Shokuzai (Kiyoshi Kurosawa - 2012)

Rubrique consacrée au cinéma et aux films tournés à partir de 1980.

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Anorya
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Shokuzai (Kiyoshi Kurosawa - 2012)

Message par Anorya »

Avec les premières notes, ouverture d'un topic pour les deux parties de Shokuzai de Kiyoshi Kurosawa (270 mn en entier :shock: ), la série fleuve du réal qui trouve son chemin chez nous en deux films et peu de salles...

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(Partie I - Celles qui voulaient se souvenir)

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(Partie II - Celles qui voulaient oublier)

Synopsis : Dans la cour d’école d’un paisible village japonais, quatre fillettes sont témoins du meurtre d’Emili, leur camarade de classe. Sous le choc, aucune n’est capable de se souvenir de l’assassin. Asako, la mère d’Emili, désespérée de savoir le coupable en liberté, convie les quatre enfants chez elle pour les mettre en garde : si elles ne se rappellent pas du visage du tueur, elles devront faire pénitence toute leur vie. Quinze ans après, que sont-elles devenues ? Sae et Maki veulent se souvenir.

Quelques avis pour ouvrir le topic...

Karras a écrit :Shokuzai - Celles qui voulaient se souvenir (7/10) : Un conte social aux confins du fantastique, à l'ambiance glacée et aux personnages plutôt addictifs.
Best a écrit :Shokuzai - Celles qui voulaient se souvenir (Kiyoshi Kurosawa) 3/10

Je préviens, je ne suis pas objectif. Je m'attendais à un film dans la veine du magnifique Tokyo Sonata, et je me retrouve devant une œuvre fortement marquée par les habitudes du réalisateur en matière de films d'Angoisse/Epouvante. Hors c'est un style que je n'aime pas. Les films peuvent être très réussis dans leur domaine, je n'y prend aucun plaisir. Tout est froid, désincarné, antipathique, tous les personnages sont dérangés et flippants, on se sent souvent mal à l'aise et que ce soit dans le fond ou la forme, ce n'est tout simplement pas ma tasse de thé. Par contre je pense que les amateurs apprécieront.
Vic Vega a écrit :Shokuzai - Celles qui voulaient se souvenir de Kurosawa Kiyoshi 6/10
Shokuzai - Celles qui voulaient oublier de Kurosawa Kiyoshi 4/10
Nicofromtheblock a écrit :- Shokuzai - celles qui voulaient se souvenir : 6/10
Dernière modification par Anorya le 30 mai 13, 18:18, modifié 2 fois.
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semmelweis
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Re: Shokuzai (Kiyoshi Kurosawa - 2012)

Message par semmelweis »

Cure m'avait beaucoup impressionné! Mais j'hésite à voir ce film en 2 parties surtout que les avis ne sont pas fameux! J'ai peur que ce soit très longtemps quand même :mrgreen: . Tu l'as vu Anorya ?
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Re: Shokuzai (Kiyoshi Kurosawa - 2012)

Message par Anorya »

Non non les avis sont pour l'instant partagés mais on a aussi bien du négatif que du positif apparemment.
Et puis faut bien se mettre du Kiyoshi Kurosawa sous la dent en attendant Real qui va encore arriver chez nous à la St-Glinglin si ce n'est pas en DTV...
J'y vais ce soir pour ma part. ;)
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Borislehachoir
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Re: Shokuzai (Kiyoshi Kurosawa - 2012)

Message par Borislehachoir »

J'y vais mardi, merci au cinéma Desvoges de Dijon qui pour la première fois depuis sa création a eu un peu de courage concernant sa programmation.
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Karras
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Re: Shokuzai (Kiyoshi Kurosawa - 2012)

Message par Karras »

Anorya a écrit : Déjà deux avis en attendant plus...
Il y a aussi les notes de Vic Vega
Vic Vega a écrit :Shokuzai - Celles qui voulaient se souvenir de Kurosawa Kiyoshi 6/10
Shokuzai - Celles qui voulaient oublier de Kurosawa Kiyoshi 4/10
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Re: Shokuzai (Kiyoshi Kurosawa - 2012)

Message par Anorya »

En effet. Je viens d'éditer en rajoutant aussi la note de Nicofromtheblock qui vient de tomber.
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Demi-Lune
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Re: Shokuzai (Kiyoshi Kurosawa - 2012)

Message par Demi-Lune »

Si tout va bien je vais voir la première partie demain après-midi.
Les références de Best aux travaux d'épouvante de KK sont très encourageantes à mes yeux. J'espère que le film saura s'en montrer digne.
D.v.d
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Re: Shokuzai (Kiyoshi Kurosawa - 2012)

Message par D.v.d »

Vu la première partie "Celles qui voulaient se souvenir" hier soir.

Le film est très réussi : le style de K. Kurosawa, tout à fait unique à mon goût dans le cinéma contemporain, semble ici s'épanouir encore pour atteindre une sorte de sommet, notamment dans le chapitre 1 de ce film. Dans le même registre que l'éblouissant "Tokyo Sonata", Kiyoshi Kurosawa fait glisser, par petites touches, la réalité vers un univers horrifique. En maintenant le continuum entre ces deux univers, il plonge le spectateur dans une réflexion profonde sur la société actuelle. Cela grâce à une mise en scène audacieuse dépourvue d'effets, à la fois conceptuelle et efficace, et qui n'est pas sans rappeler le meilleur B. De Palma.

J'ai hâte de découvrir la suite.
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Re: Shokuzai (Kiyoshi Kurosawa - 2012)

Message par Anorya »

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Shokuzai - première partie (Kiyoshi Kurosawa - 2012)


Malgré des conditions pour le moins héroïques (punaise, j'avais oublié que L'Arlequin à Paris c'était un peu pourri comme salle. Je n'y étais pas revenu depuis 10 ans, quand ils avaient fait un festival David Cronenberg et hier soir, pour voir le film, il fallait faire abstraction de beaucoup de choses pour arriver à un bon état de concentration --normal pour un Kiyoshi Kurosawa vous me direz--. En l'occurrence, le fait que la ligne 4 passe en dessous et donc que la salle vibre un peu. Et puis ce week-end c'est le festival Nollywood avec des films venus de Nigeria. Paye ton "vernissage" dans la salle d'à côté et le petit salon et bar pendant les 10 dernières minutes de cette première partie avec la zouk music que t'entends même durant ta séance. Putain quoi... :x ), j'ai vraiment adoré cette première partie.

Le "film" installe rapidement et très vite avec une belle économie de moyens l'amitié des gamines en quelques scènes (une nouvelle venue, un gâteau et des cadeaux partagés) puis le drame et les conséquences traumatiques qui vont suivre, du coup j'ai été happé tout le long. Je trouve Best un peu injuste (et légèrement à côté de la plaque, désolé) d'espérer un film similaire à Tokyo Sonata, même si pour moi Shokuzai s'avère dans le digne prolongement à la fois de ce dernier (belles descriptions de vies du milieu social actuel japonais à nouveau avec ses névroses et problèmes. Le chômage ou l'absence d'un fils --parti à la guerre pour toujours ?-- dans Tokyo Sonata, les conséquences du traumatisme et de la culpabilité puis l'insertion de ces femmes une fois adultes ici) tout en étant dans le style horrifique et inquiétant qui a déjà fait la marque du cinéaste. Même création pour la télévision de même que Séance en 2000, Shokuzai ne se départit pas de cadrages parfois venimeux (Maki vue dans un miroir rectangulaire qui lui donne un aspect plus qu'haineux envers sa personne) et d'ellipses chères à l'auteur de Cure. Il ne faudra pas par contre espérer de fulgurances oniriques, si ce n'est en de rares endroits (une discussion trouble à l'aube au bord d'un des fleuves qui traverse Tokyo ou un corps caressé soudain par le vent et les feuilles (plan très Tarkovskien dans l'idée)) puisque tout est dans la continuité de l'épure que Tokyo Sonata avait mis en place.

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Les personnages sont plus que passionnants car dévorés d'un passé auxquels ils ne peuvent pas spécialement échapper (j'ai presqu'envie là aussi de dire, normal, quand on connait le cinéma du bonhomme). D'abord mme Asako, très iconique, à la fois inquiétante et résignée, toute de noir vêtue qui réclame pénitence comme si elle lançait une malédiction sur les gamines (une des meilleures scènes du film) et revenait chercher rétribution plusieurs années après. Figure martyrisée à vie par la perte, toute autant victime que les 4 survivantes et pourtant capable de compassion envers elles (la sublime scène de fin de cette première partie avec des corbeaux qu'on jurerait presque issue d'un passage de Retribution justement).

Et puis Sae. Celle qui avait une poupée qui fut volée chez les gamines et dont on se demandait si ce n'était pas aussi le fait du tueur en premier lieu. Une poupée française mise sous cloche de verre qui disparaît peu de temps avant le meurtre... Plus tard Sae acceptera de vivre avec un homme qui finit par la réduire et l'humilier à l'état de chose. Littéralement avec ses habits de contes de fées et piégée dans ce grand appartement blanc et vitré comme une cage de verre, Sae finit pétrifiée à l'état de poupée (bel éclairage qui la fait apparaître tel un spectre blafard et dénie par là-même toute humanité). Enfin Maki, toute aussi fascinante puisque son personnage se bâtit une carapace stricte de colère rentrée et de rigueur en réaction à la culpabilité éprouvée depuis le drame, ce qui lui fera fatalement faire un faux-pas...

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On retrouve là en filigrane des thématiques chères au cinéaste comme la solitude, ce mal-être moderne, la malédiction (Asako est tout autant à plaindre qu'inquiétante, surgissant tel un fantôme lors du mariage de Sae, lui rappelant qu'elle a, comme les autres, une promesse à tenir sans quoi, elle la hantera encore longtemps d'une certaine manière), les spectres, le tout dilués dans une oeuvre qui s'étale généreusement (il ne faut pas être fatigué quand on regarde un film de K.K mais ça aussi vous commencez à en avoir l'habitude ? :) ). Au final l'impression que l'ami Kiyoshi se fait les jambes après une absence de presque 4 ans, prêt à repartir de plus belle. Shokuzai en cela n'est donc pas un raté mais une nouvelle belle réussite qui a bien sa place dans une filmographie toujours aussi passionnante. Pour l'instant concentrons nous sur ces femmes qui voulaient se souvenir en attendant la suite mais quelque chose me dit que Kurosawa n'espère pas tant livrer des réponses au final (dans Seance, le kidnappeur initial était éjecté de l'histoire après 15 minutes. On ne saura jamais ce qui a déclenché cet enfer sur terre dans Kaïro...) que continuer son exploration avec fascination d'un Japon inquiet et en proies à des terreurs toujours aussi inconnues et c'est là tout le bien que je lui souhaite.

5/6.
Dernière modification par Anorya le 1 juin 13, 10:53, modifié 1 fois.
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Demi-Lune
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Re: Shokuzai (Kiyoshi Kurosawa - 2012)

Message par Demi-Lune »

A regret, j'avoue ne pas avoir été particulièrement convaincu par Celles qui voulaient se souvenir, que je classe clairement dans le bas de la filmographie de Kurosawa (bon c'est quand même mieux que cette purge de Charisma, rassurez-vous hein).

Avant toute chose dissipons les éventuels malentendus : Shokuzai (en tout cas pour ce qui concerne sa première partie) n'est ni un polar, ni un film fantastique, même si avec le cinéaste les frontières du genre peuvent parfois être poreuses. L'argument de base dans tous les cas est trompeur. Le meurtre inaugural de la petite écolière est un McGuffin utilisé par le cinéaste pour ré-explorer ses thématiques liées à la malédiction, à l'emprise des morts, à la fatalité ou à l'expiation. Le parallèle avec Rétribution, son meilleur film à mes yeux, est évident et l'efficacité à couper le souffle de l'ouverture laisse espérer une exécution au moins aussi aboutie. Or à la différence de ses films de fantômes, la dette contractée auprès de l'au-delà ne repose plus ici sur l'explicite (l'humain hanté par le revenant qui attend quelque chose de lui), mais sur l'intériorisation psychologique (le traumatisme et la culpabilité ineffaçables avec lesquelles doivent vivre au quotidien les 4 filles témoins, maudites par la mère de la victime pour n'avoir su se rappeler du visage du meurtrier) : c'est là une inflexion passionnante sur le papier des approches du cinéaste, qui revisite ses fondamentaux à la lumière d'une étude de caractères. Il s'agit d'accompagner le devenir de chacune de ces quatre fillettes et de voir comment cet événement traumatique a déterminé leur personne à l'âge adulte.

Et c'est là que les choses déraillent. Si les enjeux du scénario sont prometteurs et les ambitions psychologiques, voire psychanalytiques, de Kurosawa envers ses personnages sont séduisantes, l'étude de caractères guidant Shokuzai pèche largement par ses insuffisances. Le scénario se montre pour moi très en-deçà de son potentiel. L'évocation du traumatisme ne dépasse jamais le convenu et le rabâché, ce qui déçoit (le personnage de Sae, dont la caractérisation amorphe ne saisit jamais l'empreinte du blocage intime) ou lasse (le personnage de Maki, dont les évolutions sont archi-prévisibles). Les personnages, certes, procèdent de la même vision de Kurosawa s'agissant de la déshumanisation de la société. Le cinéaste a une expression très cérébrale, et une approche très clinique et froide des relations humaines, qui peuvent déstabiliser les néophytes. Ce n'est pas ce que je critique ici : c'est bien le manque d'approfondissement et le psychologisme raté. On nous propose des personnages hantés mais dont le trauma indiffère, car l'écriture reste trop distante ou pire, s'enlise dans des développements grotesques (le fétichisme de la poupée :lol: ). KK a parfois eu la mauvaise habitude de tenter des idées foireuses dans ses films (Loft en compile pas mal) mais celle-là, c'est quelque chose. Le potentiel de la première histoire est sabordé au profit d'un asservissement fétichiste totalement bêta et inutilement étiré... pour dire les choses simplement, ça ne fonctionne pas, ce n'est pas bon. Le problème est reconduit avec la seconde histoire : la définition du personnage manque de nuance et Kurosawa s'abandonne à des séquences en-dessous de son talent (le paumé qui débarque avec son couteau à la piscine et qui se fait maraver la gueule au kendo... nanardesque). La progression très linéaire de ce second segment ennuie encore plus que la première histoire, qui avait pour elle de générer une petite atmosphère parfois troublante. Quant à la scène finale... ça me fait penser à Last Action Hero, avec le méchant qui parle, qui parle... :lol: évidemment qu'elle ne va pas décrire l'assassin, sinon il n'y aurait plus de second film.

Bon donc pour résumer : thématiquement, Shokuzai - Celles qui voulaient se souvenir est cohérent avec l’œuvre du bonhomme et propose quelques bonnes scènes (bien aimé par exemple les intrusions fantastiques de la mère dans la première histoire... ou un détail tout con : prise de panique quand la gamine vient lui annoncer la mort de sa fille, elle la pousse violemment contre le sol). La rigueur stylistique du réalisateur est toujours présente. Mais le traitement ne me convainc malheureusement pas, Kurosawa ne faisant que survoler son sujet et se complaire dans une écriture pauvre, sinon inféconde.
Je crains que la suite soit du même tonneau, mais sait-on jamais.
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Re: Shokuzai (Kiyoshi Kurosawa - 2012)

Message par Anorya »

Demi-Lune a écrit :A regret, j'avoue ne pas avoir été particulièrement convaincu par Celles qui voulaient se souvenir, que je classe clairement dans le bas de la filmographie de Kurosawa (bon c'est quand même mieux que cette purge de Charisma, rassurez-vous hein).
Et j'ai l'impression que le fait que tu n'ai pas vu Tokyo Sonata n'ajoute pas grand chose car je pense qu'avec ce dernier en tête, tu réévaluerais sans doute un peu plus Shokuzai. :|

lune a écrit :Ce n'est pas ce que je critique ici : c'est bien le manque d'approfondissement et le psychologisme raté. On nous propose des personnages hantés mais dont le trauma indiffère, car l'écriture reste trop distante ou pire, s'enlise dans des développements grotesques (le fétichisme de la poupée :lol: ).
En l'état Shokuzai est une série de 5 épisodes ramené chez nous en 2 films. Je doute que Kurosawa ait eu toute lattitude pour pouvoir développer ce qui lui tenait à coeur et qu'il a dû composer en partie avec des moyens télévisuels, une possible censure (ce qui ne gâche en rien la force de certaines scènes) et un manque de temps qui peut expliquer ça. Si ça paraît chez nous en DVD, j'espère qu'on aura un chapitrage qui respectera les différents épisodes et permettra de revoir encore mieux le résultat final. Quand au fétichisme de la poupée, personnellement venant d'un pays où les otakus s'enferment dans plusieurs passions qui ne sont pas uniquement liées aux jeux vidéos, je ne vois pas ce qu'il y a de rédhibitoire. C'est au contraire quelque chose qui est plus qu'une mode là-bas, des corps parfois enfantins photographiés par Kishin Shinoyama en passant par cet étrange livre de photos de gamines habillées façons poupées que Johell m'avait montré, sans oublier le film Airdoll de Kore-Eda où une poupée prend vie, le bondage encore pratiqué où le corps est réduit à presque rien, enchâssé de cordes ou la thématique liée aux poupées de Bellmer dans Ghost in the shell 2, Innocence.
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Personnellement j'aime bien ces scènes qui se parent d'un rituel et prennent le temps de marquer l'emprise de cet homme sur cette femme même si je pense que ça pourrait paraître bateau. :wink:

demi a écrit :(le paumé qui débarque avec son couteau à la piscine et qui se fait maraver la gueule au kendo... nanardesque).

La scène est assez marrante et je la pense effectivement conçue en ce sens (en général Kurosawa n'est pas dans le laisser-aller. Du coup on peut trouver ça très poussif surtout qu'en l'état ça déboule comme ça sorti de rien mais je pense que c'est recherché, cela ne m'a pas gêné en tout cas)... Jusqu'à ce plan sur le corps flottant sans vie dans l'eau qui achève de dissiper le sourire.
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Bon, d'une manière plus générale, il ne faut pas oublier que K.K cultive un certain humour qui apparaît plus souvent qu'on ne le croit à l'écran, quitte à basculer dans le grotesque. Ce peut être totalement absurde au son d'une cornemuse face à un double vautré bien pépère dans Seance, nunuche et très con (vraiment très con) comme dans Kandagawa wars, intégralement ironique pour Doppelganger (le coup de la boule disco qui remplace la boule des aventuriers de l'arche perdue, c'est même jouissif dans le WTF). Parfois c'est de l'humour noir qu'on aura du mal à percevoir (une amie japonaise avouait que certaines choses dans Kaïro la faisait marrer :shock: ). J'ai l'impression qu'il y a quelque chose de très construit qui se révèle en même temps, comment dire... pas grotesque mais... disons que le cinéaste n'a pas peur de jouer sur la corde-raide pour obtenir ce qu'il veut, quitte à en passer par là. Et ça ne passera donc pas toujours, c'est clair.

lude a écrit :Je crains que la suite soit du même tonneau, mais sait-on jamais.
Je ne vais pas spoiler car je ne l'ai pas vue non plus contrairement à un ami sur facebook mais oui. Mais elle vaut le coup d'être vue parce que ça se finit sur une scène assez dure apparemment. Wait and see.
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Re: Shokuzai (Kiyoshi Kurosawa - 2012)

Message par Demi-Lune »

Le commentaire de Thaddeus :
Thaddeus a écrit :Shokuzai : celles qui voulaient se souvenir (Kiyoshi Kurosawa, 2012)
Comme dans son précédent film, Kurosawa tente de capter les angoisses et les hantises du Japon contemporain en injectant des touches d’inquiétante étrangeté à une intrigue qui ne recourt jamais au fantastique. L’ambition est louable et se transforme ponctuellement à la faveur d’une lumière blafarde, d’un surgissement de cruauté, d’un visage fermé réprimant tantôt la colère, tantôt la détresse, tantôt la folie. Mais pour l’essentiel, Kurosawa manque assez largement son sujet et ne s’en tient, le long d’une structure épisodique vite lassante, qu’à une petite explication de texte au cas par cas sur le thème "Le traumatisme pour les nuls". Et si l’on ne peut lui reprocher du tuer le suspense dès le début, la lourdeur illustrative de ses intentions est plus difficilement pardonnable. 3/6
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Re: Shokuzai (Kiyoshi Kurosawa - 2012)

Message par locktal »

Franchement, cette première partie de Shokuzai m'a complètement séduit, par son inquiétante étrangeté et son épure, son sens du cadre et son utilisation du son. Pour la première fois, le cinéaste japonais s'intéresse exclusivement aux portraits féminins, jeunes femmes torturées par le meurtre inaugural et qui sont liées par une sorte de pacte à la mère de la victime, les obligeant à faire pénitence (shokuzai en japonais), donc au transfert de culpabilité.

Dans les deux premiers chapitres, consacrées à deux des quatre amies de la victime, Kurosawa livre une étude particulièrement cruelle et en pleine décomposition des rapports hommes/femmes et femmes/société. Les hommes ici sont possessifs, impuissants, lâches ou veuls, tandis que la société, basée sur l'incommunicabilité et le machisme, ne se fie qu'aux apparences. Le cinéaste instaure pour le 1er chapitre une ambiance malsaine et anxiogène, voire mortifère, tandis que le 2ème chapitre lorgne plus vers la chronique sociale, comme s'il revisitait ses différents styles passés pour les adapter à l'histoire.

Par ailleurs, la forme feuilletonesque rend le film constamment captivant.

Bref, j'ai vraiment beaucoup aimé ! Vivement la suite !
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Re: Shokuzai (Kiyoshi Kurosawa - 2012)

Message par Anorya »

locktal a écrit :Franchement, cette première partie de Shokuzai m'a complètement séduit, par son inquiétante étrangeté et son épure, son sens du cadre et son utilisation du son. Pour la première fois, le cinéaste japonais s'intéresse exclusivement aux portraits féminins, jeunes femmes torturées par le meurtre inaugural et qui sont liées par une sorte de pacte à la mère de la victime, les obligeant à faire pénitence (shokuzai en japonais), donc au transfert de culpabilité.
Première fois je ne sais pas, le portrait de la mère de famille de Tokyo Sonata était déjà très bien écrit. :wink:
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Re: Shokuzai (Kiyoshi Kurosawa - 2012)

Message par locktal »

Anorya a écrit :
locktal a écrit :Franchement, cette première partie de Shokuzai m'a complètement séduit, par son inquiétante étrangeté et son épure, son sens du cadre et son utilisation du son. Pour la première fois, le cinéaste japonais s'intéresse exclusivement aux portraits féminins, jeunes femmes torturées par le meurtre inaugural et qui sont liées par une sorte de pacte à la mère de la victime, les obligeant à faire pénitence (shokuzai en japonais), donc au transfert de culpabilité.
Première fois je ne sais pas, le portrait de la mère de famille de Tokyo Sonata était déjà très bien écrit. :wink:
Oui, tout à fait ! Mais dans le superbe Tokyo sonata, la mère n'est pas la seule à être un personnage approfondi, le père l'est tout autant, de même que tous les membres de la famille. On voit clairement que dans Shokuzai, Kiyoshi Kurosawa se consacre exclusivement à ses personnages féminins, alors que les hommes sont plutôt secondaires...
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