Je comprends l'intérêt du soutien en amont, et il permet à tous ces films invisibles de pouvoir être créés déjà pour commencer. C'est une gageure artistique forte, et je dis cela sans sarcasme.
Mais produire en masse des films que personne ne va, voire ne peut, voir, j'avoue trouver cela potentiellement vain. Cela ressemble pour moi à une politique du chiffre, où on produit pour produire, et tant pis si tout ou presque finira à la benne ensuite pour cause d'encombrement en salles.
Un peu comme si on formait en masse dans un secteur sur-saturé, mais qu'il faudrait se féliciter qu'autant d'investissements soient faits pour la formation.
Ici, à quoi bon avoir une force de frappe pareille si 95% de ce qu'elle produit est voué à ne trouver aucun débouché, aucun public, ou si peu ? S'ils sont voués à se partager des miettes ?
Ca ne veut pas dire que rien n'est fait en amont, au contraire, mais j'ai de plus en plus l'impression que cela masque un énorme travail de ré-équilibrage à faire en aval, pour que tous ces films dont on se félicite de leur existence puisse réellement trouver un semblant de place une fois distribués. 1600 spectateurs en moyenne, c'est 8 séances en moyenne. Deux journées d'exploitation. Et voilà. Comment tu fais exister un film là dedans.
En vrai, en 2015, ces 2938 films se sont partagés 332 284 séances. Ca fait 113 séances par film. Ca fait 14 spectateurs par séance.
Et il y a aussi la tendance générale. A part saturer les salles d'art et essai avec des films qui se marchent dessus sans jamais drainer plus de public, cette politique de production fait quoi ? Y a 25 ans, 1387 films français cumulaient 4.7M d'entrées. Aujourd'hui, ils sont le double, 2938, et ils font 4.7M.
Ca ne marche pas, ça ne pousse pas le public, ça ne pousse pas les programmations, ça ne pousse pas la demande. Ca fait juste plus de films sans existence réelle dans les circuits.
A ce rythme là, ils seront 5000 en 2030 et ils ne feront plus que 1000 spectateurs en moyenne chacun.