L'Apollonide (Bertrand Bonello - 2011)

Rubrique consacrée au cinéma et aux films tournés à partir de 1980.

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The Eye Of Doom
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Re: L'Apollonide (Bertrand Bonello - 2011)

Message par The Eye Of Doom »

Découvert hier.

!Attention spolier !

Comme trop souvent j'ai du le voir en deux fois (cf debat sur un autre topic)
J'ai trouve le film ni froid ni ennuyeux, ni meme beau d'ailleurs.
Dés la première minute, la comparaison avec Fleurs de Shanghai de HHHsien c'est imposé et malheureusement au détriment du film de Bonello.
C'est pas vraiment fair-play car :
Les deux films ne sont pas exactement dans le même registre
J'ai vu le film de HHH à sa sortie et en garde surtout le souvenir de sa beauté plastique et l'enthousiasme qu'il m'avait provoqué.
Ils partage toutefois de nombreux éléments communs:
Ils ambitionnent de rendre compte du quotidien d'une maison close de luxe
Ils misent sur une image très esthétisante
Ce ne sont pas des films directement militants pour ou contre la prostitution ( différents de la Rue de la Honte par exemple, il me semble)

Revenons au film de Bonello.
J'ai bien aimé cette volonté de décrire un groupe plutôt uni et solidaire (j'inclus la tenancière) sans masquer le réalité du commerce des filles. Finalement tout le monde semble faire le maximum pour faire en sorte que cela ce passe le mieux possible. (Cf le docteur en quête de collaboration des filles durant l'examen) C'est ce qui est en fin de compte le plus troublant: il y a une résignation : la prostitution et son commerce sont la seule solution . L'arrivée de la jeune fille de province recommandée par ses parents en est l'exemple. Tout cela est in fine normal.
La scène la plus troublante est pour moi celle de la jeune en pleurs suite à la lecture de l'ouvrage scientifique comparant prostituées et criminels et justifiant leurs dégénérescence par une taille de tête plus petite. C'est finalement le seul regard extérieur que nous aurons sur le sujet et celui condamne les filles et justifie en fait leur condition, en dehors de toute considérations sociales et économiques. Terrible.

Sur la scène des larmes, je n'ai compris ce qu'ajoutait le fait de l'avoir filmer en fin du film. L'image est bien moins forte que son évocation.
De meme, la scène de la "soirée spéciale" paraît peu crédible et de trop. C'est probablement son côté franchement désagréable qui m'a empêché d'être ému par le sort de la femme qui rit. Bonello en fait trop ou pas assez je trouve. Il reste dans le même registre que les autres scènes alors que c'est finalement le seul moment où le mépris des filles par les clients est visible.
Il ne s'agit pas de penser que tout les clients sont de sympathiques hommes aisés et cultivés, l'ouverture du film le monte bien, mais tout de meme la représentation des clients pose questions : ils ne sont pas vraiment mis en perspectives, il n'y a pas de contre point de vue. Certainement pour se focaliser sur la vision des filles sur eux. Et en faite, ils semblent plutôt bienveillants, loin d'une posture de consommateurs. Chacun a ses lubies mais tout cela n'est pas très méchants (la baignoire de champagne, la poupée, l'admirateur du sexe féminin,...).
On est entre gens du monde d'où le côté confortable.
Bien sûr l'ennuie et le désespoir sont bien présents et rampants, jusqu'à la drogue. Mais l'ennui est aussi chez les clients, il viennent tuer le temps et les nuits sont longues...
Bref on s'évertue ensemble à croire que l'on fait la fête. Mascarade collective entretenue par le proffesiobalisme de la patronne.
Peut être par manque d'une personnalité forte, chacun peut voir dans le film ce qu'il a envie. La scène finale en est l'exemple type : constat d'une simple continuité, illustration du c'était mieux avant, point final d'une dénonciation de la condition féminine, tour de passe-passe pour conclure (comme le laisse entendre la remarque de Bonello himself rapportee dans les pages précédente : c'est pour offrir une sortie du film au spectateur : bigre!)
L'excellent partis pris du début du film laissait augurer une œuvre plus affirmée. Finalement elle ne retrouve qu'épisodiquement cette intensité (la visite du docteur, le repas, la sortie de campagne,..) et semble perdre un peu de sa vision en route.
Trop de choses ne sont finalement pas dites.
Mais d'aucun peuvent trouver que cette ambiguite fait sa richesse...
Intéressant et recommandable mais un peu décevant.
Le film de HHH ne semble beaucoup plus cohérent.
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