Roman Polanski

Rubrique consacrée au cinéma et aux films tournés à partir de 1980.

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Major Tom
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Re: Roman Polanski

Message par Major Tom »

"J’ai longtemps voulu faire un film sur l’Affaire Dreyfus, en traitant le sujet non comme un drame en costumes mais comme une histoire d’espionnage, avait expliqué Roman Polanski lors de la première annonce de ce projet, en mai 2012. De cette manière, on peut montrer son absolue pertinence par rapport à ce qui se passe dans le monde aujourd’hui – le spectacle séculaire de la chasse aux sorcières à l’encontre d’une minorité, la paranoïa sécuritaire, les tribunaux militaires secrets, les agences de renseignement hors de contrôle, les dissimulations gouvernementales et la presse enragée."

Au départ, ça devait s'appeler D., comme le roman, et donc ça sera finalement J'accuse.
C'est un super projet, franchement. :D Zappons D'après une histoire vraie. Je reprends espoir et goût à la vie.
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Supfiction
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Re: Roman Polanski

Message par Supfiction »

son absolue pertinence par rapport à ce qui se passe dans le monde aujourd’hui – le spectacle séculaire de la chasse aux sorcières à l’encontre d’une minorité..
Grand projet oui. Espérons que les parallèles « pertinents » avec 2018 ne soient pas trop appuyés tout de même. Le passé reste le passé. C’est le genre de film qui nécessite du budget même s’il ne veut pas faire de film « en costumes ». En a t-il encore les moyens?
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Alexandre Angel
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Re: Roman Polanski

Message par Alexandre Angel »

Major Tom a écrit :Au départ, ça devait s'appeler D., comme le roman, et donc ça sera finalement J'accuse.
C'est un super projet, franchement. :D
Oui, ça envoie!
Comme "le Temps de l'innonce" et "A tombeau ouvert", "Killers of the Flower Moon" , très identifiable martinien, est un film divisiblement indélébile et insoluble, une roulade avant au niveau du sol, une romance dramatique éternuante et hilarante.

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Thaddeus
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Re: Roman Polanski

Message par Thaddeus »

C'est une nouvelle d'autant plus réjouissante que je pensais le projet enterré, tant il est évoqué depuis longtemps. J'espère vraiment qu'il aboutira.
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Alexandre Angel
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Re: Roman Polanski

Message par Alexandre Angel »

Major Tom a écrit : Bien qu'il refuse de l'admettre en interviews, Polanski est probablement très influencé par ce qu'il a vu dans sa jeunesse. Dans son autobiographie, il racontait qu'à la libération de la Pologne par l'Armée rouge, il avait notamment vu dans les rues des cadavres de soldats allemands avec le pantalon baissé et des bouteilles enfoncées dans le cul. Je ne suis pas psy, mais vu qu'il avait à peine 12 ans, je m'avancerai doucement en disant que ce genre d'image, à la fois macabre et absurde par son apparence, l'a peut-être un peu marqué... :fiou:
Il y a ça constamment chez Polanski : la mort, même survenant de façon absurde (mais meurt-on souvent de façon digne ?) n'est cependant jamais prise à la légère. Ses personnages ne sont pas des pions solitaires au service d'une violence ludique, ils ont des connaissances qui viennent pleurer à leurs côtés (la femme qui pleure bruyamment dans Le Bal des vampires), de la famille, des amis, et quand survient leur disparition, celle-ci marque durablement l'esprit. En outre, Polanski s'intéresse à ce que la plupart des autres cinéastes ne s'embarrassent même pas de montrer une fois débarrassé d'un personnage, comme les visites à l'hôpital, les veillées funéraires, enterrements, etc. Il y a clairement du Jérôme Bosch dans sa représentation comico-tragique de l'humanité.
Il est sûr que tout le cinéma de Polanski est traversé d’une angoisse indicible dont il est facile de repérer l’origine.
Cette angoisse s’articule, je dirais, autour de deux axes : l’un est irrationnel (la paranoïa et ses hallucinations), l’autre, plus concret, vient de la guerre, de l’oppression, de l’injustice et de leur cortège d’exactions.
Ces deux axes ne se rencontrent pas toujours, voire rarement (les sorciers de Rosemary’s Baby n’ont rien de nazi n’était le côté secte) mais nourrissent une sorte de dialogue à distance.
Même par le biais de l’humour, du comique et du divertissement, Polanski fait revenir le naturel de ses obsessions psycho morbides au galop.
Lorsqu’on oblige Walter Matthau et Cris Campion, dans Pirates, à bouffer du rat, on se marre bien mais, quelque part, le rire se fige à mesure que Polanski transmet quelque chose de l’ horreur alimentaire qu’ont du subir bien des malheureux entassés dans les ghettos polonais. Ce n’est évidemment qu’un moment isolé au milieu d’un divertissement familial (un peu lourd, dans mon souvenir) mais il est symptomatique.
Plus généralement, Polanski puise avant tout son angoisse dans le souvenir de la misère, du sordide (Tess, Oliver Twist, et Le Pianiste) et/ou de l’oppression et de la violence (Macbeth, Le Pianiste toujours, et les deux films nous montrent un enfant faire quelques pas avant de s’effondrer, mort). Puis, dans le même mouvement, l’imagination prend le pouvoir pour donner à cette angoisse son prolongement carnavalesque.

Et ces deux axes, de part et d’autre de l’œuvre, sont soudés par moult incongruités plus ou moins comiques, plus ou moins macabres, comme autant de manifestations d’exorcisme d’un réel insupportable par son exact contraire fantasmagorique.
Major Tom a écrit : Dans son autobiographie, il racontait qu'à la libération de la Pologne par l'Armée rouge, il avait notamment vu dans les rues des cadavres de soldats allemands avec le pantalon baissé et des bouteilles enfoncées dans le cul.
Vodka?
Comme "le Temps de l'innonce" et "A tombeau ouvert", "Killers of the Flower Moon" , très identifiable martinien, est un film divisiblement indélébile et insoluble, une roulade avant au niveau du sol, une romance dramatique éternuante et hilarante.

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Major Tom
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Re: Roman Polanski

Message par Major Tom »

Alexandre Angel a écrit :
Major Tom a écrit : Bien qu'il refuse de l'admettre en interviews, Polanski est probablement très influencé par ce qu'il a vu dans sa jeunesse. Dans son autobiographie, il racontait qu'à la libération de la Pologne par l'Armée rouge, il avait notamment vu dans les rues des cadavres de soldats allemands avec le pantalon baissé et des bouteilles enfoncées dans le cul. Je ne suis pas psy, mais vu qu'il avait à peine 12 ans, je m'avancerai doucement en disant que ce genre d'image, à la fois macabre et absurde par son apparence, l'a peut-être un peu marqué... :fiou:
Il y a ça constamment chez Polanski : la mort, même survenant de façon absurde (mais meurt-on souvent de façon digne ?) n'est cependant jamais prise à la légère. Ses personnages ne sont pas des pions solitaires au service d'une violence ludique, ils ont des connaissances qui viennent pleurer à leurs côtés (la femme qui pleure bruyamment dans Le Bal des vampires), de la famille, des amis, et quand survient leur disparition, celle-ci marque durablement l'esprit. En outre, Polanski s'intéresse à ce que la plupart des autres cinéastes ne s'embarrassent même pas de montrer une fois débarrassé d'un personnage, comme les visites à l'hôpital, les veillées funéraires, enterrements, etc. Il y a clairement du Jérôme Bosch dans sa représentation comico-tragique de l'humanité.
Il est sûr que tout le cinéma de Polanski est traversé d’une angoisse indicible dont il est facile de repérer l’origine.
Cette angoisse s’articule, je dirais, autour de deux axes : l’un est irrationnel (la paranoïa et ses hallucinations), l’autre, plus concret, vient de la guerre, de l’oppression, de l’injustice et de leur cortège d’exactions.
Ces deux axes ne se rencontrent pas toujours, voire rarement (les sorciers de Rosemary’s Baby n’ont rien de nazi n’était le côté secte) mais nourrissent une sorte de dialogue à distance.
Même par le biais de l’humour, du comique et du divertissement, Polanski fait revenir le naturel de ses obsessions psycho morbides au galop.
Lorsqu’on oblige Walter Matthau et Cris Campion, dans Pirates, à bouffer du rat, on se marre bien mais, quelque part, le rire se fige à mesure que Polanski transmet quelque chose de l’ horreur alimentaire qu’ont du subir bien des malheureux entassés dans les ghettos polonais. Ce n’est évidemment qu’un moment isolé au milieu d’un divertissement familial (un peu lourd, dans mon souvenir) mais il est symptomatique.
Plus généralement, Polanski puise avant tout son angoisse dans le souvenir de la misère, du sordide (Tess, Oliver Twist, et Le Pianiste) et/ou de l’oppression et de la violence (Macbeth, Le Pianiste toujours, et les deux films nous montrent un enfant faire quelques pas avant de s’effondrer, mort). Puis, dans le même mouvement, l’imagination prend le pouvoir pour donner à cette angoisse son prolongement carnavalesque.

Et ces deux axes, de part et d’autre de l’œuvre, sont soudés par moult incongruités plus ou moins comiques, plus ou moins macabres, comme autant de manifestations d’exorcisme d’un réel insupportable par son exact contraire fantasmagorique.
Jolie analyse.
Pour ce qui est de la claustrophobie, la paranoïa et compagnie, c'est surtout Gérard Brach qui apportait sa touche, scénariste agoraphobe et resté cloué au lit la majorité de sa vie. Pour l'anecdote, la blaguounette que raconte Polanski sur le plateau d'Ardisson (à 6 minutes), où Brach avait fait l'effort (surhumain pour lui) de venir, est une anecdote véridique (Brach était sorti de chez lui et s'était assis sur un banc en pleurs parce qu'il s'était paumé dans la rue), ce qui a mis encore plus mal à l'aise le Gérard déjà pas très serein sur un plateau TV, vivent les amis. :mrgreen: Mais tout ce que dit Brach au début rejoint ce que j'allais écrire : Polanski durant leur collaboration était un bon-vivant, qui pratiquait plein de sports, couchait avec toutes les filles (ça ne lui a pas toujours réussi, paraît-il) et allait dans toutes les soirées mondaines, alors que Brach restait enfermé chez lui, sa femme prenait soin de lui pendant qu'il écrivait et il ne quittait pas Paris. Une des choses qui les réunissait c'était finalement cette même jeunesse difficile qui les a conduit à avoir le même genre d'humour et une vision assez noire de l'humanité. Les deux, en dépit de leur personnalité très différente, ont fini par se confondre, si bien qu'une scène comme celle du dîner avec le rat que tu évoques, je serais incapable de savoir lequel des deux a bien pu en avoir l'idée.
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(Il y a tout de même un plan qu'on retrouve souvent dans les films que Brach a écrit et qui vient spécifiquement de Brach, un peu son "plan-signature" : les rideaux qui flottent dans le vent. On voit ça dans Le Locataire bien sûr, subtilement dans Frantic ou encore dans Identification d'une femme d'Antonioni. C'était une image trauma : quand il était enfant et enrôlé dans la Division Charlemagne, il a vu une maison soufflée par un obus, seul un mur est resté debout, avec une fenêtre aux carreaux explosés et son rideau qui volait au vent.)
Il y a effectivement chez Polanski, dans sa manière de faire surgir l'horreur, une recherche du détail qui donne un air de vraisemblance (même s'il paraît absurde, il s'en fout comme par exemple, dans Le Pianiste, la façon dont une jeune femme tombe dans la rue sous les balles allemandes, finissant dans une curieuse pose accroupie) et bien sûr de résonance avec une réalité qu'il a trop bien connue...

Sur le tournage de Macbeth, son premier film après la tuerie de la secte Manson, il y a une scène avec des enfants morts allongés dans leur sang. Dans Polanski par Polanski, l'auteur Pierre-André Boutang raconte que l'accessoiriste, devant l'insistance de Polanski à rajouter plus de sang, lui a demandé : "Vous ne trouvez pas qu'il y en a un peu trop ?" et Polanski lui a répondu : "Toi tu n'as pas vu ma maison l'année dernière..." Ambiance mégateuf sur le tournage. :D

Une anecdote de plus concernant Brach. :) Dans la vidéo que j'ai postée, Polanski se garde bien de raconter entièrement d'où lui est venue l'idée de Frantic, et c'est en grande partie de son coscénariste, en quelques sorte : un jour Polanski lui a demandé, puisqu'il reste tout le temps enfermé dans son appartement et se perd dans les rues quand il en sort, que ferait-il si sa femme ne revenait pas, et à partir de quel moment s'inquièterait-il ?... (Et bim. :idea:) Un jour j'écrirai un livre sur Brach.
Alexandre Angel a écrit :Vodka?
Excellente question. :D
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Était-ce de la vodka ? Hmmmpuf, je ne suis pas sûr... Puf... Cela mérite réflexmmhpuf...

Aucune idée. :mrgreen:
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Boubakar
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Re: Roman Polanski

Message par Boubakar »

Major Tom a écrit :"J’ai longtemps voulu faire un film sur l’Affaire Dreyfus, en traitant le sujet non comme un drame en costumes mais comme une histoire d’espionnage, avait expliqué Roman Polanski lors de la première annonce de ce projet, en mai 2012. De cette manière, on peut montrer son absolue pertinence par rapport à ce qui se passe dans le monde aujourd’hui – le spectacle séculaire de la chasse aux sorcières à l’encontre d’une minorité, la paranoïa sécuritaire, les tribunaux militaires secrets, les agences de renseignement hors de contrôle, les dissimulations gouvernementales et la presse enragée."

Au départ, ça devait s'appeler D., comme le roman, et donc ça sera finalement J'accuse.
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Alexandre Angel
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Re: Roman Polanski

Message par Alexandre Angel »

Boubakar a écrit :
Major Tom a écrit :"J’ai longtemps voulu faire un film sur l’Affaire Dreyfus, en traitant le sujet non comme un drame en costumes mais comme une histoire d’espionnage, avait expliqué Roman Polanski lors de la première annonce de ce projet, en mai 2012. De cette manière, on peut montrer son absolue pertinence par rapport à ce qui se passe dans le monde aujourd’hui – le spectacle séculaire de la chasse aux sorcières à l’encontre d’une minorité, la paranoïa sécuritaire, les tribunaux militaires secrets, les agences de renseignement hors de contrôle, les dissimulations gouvernementales et la presse enragée."

Au départ, ça devait s'appeler D., comme le roman, et donc ça sera finalement J'accuse.
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Sortie prévue le 04 Décembre 2019.
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Flol
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Re: Roman Polanski

Message par Flol »

J'aime bien le titre de Vanity Fair pas DU TOUT anglé (surtout pour un film qu'il voulait faire depuis un paquet de temps) :
Roman Polanski Announces His First Movie in #MeToo Era, Called J’Accuse
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Re: Roman Polanski

Message par Karras »

Flol a écrit :J'aime bien le titre de Vanity Fair pas DU TOUT anglé (surtout pour un film qu'il voulait faire depuis un paquet de temps) :
Roman Polanski Announces His First Movie in #MeToo Era, Called J’Accuse
Remarque partagée par ce chroniqueur : :wink:
https://focus.levif.be/culture/cinema/q ... 33981.html
Spoiler (cliquez pour afficher)
Quand l'annonce du J'accuse de Polanski sert à allumer des bûchers féministes

Ce dimanche, une partie de Twitter s'est fâchée tout rouge à l'annonce du nouveau film de Roman Polanski, J'accuse, présenté à tort par certains médias comme une réponse à #MeToo. Tout cela par pur cynisme mercantile. Émile Zola et George Abitbol sont dans un bateau, c'est le Crash Test S04E05.

Ce dimanche 30 septembre 2018, l'annonce d'un nouveau film de Roman Polanski intitulé J'accuse a provoqué quelques foudres féministes sur Twitter. J'accuse fait bien entendu allusion à l'Affaire Dreyfus et au pamphlet d'Émile Zola du même titre à ce sujet mais par pure bêtise ou simple cynisme, pas mal de Twittos et de publications l'ont en fait rattaché à... #MeToo. C'est notamment le cas de Vanity Fair, dont le titre très pute à clics "Roman Polanski announces his first movie in #MeToo era, called J'accuse" a bouté l'un de ces feux, générant pas mal de GIFs de gens qui vomissent, des "mais comment ose-t-il?" à la pelle et même quelques "Polanski prépare J'accuse sur la méchante vague #MeToo... Dur dur d'être violeur!" prouvant une nouvelle fois que sur les réseaux sociaux, on s'arrête au titre sans lire l'article. Car si celui-ci prend largement la peine de rappeler quel sale type Roman Polanski est censé être, il décrit sinon plutôt bien le projet: un film sur l'Affaire Dreyfus, donc, tiré du roman D. de Robert Harris, avec Louis Garrel et Jean Dujardin dans les rôles principaux. Autrement dit, une fiction autour d'une affaire d'État qui éclata en 1894 et a beaucoup plus à voir avec le nationalisme, l'antisémitisme, les manigances politiques et les errances morales et éthiques des médias qu'avec quelque mouvement féminin que ce soit.

Bref, si Roman Polanski sort ce film, ce n'est pas pour défendre sa cause perdue ou narguer qui que ce soit, mais plutôt parce que voilà bien un sujet non seulement dans l'air du temps et aussi parfaitement dans le ton de ses intérêts habituels. À 85 balais, souvent déconsidéré, mais avec un budget davantage conséquent que celui de ses dernières sorties, on peut aussi penser que Polanski veut sinon frapper un dernier grand coup cinématographique, au moins revenir sur le devant de la scène montrer quel cinéaste exceptionnel il peut être. J'accuse est d'ailleurs un projet qui traîne depuis quelques années, évoqué dans la presse dès 2012. Roman Polanski parlait alors de "pertinence absolue de cette histoire" en "regard de ce qu'il se passe dans le monde aujourd'hui: ce spectacle ancestral de la chasse aux sorcières menée par une minorité, la paranoïa sécuritaire, les tribunaux militaires secrets, les agences de renseignement hors de tout contrôle, des cachotteries gouvernementales et une presse enragée." Bref, il ne rattachait pas du tout l'Affaire Dreyfus à #MeToo mais bien à une vision du monde proche de celles d'Edward Snowden et de Julian Assange. D., le bouquin de Robert Harris dont va être tiré ce film, n'est d'ailleurs pas un récit historique mais bien une fiction basée sur des faits réels mais reconstruits de façon à passer pour un thriller politique aux thèmes contemporains.

Pour être tout à fait honnête, il faut reconnaître que Polanski a lui-même évoqué des raisons personnelles de mener ce projet à bien, notamment parce qu'estimant avoir souvent été lui-même victime d'une presse et de commentateurs en délire. Encore faudrait-il se poser la question, ce que personne ne semble faire, de ce quoi parle-t-il vraiment en évoquant cela. Parce que si c'est de #MeToo et des articles sur son affaire de viol, oui, on peut y voir un gros doigt d'honneur à ses accusateurs/trices. Mais si c'était plutôt à tous ces articles, ces documentaires, ces livres et ces fictions souvent débiles sur l'assassinat, en 1969, de son épouse Sharon Tate (enceinte de 8 mois) et de ses amis par la Manson Family qu'il pensait? N'auriez-vous pas vous aussi une dent contre les médias depuis l'époque du carnage, quand certains journalistes avaient très sérieusement avancé que si Polanski n'avait pas tourné Rosemary's Baby, le drame ne serait pas arrivé? Est-ce d'ailleurs un scoop que la presse fatigue par ses partis-pris et son manque de nuances? Des milliers de personnes critiquent les médias mais Polanski, lui, ne pourrait pas, parce que s'il sort un truc pareil, lui, c'est forcément pour se victimiser et noyer le fishstick? C'est d'autant plus aberrant que ce dont on parle ici part d'un article dont le titre est calibré pour faire du clic en induisant les gens en erreur et qu'un projet cinématographique a priori très valable y sert surtout d'alibi à générer du commentaire social à l'emporte-pièce. Dans Le Grand détournement, George Abitbol, l'homme le plus classe du monde, avait une phrase assez définitive pour résumer tout cela. Trouvez-là vous-même via Google, ça vous fera de l'exercice.
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Re: Roman Polanski

Message par Flol »

Je ne peux pas lire l'article mais je sens que j'aime bien ce monsieur.
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Re: Roman Polanski

Message par la_vie_en_blueray »

VAnity Fair est en guerre, notamment contre Woody Allen, mais à part le titre, je ne vois rien dans l'article de foncierement faux, c'est plutôt balancé avec des remarques constantes pour recadrer le débat.
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Re: Roman Polanski

Message par Flol »

C'est surtout leur titre putaclic qui est remis en cause ici. Mais bon, rien de bien nouveau finalement.
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Re: Roman Polanski

Message par Major Tom »

Dujardin imitant Polanski au travail (à 4:30) :



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odelay
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Re: Roman Polanski

Message par odelay »

Vous êtes libres dans les mois prochains?

Paris : figuration nombreux hommes de plus de 35 ans pour le film historique « j’accuse » avec Dujardin dans le rôle principal; la directrice de casting cast des hommes 35 à 80 ans. Cheveux gris bienvenus !
On connait tous des amis qui adoreraient participer, alors taggez-les !
Pour s'inscrire :
https://figurants.com/figuration-cinema ... aris_i8064
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