La Cinémathèque française : La programmation

Rubrique consacrée au cinéma et aux films tournés à partir de 1980.

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Duke Red
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Re: La Cinémathèque française - discussions sur la programmation

Message par Duke Red »

Rachael ne fait pas la gueule, elle émerge gentiment de son dodo ^^

(Et puis un des titres de la BO, c'est "Love Theme")

(Hop, imparable 8))

(D'ailleurs, en parlant de dodo, je vais pas tarder moi...)
"On est juste une bande de glands qui n'a rien trouvé de mieux à faire de sa vie." (Colqhoun)
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tenia
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Re: La Cinémathèque française - discussions sur la programmation

Message par tenia »

Major Tom a écrit :Il y en aura toujours pour croire que le cinéma violent, les jeux vidéos, la musique trash ont créé les types qui font des tueries aux USA.
Sauf que la violence n'a rien à voir là dedans, vu qu'on a des études d'un côté qui disent que les films et JV violent n'influent pas de façon notable les comportements mais que de l'autre, l'hyper-sexualisation de la société (notamment médiatique) et l'omni-présence du porno ont par contre une influence. Ou c'est trop compliqué d'imaginer une perméalibilité différente chez le spectateur ? Qu'il y a dans un cas un passage à l'acte physique et spécifique, de l'autre un ensemble de valeurs comportementales implicites et diffuses ?

Ca me fait penser qu'il y a un film qui pointait assez subtilement (mais de façon tout de même notable) cette hyper-sexualisation (notamment mercantile) et qui m'avait marqué sur ce point, c'était Le couperet. C'est bien, on reste dans le sujet du moment.
Dernière modification par tenia le 10 nov. 17, 17:53, modifié 2 fois.
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Jack Griffin
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Re: La Cinémathèque française - discussions sur la programmation

Message par Jack Griffin »

Thaddeus a écrit : Dans un article lu il y a peu qui évoquait deux de ces trois scènes, le personnage d'Indiana Jones tenait également une place de choix, considéré comme un violeur en puissance grâce à deux passages : la toute fin du Temple maudit où il utilise son lasso pour faire venir à lui une Willie récalcitrante, et la séquence de La dernière croisade où les échanges de baiser avec Elsa se font un peu musclés.

Maintenant, j'attends que ces analystes affirment avec la même assurance que, par exemple, le moment où Lorraine se jette sur Marty dans la voiture de Retour vers le futur, ou celui où Jessica Chastain, après son heureuse découverte, embrasse Topher Grave par surprise dans Interstellar, mettent en scène des agressions sexuelles.
Dans retour vers le futur il y a forcément un malaise dû au caractère incestueux (dans blade runner aussi je dirais puisque on peut penser que Deckard manipule Rachel/Replicant comme un jouet). Dans Interstellar je vois de quoi tu parles mais ce n'est pas de la même nature que les scènes évoqués au dessus (il n'y a pas de séduction si je me souviens bien).
Cela dit on ne découvrira pas que les films sont fait dans un certain contexte et à une certaine époque mais ce qui me semble intéressant aujourd'hui c'est ce basculement possible et très brusque dans les consciences. Le "baiser forcé" est un exemple. Avant tout le monde trouvait ça normal, aujourd'hui on tique. Les James bond en regorge évidemment mais ça fait partie de la violence du personnage, de son côté déplaisant.
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Karras
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Re: La Cinémathèque française - discussions sur la programmation

Message par Karras »

Jack Griffin a écrit :Le "baiser forcé" est un exemple. Avant tout le monde trouvait ça normal, aujourd'hui on tique. Les James bond en regorge évidemment mais ça fait partie de la violence du personnage, de son côté déplaisant.
Mouais, j'ai un peu de mal à comprendre pourquoi il faudrait aujourd'hui condamner un personnage de fiction qui représente un fantasme de séduction masculine alors qu'en même temps certaines se précipitent en librairie ou au cinéma pour découvrir le dernier "nuances de Grey". Drôle d'époque ...
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Thaddeus
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Re: La Cinémathèque française - discussions sur la programmation

Message par Thaddeus »

Jack Griffin a écrit :Dans retour vers le futur il y a forcément un malaise dû au caractère incestueux (dans blade runner aussi je dirais puisque on peut penser que Deckard manipule Rachel/Replicant comme un jouet). Dans Interstellar je vois de quoi tu parles mais ce n'est pas de la même nature que les scènes évoqués au dessus (il n'y a pas de séduction si je me souviens bien).
Le malaise avec lequel le spectateur perçoit l'agressivité sexuelle de Lorraine dont Retour vers le futur est en effet dû exclusivement à son caractère incestueux, et à rien d'autre. Ce qui indique bel et bien que le fait qu'elle ne s'encombre pas de son consentement à lui ne pose de problème. En d'autres termes, si elle est n'était pas sa mère et lui son fils, il n'y aurait pas de malaise. Or il s'agit bien d'une agression sexuelle stricto sensu - au sens de la loi. Concernant Interstellar, je ne vois pas en quoi le fait qu'il n'y ait pas de contexte de séduction entre les deux personnages change quoi que ce soit à la nature de ce baiser. Là encore, c'est un geste pénalement et moralement répréhensible - je dirais même qu'il l'est encore plus, car on ne peut pas le couvrir de l'alibi du rapport de séduction. Dans cette scène comme dans l'autre, faut-il crier au haro ? Faut-il tirer des conclusions sur une prétendue apologie d'un comportement déviant ? Faut-il condamner ces films et leurs auteurs sous prétexte qu'ils perpétuent une idée inacceptable des rapports humains et infusent dans l'esprit de leurs spectateurs des idées toxiques ?
Cela dit on ne découvrira pas que les films sont fait dans un certain contexte et à une certaine époque mais ce qui me semble intéressant aujourd'hui c'est ce basculement possible et très brusque dans les consciences. Le "baiser forcé" est un exemple. Avant tout le monde trouvait ça normal, aujourd'hui on tique.
Je comprends cette position, mais ce qui m'inquiète est qu'elle semble oblitérer totalement le fait que les rapports entre les êtres n'obéissent pas à un protocole d'attitudes, de gestes et de comportements uniques. Et que oui, au risque de heurter cette bonne morale qui me fait un tantinet flipper en ce moment, il existe des jeux de séduction qui se basent sur l'attente, le refus d'un consentement clair, le flirt avec la "limite", l'entretien amusé d'une frustration dans l'espoir que l'autre fasse le premier pas sans qu'on le lui demande, etc... Tout cela fait partie du jeu de la séduction, et ces rôles se distribuent entre l'homme et le femme au fil des configurations, des contextes, des circonstances... Beaucoup de films décrivent ce genre de situations, et je trouve consternant que certains, en ne basant que sur une grille de lecture psychorigide qui fait fi de tout ce qui est informulé, suggéré, implicite, les accuse de défendre cette fameuse "culture du viol" sur le dos de laquelle il est désormais facile de mettre tout et n'importe quoi. Et le pire, c'est que j'ai parfaitement conscience qu'en écrivant ces quelques lignes, je m'expose moi-même à être accusé de la perpétuer. :?
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Re: La Cinémathèque française - discussions sur la programmation

Message par pol gornek »

Est-ce un total renversement de vos principes moraux que d'imaginer, une seconde, que toutes ces scènes où le héros (un mâle bien alpha) attrape une femme et la force à l'embrasser pour qu'elle succombe à son charme, puissent, aujourd'hui, mériter que l'on s'y penche sur ce qu'elles disent de leur époque et comment elles peuvent être interpréter aujourd'hui ?

Je trouve salutaire d'être choqué par de telles séquences. Cela ne veut pas dire qu'il faut brûler le films, son réalisateur, sa famille et le maudire sur trois générations, cela signifie que toutes ces scènes que l'on trouvait normal, elles ne l'étaient pas et elles participaient à l'érection d'un paradigme très simple : nous vivons dans une société patriarcale (oui j'ai dit le gros, je n'ai pas peur). Un monde dont le septième art s'est fait l'écho, où l'on trouvait, le plus souvent, des hommes derrière la caméra. Alors oui, ça donne un male gaze. En soit, ce n'est pas grave... s'il n'était pas dominateur. Comprendre qu'un regard masculin, c'est intéressant mais uniquement des regards masculins, ça pose un problème. C'est du lobbying. Donc, ce male gaze s'éclate à montrer des jouvencelles farouches, tomber sous le charme pourvu qu'on les force un peu. Et ça entretiens le phénomène. Les films ne sont pas le mal, ils sont des symptômes. L'assimiler, ça ne veut pas dire jeter toute l'histoire du septième art à la poubelle, c'est oeuvrer pour faire en sorte que le paradigme change, qu'on réalise qu'en enrichissant l'offre par des visions féminines (et ça passe d'abord par des visions féministes), c'est tout l'art qui en sortira grandi. Si les films ne changeront pas le monde, ils peuvent le refléter. Et parfois, c'est plus facile de regarder le reflet pour mieux comprendre le sujet.

Ce genre de comportements que l'on trouve dans beaucoup de films, qui n'ont pas la volonté consciente de perpétuer une culture du viol, ne vont pas transformer la population masculine en mini-Weinstein. Mais ils participent, malgré eux, à l'élévation d'une société patriarcale (l'homme est le plus souvent dominant) par leur systématisme. Et le problème avec quelque chose de systématique, c'est que ça devient une vérité.

EDIT : toutes ces scènes ont le droit d'exister. Il faut simplement, aujourd'hui, être capable d'affirmer qu'elles représentent aussi un comportement abusif. Et le travail de critique, voire de passionné(e)s, c'est de contextualiser de telles séquences et de les interpréter.
Le public qui grandit devant la télé affine son regard, acquiert une compétence critique, une capacité à lire des formes compliquées. Il anticipe mieux les stéréotypes et finit par les refuser car il ne jouit plus d'aucune surprise ni curiosité, les deux moteurs de l'écoute.Il faut donc lui proposer des programmes d'un niveau esthétique plus ambitieux. La série télé s'est ainsi hissée, avec ses formes propres, au niveau de la littérature et du cinéma.
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Thaddeus
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Re: La Cinémathèque française - discussions sur la programmation

Message par Thaddeus »

Je suis plutôt d'accord avec ce que tu dis en théorie, mais - une fois de plus - entre la théorie et sa mise à l'épreuve des films, dans leurs infinies nuances, leur mille configurations possibles, il y a souvent un monde. Ainsi, non, je me refuse de considérer de facto que, parce qu'une scène montre par exemple un homme (ou une femme) voler un baiser non consenti à une femme (ou un homme), parce qu'un rapport de séduction ne respecte pas scrupuleusement les règles que la morale et la loi exigent, on doit obligatoirement affirmer qu'elle illustre un comportement abusif et s'arc-bouter sur un principe prétendument inaliénable qui ne tient pas compte des mille facteurs entourant une situation. Tout n'est pas blanc ou noir. A chaque scène son contexte, les circonstances qui l'ont amenée, ce que l'auteur a voulu exprimer à travers elle, l'ambigüité possible (et parfois revendiquée) de son discours, etc. Opérer autrement, c'est remplacer une grille idéologique figée par une autre.

Sinon, que penses-tu de la série Cinquante nuances de Grey (écrite et réalisée par des femmes, donc difficilement taxables de male gaze), justement évoquée par Karras, et de ce qu'elle dit des rapports hommes-femmes aujourd'hui, de leurs rôles respectifs, des fantasmes et stéréotypes attribués à chacun ?
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Roy Neary
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Re: La Cinémathèque française - discussions sur la programmation

Message par Roy Neary »

Karras a écrit :Mouais, j'ai un peu de mal à comprendre pourquoi il faudrait aujourd'hui condamner un personnage de fiction qui représente un fantasme de séduction masculine alors qu'en même temps certaines se précipitent en librairie ou au cinéma pour découvrir le dernier "nuances de Grey". Drôle d'époque ...
Alléluia ! Merci Karras. Tu touches à l'essentiel.
Je viendrai développer mon argumentaire sur ce sujet demain car je n'ai pas le temps là.
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pol gornek
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Re: La Cinémathèque française - discussions sur la programmation

Message par pol gornek »

Thaddeus a écrit :Je suis plutôt d'accord avec ce que tu dis en théorie, mais - une fois de plus - entre la théorie et sa mise à l'épreuve des films, dans leurs infinies nuances, leur mille configurations possibles, il y a souvent un monde. Ainsi, non, je me refuse de considérer de facto que, parce qu'une scène montre par exemple un homme (ou une femme) voler un baiser non consenti à une femme (ou un homme), parce qu'un rapport de séduction ne respecte pas scrupuleusement les règles que la morale et la loi exigent, on doit obligatoirement affirmer qu'elle illustre un comportement abusif et s'arc-bouter sur un principe prétendument inaliénable qui ne tient pas compte des mille facteurs entourant une situation. Tout n'est pas blanc ou noir. A chaque scène son contexte, les circonstances qui l'ont amenée, ce que l'auteur a voulu exprimer à travers elle, l'ambigüité possible (et parfois revendiquée) de son discours, etc. Opérer autrement, c'est remplacer une grille idéologique figée par une autre.
Effectivement, tu peux amener des nuances à ce genre de scènes, parce qu'elles peuvent s'inscrire dans un contexte particulier... mais pour beaucoup d'entre elles (notamment les James Bond - après, je reconnais volontiers ne pas avoir dressé de listes recensant toutes ces séquences problématiques), c'est une bête expression de male gaze. C'est la récurrence, la redondance de ce procédé qui décrit un phénomène plus général. On peut effectivement prendre chaque séquence de façon indépendante et lister tous les éléments (volonté de l'auteur, discours,...) qui offrent une interprétation nuancée, mais le tableau bien chargé sur la question finit par dire quelque chose qui dépasse le cadre de l'intention. Je ne dis que tous les réalisateurs sont fautifs directement, de propager un tel male gaze, ils participent, plus ou moins malgré eux, à l'édification d'un paradigme, brique par brique. Et il me semble intéressant aujourd'hui de le prendre en considération, pas pour le dénoncer bêtement et envoyer des auteurs aux piloris mais pour repositionner le curseur selon un modèle plus juste (ça c'est pour aujourd'hui) et faire comprendre comment le vieux modèle s'est construit et a perduré parce qu'on était bien trop confortable dans nos chaussons pour imaginer qu'il y avait un soucis (pour les oeuvres d'hier).
Sinon, que penses-tu de la série Cinquante nuances de Grey (écrite et réalisée par des femmes, donc difficilement taxables de male gaze), justement évoquée par Karras, et de ce qu'elle dit des rapports hommes-femmes aujourd'hui, de leurs rôles respectifs, des fantasmes et stéréotypes attribués à chacun ?
Je n'en pense pas grand chose, n'ayant lu ou vu 50 Nuances... Je ne sais pas dans quelle mesure elle conforte un système ou au contraire si elle le combat.
Le public qui grandit devant la télé affine son regard, acquiert une compétence critique, une capacité à lire des formes compliquées. Il anticipe mieux les stéréotypes et finit par les refuser car il ne jouit plus d'aucune surprise ni curiosité, les deux moteurs de l'écoute.Il faut donc lui proposer des programmes d'un niveau esthétique plus ambitieux. La série télé s'est ainsi hissée, avec ses formes propres, au niveau de la littérature et du cinéma.
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Re: La Cinémathèque française - discussions sur la programmation

Message par tenia »

Thaddeus a écrit :la série Cinquante nuances de Grey (écrite et réalisée par des femmes, donc difficilement taxables de male gaze)
Elle a beau être écrite par une femme, le schéma déroulé dans le film est totalement machiste et sexiste, la femme n'étant qu'un faire valoir sexuel pour l'Homme du récit et ne finissant par s'épanouir définitivement que dans une vie de famille finale "2 gosses 1 chien 1 monospace".
Je ne crois pas que l'adaptation soit différente, mais les bouquins sont sidérants de conservatisme sociétal et sentimental, le pire étant probablement le 4e tome.
A la rigueur, si on peut questionner la série, c'est de se demander comment ça peut avoir un tel succès.
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Jack Griffin
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Re: La Cinémathèque française - discussions sur la programmation

Message par Jack Griffin »

Le coup du fantasme tient difficilement parce qu’à moins de vivre dans une dimension parallèle on sait que le rapport dominant/dominé n’est pas en faveur de la femme aujourd’hui . Il y a une sur représentation de ce fantasme masculin. C’est ce qui est aussi dénoncé. Quand aux femmes derrière 50 shade, elles ont le droit de se complaire dans un fantasme masculin.
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cinephage
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Re: La Cinémathèque française - discussions sur la programmation

Message par cinephage »

Alexandre Angel a écrit :
cinephage a écrit :Les amalgames se multiplient...


Après la chasse au réalisateur indigne, voici désormais celle des films qui montrent des "porcs" en action. Ce qui me surprend, c'est que ça semble prendre. Alors qu'aux hystériques qui reprochaient aux films leur violence et qui comptaient les gestes répréhensibles dans les films, on rétorquait que ça ne rendait pas forcément les spectateurs violents, à ceux qui disent qu'un personnage sexiste "alimente la culture du viol" on ne répond pas grand chose, au pire on essaie de justifier le geste, de dire que sans ça il n'y a pas de film.

L'analyse est pourtant exactement la même, elle affirme que le spectateur est une éponge, que si on lui montre un type qui "force" un baiser, il va faire pareil, tout comme si, quand il voit dans un film une bagarre dans un saloon, il va se précipiter dans un bar pour chercher des crosses au premier venu. Quelle pauvre analyse, quelle paresse (ou malhonnêteté) intellectuelle... Mais dans le contexte d'hystérie qui nous entoure, où quiconque crie au loup semble trouver un écho, j'imagine que ça ne détonne pas sur l'air du temps.
Tu as l'air aussi en colère que Bonnaud!
Il n'y a pas vraiment de colère dans mon post, juste un constat passablement atterré...
Ce qui pourrait me mettre en colère, c'est que les plaintes de vraies victimes de choses vraiment odieuses se retrouvent escamotées derrière une série d'anecdotes ou de raisonnements stupides de cet ordre. Un type qui te parle mal dans un bar, c'est regrettable, mais ce n'est pas la même chose qu'un type qui te menace ta carrière ou s'exhibe devant toi. Un film qu'on n'aime pas, un type qui a un passé judiciaire, ce sont d'autres sujets qu'un violeur, d'autres choses. L'amalgame, l'entassement, est consternant. La seule chose que ces sujets ont en commun, c'est l'indignation qu'ils génèrent. On en a gros !!
I love movies from the creation of cinema—from single-shot silent films, to serialized films in the teens, Fritz Lang, and a million others through the twenties—basically, I have a love for cinema through all the decades, from all over the world, from the highbrow to the lowbrow. - David Robert Mitchell
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Re: La Cinémathèque française - discussions sur la programmation

Message par Thaddeus »

cinephage a écrit :Il n'y a pas vraiment de colère dans mon post, juste un constat passablement atterré...
Comme je partage ton sentiment, cinephage ! C'est bel et bien la consternation qui prévaut également chez moi devant la gigantesque centrifugeuse à raccourcis, amalgames et autres raisonnements tordus dont la société semble être prise sur ce grave sujet depuis quelques semaines... L'atterrement, c'est exactement cela - et pourtant, comme je le disais, je me tiens éloigné d'un espace comme Twitter pour me préserver de ce qui, j'imagine, doit constituer le pire réservoir à arguties moutonnières qui soit. Ce qui m'inquiète le plus je pense, c'est comme tu le disais que "ça semble prendre", que les défenseurs d'une pensée que l'on pouvait estimer pertinente et nuancée semblent eux-mêmes alimenter le phénomène (peut-être est-ce de ceux dont parlait aussi Farnaby plus haut lorsqu'il pointait le camp des "progressistes" se drapant derrière leurs idées ouvertes et tolérantes). Je suis vraiment perplexe. Enfin bref, j'essaie de m'efforcer de ne pas mettre le doigt dans un débat qui, de toutes manières, m'apparaît inextricable et n'a plus grand chose à voir avec le cinéma.

(Mais j'attends avec impatience le message de Roy Neary, qui je n'en doute pas exprimera une partie du fond de ma pensée mieux que je ne saurais le faire :mrgreen: )
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Jack Griffin
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Re: La Cinémathèque française - discussions sur la programmation

Message par Jack Griffin »

je pense qu’en creusant il n’y aurait pas de grand désaccord et je me retrouve dans les messages de pol gornek et ténia qui ne me semble rien dire de consternant. À mon tour de m’étonner....mais bon
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Alexandre Angel
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Re: La Cinémathèque française - discussions sur la programmation

Message par Alexandre Angel »

Thaddeus a écrit :Ce qui m'inquiète le plus je pense, c'est comme tu le disais que "ça semble prendre", que les défenseurs d'une pensée que l'on pouvait estimer pertinente et nuancée semblent eux-mêmes alimenter le phénomène (peut-être est-ce de ceux dont parlait aussi Farnaby plus haut lorsqu'il pointait le camp des "progressistes" se drapant derrière leurs idées ouvertes et tolérantes).
C'est exactement ce qui me met mal à l'aise devant le bashing (genre Ecran Large et l'autre, que je n'ai pas en tête..) dont est victime Bonnaud dont la prestation chez Mediapart n'est pour moi absolument pas catastrophique. Il a quelques propos malheureux mais, au delà de la posture du dirlo de la Cinémathèque qui défend son beefsteak (ce qui peut se comprendre), je trouve dans sa véhémence des accents d'inquiétude qui résonnent avec les tiens, ceux de Cinephage, de Major Tom ou de Farnaby. Bien plus que ses "demi-folles", "Dernière Tentation du Christ" et autres "HP et DASS", ce qui me choque est le constant sourire moqueur de son interlocutrice.
Sous le prétexte légitime d'éradiquer une horreur (ce qui ne se fera pas en un mois), une forme d'intégrisme est en train de voir le jour dans ce "camp des progressistes" mû par une espèce d'exaltation collective qui menace de virer au malsain.
Tu nous a proposé un lien vers une intervention de Daniel Scheidermann que j'ai lue et qui me semble (sous réserve d'une relecture) participer de ce phénomène, mais de façon oblique, policée.
Au risque de déformer ses propos car je n'ai plus ce texte sous les yeux, outre ce ton ironique vis-à-vis de Bonnaud que je fais plus que déplorer, Scheidermann rebondit sur l'histoire de la mère et de sa fille, face au Bal des Vampires (mais s'il fallait remplacer le film de Polanski, Blade Runner pourrait faire l'affaire) pour prôner une espèce de pédagogie d'accompagnement de l'évolution des mentalités. Certes, dans un autre contexte, j'aurais trouvé cette thématique tout à fait passionnante. Mais là? Sous prétexte que les mentalités évoluent, que la jeune a été choquée de la "queutardise" de rigueur dans le Polanski, il faudrait, lors d'une rétrospective, présenter le film avec toutes les précautions d'usage d'une pédagogie de l'horreur comme on le ferait du Juif Süss voire de Naissance d'une nation (film que je ne supporte plus)? Et puis quoi encore??
A ce compte-là, ce sont tous les livres jamais écrits, tous les films jamais tournés, toutes les bandes jamais dessinées, tous les tableaux jamais peints avec leurs représentations stéréotypées de tous les temps, sans parler de tout ce qui est chanté, qui sont sur la sellette.
Que l'on me comprenne bien. Qu'à l'évolution des mentalités corresponde une évolution de la pédagogie ne me pose aucun problème. Mais présenter Le Bal des Vampires lors d'une rétrospective pour mieux en disséquer l'"horreur" (en partant du principe discutable que l'horreur y soit avérée) est une idée qui me hérisse le poil.
Là, il bat la breloque, Schneidermann..
Dernière modification par Alexandre Angel le 11 nov. 17, 08:51, modifié 3 fois.
Comme "le Temps de l'innonce" et "A tombeau ouvert", "Killers of the Flower Moon" , très identifiable martinien, est un film divisiblement indélébile et insoluble, une roulade avant au niveau du sol, une romance dramatique éternuante et hilarante.

m. Envoyé Spécial à Cannes pour l'Echo Républicain
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