David Cronenberg

Rubrique consacrée au cinéma et aux films tournés à partir de 1980.

Modérateurs : cinephage, Karras, Rockatansky

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Shivers (1975)
1
1%
Rabid (1978)
1
1%
The Brood (1979)
4
3%
Scanners (1980)
3
2%
Videodrome (1982)
22
17%
The Dead Zone (1983)
13
10%
The Fly (1986)
28
21%
Dead Ringers (1988)
16
12%
Naked Lunch (1991)
9
7%
M Butterfly (1993)
1
1%
Crash (1996)
11
8%
eXistenZ (1999)
9
7%
Spider (2002)
1
1%
A History of Violence (2005)
9
7%
Eastern Promises (2007)
5
4%
 
Nombre total de votes : 133

Metal Rider
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Inscription : 13 août 03, 15:31

David Cronenberg

Message par Metal Rider »

David Cronenberg
Une fascination dérangeante
De film en film, David Cronenberg s'est révélé comme un des plus grands réalisateurs de notre temps, et des plus originaux. Obsédé par les mutations organiques, les excroissances visqueuses prenant naissance au sein même de l'individu, ou la lente détérioration des corps et des esprits, ce metteur en scène inclassable propose des œuvres envoûtantes qui mêlent répulsion et fascination. Elles restent imprimées longtemps dans la mémoire de façon indélébile. Procédons à une dissection attentive de sa carrière.
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David Cronenberg est né le 15 mars 1943, à Toronto où il vit toujours. La découverte du cinéma underground à la fin des années 60 lui fera avorter ses études de biochimie, et le déterminera à entamer une carrière cinématographique. Ce sera d'abord deux courts métrages, Transfer (1966) et From the Drain (1967). Films expérimentaux destinés à un public étudiant fréquentant les salles d'art et d'essai, Stereo (1969) et Crime of the Future (1970), sont deux moyens métrages déjà contaminés par des thèmes de science-fiction majeurs (la télépathie pour le premier, les dangers de le dermatologie pour le second), qui préfigurent la filmographie à venir.

SHIVERS
Frissons (Shivers, 1975) raconte l'histoire d'un savant déjanté et disciple de Reich qui concocte des sangsues phalliques et répugnantes, se propageant par contact buccal, dans un luxueux ensemble résidentiel. Cela provoque une épidémie de frénésie sexuelle éminemment contagieuse qui, toutes proportions gardées, préfigure déjà le Sida et ses ravages mortels. Produit par Ivan Reitman (qui produira Metal Hurlant et réalisera S.O.S Fantômes), financé par de petites sociétés de production spécialisées dans l'érotisme, et interprété notamment par Barbara Steele alors égérie féminine du ciné bis, le film est tourné avec un budget dérisoire estimé à 179.000 $ et sera projeté au marché du film à Cannes en 1976, où Cronenberg colle lui-même les affiches à la nuit tombée. Il fait immédiatement une grosse impression et est vendu dans 35 pays. Des metteurs en scènes comme Martin Scorsese ou John Carpenter crient au génie, tandis qu'au Canada les réactions sont pour le moins violentes. Les scènes incestueuses, pédophiles, homosexuelles, orgiaques, d’hystérie sexuelle, et les nombreux viols frappent les esprits (même si évidemment ces scènes sont suggérées). Certains critiques qui avaient adoré les deux premiers moyens métrages de Cronenberg, se déchaînent et réclament qu'on lui interdise de tourner. Plusieurs membres du Parlement s'étonnent ouvertement qu'un tel film ait pu être tourné avec les fonds officiels de la Canadian Film Developpement Corporation, tout en réclamant l'interdiction pure et simple de cette chose répugnante...
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RABID
Conforté dans son statut d'empêcheur de tourner en rond, Cronenberg récidive avec Rage (Rabid, 1978). Il développe à nouveau sur un plan symbolique le thème des parasites et des maladies sexuellement transmissibles. Bénéficiant d'un budget nettement plus conséquent (530.000 $), l'histoire est une parabole sur le vampirisme centré sur le personnage de Rose, interprétée par une star du porno des années 70, Marylin Chambers (Derrière la Porte Verte). Gravement blessée dans un accident de moto, la jeune femme se retrouve à la Keloïd clinic où, à la suite d'expériences menées par un directeur fou, elle se voit dotée d'un appendice phallique greffé sous son aisselle, qui lui donne une soif inextinguible de sang humain, puis provoque une épidémie de rage qui met en péril les fondements mêmes de la société canadienne. Cette corrélation étroite entre érotisme et vampirisme, qui existait déjà dans les films de la Hammer tournés dans les années 60, se voit ici poussée à son paroxysme. Cronenberg associe cette notion à une vision critique de nos sociétés contemporaines, et filme la contamination progressive dans un climat toujours morbide, où les victimes du virus sont représentées par des zombies déchaînés à bave verdâtre dégoulinant de la bouche.
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Tiens, je me me demande pourquoi j'ai choisi cette capture...
FAST COMPANY
Tourné en 1979, Fast Company est un film bizarre, de facture très classique ce qui peut au premier abord détonner dans la filmographie de Cronenberg. Cette vision attentive et presque documentaire de l'univers des circuits automobiles, s'inscrit pourtant en toute logique dans la passion du metteur en scène pour tout ce qui touche de près ou de loin à la Formule 1, mais il s'agit quand même d'une commande. Lonnie, un pilote de grande renommée de la firme FastCo, conduit des voitures à "carburant spécial" depuis des années, tandis que le jeune Billy pilote les "funny cars". Alors que Lonnie teste une nouvelle voiture surpuissante, il la casse à la grande déconvenue de son sponsor qui, fou de rage, fera des manipulations financières vis-à-vis de l'équipe de Lonnie afin de le mettre hors circuit. En passionné de circuits (il utilise souvent des noms de pilotes pour ses personnages), Cronenberg cherche à retranscrire les sensations éprouvées par ces pilotes automobiles, et a d'ailleurs voulu le retenter dans les années 90 avec un film qui n'a finalement pas vu le jour, Red Cars, basé sur ce même principe. Le thème de l'homme faisant corps avec sa machine, présent ici, constitue un des points les plus forts de la thématique cronenbergienne à suivre...
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[center]THE BROOD[/center]
Film le plus autobiographique et personnel de Cronenberg, Chromosome 3 (The Brood, 1979) est né de l'expérience d'un divorce douloureux. Il développe le thème de la psychosomatique, et de la façon dont l'esprit peut agir sur le corps, le dérégler, le modifier. Centré sur un petit groupe d'individus et interprété par deux acteurs alors en vogue (Oliver Reed et Samantha Heggar), le récit a pour cadre l'institut Somafree où le docteur Hal Raglan permet à ses patients d'extérioriser leurs troubles psychologiques dans de longues séances d'introspection, faisant apparaître sur leur corps des plaies, des pustules et autres manifestations organiques qui sont poussées à l'extrême chez Nola Carveth, une jeune femme traumatisée par une enfance battue. Ses haines refoulées sont manifestées par des enfants mutants meurtriers auxquels elle donne naissance, ce qui donne lieu à une scène particulièrement hard où elle engendre une de ses créatures par le biais d'une poche gluante collée à son abdomen. Vision ultra-pessimiste du cocon familial, Chromosome 3 est une oeuvre malsaine, au climat éprouvant et aux scènes chocs efficaces. Le film marque aussi la rencontre entre Cronenberg et le compositeur Howard Shore, qui signera la musique de tous les autres films du cinéaste, à l'exception de Dead Zone (Michael Kamen).
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SCANNERS
Tourné en 1980 et bénéficiant d'un large circuit de distribution, Scanners marque l'intérêt évident de Cronenberg pour un cinéma moins underground et plus commercial. Exit les connotations sexuelles. L'intrigue, mêlant récit fantastique, complot politique et traîtrise, est racontée de façon très nerveuse et mouvementée. Mais d'un canevas classique, Cronenberg ajoute ses propres thèmes. Comme dans ses précédents films, la médecine et les dérapages scientifiques sont bien présents. Les idées de fusion du corps, de l’esprit et de la machine se retrouvent comme dans la scène de télépathie dans la cabine téléphonique. Bons et méchants scanners s'affrontent dans des duels au sommet se terminant par des effets spéciaux sanglants du plus bel effet, comme cette célèbre explosion de boite crânienne très réussie. La fin est parfaitement représentative du cinéma de Cronenberg (le film démarrant de façon manichéenne très appuyée), et la frontière entre le Bien et le Mal, la raison et la folie, le rêve et l'imaginaire est bien souvent indiscernable...
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VIDEODROME
Considéré par beaucoup comme le film le plus passionnant de son auteur, pour atteindre même le statut envié de "film culte", Videodrome (1982) a été un échec commercial cuisant lors de sa sortie. Universal avait décidé de le lancer comme un film de science-fiction avec un gros battage publicitaire, alors qu'il s'agit d'un film plus complexe destiné avant tout à un public d'art et d'essai. Dans Videodrome, Cronenberg aborde un nouveau thème: celui des médias, le film suit les pérégrinations de Max Renn (James Woods), directeur d'une chaîne indépendante de TV qui capte par hasard un mystérieux programme où des meurtres et des tortures ont réellement lieu. Entraîné par le biais de la pulpeuse Nicki Brand (Deborah Henry, ex-Blondie) dans un monde de perversions sado-masochistes, Max va graduellement s'enfoncer dans une folie hallucinatoire. Doté d'effets spéciaux époustouflants du maquilleur Rick Baker (Le Loup-Garou de Londres) comme la main-pistolet ou le ventre transformé en magnétoscope humain, Videodrome est une œuvre complexe et déroutante. Mais c'est aussi totalement fascinant, et qui consacre véritablement le talent visionnaire de son auteur.
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THE DEAD ZONE
Après l'échec de Videodrome, Cronenberg, se voit contraint de revenir à des sujets plus mainstream. Commande adaptée d'un best-seller de Stephen King, et produit par Dino de Laurentis, Dead Zone (The Dead Zone, 1983) est cependant une nouvelle réussite dans la carrière du réalisateur. Johnny Smith, victime d'un accident de la route, se réveille après un long coma avec le don de prévoir l'avenir par le simple contact avec un individu. Après avoir sauvé des vies et démasqué un tueur en série, Smith découvre qu'un politicien en phase de devenir président des Etats-Unis provoquera une guerre nucléaire. Porté par la composition exceptionnelle de Christopher Walken, Dead Zone explore à nouveau à la manière de Scanners les zones d'ombres (ou mortes) de notre esprit, et les forces exceptionnelles qui peuvent s'y nicher.
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THE FLY
Tourné en 1986, La Mouche (The Fly) est bien plus qu'un simple remake du classique du cinéma fantastique La Mouche Noire de Kurt Neumann avec Vincent Price. Là encore, Cronenberg a su y intégrer ses obsessions et sa vision bien particulière du thème de la monstruosité. Métaphore emblématique sur le vieillissement des corps et âmes, sur les mutations irrémédiables de la chair, La Mouche peut aussi se lire comme une vision à peine déformée des terribles maladies contemporaines en particulier du cancer et du Sida. Howard Shore accompagne les images d'une composition douce et angoissante, tandis que la transformation, graduelle et inéluctable, de Seth Brundle en une créature visqueuse et repoussante est superbement réalisée, bénéficiant d'effets spéciaux prodigieux de Chris Walas (qui signera la médiocre suite).
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DEAD RINGERS
Faux-Semblants (Dead Ringers, 1988) est un drame psychologique d'une rare intensité où Cronenberg, à une séquence onirique près, délaisse en partie ses visions gores et les gros effets spéciaux spectaculaires, pour mieux se concentrer sur les déviances psychologiques de frères jumeaux inséparables, tant dans l'exercice de la gynécologie que dans leurs conquêtes amoureuses. Beaucoup de fans le considèrent aussi comme le chef-d'œuvre de David Cronenberg. Faux Semblants est un de ses films les plus sobres d'avant ses réalisations des années 2000. L'auteur a fait un film dépouillé et quasi ascétique centrée sur l'amour d'une même femme qui conduira les jumeaux à une descente aux enfers, en les transformant en frères ennemis. Bien que ce film semble au premier abord bien éloigné des œuvres précédentes de l'auteur, il rejoint des thèmes esquissés dans Chromosome 3. Ici, la monstruosité ne naît pas de séances de psychanalyse, mais d'un combat magnifié par un rituel chirurgical symbolisé par une panoplie d'instruments opératoires aussi redoutables que splendides. Longtemps après la vision de cette plongée inexorable dans les abîmes vertigineux, les images de Faux Semblants restent en mémoire. Jeremy Irons, en double scientifique obsédé et tourmenté, interprète dans ce film l'un des rôles les plus marquants de sa carrière.
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NAKED LUNCH
Longtemps taxé d'inadaptable au cinéma, Le Festin Nu (Naked Lunch, 1991) de William Burroughs ne pouvait que séduire Cronenberg qui, depuis 1983, songe à son adaptation. Écrit en 1959, largement sous l'influence de drogues hallucinogènes, le bouquin se présente sous la forme de notes éparses, réarrangées parfois par la fameuse technique du "cut-up" (une reformulation physique des chapitres, par découpages, mélange et recollage, dans une procédure inédite que l'on peut apparenter aux transes créatrices des surréalistes). Le film comme le livre suit l'enquête analytique que mène et qu'endure le héros, William Lee, alias Burroughs himself. Bill Lee est un écrivain minable et exterminateur de cafards (référence directe à la Métamorphose de Kafka). Comme lui, Burroughs a tué sa femme accidentellement sous l'emprise d'un trip hallucinatoire, avec une arme à feu en jouant à Guillaume Tell. Bill Lee se voit contraint de fuir à Interzone, en fait l'International Zone de Tanger où Burroughs a écrit le livre, lieu exotique justement similaire à Tanger, où gravitent des personnages interlopes: lesbiennes dominatrices, homosexuels pervers, drogués névrosés... Si Ginsberg et Kerouac ont aidé Burroughs à le rendre publiable, à sa sortie en 1962 en Amérique, le livre est interdit et le restera pendant environ 10 ans, tombant sous les lois sur l'obscénité dans un procès qui servit la cause de la lutte contre la censure aux États-Unis. Cronenberg doit faire plus soft pour d'évidentes mêmes raisons de censure. Mais Le Festin Nu offre l'occasion à son réalisateur de faire vivre les quelques créatures monstrueuses échappées d'un esprit aussi tortueux que le sien: machines à écrire insectes, Mugwump (un monstre bizarroïde tout droit sorti de la science-fiction des années 50), sans oublier une mémorable scène de viol homosexuel perpétré par une créature mi-homme... mi-mante religieuse. Conçu comme un polar hallucinatoire doté d'une imagerie fulgurante, le film amalgame les thèmes du roman aux préoccupations essentielles du metteur en scène, pour former un ensemble cauchemardesque totalement déroutant.
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CRASH
Homme de toutes les audaces, de tous les défis, Cronenberg ne pouvait en bon fan de courses automobiles que s'atteler à l'adaptation de Crash (qu'il réalise en 1996), un autre bouquin réputé inadaptable à l'écran. Ce roman prophétique incontournable a été écrit par James Graham Ballard en 1973, donc à une époque où la bagnole n'avait pas encore imposé sa domination "écrasante" sur la civilisation moderne. Aussi glacé que glaçant, le film est centré sur un couple pseudo-libéré qui se lance à "corps perdu" dans l'exploration des rapports bizarres et ténus qui lient le danger, le sexe et la mort. Crash pourra ainsi, lors d'une première vision, rebuter et révulser le spectateur moyen qui n'y verra qu'une succession de scènes érotiques entrecoupées d'accidents automobiles. Pourtant, une revoyure attentive permet de révéler toute la richesse du film, notamment l'absence de vulgarité ou de complaisance dans une peinture au scalpel des rapports ambigus entre l'homme et la machine de notre ère de technologie avancée. Obsédé depuis toujours par la fusion entre la chair et le métal, Cronenberg nous offre un film totalement abouti, doté de scènes incroyables comme la reconstitution "live" de l'accident de James Dean, qui refuse tout compromission, et qui peut se lire comme une épuration définitive des thèmes et des obsessions du metteur en scène. Le film nous touche et nous dérange au plus haut point. Les interrogations qu'il pose constamment en filigrane, sur le devenir de notre sexualité et de nos fantasmes, en font une projection des angoisses et des remises en questions existentielles, liée à notre civilisation hyper-mécanisée.
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eXistenZ
On retrouve dans eXistenZ le penchant morbide du réalisateur pour les monstruosités scientifiques, les masses de tissus vivants déformées ou les connotations sexuelles à gogo, et laisse parfois penser qu'il est un peu le "best-of" des films passés du réalisateur. Des amateurs d'une nouvelle forme de jeu vidéo sont reliés à un monde virtuel, grâce à une console appelée "pod" qui ressemble à un fœtus, et se connecte au système nerveux du joueur au travers d'un "bioport", une sorte de sphincter artificiel percé à la base de la colonne vertébrale du joueur. La démonstration du tout dernier jeu d'Allegra Geller (Jennifer Jason Leigh) tourne court lorsqu'un fanatique du réel, opposé au jeu, intervient pour tenter de la tuer. La trame du film est basée sur la confusion entre la réalité vraie et la réalité virtuelle représentant un monde ultra réaliste. En jouant sur les codes et stéréotypes du jeu vidéo comme les missions données, les personnages ou les éventuels bugs, le film aborde le thème des modifications que le jeu peut opérer sur notre appréhension de la réalité. La réalité virtuelle transgresse les tabous de la folie, et la reconstitution d'un univers remanié par ses propres fantasmes revient à assumer une expérience fondamentalement schizophrénique. Sur le plan formel, Cronenberg a choisi de créer le monde virtuel sans avoir recours aux images de synthèse, en se fiant à la syntaxe cinématographique classique pour susciter l'étrangeté. eXistenZ déroute par sa mise en abyme constante, et finit par offrir une vision intéressante et critique du cyberpunk.
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A HISTORY OF VIOLENCE
Sorti en 2005, A History of Violence marque le nouveau "style Cronenberg" que ses détracteurs reprocheront en parlant d'un style "auteurisant". Les monstruosités ne sont plus issues de déformations médicales ou d'expériences occultes, mais naissent sous une forme plus psychologique. Tom Stall (Viggo Mortensen) est un citoyen paisible d'une petite ville dans l'Indiana, patron d'un petit restaurant, bon père de famille et bon mari. Un soir, deux tueurs font irruption dans son restaurant, s'apprêtant à commettre un massacre. En quelques fractions de secondes, Stall les abat avec une dextérité surprenante. Le fait divers fait la une des médias, la fierté de sa famille, et le propulse au rang de célébrité locale et nationale. Alors qu'il tente de retrouver une vie normale, Fogarty, un mafieux partiellement défiguré, et ses complices débarquent dans son petit restaurant. Ils prennent Tom, qu'ils ont vu récemment à la télévision, pour un de leurs anciens complices qui leur a fait faux bond, mais Tom nie... Les deux tueurs du début du film sont une véritable allégorie de la violence pure et gratuite. Par leur rencontre avec Tom Stall, ils sont les déclencheurs de l'intrigue qui suivra. Cronenberg ouvre ainsi son film par un long plan séquence, en travelling latéral, détaillant la façade paisible d'un petit motel de l'Amérique profonde, puis le réalisateur montre ce que la caméra tenait alors hors champ: les cadavres des gérants, abattus par les deux tueurs à l'intérieur de ce même établissement. L'image peut en cacher une autre comme un personnage peut dissimuler une autre identité. Cronenberg brosse le portrait d'une violence en puissance: la violence de tueurs sans scrupules, la violence intérieure de Tom Stall ou la violence qui apparaît chez un citoyen ordinaire. Le film met en avant la duplicité de l'Amérique profonde, entre normalité et violence cachée. En anglais, "to have a history of violence" signifie "avoir un passé violent" (on dirait aussi "avoir un casier judiciaire"). Le réalisateur joue donc sur l'ambiguïté de son titre, entre une histoire violente, un passé violent et une Histoire de la Violence.
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EASTERN PROMISES
Les Promesses de l'Ombre (Eastern Promises, 2007) raconte l'histoire d'une sage-femme (Naomi Watts) qui tente de retrouver la famille d'un nouveau-né orphelin, en s'aidant du journal intime de la mère, écrit en russe. En remontant la piste de l'ouvrage elle rencontre un apparemment paisible propriétaire d'un luxueux restaurant, Semyon, qui est en fait un redoutable chef de gang. Le document qu'elle possède va lui attirer de gros problèmes. Si le film est relativement mineur par rapport à la filmographie précédemment citée de David Cronenberg, il n'en reste pas moins une œuvre de maîtrise technique, singularisée par l’étrange et inquiétante toile de fond constituée par une Tamise grisâtre et de sombres docks londoniens. Hormis quelques scènes sanguinolentes dont une mémorable aux bains turcs, cela reste un thriller simple et linéaire (Cronenberg a d'ailleurs toujours raconté ses films de cette manière si l'on excepte les "flashs" du John Smith de Dead Zone). Malgré le talent du réalisateur et la présence de quelques-unes de ses obsessions, plutôt sous forme de références à l'identité ou du morcellement des corps, voire du corps comme œuvre d'art, cette histoire de Mafia russe peine à devenir vraiment prenante, là où A History of Violence était diaboliquement parfait dans sa démonstration et sa réalisation sobre. La faute peut-être à un scénario vraiment trop éloigné des obsessions du cinéaste.
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Je n'ai pas vu ni M Butterfly (1993) ni Spider (2002). L'un par manque de temps, l'autre par manque d'envie, mais j'éditerai ce topic dès le visionnage de l'un ou l'autre, ou des deux à la fois. ;)
Dernière modification par Metal Rider le 22 nov. 08, 15:56, modifié 2 fois.
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Watkinssien
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Re: David Cronenberg

Message par Watkinssien »

Ce qui est passionnant chez Cronenberg, c'est cette volonté d'imager des obsessions fortes mais aussi éminemment personnelles, c'est-à-dire qu'elles n'appartiennent qu'à lui, qu'à ses pensées les plus intimes et qu'avec ces éléments il parvient à les rendre accessibles et compréhensibles, grâce à une formidable volonté de les enrichir par-delà des scénarios transcendés par des mises en images singulières et dérangeantes, marquant parfois fortement les neurones du spectateur. Ses oeuvres à connotation fantastique qui témoignent de la majorité de sa filmographie sont les plus typiques, mais ce sont ces deux derniers films en date, A History of Violence et Les promesses de l'ombre, qui me passionnent le plus, car il arrive à imbriquer des thématiques récurrentes par la subtilité de ses mises en scène à travers des apparences plus sages et traditionnelles.
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AtCloseRange
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Re: David Cronenberg

Message par AtCloseRange »

C'est bien gentil mais qui a envie de lire un truc pareil.
Encore un qui n'a pas lu la charte :?
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k-chan
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Re: David Cronenberg

Message par k-chan »

AtCloseRange a écrit :C'est bien gentil mais qui a envie de lire un truc pareil.
Encore un qui n'a pas lu la charte :?
Allons ! Pas sympa après le mal qu'il s'est donné, avec en plus un petit travail de mise en page pour rendre le tout plus agréable. (Major Tom il me semble)
Et je ne vois pas trop le problème, c'est comme une chronique ou un dossier, si tu n'as pas envie de lire, tu es libre (à moins que ce soit ironique). Perso, ne connaissant encore que très mal Cronenberg (réalisateur qui m'intrigue), ça m'intéresse, donc je prendrais le temps de lire ça. :)

J'aime beaucoup La mouche, sinon.
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AtCloseRange
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Re: David Cronenberg

Message par AtCloseRange »

k-chan a écrit :
AtCloseRange a écrit :C'est bien gentil mais qui a envie de lire un truc pareil.
Encore un qui n'a pas lu la charte :?
Allons ! Pas sympa après le mal qu'il s'est donné, avec en plus un petit travail de mise en page pour rendre le tout plus agréable. (Major Tom il me semble)
Et je ne vois pas trop le problème, c'est comme une chronique ou un dossier, si tu n'as pas envie de lire, tu es libre (à moins que ce soit ironique).
ça l'était un poil.
Depuis le temps que ça me chatouillait...
kerala
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Re: David Cronenberg

Message par kerala »

Très bonne filmographie de Cronenberg, j'ai tout vu à part les 3 premiers que tu cites. Dommage pour le demi-ratage de son dernier film (Les Promesses de l'Ombre) qui aurait pu être une réussite avec une fin différente. Là ont à droit à un petit film de gangster maniéré avec ici et là des scènes époustouflantes.
Sinon juste deux mots sur existenz qui est intéressant mais pas extraordinaire.
Le cinéma, ce nouveau petit salarié de nos rêves on peut l'acheter lui, se le procurer pour une heure ou deux, comme un prostitué.

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mannhunter
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Re: David Cronenberg

Message par mannhunter »

J'aime bien sa filmo 70's et 80's (sauf FAST COMPANY :mrgreen: ) mais certains de ses derniers opus sont décevants (HISTORY OF VIOLENCE :cry: )...il tourne bientôt un film d'espionnage avec Denzel Washington.
Mes préférés: DEAD ZONE,CHROMOSOME 3 et VIDEODROME.
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Major Tom
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Re: David Cronenberg

Message par Major Tom »

Edité: j'ai rajouté le sondage que j'avais oublié comme un...
Comme il n'y a que 15 possibilités de vote, j'ai retiré Fast Company de la liste ; c'est un peu un hors-série ce film... Pas de regrets? :)

Personnellement, je ne sais pas pour lesquel voter, si je devais choisir là maintenant, je dirais La Mouche et demain peut-être Le Festin Nu. J'aime beaucoup l'intégralité de sa filmographie, comme vous avez pu le voir, à l'exception de Eastern Promises pour les raisons évoquées. Et puis il me reste à voir M Butterfly et Spider...
mannhunter
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Re: David Cronenberg

Message par mannhunter »

Major Tom a écrit :Edité: j'ai rajouté le sondage que j'avais oublié comme un...
tu nous refais un topic dans ce style pour De Palma? :) 8)
Jordan White
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Re: David Cronenberg

Message par Jordan White »

Je dirais que mes préférés sont les suivants

1) Crash
2) Faux Semblants
3) Dead Zone
4) La Mouche
5) Chromosome 3

Je n'ai pas vu Le festin nu, Videodrome, Les promesses de l'ombre (que j'ai très envie de découvrir), Mr Butterfly
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Je vote pour Victoria Romanova
Joe Wilson
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Re: David Cronenberg

Message par Joe Wilson »

Un de mes réalisateurs essentiels. L'attrait et la répulsion de la chair, la fascination auto-destructrice et derrière une rigueur viscérale, sèche, une sensibilité magistrale qui dépouille les relations humaines, à l'image du sommet Faux semblants dans sa tristesse insondable. Et je suis le cinéaste jusqu'au bout, à travers le portrait de Mortensen, corps absorbé par sa rigidité et sa déchéance dans Eastern Promises.
Je suis en train de reprendre sa filmographie donc voici des avis :

M Butterfly

Un film d'une immense dureté. Par beaucoup d'aspects frère jumeau de Faux semblants, il contient également un final d'une âpreté et d'une violence éprouvantes. Mais la sensibilité est ici plus distanciée, le ton est amer, mortifère. Toute la partie française semble contempler des figures mortes, asséchées.
Cronenberg, en enlevant tout mystère (les traits de Song Liling dévoilent rapidement la vérité), s'attache à la description d'une illusion, d'un déni, né d'une quête insensée. Gallimard ne voit que ce qu'il veut voir, se manipule lui-même dans une course à l'abyme. Les enjeux de pouvoir, le balancement Occident/Orient rendent plus désespérée une recherche personnelle qui ne peut qu'être destruction. Jeremy Irons tient un rôle d'une grande finesse, abrupt, sec, il brouille les pistes de son personnage, laisse des incompréhensions face à un engrenage terrible.
Cronenberg livre une mise en scène d'une grande sobriété, fouille les visages tout en creusant un trouble, des doutes. Les motivations ne sont jamais complètement percées, et les deux protagonistes, dans leur tragédie, gardent cette dignité qui naît de leur richesse, de leur fragilité insaisissable.
Le récit perd un peu de sa force dans sa seconde partie, étouffante, mais gagne en cohérence ce qu'il perd en intensité. La fuite en avant des dernières minutes n'est plus qu'un aboutissement inévitable, un sacrifice solitaire.

eXistenZ

De très belles séquences, un trouble calmement distillé, à travers des thématiques visuelles à la fois ludiques et effrayantes. La perception d'une réalité fuyante offre de beaux développements. Cronenberg se fait plaisir, joue avec la dépendance de ses protagonistes. Le corps est malmené, déchiqueté, incapable de représenter une certitude, une personnalité.
C'est un exercice de style soigné et souvent brillant quoique parfois un peu touffu et caricatural dans sa dérision. Cronenberg reste à distance des personnages, incarnations figées. Il touche au grotesque en conservant une énergie créative, une euphorie face à la jouissance, la perte de soi recherchée par Allegra Geller.
Très solide mais un peu frustrant.
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Nestor Almendros
Déçu
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Message par Nestor Almendros »

Le maniaque du rangement n'a pas pu résister (je ne sais pas ce qu'il m'a pris :oops: ).

Voici les liens vers les topics des films du réalisateur et des avis glanés dans les topics "notez les films" :fiou:

FRISSONS
John Constantine (le 19 octobre 2003) a écrit :Tout comme avec Rage [au thème à peu près identique], Cronenberg nous livre un bon film d'horreur avec un budget riquiqui (rikiki?) et peu d'effets. Première oeuvre de Cronenberg, mais on se retrouve en terrain de connaissance: un parasite sexuel - "mélange de maladie vénérienne et d'aphrodisiaque" dixit un personnage - fout le bordel dans un immeuble en poussant ses occupants à une frénésie d'amooourrr. Ca rappelle fortement Rage puisqu'il s'agit de personnages en quête de contact charnel, de proximité mais désignés comme des monstres [le générique de Frissons s'ouvre sur une vidéo de présentation de l'immeuble genre les maisons Catherine Mamet et introduit d'emblée la critique par Cronenberg du conformisme]. On parle aussi d'opérations ratées, de sexe... j'ai l'impression de réécrire mon post sur Rage: un personnage résume le film en affirmant que "tout est sexuel, respirer c'est sexuel et même exister est sexuel". Les apparitions du parasite - une sorte de limace- produisent leur petit effet et le final semble une grosse moquerie de l'idéal de grande partouze chez les hippies.
Bon, je préfère Rage (en gros c'est Barbara Steele dans Frissons contre Marilyn Chambers dans Rage) , mais c'est un bon premier film qui contient déjà les 3/4 de son univers.
6,5/10
réponse de Jordan White a écrit :Un bon film qui est assez proche de la thématique de Rage, mais qui n'en a pas toute la puissance, aussi bien visuelle que narrative. Je prefère donc Rage et surtout Marylin Chambers crève l'écran et confirme le fait qu'elle est une actrice et pas seulement une fille venue du X qui fait de la figuration. Dans une interview filmée ( L'horreur selon Cronenberg), le cinéaste avouait que l'interprétation de son actrice était très bonne et qu'elle portait le fim sur ses épaules.
réponse de Brice Kantor a écrit :Frissons, c'est carrément un de mes Cronenberg préférés, et c'est clair que là plupart de ce qu'il y a dans son cinéma est déjà contenu dedans... J'ai plus de mal avec Rage, ou tout est beaucoups plus centré autour du personnage de Chambers (peut-être un certain cahier des charges du film d'exploitation finalement) c'est plus unidimensionnel que le précédent, plus limité...
Frissons: 5,5/6
Rage: 4/6
réponse de John Constantine, toujours le 19 octobre 2003) a écrit :Je ne crois pas que le casting de Chambers soit une volonté de Cronenberg de faire dans la pure exploit' même si nom était assez porteur - sur le conseil d'Ivan Reitman, pour mieux le vendre. Frissons n'a pas de persos intéressants auxquels se raccrocher... Rage est en ce sens + équilibré en se centrant sur Chambers, + le film rajoute davantage de dimensions que Frissons: la tentation d'un état policier qui peut tt se permettre et te jeter à la poubelle, + de suspense que Frissons et Chambers est un personnage + intéressant, assez touchant dans sa euh, fragilité et son impuissance face à ce qu'elle provoque.
O'Malley (le 12 avril 2005) a écrit :Un coup d'essai mais un coup de maître que cet excellent film d'horreur où toute la thématique cronenbergienne est déjà là, de la dégradation du corps, de l'obsession organique et et de la perversion sexuelle...Le film est intelligent, angoissant à souhait et le final est superbe...
Ah, que le cinéma fantastique américain des 70's était passionnant...
Spongebob (le 26 mai 2005) a écrit :Voilà un film qui porte bien son nom ! Chaque apparition des petits parasites qui entrent ou qui sortent des corps fait réellement froid dans le dos. Les effets spéciaux trés convaincants et l'aspect presque documentaire des images rendent le film encore plus horrifique. Malgrés un trés petit budget (deux semaines de tournages) l'ambiance est vraiment réussie. Et même si les acteurs ne sont pas extraordinaires, le scénario ne manque pas de subtilité et parvient à maintenir la tension jusqu'à la scène finale. Cronenberg s'inscrit ici dans la lignée de Romero en parvenant à introduire une critique de la société dans un fillm d'horreur basique. Et puis tous les thèmes qu'il développera par la suite apparaissent déjà dans cette première oeuvre trés prometteuse.
7/10
Max Schreck (le 25 novembre 2005) a écrit :Enfin vu ! J'y allais plein d'indulgence persuadé que ça allait être criant d'amateurisme, or quelle ne fut pas ma surprise de me retrouver face à un excellent film d'horreur plutôt brillamment troussé. Le plus remarquable étant encore une fois le côté visionnaire de Cronenberg. Toutes ses thématiques sont là, plus qu'en germe (savants fous, pulsions sexuelles déviantes, maladie et transformation du corps, jusqu'à un crash automobile !). Fortement marqué par le cinéma de Romero, Shivers réjouit également par sa dimension satirique : on observe comment un immeuble, fleuron de la société moderne, se détraque, jusqu'à une conclusion digne des meilleurs romans de SF apocalyptiques. On pourrait d'ailleurs y voir aussi l'influence de J.G. Ballard, déjà, dont l'excellent roman I.G.H présente de nombreux points communs.

RAGE
John Constantine (le 25 septembre 2003) a écrit :Dans le genre film d'horreur pas cher - Romero, Prince des ténèbres - le film fonctionne très bien: le grain très 70's du film et les maquillages des victimes de l'épidémie font leur effet. Bon, ensuite, des tonnes de thèses ont été écrites sur la question, alors je passerai brièvement sur ce qu'on trouve sous ce film, à savoir des thèmes tjrs actuels: le corps trituré, manipulé, puis jeté [l'opération de Rose puis la scène finale], la contamination, la répulsion/fascination du corps et la tentation policière de l'Etat.
Dans les bonus du dvd, Serge Grunberg rappelle combien la présence de Marilyn Chambers - avec tout son bagage X - apporte un sup de chair et de sens au film, soit l'image d'une actrice X qui attire/révulse les puritains. Le personnage qu'elle incarne ne demande qu'un peu de chaleur [humaine ou animale], de contact, jusqu'au point de la toxicomanie mais elle apporte la mort. Ironiquement, le rôle de cette femme ayant des problèmes avec son corps devait être tenu par Sissy Spacek, qui se rattrappera plus tard avec Carrie [dont on aperçoit une affiche dans Rage].
7/10
Major Tom (le 10 octobre 2006) a écrit :Cronenberg fait son hommage à Romero dont il apprécie les films. C'est un peu sa Nuit des Morts Vivants, version virus qui contamine une population. Ayant un peu trop connu les hôpitaux, je suis mal à l'aise dès les premières scènes se déroulant dans un institut de chirurgie esthétique. Cronenberg est également très bon scénariste, la trame est à peu près la même que Frissons, seule la fin diffère. Je préfère d'ailleurs celle de Frissons, plus sombre.

CHROMOSOME 3
Colqhoun (le 1er juin 2004) a écrit :3ème long métrage de Cronenberg, ce film se penche sur l'histoire d'une nouvelle forme de thérapie psychologique visant à faire ressortir ses peurs, sa haine, ses émotions sous forme de pustules, excroissances et autres manifestations de ce type.
En fait, ça me gonfle d'écrire beaucoup. Je voulais juste dire que j'ai énormément apprécier la manière dont Crocro traite son sujet, prenant le temps de s'arrêter sur chaque thème, sans pour autant les souligner vulgairement. Le film se pose donc des questions sur les théraphies mais surtout (enfin, c'est ce que je pense), sur la famille en elle-même et les difficultés d'un mariage raté et de ce qui s'en suit, avec les conséquences que cela a sur l'entourage -ici exagéré à l'excès, en faisant mourir divers protagonistes par ce qui a été engendré de la rage et de la haine de la mère.
Un film, au final, très intéressant, malgré le fait que les thèmes traités ne me touchent pas autrement, me faisant ressentir non pas de l'ennui, mais un sentiment d'inintérêt du sujet. Mais j'ai tout de même bien apprécier.
Max Schreck (le 20 juillet 2004) a écrit :Si je ne vais pas jusqu'à le ranger parmi mes Cronenberg préférés, ce film reste quand même la première grande réussite de son auteur. C'est passionnant de constater la fidélité qu'il a pour ses thèmes liés à la chair, à la mutation et aux pulsions humaines. L'ayant revu en sachant que de nombreux éléments autobiographiques avaient été inclus dans le scénario, l'histoire y a révélé sa pleine richesse. On est complètement ahuri par la violence des situations qui, au-delà des seuls éléments fantastiques, sont d'abord ceux d'un père qui se débat en pleine période de divorce pour conserver la garde de sa fille, la protéger du traumatisme d'une telle situation. On est en effet vite épuisé par le flot de péripéties qui s'abattent sur le personnage (l'action du film ne doit pas s'étaler sur plus de 3 jours). Mention spéciale aux interprétations absolument fascinantes d'Oliver Reed en savant fou cronenbergien, et Samantha Eggar en mère indigne.

La mise en scène est brillante, sèche dans les scènes de violence, fluide quand elle suit le personnage du père, très belle photographie également, qui fait péter les couleurs chaudes dans les scènes intérieures, tandis que les extérieurs nuits prennent un aspect fantasmagorique (il y a un vrai côté conte dans ce récit). La musique d'Howard Shore, avec ses sombres arpèges aux accents parfois Hitchcockiens (Psychose précisément), apporte beaucoup à l'ambiance déséspérée du film. Le dernier quart d'heure, sommet du film, offre un dénouement absolument terrifiant, spectaculaire et cohérent qui ne laissera pas le spectateur apaisé avant longtemps.
Coxwell (le 13 septembre 2005) a écrit :Je commence ma quête initiatique de l'univers Cronenberg avec ce film et autant le dire tout de suite, cela s'annonce plutôt bien. Un sujet passionnant abordé avec style et audace. La manière dont Cronenberg dépeint la science et la société -ses rapports - est particulièrement intéressante. On retrouve cette obsession scientifique jusque dans la mise en scène, et ces longs plans sur les bâtiments à l'architecture typé 70", à savoir celle du rationalisme néopositiviste. (successeurs de Le Corbusier).
Cette histoire d'extériorisation des émotions guidées par une sorte de télékinésie est agréable, et originale, l'horreur ne venant pas spécialement de phénomènes extérieurs aux hommes, mais de leur propre inconscient, de leur chair. L'héroïne anglaise au physique si particulier est convaincante, tout autant de la BO signée Howard Shore..
Ratatouille (le 28 novembre 2005) a écrit :Revu The Brood de Crocro...et je l'ai très fortement réévalué !
Ca faisait quelques temps que je ne l'avais pas vu, mais j'ai été impressionné par la violence physique et psychologique qui émane de ce film.
Spoiler (cliquez pour afficher)
(mention spéciale à la scène du meurtre de la maîtresse d'école)

Je sais bien que ce sont des éléments que l'on retrouve dans toute la filmographie de Cronenberg, mais les vagues souvenirs que j'avais de ce film étaient plutôt mitigés. J'en avais une image de film gentil (désolé, je ne trouve pas de terme plus approprié).
Donc moi qui le considérais autrefois comme un opus mineur dans la carrière du réalisateur canadien...eh bien ce n'est plus du tout le cas maintenant ! :D
réponse de Max Schreck (le 28 novembre 2005) a écrit :Je crois que la filmographie de Cronenberg a ceci de passionnant que chaque film revu donne envie de le réévaluer à la hausse (en tous cas, c'est ce qui se passe chez moi). Sur ce titre, je me permets de te renvoyer à l'étude de l'ami Cinétudes, très éclairante et qui a vraiment enrichi ma lecture du film :
http://www.cinetudes.com/THE-BROOD-Chro ... 9_a29.html

SCANNERS
Colqhoun (le 9 juillet 2004) a écrit :Comme toujours chez Cronenberg, on a droit à un film de qualité. Mais il y a un point que je me dois de préciser, c'est qu'il s'agit du fait que les thématiques traitées par le canadien me laissent froides. Ses "expériences" sur le corps humain, ses métamorphoses, ses fusions sont certes bien souvent effrayantes et impressionantes, mais jamais je ne me sens concerné par ce qui se passe. Dans ce film-ci, les scanners ont ce pouvoir terrible, concluant le film dans un duel psychique incroyablement violent et malgré tout cela, je reste relativement en retrait n'étant qu'à moitié passioné par ce qui se passe...
Cela m'a aussi frappé l'autre jour lorsque j'ai regardé The Fly. Malgré l'incroyable émotion qui se dégageait à la fin, tout l'aspect scientifique, de manipulation du corps ne m'intéressait pas outre mesure.
Du coup, je n'ai pas de véritable attachement à l'oeuvre de Cronenberg.
MJ (le 4 juillet 2006) a écrit :Un film à l'ambiance étrange et qui se révèle assez angoissant.
Avec un budget franchement riquiqui Cronenberg livre quelque chose de tout à fait digeste, où une ambiance malsaine arrive à s'insinuer. Et si ce n'est de loin pas son film le plus personnel, on ressent déjà fortement la patte de son cinéaste. Une musique très ancrée dans son époque mais étonnament assez efficace, une mise en scène aboutie, plutôt convaincant en général.
Spoiler (cliquez pour afficher)
La révélation finale voulant Cameron Vale et Darryl Revok soient frères, préfigure déjà Faux-Semblants et son atmosphère étouffante. Seulement si le film avec Jeremy Irons, bien plus ambigu, se rattache plus au mythe du Narcisse, on est plus ici dans une relation évoquant Eros et Thanatos, mais bon là je m'égare.
Si le jeu trop crispé de Stephen Lack m'a plutôt ennuyé, toujours un plaisir en revanche de retrouver cette bonne vieille trogne de Michael Ironside, qui reste LA meilleure raison de regarder ce film.
Autre légére déception au rayon plaisirs coupables, je m'attendais à plus de têtes qui explosent. :(

topic sur VIDEODROME
et un débat engagé par Cinétudes
Madmartigan (le 19 octobre 2003) a écrit :j'ai revu dernièrement ce film de D.D, et je vous avoue bien volontier que cela m'a tout retourné...
Je crois que ce film est le plus sous estimé de cronenberg, car quand on y pense, il amène beaucoup de réflèxions et d'idées nouvelles.
En effet, l'idée de base est, pour moi (bien entendu) terrible ! Les images de votre téléviseur transforment votre perception et vous voila dans un monde irréel, violent (l'homme étant un animal sur 2 pattes, tout au plus) et, ce qui est malsain, foncièrement attirant.
Imaginez vous devant votre téléviseur, regardant ces mutilations et meurtres et vous vous apercevez que vous aimez ça...Brrr....
J'ai beaucoup aimé le coté chair/machine, très cyber reality (waow, chuis in !) avant l'heure.
Et puis cette fin, ou le héros, le grand james wood (en tout cas dans ce film...) se rend compte de son inhumanité, étant plus machine qu'homme, décide de se suicider, ça ma franchement retourné.
Bref, vraiment c'est pour moi un bon film, du genre qui vous tracasse encore le soir chez vous après le ciné.
Je vous le conseille !
Stalker(le 24 juillet 2004) a écrit :Je sais que beaucoup adorent ce film, mais perso il ne m'a pas passioné... Ca aurait pu être une métaphore fantastique sur le pouvoir de la télévision sur les esprits... Ca aurait pu être un film qui interroge le spectateur sur son attirance pour la violence, le sexe, le snuff (façon Tesis ou Funny Games). Mais même si ces pistes sont lancées, je trouve que ça ne va pas beaucoup plus loin... Reste un film fantastique qui ne m'a pas tenu en haleine où les effets visuels sanguignolants me semblent finalement assez vains. Mais je crois surtout que c'est pas trop mon genre de cinéma.
6,5/10
Cinetudes (le 16 septembre 2004) a écrit :le DVD de Criterion est absolument parfait et m'a permis de littérallement redécouvrir ce film que je connais pourtant par coeur.
Une oeuvre d'une puissance incoryable alliant délire métaphorique visuel (et extrémement prégnant), une structure d'aller retour entre hallucinations et réalité purement dickienne, une étude poussée sur le pouvoir du media télévisuel et une amibiance à la limite de la satire (critique de l'endoctrinement, humour quasi constant) qui rajoute encore une dimension à ce film décidément génial.
Je sais je suis loin d'être impartial mais bon :oops: !!
Décidément ce film me retournera toujours autant et les effets spéciaux de Rick Baker, l'imagination fertile et la talent indéniable de metteur en scène et de directeur d'acteur de Cronenberg forment une cocktail résolument passionnant dont on peut explorer les diverses ramifications pendant longtemps.
Personellement c'est le film qui m'a fait basculer dans la cinéphilie la plus débridée et je suis heureux de voir qu'au fil des visionnages son pouvoir sur moi ne fait qu'augmenter.
A part dans les autres films de Cronenberg je ne connais aucune utilisation aussi intelligente, pregnante, impressionnante et dérangeante des effets spéciaux qui sont parfaitement intégrés au récit.
A la rigueur seul le travail conjoint de Bottin et Carpenter sur The Thing arrive à un tel niveau de fusion entre le scénario, la mise en image et les effets spéciaux.
Bon j'arrête la car sinon je vais vous saouler de toute façon j'en reparles le mois prochain dans Mad Movies (pas taper) et sur cientudes.com de façon beaucoup plus complête.
Stefan 8) qui ravi va aller dévorer les suppléments du sublime dvd criterion.
réponse de Solaris a écrit :Un film que j'adore également, mais pas autant que toi, hien :lol: :wink:
Pour ma part, le film arrive facilement à entraîner le spectateur grâce à la scène d'ouverture: on démarre en douceur, avec un seul personnage, le tout dans une atmosphère intimiste malgré l'impression de pénétrer dans un univers "underground" et malsain (un détail à priori anodin comme le générique écrit en rouge a son petit effet il me semble).
Cet univers étrange exerce un pouvoir d'attraction plus grand encore lors des séquences suivantes, notamment lorsque James Woods découvre en même temps que nous cette fameuse cassette; l'identification au personnage principal est ainsi acquise, et l'aventure commence...
Coxwell(le 12 octobre 2005) a écrit :Quelle claque ! :shock:
Est-ce enfoncer une porte ouverte que de dire que le film de Cronenberg est visionnaire ? Très certainement. La télévision est ici instrument de contrôle, de manipulation; elle exerce un pouvoir magnétisant, ensorcelant sur des spectateurs qui la boivent comme le calice de la messe. Cronenberg ne s'y trompe pas d'ailleurs, puisqu'elle est chez lui un moyen de thérapie, un lieu de confessionnal. Instrument dangereux, abrutisant qui retourne comme un gant sa cible, quitte à lui faire dire et faire tout et son contraire (en l'occurence ici Max Renn). On pourrait en discuter sur de longues pages tant les thèmes sont riches, et la mise en scène audacieuse. Le fim est à la mesure du petit écran : fascinant. La photographie est très belle et très détaillée, la musique d'Howard Shore toujours aussi adéquate ; ni anecodtique, ni exhubérante, elle n'est pas là pour appuyer démesurément le film, juste pour souligner ici et là certaines séquences. Un grand film servi par des acteurs toujours aussi bien dirigés par le canadien. James Woods est parfait en producteur télé un peu confus face à des personnages environnants tous plus éngimatiques les uns que les autres.

PS: A ceux qui aimeraient le découvrir, je recommande très fortement la somptueuse édition de l'éditeur new-yorkais Criterion qui rend pleinement hommage à ce film. Elle propose une très belle image, accompagnée de suppléments très intéressants le tout dans un packaging très original.
Joe Wilson (le 16 juin 2007) a écrit :Cronenberg fascine dans son exploration bouleversante du corps, en interrogeant ses limites et son dépassement tout en questionnant notre propre regard. Sa réflexion sur le pouvoir de l'image et ses efffets dans la vie quotidienne est évidemment d'une lucidité impressionnante, tout comme sa vision des troubles et de la contamination de la personnalité. C'est l'émergence d'une horreur viscérale, qui n'est finalement que le reflet de la détresse l'individu face à une indentité incertaine, mutante, désespérée.
Le foisonnement des thèmes et la durée très resserrée du film laissent parfois une impression un peu touffue ou confuse mais ce n'est pas grand chose face à la pertinence de l'ensemble. Il reste avant tout le souvenir d'un délire visuel étrange et mémorable, magnifié par la performance de James Woods. Tous les évènements sont perçus par son regard, son cauchemar devient le notre et son visage anguleux, taillé à la serpe n'a jamais autant fait merveille.

LA MOUCHE
Joshua Baskin (le 13 septembre 2003) a écrit :Finalement ce remake de la mouche noire s'éloigne pas mal de l'original.
Autre temps, autre moeurs, ici nous ne sommes plus en présence d'une famille unie mais d'un célibataire qui ne vit que pour la science. L'histoire est donc bien plus noire que dans les 50s et s'éloigne de la pure serie B.
La passion de Cronenberg pour les corps semble ici une prémisse de ce que sera Crash, tout comme son goût pour filmer les transformations humaines et ses méandres.
Les SFX sont très réussis mais lors de cette seconde vision je n'ai pas eu le mal de coeur que j'avais eu quand je l'avais vu vers l'âge de 15 ans :lol:
8,5/10
Ratatouille (les 21 et 23 mars 2006) a écrit :Tiens en parlant de Cronenberg, j'ai revu hier soir pour la 68ème fois The Fly...et alors là, le film m'a touché comme jamais. La dernière demi-heure, véritable sommet d'émotion, m'a littéralement terrassé. C'est véritablement hier soir que la dimension théâtrale et tragique du film m'a autant sauté aux yeux. Finalement, le fait que Cronenberg ait travaillé en collaboration avec Shore pour l'élaboration d'un opéra tiré du film, me paraît totalement cohérent.
Bref...immense film, et chef-d'oeuvre absolu.
120/10

Je tiens juste à préciser que le film de Crocro fait partie de mes 5 films préférés. Je l'ai vu beaucoup de fois dans ma vie (le "68 fois" était exagéré, j'avoue....mais y en a eu beaucoup quand même), il me bouleverse à chaque fois. Mais là, lors de cette dernière vision, j'y ai vu de nouvelles choses : ma grille de lecture a changé car je pense être un peu plus matûre qu'il y a quelques années, mais également parce que l'oeuvre de Cronenberg m'est de moins en moins inconnue.
Donc incidemment, de nouveaux éléments m'ont été révélés. Et selon moi, c'est même à ça qu'on reconnaît un véritable chef-d'oeuvre : être capable, et ce malgré les multiples revisionnages, de dévoiler encore et toujours de nouvelles facettes.
Et dans le genre, le film de Crocro (je dirais même : "la filmo de Crocro") se pose carrément là.
Colqhoun (le 19 novembre 2006) a écrit :Vu et revu des dizaines de fois, mais première fois sur grand écran, ça fait plaisir. Le film reste encore et toujours impressionant (sfx impec') et les diverses réflexions qu'ils proposent sont toujours autant d'actualité (sur la science, mais aussi sur la transformation humaine et sociale, sur les "masques" que l'on porte, sur notre véritable être caché sous un déguisement humain, etc.. est vraiment fascinante.). Sinon, on a à peu près rigoler de voir deux mamans avec leurs mioches qui devaient avoir entre 8 et 14 ans venir voir ce film (forcément, ils étaient tous traumatisés) et on a un peu moins rigolé de se farcir une vingtaine de djeuns caillera-bouffons-yo-de-merde qui ont passer toute la séance à hurler.
Miss Nobody (le 21 novembre 2006) a écrit :Sur le thème déjà vu et revu (mais toujours aussi captivant) de la belle et la bête, « La mouche » est indéniablement un must : une histoire d’amour impossible et invraisemblable qu’on parvient à comprendre et à partager avec une facilité ahurissante, constellée de scènes toutes plus répugnantes et traumatisantes les unes que les autres. Liant l’émotion et la répulsion, Cronenberg parvient à nous faire passer par tous les états avant de nous laisser scotché au canapé lors d’un final magnifique, bouleversant, irréprochable. Un film qui donne autant la nausée que les larmes aux yeux… et qui mérite sans aucun doute sa place de film du mois !
9/10 (pourquoi pas plus? parceque je suis encore complétement sous le choc!)
Joe Wilson (21 novembre 2006) a écrit :La Mouche est certainement mon Cronenberg préféré (même si je suis loin d'avoir visionné tous ses films). Derrière l'expérience scientifique et la monstruosité, on voit une humanité et ses souffrances, le refus et la peur de l'altérité. C'est un récit déchirant, ne cédant jamais à la facilité et au voyeurisme malsain. Le rejet de toute distanciation contribue à rendre la transformation physique de Jeff Goldblum éprouvante et perturbante. Cronenberg scrute alors la moindre expression de ce corps mutant jusqu'au final tragique d'une puissance rare.

LA MOUCHE et sa suite

LA MOUCHE NOIRE VS. LA MOUCHE

FAUX SEMBLANTS
MJ (le 19 mars 2006) a écrit :Non seulement le plus beau et le plus dérangeant des film du père crocro mais aussi (et surtout) son plus émouvant. Une histoire d'amour complétement barge et hallucinée sert de support à l'accomplissement thématique de toutes les préoccupations du cinéaste. Poignant.
J'ai pleuré.
réponse de Colghoun (le 20 mars 2006) a écrit :Le plus dérangeant ? Non, je ne crois vraiment pas. History of Violence, pour ne citer que lui, est bien plus dérangeant. Le problème de Dead Ringers c'est qu'il part avec un postulat de base déjà bizarre et que du coup, le malaise en est diminué. Alors que dans son dernier film, le fait d'utiliser un contexte simple et auquel on peut s'identifier aisément (à moins que l'on ait un frère jumeau avec qui l'on vive et que l'on soit amoureux d'une nymphomane maniaco-dépressive), contexte dans lequel on fait soudainement surgir un événement imprévisible et d'une violence sans précédent, permet de créer un malaise autrement plus violent et plus déstabilisant.
Parce que pour ma part, si j'ai trouvé Dead Ringers assez bien foutu, je n'ai pas développé tellement d'empathie pour ses personnages et leur histoire ne m'a pas boulversé plus que ça. Je reste convaincu qu'un film sera bien plus dérangeant si il s'inscrit dans une réalité commune, dans un monde de tous les jours, où des monsieur-tout-le-monde se retrouveraient à vivre (subir ?) une situation amenant le malaise. Et c'est d'ailleurs pour cela que plusieurs films de Cronenberg m'ont soit laissés indifférents ou m'ont totalement subjugués (Shivers, the Fly, History of Violence, pour ne citer qu'eux).
réponse de MJ (le 20 mars 2006) a écrit :De manière générale, je suis d'accord, il suffit de jeter un coup d'oeil sur la filmo d'un Polanski pour s'en rendre compte.
Cependant Dead Ringers (et tout le cinéma de Cronenberg!) creuse une veine différente, prenant pour base l'absurdité de l'existence telle que la perçoit l'auteur. En y regardant de près, le film est d'ailleurs très kafkaïen, dans son traitement du corps, de la folie et je vois certains passages comme un hommage à cet écrivain (la bâtisse de l'artiste, où séjourne Claire, outre son parallèle auto-dérisoire avec le cinéma de Cronenberg -"mes oeuvres sont froides en apparences mais puissantes sur le fond"- est pour moi une référence directe au peintre du Procès), enfin là je m'égare.
Pour moi, la peur est plus dépendante du quotidien que le malaise. Et Faux-Semblants, avant de plonger en enfer, prend soin de s'attirer la sympathie du spectateur dans une introduction très rapide, qui amène logiquement à la suite du métrage.
réponse de Truffaut Chocolat (le 20 mars 2006) a écrit :Dans Faux-Semblants, cette mécanique trop bien huilée me fait frémir, car on pressent qu'un grain de sable va enrayer la machine et que celle-ci va complètement disjoncter. Le rythme du film, extrêmement mesuré, précis jusqu'à l'obession rend ce disfonctionnement plus impressionnant encore...
Ce qui fait de F-S le plus kubrickien des films de Cronenberg - que je considère par ailleurs comme le fils illégitime de K.
A la limite, que les personnages soient jumaux ou gynéco, je ne crois pas que ça aie grande importance, ce genre d'histoire pourrait arriver à n'importe qui, même au personnage de son dernier film par exemple... auquel ils ressemblent beaucoup par ailleurs.

M BUTTERFLY

LE FESTIN NU
Spongebob (le 16 mars 2005) a écrit :Un film déroutant par sa narration labyrinthique voir non-sensique (j'essaye encore de m'en dépétrer) mais tellement fascinant dans son esthétique 50's agrémentées d'éléments SF/fantastique du plus bel effet (quelles magnifiques créatures). C'est aussi et surtout une trés belle réflexion sur la création littéraire et l'influence de la drogue sur celle-ci. De quoi me donner envie de lire le livre.
réponse de Cinetudes a écrit :Je viens de relire le roman et heureusement que personne n'a tenté d'en faire une adaptation littérale, non seulement parce qu'il est clair que c'est totalement impossible mais surtout parce que ce livre est le plus violent, dérangeant que j'ai lu (tient justement avec Crash de Ballard).
De nombreux passages sont à la limite si tant est que l'on tente de se représenter mentalement ce que Burroughs nous décrit. Son humour fait vraiment mouche mais est souvent d'une noirceur incroyable qui colle à la peau.
Et décidément Naked Lunch est une "cronenbergisation" :wink: extraordinaire de The Naked Lunch le livre.
Burroughs est de toute façon la référence majeure de Cronenberg et il était logique que les univers de ces deux créeateurs finissent par se croiser un jour et heureusement pour les amateurs cela s'est fait de la plus belle façon qui soit.
EXTERMINATE ALL RATIONAL THOUGHTS !!!!
réponse de Ratatouille (toujours le 16 mars 2005) a écrit :En effet, Cronenberg a su parfaitement "s'approprier" le roman originel de Burroughs, tout en y injectant ses propres thématiques (mutation, fusion des corps, etc), pour nous offrir là une oeuvre aux contours labyrinthiques, à l'ambiance fièvreuse, et portée par un score extraordinaire d'Howard Shore (traversé par les soli d'Ornette Coleman).
Un film déroutant, mais proprement fascinant (la fin ! :shock:).
Johnny Doe (le 22 mai 2005) a écrit :C'est sûr que ça change de la froideur de pas mal d'autres Cronenberg, l'ambiance visuelle feutré façon film noir soigné est à 1000 lieux du style de Crocro. Sinon je m'y attendais un peu, j'ai apprécier, les acteurs sont étonnants et certaines séquences fascinantes (les animatroniques et surtout, le travail sur le son avec ses bruits viscéraux, ces voix rauques, etc...), mais le tout ne m'a jamais transporté, au moins ça m'a plût et ça m'a donné très envie (encore plus quoi) de lire le bouquin de Burrough.
Coxwell (le 28 octobre 2005) a écrit :Je ne sais pas vraiment quoi en penser, du moins pas pour le moment.
J'ai l'impression de ne pas être sorti de cette atmosphère à l'odeur de came, pour le moins très dérangeante. Rares sont les films a laisser cette impression de permanence, de continuité...
C'est très déconcertant, on essaye de se raccrocher du mieux qu'on peut à une once de réalité, mais on y parvient difficilement, alors on se laisse aller, en tombant dans une espèce de spirale, sans que vraiment pouvoir en toucher le bout. Je crois que c'est une vraie expérience cinématographique, et à coup sur le cronenberg le plus expérimental de ce que j'ai vu jusqu'à maintenant.
réponse de Truffaut Chocolat (le 28 octobre 2005) a écrit :Mon Cronenberg préféré. Atmosphère très poisseuse comme tu l'as dit, allées et venues entre réalité et fantasme, mais je dois dire aussi que par moments je trouve ce film à la fois très drôle et terrifiant.
J'aime énormément les deux récits que William Lee fait à Cloquet, d'abord pendant le petit déjeuner puis en voiture (l'homme dévoré par son c*l), qui sonnent d'abord comme des farces...
Coxwell (le 28 janvier 2006) a écrit :J'ai eu l'occasion de revoir au cinéma Naked Lunch de Cronenberg en présence de Serge Grünberg.
Le film se bonifie à chaque vision, tout en étant toujours aussi éprouvant. Le film cérébral par excellence, vicieux, sournois qui pénètre/contamine votre esprit. On cherche à se rattacher en permanence à quelque chose de familier, un peu à la manière d'une musique où l'on cherche les refrains, les structures répétées. On échappe pas à la manipulation et on en ressort vraiment perturbé.
Ouf, papa ours (le 14 février 2006) a écrit :mon coeur balance. C'est assez prenant, bien qu'assez décousu. Mais l'intérêt ne faiblit pas. L'ambiance est remarquablement créée, Cronenberg a une maîtrise bluffante des mondes qu'il transpose. Manque le supplément d'âme qui me feraient trembler 1) d'effroi, 2) de douleur, 3) d'émotion, quoique ce dernier point soit par moments atteints de belle façon avec sa femme. Cronenberg signe un très bon film, mais j'ai eu la triste sensation qu'on n'est pas passé loin du chef d'oeuvre indiscutable. Chié. (je précise que je n'ai lu qu'un quart du bouquin).
CRASH
TROMA (le 3 septembre 2003) a écrit :Enfin découvert avec appréhension ce Cronenberg jamais vu. A vrai dire, je ne voulais pas le voir parce que le bouquin m'avait impressionné (voire horrifié, comme du Burroughs soudain structuré qui ne vous épargne rien) et j'avais du mal à imaginer une adaptation autrement que craspec et porno. Cronenberg a su garder le coté métallique, froid et lumineux du livre, et à remplacé la pornographie brutale et sèche par un érotisme et un fétichisme certes soft mais tellement plus manipulateur. Là ou le livre jetait des fantasmes réalisés en pleine gueule, le film suggère et fascine, et invite même. Finalement, un fabuleux Crocro qu'il faudra revoir pour rejoindre l'avis de Roy.
blaisdell (le 4 juillet 2005) a écrit :C'est mon troisième Cronenberg de vu après LA MOUCHE et FAUX SEMBLANTS; là 0n entre dans la catégorie des films qui divisent farouches adversaires et détracteurs forcenés et de temps en temps ça fait du bien.
Personnellement, j'ai trouvé le film fascinant du début à la fin sur tous les plans: réalisation, photo, interprétation (alors que je ne suis pas sûr d'etre fan des acteurs dans un autre contexte), musique, costruction du scénario.Je n'ai pas lu Ballard mais ici on retrouve Cronenberg et son art inimitable pour filmer le corps humains et ses avatars.
La façon qu'a le film de mêler la fascination pour les voitures (sous un angle neuf et insolite mais profondément juste) et le sexe est d'une fascinante habileté.
Voilà donc le mot clé pour décrire mon sentiment face à ce film qui a priori ne relevait pas de mon cinéma de prédilection -mais ça confirme que j'aime tous les domaines du cinéma- :FASCINANT, vraiment FASCINANT.
Colqhoun (le 21 juillet 2006) a écrit :3ème essai... cette fois-ci j'ai tenu jusqu'au bout... mais c'est pas pour autant que j'ai été franchement emballé. Alors certes, la réalisation du canadien est à tomber et il construit son film avec un sens du montage, de l'élipse des plus fascinants. Malheureusement, à côté de ça il faut se farcir Deborah Kara Unger qui parle à demi-mots du début à la fin en gémissant à chaque fin de phrase (insupportable), Elias Koteas qui rumine comme une vache et roule des yeux pour nous faire comprendre qu'il est fou dans sa tête, James Spader qui passe tout le film le regard hagard ou halluciné avec autour de ce trio quelques autres personnages tous plus atteints les uns que les autres. Autant le dire, ce freak show et ces baises à répétitions dans toutes les voitures les positions possibles m'ont un peu saoûlées. Et je ne sais pas trop où Crocro veut en venir. D'accord, on se farcit encore une fois sa thématique sexe-mort-chair-métal-fusion, d'accord il veut nous faire comprendre que toutes ses personnes qui s'enfilent dans ces bagnoles ne sont en fait que des images symboliques pour signifier les relations humains-machines qui dégénèrent de plus en plus.... mais bon, là pour le coup, c'est un peu le genre de trucs dont je me fous éperduemment. Donc ouais, des qualités cinématographiques... mais pour le reste, y a rien à faire, c'est un univers qui me laisse complètement froid et insensible.
Helward (le 16 octobre 2006) a écrit :Film raté qui ne va pas jusqu'au bout de son sujet. Cronenberg reste en surface, se contente d'aligner les scènes de sexe sans réussir à donner un sens à l'ensemble, pas très aidé en cela par l'atonie des deux personnages principaux interprétés par James Spader et Holly Hunter. Même Vaughan est bien fade comparé au personnage du livre. Il manque une force, une viscéralité qui auraient permis au film de dépasser la simple adaptation des quelques éléments (pré)visibles du roman. Tout celà ressemble davantage à un brouillon théorique, l'illustration clinique d'un affect mécanico-sensuel aboutissant à l'orgasme ne suffisant pas à rendre l'ensemble troublant, provoquant voire fascinant.
Bref, un Cronenberg paresseux.
Mama Grande! (le 28 octobre 2007) a écrit :Pas la grande réévaluation attendue, mais une petite quand même. Le film m'apparaît plus équilibré, moins abscons qu'à la première vision. Maintenant, j'ai toujours l'impression de passer à côté du propos tant la fascination que l'on est en droit d'attendre devant ce genre de films ne vient pas. Cronenberg rompt avec sa première partie de carrière, puisque cette fois la mutation du corps humain n'est qu'une blague. On a l'impression qu'il cherche une vision plus sociologique du monde froid et technologique. Sauf que la rupture ne mène pas à grand chose de neuf, et on en revient aux mutations organiques (voir Rosanna Arquette, qui passe pour une créature à part et pas une simple accidentée de la route). Et là le film souffre de la comparaison avec Videodrome. J'ai en revanche été plus sensible qu'à la première vision au couple Spader - Unger (aaaah!), auquel le dernier plan, très poignant, offre un bel hommage.
Anorya (15 juin 2008) a écrit :Redécouverte totale de ce Cronenberg qui pourtant m'avait non seulement ennuyé mais aussi endormi (j'avoue que j'étais fatigué), il y a quelques années. Avec le recul et l'intégralité de la filmo du maître visionnée (sauf Spider et 2,3 de ses courts-métrages ...), on mesure mieux ce film et oui, c'est bien un film Cronenbergien qui pointe sur de nombreuses choses que je n'avais guère remarqué auparavant. Placé entre le Festin Nu et eXistenZ, l'oeuvre était un peu cachée par les débordements de chair inconnue dont nous abreuvait le canadien mais ces bleus, ces ecchymoses, ces fissures de la chair renvoient parfaitement à l'orifice dans le ventre de James Woods de Vidéodrome...
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Image
Après le vagin-magnétoscope de Vidéodrome, voici la blessure-vagin de Crash. :shock:
Ces tatouages que se gravent Ballard (James Spader halluciné) et Vaughan (Elias Koteas hallucinant), de guidon de voiture et de croix, emblème de la Chrysler, renvoient presqu'aux tatouages mafieux des Promesses de l'ombre même. Quand à l'ambiance, on dirait constamment un rêve éveillé, lointain cousin de Lost Highway par ses noirs, ses couleurs métalliques, l'absence certaine de luminosité et les accidents, très bien filmés par le canadien. Et la musique de Shore où le maestro organise une composition métallique autour de 6 guitares qui jouent presqu'en même temps. Grand film.
4/6

EXISTENZ
Ender (le 22 février 2008) a écrit :A la manière de A History of Violence plus récemment, eXistenZ est un faux film mineur et un vrai grand film. Le début du film déconcerte par l'irréalité de ses situations comme le ferait l'intrigue la plus idiote ; rapprochement improbable des personnages, péripéties mécaniques, mais évidemment on devine le malaise dessous, suggéré par un éclairage blafard qui neutralise, efface presque, tous les décors. Cronenberg pour construire l'identité de son film choisit de représenter un univers sans personnalité cinématographique, explicite l'arbitraire du montage en usant d'ellipses déroutantes, pour en fournir ensuite la justification thématique en entrant au coeur du jeu "eXistenZ" et donc montrer une identité humaine elle-même creuse. A la fin le film multiplie les niveaux de réalité, ou de virtualité, mais les résonances entre ce qu'on croit être (à différents moments) la réalité, et le monde virtuel, achève de représenter l'humain comme déterminé par des objectifs qui lui sont extérieurs, et ne se contente donc pas d'interroger le virtuel, mais la valeur programmatique de l'éducation et l'organisation sociale, ce qui construit l'individu contre son individualité. Le virtuel du futur du film ne serait que le prolongement fictif d'une scénarisation de l'existence qui dans la réalité a déjà la qualité du jeu-vidéo ; et le virtuel n'est qu'une version mimée, grotesque, du réel, et son recours est fait pour échapper des intérêts extérieurs à soi, et en accepter d'autres, peut-être les mêmes sous une différente forme.
Pour représenter la partie virtuelle de son film qui est revendiquée par ses personnages comme telle, les séquences identifiées de jeu, Cronenberg réalise une mise en abyme de la matière fictive qui, autant qu'elle sonde le dialogue contemporain entre le monde du cinéma et du jeu-vidéo, constitue une pure et simple mise en abyme du cinéma, du scenario, du jeu d'acteur et évidemment de la mise en scène. Le témoin de toute cette contamination, orchestrée et peut-être finalement incontrôlée, entre réalité et fiction, est bien entendu chez Cronenberg le corps. Les mutations des modes de représentation et les évolutions de l'interaction entre l'individu et la fiction mènent avant tout vers une mutation de la sexualité (la séduction se vit dans la fiction pour aboutir dans la réalité - ou un autre niveau de fiction...) et donc, du sexe : voilà les personnages dotés d'un nouvel orifice, qui au final est le symbole de tous les fantasmes que le film travaille, l'abandon total de soi, le plaisir organique offert par la technologie... et résume le schéma contemporain du divertissement, servir au moyen du loisir un système libéral dont un fuit la pression dans ce le loisir. Et Cronenberg d'aller plus loin encore en troublant le rapport de force ; ce système contient en lui même sa propre perte morale.
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SPIDER
acidparadouze (le 4 octobre 2004) a écrit :Assez envoutant par moments mais je trouve franchement que ca manque d'interet. Une histoire toute banale apperemment (un homme devient fou suite a un traumatisme de l'enfance).
Mais dans le fond assez incomprehensible, car meme si le "gros" de la trame est expliquée a la fin je ne comprends toujours pas le pourquoi du comment, notamment pourquoi il confond certains personnages.
Si l'epure permet a Cronenberg de donner une ambiance très interessante et intriguante a son sujet, il finit par se complaire a raconter sans rythme une histoire qui finalement est assez banale et sans meme chercher a entrer vraiment dans l'esprit de cet homme.
On voit surtout un gars qui griffonne ses delires dans son coin et revit son passé traumatisant.
Malheuresement a force de ne pas vouloir etre trop explicite, je n'ai eu aucune idée de ce que j'etais sensé comprendre mis à part des banalités ennuyeuses sur la folie(Cronenberg semble jouer au Lynch sans vraiment savoir pourquoi).
Une reussite esthetique et des acteurs impeccables, mais une deception vis à vis du potentiel.
Coxwell (le 13 janvier 2006) a écrit :La représentation de la schizophrénie est particulièrement intéressante. Cronenberg insiste sur le complexe oedipien traditionnel chez ce type de patient, amour de la mère qui se traduit généralement par son meurtre. C'est le déni qui fait suite, ou plutôt une construction visant à "réparer" cet acte.
Ralph Fiennes campe parfaitement ce psychotique remplié sur lui-même, enfermé dans un monde matérialisé par cette toile suspendu, sorte de représentation mentale, de fil scénaristique de sa vie, dont il s'accroche comme pour se protéger.
La mise en scène est chirurgicale. Tout est parfaitement découpé, en usant davantage de plans fixes, plutôt que de longues séquences mouvantes. Cela renforce la sensation d'étouffement, d'enfermement.
Un très bon film, qui repose sur une certaine "collusion" entre le spectateur et le cinéaste dans la construction du scénario.
A HISTORY OF VIOLENCE
MJ (le 17 octobre 2006) a écrit :Au sortant de la salle je n'aurais absolument pas su donner mon avis, ayant pris un pied assez grand tout en étant quand même plutôt circonspect sur bien des points. Maintenant je devrais pouvoir causer du film assez clairement.
Sur la forme, c'est une réussite. Dispositif de mise en scène, superbe photographie, traitement des scènes d'action, un travail "sobre" mais efficace, et p*** ces acteurs! A ce niveau rien à re-dire, mais là où AHOF devient un film vraiment particulier, c'est quand on le regarde sur le fond.
Derrière un projet à-priori formaté, de par sa condition même de film de studio, se trouve un film profondément personnel et complétement cronenbergien: transformation, masque social, double, rapport violence/libido, sexe/mort, traitement viscéral du corps... tout y est! Et dans son propos, j'applaudis le film des deux mains. Mais le gros problème réside dans son cynisme. Attention je ne parle pas de l'humour du film, au demeurant très efficace, mais de cette lecture constamment ironique et second-degré qui fera, à juste titre, hurler les fans hardcore du Cronenberg maître d'une horreur directe et purement premier degré.
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Le faux-climax est réjouissant, mais j'ai quand même eu de la peine dans la partie d'introduction où chaque réplique donne envie de ricaner, et y arrive généralement.
On pourrait dire que le Canadien présente une situation pour mieux décrire son revers, mais j'ai surtout eu l'impression qu'il faisait du Lynch sans trop y arriver.
Et cette ironie nous mène droit au point où le mât blesse vraiment: Cronenberg ne choque plus. Il amuse, intéresse, d'un point de vue cérébral est toujours au top, mais cette violence, ce malaise qui s'insinue dans presque tous ses autres films ne fonctionne plus. Et on peut se demander si il n'y a pas une réelle volonté de le cacher derrière passe-passe et boufonnerie. A certains moments il se passe encore quelque chose:
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la seconde scène d'amour, dans les escaliers (Maria Bello rules), la séquence finale juste magnifique, et qui m'a littéralement fait monter les larmes aux yeux, où ce plan du rétroviseur lors du voyage pour Philadelphie...)
, mais autrement je ne retrouve pas la grandeur cronenbergienne. Deux poids deux mesures? A la limite, puisque je n'aurais pas émis de telles critiques si le film était venu d'un autre réalisateur, mais il n'empêche que pris par rapport au reste de sa carrière, A History of Violence déçoit.
J'ai de la peine à en parler sans donner l'impression de ne pas assumer le plaisir que j'ai pris devant ce film (oui j'ai pris mon pied), j'ai des réserves que je ne peux pas mettre de côté, mais quand même... un sacré moment cette séance!
Watkinssien (le 17 octobre 2006) a écrit :Ce film est une merveille de mise en scène.
J'adore complètement la façon dont Cronenberg filme et amène la violence dans le mode de vie américain.
Il filme la violence comme une maladie qui contamine imperceptiblement les personnages :
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comme le retour du "cancer" au moment où Mrs Stall trouve la vérité, Tom Stall est filmé sur le lit comme un malade, qui aurait caché à sa femme sa "maladie", elle est en colère, non pas par le côté premier degré du fait quil soit un tueur, mais plus en filigrane, du fait qu'il a contaminé le foyer familial; de la claque à son fils au climax érotique de la séquence de l'escalier, du comportement de son fils, à la tuerie finale, où le héros trouve sa source, encore une fois liée par le sang et la tue symboliquement, jusqu'à la séquence finale, d'une puissance émotionnelle rare, où Cronenberg laisse s'interroger le spectateur sur un provisoire ou non retour à la norme.
Ce film est bouleversant.
LES PROMESSES DE L'OMBRE

Cronenberg à la Cinémathèque

topic "Vos Cronenberg préférés"

Dilemme Cronenbergien

l'incontournable Top à Cronenberg" et son clone?

Enfin, pour terminer, voici les liens vers les "Chroniques Classik" de
STEREO-CRIMES OF THE FUTURE et de FRISSONS
"Un film n'est pas une envie de faire pipi" (Cinéphage, août 2021)
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Major Tom
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Re: David Cronenberg

Message par Major Tom »

Nestor: :shock: :lol: :lol: Chapeau.
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Re: David Cronenberg

Message par Nestor Almendros »

Major Tom a écrit :Nestor: :shock: :lol: :lol: Chapeau.
:mrgreen: Ouais... mais je n'avais pas réalisé le temps que ça allait mettre. Je ne suis pas certain de recommencer :wink: Maintenant je vais me coucher!
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Re: David Cronenberg

Message par bronski »

The Fly prend de l'avance dans le sondage. C'est normal, c'est son film le plus commercial...
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