Sans être aussi sévère, je dois bien avouer que je me retrouve plutôt bien dans cette critique. Le film vaut le coup d'oeil pour ses choix artistiques qui le rendent très immersif, oppressant et souvent agressif, virant ainsi plus d'une fois au pur trip sensoriel. Bon point également pour son duo d'acteurs principaux qui ne ménagent pas leurs efforts. Il me semble que ce n'est que le deuxième film interprété par Rufus Sewell que je vois (avec le mémorable Dark City), et je me rends compte que c'est dommage, tant ce dernier possède une forte présence à l'écran. Malgré ces qualités évidentes, je me suis progressivement désintéressé de l'intrigue une fois l'expédition en Birmanie entamé. Mon principal grief concerne l'évolution des personnages que le scénario n'est pas parvenu à me faire accepter, car trop abrupte et manquant de finesse (la faute par exemple à un recours un peu facile à l'onirisme). Au final, un film intéressant à défaut d'être mémorable, qui n'est pas parvenu à m'impliquer comme j'aurais voulu l'être.
Très intéressant de lire la première page car je ne savais pas (plus) qui était du Welz. J'avais gardé un mauvais souvenir de CALVAIRE, c'est donc une surprise.
SPOILERS
Le film est clairement divisé en 2 parties. la première se maintient dans un réalisme presque documentaire. Il y a une immersion des personnages (occidentaux) dans cet univers exotique et suspicieux, dont le scénario joue assez habilement (on soupçonne régulièrement les thailandais d'abuser de la crédulité du couple). Il y a une gestion assez habile de la perte de repères, d'une folie qui envahit peu à peu l'un des personnages, et des limites entre réalité et hallucination.
Tout cela se fait crescendo, lorsqu'on passe dans la 2e partie. Si l'ambiance était déjà d'une très grande importance auparavant, cette presque moitié de film (qui parait s'éterniser, à la limite) ne repose presque que sur cela. L'intrigue devient secondaire, au profit d'un ton contemplatif et d'une plongée dans un autre univers. Ca m'a fait penser, dans l'idée, à une sorte d'APOCALYPSE NOW: un parcours dans la jungle où le mental en prend un sacré coup. Et là aussi, les limites rêve/réalité sont de plus en plus floues, voire inexistantes. La "proie" (l'enfant) devient prédateur, dans des ambiances fantômatiques.
Malgré tous ces efforts, j'ai eu du mal à rentrer vraiment dans le film, surtout dans sa 2e partie. Amateur d'histoires, j'ai trop senti les faiblesses du scénario (trop light) au profit d'une ambiance finalement un peu juste (pour compenser), et réservée à un public plus réceptif. Néanmoins, cette 2e partie me procurerait presque une plus grande satisfaction que le début.
C'est probablement dû au visuel qui est tout simplement hypnotisant. Du Welz sait filmer, ça ne fait plus aucun doute. Les plans sont à tomber, il y a une vraie énergie dedans (comme avec le travail sur le son). C'est émerveillant, c'est surtout du super boulot. Après les fameux plans séquence de CHILDREN OF MEN qui ont alimenté les forums, on reparlera probablement de celui du temple dans la jungle, véritable tour de force là aussi. Un tel résultat, sur le film entier, avec seulement 4 millions de budget, c'est une sorte de passeport pour deux grandes carrières à venir (le réal et le chef op', au moins).
Enfin le casting, réussi. Surtout pour Béart qui ne nous avait pas habitué à une telle filmo, le film étant quand même une sorte d'ovni.
"Un film n'est pas une envie de faire pipi" (Cinéphage, août 2021)
Pete Dayton a écrit : ce n'est que le deuxième film interprété par Rufus Sewell que je vois (avec le mémorable Dark City), et je me rends compte que c'est dommage, tant ce dernier possède une forte présence à l'écran.
Je dois dire que je ne l'avais pas vu aussi bon justement depuis le film de Proyas... sa filmo est quand même un peu décevante. Sinon pas vraiment convaincant même si intéressant. Le film commence comme un "Don't Look Now" en Thaïlande avec effets tapageurs, suivant les chemins maintenant assez balisés à l'écran du deuil et du purgatoire. mais à force d'immersion physiques et senstives inégales le film arrivé à trouver au finish une certaine voie singulière, bien qu'un peu tard. Le film est plus prenant dés qu'il joue plus franchement les imageries fantasmagoriques et le final m'a mine de rien bien pas mal emballé...même si Béart est assez limitée. Toujours un bon point pourla photo de Benoit Débie.
Les temps sont durs, les sorties pléthoriques, les écrans limités.
Vinyan se retrouve par exemple en première semaine avec 50 écrans/France.
Je ne parle même pas du Bonnello avec Amalric (29 écrans).
Sergius a écrit :Les temps sont durs, les sorties pléthoriques, les écrans limités.
Vinyan se retrouve par exemple en première semaine avec 50 écrans/France.
Dans les Cahiers, très mauvais article... mais ce qui est drôle, c'est que l'auteur dit que Du Welz était déjà responsable de deux affreux ratages : Calvaire et... Hitman
Les films sont à notre civilisation ce que les rêves sont à nos vies individuelles : ils en expriment le mystère et aident à définir la nature de ce que nous sommes et de ce que nous devenons. (Frank Pierson)
phylute a écrit :Dans les Cahiers, très mauvais article... mais ce qui est drôle, c'est que l'auteur dit que Du Welz était déjà responsable de deux affreux ratages : Calvaire et... Hitman
c'est invraisemblable que des erreurs pareilles puissent voir le jour.
Il n'y a donc vraiment personne qui relit?
Et ben je suis bien cotent que ma "petite" ville de Colmar ait eu une copie du film.
Ayant déjà beaucoup aimé Calvaire, je me suis dès mercredi jeté sur ce Vinyan et j'en suis ressorti conquis. Après j'imagine aisément que ça ne sera pas le cas de tout le monde. L'histoire est assez light disons. C'est assez basique, on devine facielement comment tout cela va finir, pas de retournement de situation, d'astuce scénaristique, ou je ne sais quoi... il faut se laisser porter par l'expérience sensoriel on va dire.
J'ai vraiment été pris par l'ambiance... l'interprétation est vraiment de qualité (en particulier Rufus Sewell). Réalisation de qualité... mon coup de coeur du moment !
phylute a écrit :Dans les Cahiers, très mauvais article... mais ce qui est drôle, c'est que l'auteur dit que Du Welz était déjà responsable de deux affreux ratages : Calvaire et... Hitman
Ayant beaucoup aimé "Calvaire", et ayant vu quelques images alléchantes de "Vinyan", j'y suis allé avec enthousiasme. Et c'est une grosse déception, je trouve que c'est tout simplement une grosse purge.
En règle générale je m'efforce de défendre les films qui sortent un peu de l'ordinaire, les films ratés qui osent. J'ai même défendu "La possibilité d'une île", c'est dire. Mais ici, je ne peux pas. C'est trop pour moi. Que Du Welz fasse du sous-Noé, du sous-Kalatozov, ou du sous-Grandrieux, pourquoi pas, car après tout je préfère ça à une absence de mise en scène. Le problème, c'est qu'il est manifestement incapable de raconter une histoire. J'ai bien aimé le premier quart d'heure, assez intriguant, avec un pitch intéressant, et ensuite j'ai lâché. C'est très ennuyeux, et ce n'est pas une question de sensibilité, ce n'est pas pour une raison de goûts. Car comme je viens de le dire, j'aime justement ces films-trip, ces expériences sensorielles. Je marche à fond devant "La vie nouvelle" et devant "L'année dernière à Marienbad". Ici, c'est juste mal fait. La mise en scène est beaucoup trop faible et le montage complètement raté, ce qui a vite rendu le film insupportable. Car quand on ne rentre pas dans le trip proposé, on a le loisir de remarquer tous les défauts - et ils sont nombreux. On se rend compte de la vacuité de la mise en scène, passant de la caméra tremblotante à un plan-séquence impressionnant techniquement mais vain, inutile et gratuit, ne provoquant aucune sensation. Et puis que dire de ce passage expérimental, au début ? Quelle est son utilité, si ce n'est impressionner le petit-bourgeois ? "Vinyan" est un caprice de cinéaste gaté. Il met un peu tout dans son film en espérant qu'à la fin ça ressemble à un trip sensoriel. Il faut dire qu'ils paraissent tellement "lâches" les trips Grandrieux ! Mais je pense que derrière les apparences il y a un minimum de construction et de réflexion non ?
D'une façon générale j'ai trouvé le film très laid. C'est même la première fois que je trouve une photographie de Benoit Debie ratée. Concernant le son ; oui, il est travaillé, je ne vais pas dire le contraire. Mais il est travaillé comme dans tous les films de ce genre. Toujours ce son très fort, ces bruits graves et bizarres, ce mixage agressif. L'impression d'avoir vu ça déjà 100 fois. Et en plus, c'est moins bien. Le son devient finalement plus agaçant qu'immersif.
Quand au jeu d'acteurs, c'est catastrophique. J'aime bien Emmanuelle Béart mais ici elle est vraiment mal dirigée. Elle écarquille les yeux et crie pour montrer son basculement dans la folie, super. Pendant ce temps, on s'ennuie ferme.
Plus qu'à espérer que du Welz se casse aux Etats-Unis faire du direct-to-dvd ou des films uniquement défendus par "Mad Movies", "Brazil" ou "Romain Le Vern". Que ses potes et lui redescendent sur terre (le générique de début est symptomatique, avec le nom de Du Welz écrit en gros sur l'écran, façon Carpenter) arrêtent de nous saouler avec leurs films radicaux sans concessions à la limite de la folie, et qu'ils réfléchissent deux minutes au pourquoi de ces petits nombres de copies et d'entrées spectateurs.
Ouais, j'aurais pu aussi citer Lemaire ...
Enfin, quand je lis la critique de Romain Le Vern, j'hallucine :
Un tourbillon vertigineux et cathartique, digne de Paradjanov en son temps, où plus personne n'a d'emprise, où chacun exorcise ses propres angoisses. Ce n'est plus un calvaire; c'est un éblouissement.
Ou celle de Brazil :
(...) le film est aussi une peinture mouvante et expressionniste, glissant elle-même progressivement d'une lumière réaliste au possible, vers des teintes surréalistes monochromes et agressives. Magnifique!...
L'impression de ne pas avoir vu le même film ...
Et dire qu'avant de voir le film je pestais contre la critique de Chronic'Art, que je trouvais violente et agressive ... Maintenant je comprends mieux leur point de vue.
Megalomanu a écrit : (le générique de début est symptomatique, avec le nom de Du Welz écrit en gros sur l'écran, façon Carpenter).
Sur Frisson Break ils disent comment ils ont fait ce générique : ils ont joué avec un aquarium, des colorants, une perruque, etc. Ca m'avait fait tripper de voir ce gosse de Du Welz nous balancer ca, " Ouais on s'amusait avec Debbie et finalement on s'est rendu compte au final que ca rendait super bien ! " Pas vu le film, mais j'aurais aimé que ce soit en effet aussi réussi qu'ils le disent, vu le caractère Ed Woodien de cette confession.
Si la vie réelle est un chaos, en revanche une terrible logique gouverne l'imagination.
Ôtez le mensonge vital à un homme moyen, vous lui ôtez le bonheur, du même élan.
...il manque pas Christophe Lemaire dans ta liste? 
