Top Ridley Scott

Rubrique consacrée au cinéma et aux films tournés à partir de 1980.

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Hitchcock
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Re: Top Ridley Scott

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Strum
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Re: Top Ridley Scott

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AtCloseRange a écrit :Néanmoins, je serais moins catégorique sur la question du scénario. Je pense comme souvent que les chef d'œuvre proviennent la plupart du temps du hasard: de la rencontre d'un sujet avec une esthétique, avec des acteurs.
Et il s'est avéré qu'il s'est "trouvé" successivement avec 2 grands films de SF mais je crois bien qu'il n'avait pas plus d'affinité que ça avec le genre.
Pour moi, un grand cinéaste, c'est d'abord quelqu'un qui produit un univers cohérent qui vaut par sa singularité et sa puissance émotionnelle et que l'on retrouve de film en film, avec ses thèmes et ses obsessions récurrentes. C'est comme pour une chanson - c'est le ton ou l'atmosphère d'ensemble qui compte. L'esthétique, la recherche de la belle image, ne fait pas à elle seule un univers de cinéma. Chez Scott, cet univers, hormis dans Blade Runner et Alien, je ne le trouve pas. La cohérence, cette alchimie mystérieuse qui permet de mêler en un tout l'image, les personnages et les thèmes, c'est pour moi le Graal du cinéma. On peut parler de "rencontre" comme tu le dis. Mais je crois peut-être moins au "hasard" que toi car je raisonne plus par auteur que par film. Je m'en suis pris aux scénarios chez Scott, parce qu'ils sont régulièrement décevants depuis ses brillants débuts, mais peut-être que ce qu'il faut incriminer en premier lieu chez lui, c'est de faire passer l'esthétique, le goût du spectacle, avant la cohérence de l'univers, comme s'il était plus intéressé par les détails, les aspects visuels de telle ou telle scène (il éprouve souvent le besoin d'en rajouter), que par l'ensemble ou la cohérence globale de ses films. Comme s'il sous-estimait le pouvoir émotionnel et donc artistique qui découle du seul récit. Pure hypothèse.
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Demi-Lune
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Re: Top Ridley Scott

Message par Demi-Lune »

Ce qui est dommage, c'est que cette publication (que je n'ai pas encore lue, mais qu'elle existe semble montrer qu'il y a de la matière à disserter) pouvait être l'occasion justement d'écorner cette image de simple faiseur esthète qui lui tient manifestement à la peau. Toujours ce statut bâtard (immense technicien, oui, mais grand cinéaste ?). A tâter le pouls des dernières interventions, je dois me faire une raison : ce n'est pas demain la veille qu'on convaincra que Ridley Scott est autre chose qu'un cinéaste de catégorie B. Ben oui, Alien et Blade Runner, c'est accidentellement qu'il les a faits, le gars... et puis ça fait longtemps, hein, on a vu ce qu'il a fait depuis...

Pour reprendre ce que j'avais brièvement écrit dans le jeu du duel de réalisateurs, Ridley Scott est un des cinéastes qui ont forgé mon goût pour le formalisme, les images transcendantales. J'y vois le meilleur cinéaste anglais depuis la disparition de Lean, mais contrairement à Kubrick (son modèle affiché) et Spielberg qui alternent des projets toujours très différents les uns des autres, il n'a jamais joui de la reconnaissance qu'il me semble mériter. Certes, il a le handicap d'avoir créé des films-monde visionnaires à ses débuts à l'aune desquels il est facile de mesurer le tiédissement de sa trajectoire. Faire deux des meilleurs films du Cinéma en début de carrière, ça place haut les attentes. Je continue de penser que les échecs publics consécutifs de Blade Runner et Legend ont brisé quelque chose dans sa créativité, et l'ont forcé à s'orienter vers une expression moins personnelle, au sens où son exécution esthétique peut obscurcir des choix de sujets où on ne voit pas forcément un "auteur" derrière. Je continuerai à défendre bec et ongle la carrière de Scott malgré ses errances (de plus en plus fréquentes hélas), parce que j'y vois bien plus qu'un plasticien. Il me fait l'effet d'un de ces vieux routards de l'ère des studios, qui tournaient film sur film sur un large éventail de genres, mais qui développaient des thèmes cohérents sur la durée. La place de la femme (Alien, Thelma & Louise, GI Jane), la soif de la découverte, la séduction du Mal (Alien, Legend, Hannibal), le choc des civilisations (Alien, Black rain, 1492, Kingdom of heaven), le thème du surhomme (qui, selon les films, se sait ou qui s'ignore, comme par exemple Balian d'Ibelin dans Kingdom of Heaven) habité d'une pensée obsessionnelle comme pouvait l'être Roy Batty vis-à-vis de ses origines ou Christophe Colomb vis-à-vis de ses thèses géographiques et se situant à sa manière "par-delà le bien et le mal", la fascination pour les personnages démiurges, le conflit père/fils, l'Urbs babylonienne (le Los Angeles de Blade Runner, l'Osaka de Black rain, la Rome de Gladiator, la Jérusalem de Kingdom of heaven) sont pourtant autant de récurrences dans l’œuvre de Scott.
Mais le bonhomme les emballe avec discrétion, presque sans réelle prétention. En est-il lui-même conscient ? Voilà quelque chose qu'il serait intéressant de lui demander. Mais à la limite, on s'en fout. L’œuvre parle d'elle-même.

Donc pour rebondir sur le post de Truffaut Chocolat, oui, pour moi Scott est un auteur. La plupart de ses films présentent des idées, des thèmes, des récurrences, une vision de l'homme et de l'art particulière, une empreinte de l'Histoire, que l'on peut aisément mettre en relation. Leur plastique est reconnaissable entre mille, tout comme leur mise en scène, qui n'a jamais réellement cherché la virtuosité technique ostentatoire, mais plus un sens de la valorisation visuelle fondé sur une ampleur, une rigueur digne d'un peintre, l'essence d'une atmosphère.
Le truc, c'est qu'il s'abaisse à tourner trop souvent des films qui ne lui ressemblent pas et/ou qui ont des histoires médiocres. Pourquoi diable se compromet-il dans des trucs faisandés comme G.I. Jane ou American Gangster ? C'est un mystère pour moi. Plutôt que de vouloir essayer tous les genres, des fois on a envie de lui dire de faire un peu plus attention à ce qu'il filme. Scott est un esthète inné qui a besoin de grandes histoires pour laisser parler son sens du formalisme. Il n'est à l'aise que dans des histoires ambitieuses qui lui laissent toute l'opportunité de façonner des univers entiers, qu'ils soient historiques, merveilleux, baroques ou futuristes. Ses films plus "modestes" peuvent être sympathiques, mais c'est quand même quand il assouvit sa soif de grandeur que le réalisateur a donné son meilleur. Donc pas d'accord avec les critères de Strum qui me paraissent rigides. Car même dans ses films boiteux style 1492, il y a la vigueur du récit et des personnages.

Alors pourquoi ce statut bâtard ?

Le fait est que Scott a, depuis quelques temps, tendance à se complaire dans un certain affadissement de son style. Il se laisse plus facilement aller à des tics visuels et musicaux pompiers qui parasitent sa maîtrise esthétique et narrative. Même sa plus grande réussite des années 2000 (à mes yeux), Kingdom of heaven, est ponctuellement entaché par ces choix malheureux et qui apparaissent encore plus incompréhensibles quand on étudie ses premiers films. Il n'y a donc pas réellement de progression vers un perfectionnement stylistique, mais plutôt, exceptées quelques fulgurances, une lente marche vers la banalité, vers l'appauvrissement. Cet aspect joue peut-être un rôle dans la perception critique au sujet de l’œuvre de Scott, qui lorsqu'il déçoit, déçoit amèrement.
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Re: Top Ridley Scott

Message par Jeremy Fox »

Même si je ne suis pas d'accord à 100%, je me rapproche beaucoup de ta défense du bonhomme.
Pour reprendre ce que j'avais brièvement écrit dans le jeu du duel de réalisateurs, Ridley Scott est un des cinéastes qui ont forgé mon goût pour le formalisme, les images transcendantales. J'y vois le meilleur cinéaste anglais depuis la disparition de Lean, mais contrairement à Kubrick (son modèle affiché) et Spielberg qui alternent des projets toujours très différents les uns des autres, il n'a jamais joui de la reconnaissance qu'il me semble mériter.
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Demi-Lune
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Re: Top Ridley Scott

Message par Demi-Lune »

Strum a écrit :L'esthétique, la recherche de la belle image, ne fait pas à elle seule un univers de cinéma. Chez Scott, cet univers, hormis dans Blade Runner et Alien, je ne le trouve pas.
Cf. plus haut.
Je m'en suis pris aux scénarios chez Scott, parce qu'ils sont régulièrement décevants depuis ses brillants débuts, mais peut-être que ce qu'il faut incriminer en premier lieu chez lui, c'est de faire passer l'esthétique, le goût du spectacle, avant la cohérence de l'univers, comme s'il était plus intéressé par les détails, les aspects visuels de telle ou telle scène (il éprouve souvent le besoin d'en rajouter), que par l'ensemble ou la cohérence globale de ses films. Comme s'il sous-estimait le pouvoir émotionnel et donc artistique qui découle du seul récit. Pure hypothèse.
Il est exact que Scott accorde une attention extrême aux détails et que, étant passé par une école de beaux-arts, il a toujours le réflexe de raisonner en termes visuels et plastiques (donc par exemple de chercher à formaliser une atmosphère en étudiant dans les courants artistiques - il avait par exemple expliqué que l'univers plastique de Gladiator lui était venu en tête en voyant le tableau de Gérôme Pollice Verso). Je comprends ton raisonnement de la "vampirisation" de l'émotion par cette quête formelle, mais la cohérence de l'univers, c'est bien ce qui l'occupe au premier titre.
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AtCloseRange
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Re: Top Ridley Scott

Message par AtCloseRange »

Demi-Lune a écrit : A tâter le pouls des dernières interventions, je dois me faire une raison : ce n'est pas demain la veille qu'on convaincra que Ridley Scott est autre chose qu'un cinéaste de catégorie B. Ben oui, Alien et Blade Runner, c'est accidentellement qu'il les a faits, le gars... et puis ça fait longtemps, hein, on a vu ce qu'il a fait depuis...
Bonjour la caricature de nos propos...
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Truffaut Chocolat
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Re: Top Ridley Scott

Message par Truffaut Chocolat »

Demi-Lune a écrit :Ce qui est dommage, c'est que cette publication (que je n'ai pas encore lue, mais qu'elle existe semble montrer qu'il y a de la matière à disserter) pouvait être l'occasion justement d'écorner cette image de simple faiseur esthète qui lui tient manifestement à la peau. Toujours ce statut bâtard (immense technicien, oui, mais grand cinéaste ?). A tâter le pouls des dernières interventions, je dois me faire une raison : ce n'est pas demain la veille qu'on convaincra que Ridley Scott est autre chose qu'un cinéaste de catégorie B. Ben oui, Alien et Blade Runner, c'est accidentellement qu'il les a faits, le gars... et puis ça fait longtemps, hein, on a vu ce qu'il a fait depuis...

Pour reprendre ce que j'avais brièvement écrit dans le jeu du duel de réalisateurs, Ridley Scott est un des cinéastes qui ont forgé mon goût pour le formalisme, les images transcendantales. J'y vois le meilleur cinéaste anglais depuis la disparition de Lean, mais contrairement à Kubrick (son modèle affiché) et Spielberg qui alternent des projets toujours très différents les uns des autres, il n'a jamais joui de la reconnaissance qu'il me semble mériter. Certes, il a le handicap d'avoir créé des films-monde visionnaires à ses débuts à l'aune desquels il est facile de mesurer le tiédissement de sa trajectoire. Faire deux des meilleurs films du Cinéma en début de carrière, ça place haut les attentes. Je continue de penser que les échecs publics consécutifs de Blade Runner et Legend ont brisé quelque chose dans sa créativité, et l'ont forcé à s'orienter vers une expression moins personnelle, au sens où son exécution esthétique peut obscurcir des choix de sujets où on ne voit pas forcément un "auteur" derrière. Je continuerai à défendre bec et ongle la carrière de Scott malgré ses errances (de plus en plus fréquentes hélas), parce que j'y vois bien plus qu'un plasticien. Il me fait l'effet d'un de ces vieux routards de l'ère des studios, qui tournaient film sur film sur un large éventail de genres, mais qui développaient des thèmes cohérents sur la durée. La place de la femme (Alien, Thelma & Louise, GI Jane), la soif de la découverte, la séduction du Mal (Alien, Legend, Hannibal), le choc des civilisations (Alien, Black rain, 1492, Kingdom of heaven), le thème du surhomme (qui, selon les films, se sait ou qui s'ignore, comme par exemple Balian d'Ibelin dans Kingdom of Heaven) habité d'une pensée obsessionnelle comme pouvait l'être Roy Batty vis-à-vis de ses origines ou Christophe Colomb vis-à-vis de ses thèses géographiques et se situant à sa manière "par-delà le bien et le mal", la fascination pour les personnages démiurges, le conflit père/fils, l'Urbs babylonienne (le Los Angeles de Blade Runner, l'Osaka de Black rain, la Rome de Gladiator, la Jérusalem de Kingdom of heaven) sont pourtant autant de récurrences dans l’œuvre de Scott.
Mais le bonhomme les emballe avec discrétion, presque sans réelle prétention. En est-il lui-même conscient ? Voilà quelque chose qu'il serait intéressant de lui demander. Mais à la limite, on s'en fout. L’œuvre parle d'elle-même.

Donc pour rebondir sur le post de Truffaut Chocolat, oui, pour moi Scott est un auteur. La plupart de ses films présentent des idées, des thèmes, des récurrences, une vision de l'homme et de l'art particulière, une empreinte de l'Histoire, que l'on peut aisément mettre en relation. Leur plastique est reconnaissable entre mille, tout comme leur mise en scène, qui n'a jamais réellement cherché la virtuosité technique ostentatoire, mais plus un sens de la valorisation visuelle fondé sur une ampleur, une rigueur digne d'un peintre, l'essence d'une atmosphère.
Le truc, c'est qu'il s'abaisse à tourner trop souvent des films qui ne lui ressemblent pas et/ou qui ont des histoires médiocres. Pourquoi diable se compromet-il dans des trucs faisandés comme G.I. Jane ou American Gangster ? C'est un mystère pour moi. Plutôt que de vouloir essayer tous les genres, des fois on a envie de lui dire de faire un peu plus attention à ce qu'il filme. Scott est un esthète inné qui a besoin de grandes histoires pour laisser parler son sens du formalisme. Il n'est à l'aise que dans des histoires ambitieuses qui lui laissent toute l'opportunité de façonner des univers entiers, qu'ils soient historiques, merveilleux, baroques ou futuristes. Ses films plus "modestes" peuvent être sympathiques, mais c'est quand même quand il assouvit sa soif de grandeur que le réalisateur a donné son meilleur. Donc pas d'accord avec les critères de Strum qui me paraissent rigides. Car même dans ses films boiteux style 1492, il y a la vigueur du récit et des personnages.

Alors pourquoi ce statut bâtard ?

Le fait est que Scott a, depuis quelques temps, tendance à se complaire dans un certain affadissement de son style. Il se laisse plus facilement aller à des tics visuels et musicaux pompiers qui parasitent sa maîtrise esthétique et narrative. Même sa plus grande réussite des années 2000 (à mes yeux), Kingdom of heaven, est ponctuellement entaché par ces choix malheureux et qui apparaissent encore plus incompréhensibles car on étudie ses premiers films. Il n'y a donc pas réellement de progression vers un perfectionnement stylistique, mais plutôt, exceptées quelques fulgurances, une lente marche vers la banalité, vers l'appauvrissement. Cet aspect joue peut-être un rôle dans la perception critique au sujet de l’œuvre de Scott, qui lorsqu'il déçoit, déçoit amèrement.
Bien sur que le sur le papier, c'est un auteur et qu'il a ses sujets / obsessions récurrents (même si ça ne me saute pas aux yeux).
Mais honnêtement, t'as déjà eu à débattre des idées et problématiques qu'il aborde dans ses films ?
Perso, je le vois comme une mauvaise caricature de ce que peut produire le système hollywoodien : sur la base de 2 ou 3 films légendaires, tu peux croquer dessus pendant 30 ans.
A part ça...
A part ça, à sa place, je vois pas pourquoi je me remettrais en cause : on me propose toujours des projets, mes castings sont plus qu'honorables... pourquoi en faire plus ?
Si rien autour de toi te pousse à te remettre en question et surtout, si toi-même tu n'en vois pas l'intérêt, il n'y a aucune raison de changer. :o
Strum
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Re: Top Ridley Scott

Message par Strum »

Demi-Lune a écrit :Il est exact que Scott accorde une attention extrême aux détails et que, étant passé par une école de beaux-arts, il a toujours le réflexe de raisonner en termes visuels et plastiques (donc par exemple de chercher à formaliser une atmosphère en étudiant dans les courants artistiques - il avait par exemple expliqué que l'univers plastique de Gladiator lui était venu en tête en voyant le tableau de Gérôme Pollice Verso). Je comprends ton raisonnement de la "vampirisation" de l'émotion par cette quête formelle, mais la cohérence de l'univers, c'est bien ce qui l'occupe au premier titre.
Justement, Scott semble raisonner en termes d'univers par film - un univers différent pour chaque film - bref, des univers. Pour moi, un auteur de cinéma, c'est quelqu'un qui a un seul univers, que l'on retrouve de film en film, exactement comme en littérature, où l'on reconnait les grands auteurs à leur univers singulier que l'on retrouve de livre en livre. Ce n'est pas le sujet du film qui doit dicter l'univers de l'auteur à mon sens, c'est l'inverse.

J'ajoute, dans la lignée du post d'Atclose, que je ne considère pas Scott pour autant comme un cinéaste de catégorie B - deux chefs-d'oeuvre à son actif, c'est déjà très bien.
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Re: Top Ridley Scott

Message par Anorya »

Demi-Lune a écrit :La place de la femme, la soif de la découverte, la séduction du Mal, le choc des civilisations, le thème du surhomme, la fascination pour les personnages démiurges, le conflit père/fils, (...) sont pourtant autant de récurrences dans l’œuvre de Scott.
Il n'est ailleurs pas si étonnant de noter à nouveau tout ça dans Prometheus.
David et l'ingénieur sont d'ailleurs deux exemples de surhommes différents. Pas étonnant que l'un en vienne à zigouiller l'autre, ou plutôt s'en servir pour zigouiller les humains présents.
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Re: Top Ridley Scott

Message par Federico »

AtCloseRange a écrit :Néanmoins, je serais moins catégorique sur la question du scénario. Je pense comme souvent que les chef d'œuvre proviennent la plupart du temps du hasard: de la rencontre d'un sujet avec une esthétique, avec des acteurs.
Et il s'est avéré qu'il s'est "trouvé" successivement avec 2 grands films de SF mais je crois bien qu'il n'avait pas plus d'affinité que ça avec le genre.

Donc Scott a été grand à ses débuts mais on peut se demander s'il n'y a pas une part de réussite là-dedans au regard de l'ensemble de sa filmographie dont le reste de la filmographie reste globalement très en-dessous avec des rebonds très ponctuels. J'ai pu aimer Traquée ou Thelma et Louise mais pour te rejoindre Strum, ils sont souvent handicapés par les gros sabots de leur scénario.
Admirateur de toujours d'Alien (pris en pleine poire à 16 ans, l'un de mes plus grands chocs de spectateur) et sur le tard de Blade runner, je serais assez tenté d'écrire que Scott fut à cette époque the right man at the right place : un esthète froid venu de la pub et bénéficiant du regain d'intérêt pour la SF. Je fais un parallèle musical avec la période similaire, post-punk, de la new puis cold-wave qui donna des morceaux et quelques albums fabuleux entre grosso-modo 1978 et 1982 avant de glisser vers le pompeux synthétique et la zik de stade.
Bien sûr, je simplifie car tout comme il y eut encore de bons albums nés de ce big bang passé 1982, Scott a commis quelques autres films plus qu'honorables (jamais pu encaisser Thelma & Louise qui n'est pour moi qu'un long clip mais j'ai aimé Legend et Gladiator, pour ne citer pratiquement qu'eux).
Conclusion hâtive (et tirée par les tifs) : Ridley Scott est le Peter Hook/Jim Kerr/Bono du cinéma. :mrgreen: :arrow:
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Demi-Lune
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Re: Top Ridley Scott

Message par Demi-Lune »

Truffaut Chocolat a écrit :A part ça, à sa place, je vois pas pourquoi je me remettrais en cause : on me propose toujours des projets, mes castings sont plus qu'honorables... pourquoi en faire plus ?
Si rien autour de toi te pousse à te remettre en question et surtout, si toi-même tu n'en vois pas l'intérêt, il n'y a aucune raison de changer. :o
Je suis bien d'accord avec toi. Et c'est pourquoi l'accueil désastreux de Cartel, qui, raté ou non, tentait quelque chose de différent, me fait de la peine (toutes proportions gardées, bien entendu). S'adjoindre les services de Cormack McCarthy, ça dénotait de l'ambition, une envie de sortir de la routine hollywoodienne. Mais ce n'est pas la première fois que le public ne suit pas Scott lorsqu'il se "ferme"... pas sûr en revanche, à son âge, qu'il ait envie une nouvelle fois de retenter l'expérience.
Strum a écrit :Justement, Scott semble raisonner en termes d'univers par film - un univers différent pour chaque film - bref, des univers. Pour moi, un auteur de cinéma, c'est quelqu'un qui a un seul univers, que l'on retrouve de film en film, exactement comme en littérature, où l'on reconnait les grands auteurs à leur univers singulier que l'on retrouve de livre en livre. Ce n'est pas le sujet du film qui doit dicter l'univers de l'auteur à mon sens, c'est l'inverse.
Oui, je vois bien ce que tu veux dire, mais n'est-ce pas une généralisation rigide ? Prends Coppola. Je ne pense pas que tu contrediras le fait que c'est un immense auteur. Et pourtant, saurais-tu me définir son style ? Je te fiche mon billet que non. :P Parce que chez Coppola, c'est le sujet du film qui dicte le style et par extension l'univers. Il n'y a pas un seul univers Coppola, il y en a pratiquement autant qu'il y a de films à son actif (au-delà de la récurrence de certains thèmes).
Perso, je suis justement particulièrement sensible à la faculté de Ridley Scott de construire des univers entiers, c'est quelque chose de très rare au cinéma à ce niveau. Tu pénètres dans un monde, il te fait rêver, tu ne veux plus le quitter. S'ils m'impressionnent autant, c'est bien parce qu'ils fonctionnent indépendamment, comme des mondes nouveaux à chaque fois.
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Re: Top Ridley Scott

Message par Strum »

Demi-Lune a écrit :Oui, je vois bien ce que tu veux dire, mais n'est-ce pas une généralisation rigide ? Prends Coppola. Je ne pense pas que tu contrediras le fait que c'est un immense auteur. Et pourtant, saurais-tu me définir son style ? Je te fiche mon billet que non. :P Parce que chez Coppola, c'est le sujet du film qui dicte le style et par extension l'univers. Il n'y a pas un seul univers Coppola, il y en a pratiquement autant qu'il y a de films à son actif (au-delà de la récurrence de certains thèmes).
Perso, je suis justement particulièrement sensible à la faculté de Ridley Scott de construire des univers entiers, c'est quelque chose de très rare au cinéma à ce niveau. Tu pénètres dans un monde, il te fait rêver, tu ne veux plus le quitter. S'ils m'impressionnent autant, c'est bien parce qu'ils fonctionnent indépendamment, comme des mondes nouveaux à chaque fois.
C'est en effet une définition assez limitative du grand auteur de cinéma. Mais c'est la mienne, et je m'y tiens. :wink: Tous mes cinéastes favoris ont un style, un univers et des thèmes particuliers, que l'on retrouve plus ou moins de film en film. Et donc, tu ne seras peut-être pas tellement surpris (si ? :mrgreen: ) d'apprendre que Coppola, malgré mon admiration pour certains de ses films, ne fait pas partie de mes cinéastes favoris - car en effet, j'aurais sans doute du mal à définir quel est son style (peut-être aussi parce que je ne connais pas assez bien tous ses films, cela dit - pour ce que j'en connais, il me parait donner beaucoup plus d'importance que Scott aux relations entre personnages, considérés comme une famille).
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Thaddeus
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Re: Top Ridley Scott

Message par Thaddeus »

Strum a écrit :Pour moi, un auteur de cinéma, c'est quelqu'un qui a un seul univers, que l'on retrouve de film en film, exactement comme en littérature, où l'on reconnait les grands auteurs à leur univers singulier que l'on retrouve de livre en livre. Ce n'est pas le sujet du film qui doit dicter l'univers de l'auteur à mon sens, c'est l'inverse.
À lire cette phrase et à bien y réfléchir, je me rends compte qu'en fait... je pense tout le contraire. :mrgreen:

Du moins, je suis attaché à deux idées :
1. j'estime que la grandeur d'un cinéaste réside moins dans la déclinaison (la répétition ? la formule ?) d'un univers commun de film en film que dans la capacité à faire des grands films, tout simplement. Et pour être considéré comme tel, un grand film n'a pas à être mis en perspective avec d'autres.

2. Il y a peu de choses que j'aime plus qu'un réalisateur qui me surprenne, qui sorte de son pré carré, qui ose de nouvelles choses, qui se remette constamment en question. Faire un film "contre" le précédent, se démarquer de ses propres identifiants, voilà l'une des approches artistiques les plus précieuses qui soient. On va sans doute écarquiller les yeux face à ce que je vais dire mais voilà : je crois en forçant un peu le trait que j'adore voir un grand film derrière lequel je ne saurais reconnaître le réalisateur, car cela signifie que celui-ci n'est pas inféodé à son univers, qu'il ne lui obéit pas, qu'il réfléchit à son film seul plus qu'à ce que l'on attend de lui. Combien de fois a-t-on pu lire qu'on reconnaît un grand réalisateur à l'identité unique qu'il injecte à un plan ? Combien de fois a-on-pu lire qu'"un grand cinéaste réalise toujours le même film" ? Je suis en total désaccord avec ces affirmations. L'un des qualités premières d'un metteur en scène, selon moi, est de prendre des risques, de chercher à faire évoluer son langage, de ne pas se laisser enfermer dans son univers justement - d'une certaine manière, de tenter de "ne pas se faire reçonnaître". Il n'y a rien de pire que la formule.

Discussion très intéressante sinon, sur un réalisateur que je tiens en très haute estime.
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Re: Top Ridley Scott

Message par AtCloseRange »

Thaddeus a écrit :2. Il y a peu de choses que j'aime plus qu'un réalisateur qui me surprenne, qui sorte de son pré carré, qui ose de nouvelles choses, qui se remette constamment en question. Faire un film "contre" le précédent, se démarquer de ses propres identifiants, voilà l'une des approches artistiques les plus précieuses qui soient. On va sans doute écarquiller les yeux face à ce que je vais dire mais voilà : je crois en forçant un peu le trait que j'adore voir un grand film derrière lequel je ne saurais reconnaître le réalisateur, car cela signifie que celui-ci n'est pas inféodé à son univers, qu'il ne lui obéit pas, qu'il réfléchit à son film seul plus qu'à ce que l'on attend de lui. Combien de fois a-t-on pu lire qu'on reconnaît un grand réalisateur à l'identité unique qu'il injecte à un plan ? Combien de fois a-on-pu lire qu'"un grand cinéaste réalise toujours le même film" ? Je suis en total désaccord avec ces affirmations. L'un des qualités premières d'un metteur en scène, selon moi, est de prendre des risques, de chercher à faire évoluer son langage, de ne pas se laisser enfermer dans son univers justement - d'une certaine manière, de tenter de "ne pas se faire reçonnaître". Il n'y a rien de pire que la formule.
Et combien de grands réalisateurs font ça?
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El Dadal
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Message par El Dadal »

AtCloseRange a écrit :
Thaddeus a écrit :2. Il y a peu de choses que j'aime plus qu'un réalisateur qui me surprenne, qui sorte de son pré carré, qui ose de nouvelles choses, qui se remette constamment en question. Faire un film "contre" le précédent, se démarquer de ses propres identifiants, voilà l'une des approches artistiques les plus précieuses qui soient. On va sans doute écarquiller les yeux face à ce que je vais dire mais voilà : je crois en forçant un peu le trait que j'adore voir un grand film derrière lequel je ne saurais reconnaître le réalisateur, car cela signifie que celui-ci n'est pas inféodé à son univers, qu'il ne lui obéit pas, qu'il réfléchit à son film seul plus qu'à ce que l'on attend de lui. Combien de fois a-t-on pu lire qu'on reconnaît un grand réalisateur à l'identité unique qu'il injecte à un plan ? Combien de fois a-on-pu lire qu'"un grand cinéaste réalise toujours le même film" ? Je suis en total désaccord avec ces affirmations. L'un des qualités premières d'un metteur en scène, selon moi, est de prendre des risques, de chercher à faire évoluer son langage, de ne pas se laisser enfermer dans son univers justement - d'une certaine manière, de tenter de "ne pas se faire reçonnaître". Il n'y a rien de pire que la formule.
Et combien de grands réalisateurs font ça?
Quasiment aucun.
Howard Hawks? Richard Fleischer? Robert Wise? William Friedkin? Bertrand Tavernier? Ce ne sont que les premiers noms qui me viennent, je suis certain qu'il y en a un paquet à ne pas se laisser enfermer.
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