Les Fils de l'homme (Alfonso Cuaron - 2006)

Rubrique consacrée au cinéma et aux films tournés à partir de 1980.

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G.T.O
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Message par G.T.O »

Gounou a écrit :Z'en faites pas un peu trop, quand même ?... A vous lire, on dirait que Cuaron a réinventé le cinéma d'anticipation à coups de plans-séquences (virtuoses, c'est indéniable... mais justement, n'est-ce pas un peu aveuglant chez certains ?)
Le film a ses qualités, oui... formelles essentiellement... mais on n'est ni chez Tarkovski (que vient-il faire là, au juste ?) ni même en présence d'un ovni ou je-ne-sais-quoi encore...
Je continue de penser qu'on à affaire à un film efficace dans tous les sens du termes, malin, et qui a finalement bénéficié de sa promotion par bouche-à-oreille exclusif (l'effet de surprise).
Après...

C'est un film traçant une voie qui lui est propre, louvoyant tantôt du côté du thriller d'anticipation, tantôt du côté du drame, alterne ville et ruralité, qui se débarasse de ses personnages principaux pour mettre au premier plan un personnage de femme-enfant...La technique bien que voyante n'est pas considérée comme une fin en soi mais rélèvent de parti-pris scéniques qui ont pour but de renforcer "le réalisme" des situations( d'ailleurs Cuaron cite La bataille d'Alger). Quant à Tarko, il ne s'agit pas d'une vue de l'esprit: la photo cendrée de Lubezki associé à des scènes contemplatives déconnectées de toute question d'efficience y font plus que songer.
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Message par Gounou »

G.T.O a écrit :C'est un film traçant une voie qui lui est propre, louvoyant tantôt du côté du thriller d'anticipation, tantôt du côté du drame, alterne ville et ruralité, qui se débarasse de ses personnages principaux pour mettre au premier plan un personnage de femme-enfant...La technique bien que voyante n'est pas considérée comme une fin en soi mais rélèvent de parti-pris scéniques qui ont pour but de renforcer "le réalisme" des situations( d'ailleurs Cuaron cite La bataille d'Alger). Quant à Tarko, il ne s'agit pas d'une vue de l'esprit: la photo cendrée de Lubezki associé à des scènes contemplatives déconnectées de toute question d'efficience y font plus que songer.
J'ai vu le film et en ai apprécié les qualités certaines que tu pointes... :wink:
Concernant Tarko, j'ai bien compris qu'une flaque d'eau boueuse pouvait suffir à éveiller des envies de rapprochements avantageux...
Il se trouve que j'estime le film réussi essentiellement pour ses "parti-pris" scéniques... et moins sur d'autres aspects de fond et de propos. C'est tout. Je trouvais que l'emballement pouvait être un peu influencé, mais je peux me tromper :wink:
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Message par Flol »

Gounou a écrit :Je trouvais que l'emballement pouvait être un peu influencé, mais je peux me tromper :wink:
Influencé ? Par qui ? Par quoi ?
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Message par MJ »

Ratatouille a écrit :Influencé ? Par qui ? Par quoi ?
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Message par Gounou »

Ratatouille a écrit :
Gounou a écrit :Je trouvais que l'emballement pouvait être un peu influencé, mais je peux me tromper :wink:
Influencé ? Par qui ? Par quoi ?
Par les qualités formelles pré-citées... t'as un peu de mal à suivre, ou c'est juste pour être contrariant ? :mrgreen:
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Message par MJ »

Je dois être un gros béotien consumériste fini, mais oui: les qualités formelles d'un film m'influent dans mon jugement sur celui-ci. :|
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Message par Flol »

Gounou a écrit :
Ratatouille a écrit : Influencé ? Par qui ? Par quoi ?
Par les qualités formelles pré-citées... t'as un peu de mal à suivre, ou c'est juste pour être contrariant ? :mrgreen:
J'aime bien faire mon relou. :)
Mais sinon, plus sérieusement : non, mon emballement pour ce film n'est aucunement influencé. Je le trouve (quasi-) parfaitement réussi, aussi bien sur le fond que sur la forme, l'un étant en totale cohérence avec l'autre.
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Message par Gounou »

MJ a écrit :Je dois être un gros béotien consumériste fini, mais oui: les qualités formelles d'un film m'influent dans mon jugement sur celui-ci. :|
Il ne s'agit pas seulement d'être influencé par un certain formalisme (ici brillant et adéquat, je ne dirai pas le contraire...) mais que cela prenne une valeur absolue sur un fond qui a également ses grandes ambitions et que je trouve, pour ma part, plus perfectible par excès d'aplomb et d'épaisseur dans le discours. Voilà tout.
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Jordan White
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Message par Jordan White »

De bonnes choses, d'autres bien moins heureuses.
Le premier film altermondialiste d'anticipation ?

Le portrait du Londres de 2027 ravagé par la guerre civile, avec ses indications visuelles et sonores agressives (les campagnes publicitaires qui n'auraient pas dépareillé dans un régime dictatorial) tendrait ou voudrait tendre à démontrer que dans le futur, en gros dans vingt ans, c'est-à-dire demain, la population sera parquée, surtout celle qui est clandestine dans des camps où l'immondice est devenue reine, laissée pour compte. Les infrastructures routières seront désastreuses, par contre il y aura un avertisseur de choc avant les collisions, les gardes royales seront toujours à cheval et le ciel sera lourd.

Difficile de s'attacher à des personnages qui ne deviennent à la longue que des fantômes au pire, des silhouettes au mieux, enfouies dans le brouillard, dont on essaie de suivre le fil de l'histoire, sans savoir d'où ils viennent et dont on comprend peu à peu ce vers quoi ils vont. Le nihilisme du début fait penser que le pire n'est pas encore venu et qu'il y a peu de chances que ça s'améliore. Cette chape de plomb m'a parue très caractéristique durant la seconde partie à partir du moment où l'on comprend qu'il y a un enfant à sauver, pas encoré né, mais symbole d'une possible humanité. Le film entre temps ne prend pas une seconde pour respirer, si ce n'est pour fumer de la ganja. Après tout, même en enfer, quand il est sur Terre, il y a encore moyen de faire du business là-dedans.

Clive Owen est impeccable, Julianne Moore en leader
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disparaît très vite
les personnages secondaires restent malheureusement secondaires, et le film montre un monde dévasté dans lequel certains collectionnent tout de même des objets de qualité, ou plus précisément des reliques d'un temps passé qui n'existent plus (la copie de Guernica accrochée au mur de l'artiste). Le seul moment arty et au delà du temps en quelque sorte d'un film qui se veut absolument, terriblement contemporain en s'ancrant le plus possible dans le récit documentaire, caméra à l'épaule dans tous les plans, et jeu expressif.

Les séquences d'assauts sont spectaculaires, celle de la voiture, où la caméra tourne à l'intérieur sans s'arrêter de pivoter impressionne. La virtuosité de Cuaron ne fait aucun doute, mais ça ne me raccroche pas pour autant aux enjeux de l'histoire, à cette peinture ultra caricaturale d'un monde souterrain, activiste qui rêve du Projet Humanité. Tout en tuant à côté pour leur cause. Cuaron a heureusement la bonne idée de ne pas cautionner leurs agissements stupides par la scène à la fois triste et teintée d'humour noir de Jasper face à ses mêmes activistes
Spoiler (cliquez pour afficher)
Durant laquelle il est assassiné.
C'est pour moi l'une des rares scènes remuantes du film avec la dernière séquence de dix minutes, si virtuose qu'elle en finit par ne plus montrer que cela. On s'en prend les mirettes, certes, et après ?

Bref, très mitigé.
Autre chose concernant l'immigration : ne peut-elle être qu'assimilée à la clandestinité et donc à l'illégalité ? Le réal nous montre surtout celle qui est concernée par la clandestinité et là encore j'ai trouvé sa patte lourde. Tout ce qui est militaire, policier est ici traité comme un mal incurable, une forme d'agression constante.
Ca m'a vraiment gêné en tout cas, tout comme l'image de la manifestation des arabes armés de kalachnikov et criant Allah Akbar ! car j'avais l'impression qu'on assimilait cela à des milices plus dangereuses encore que les groupuscules activistes.

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Ubik
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Message par Ubik »

Difficile de s'attacher aux personnages ? :shock:

Clive Owen - acting de l'année perso : une évolution sans qu'on puisse la pointer du doigt et un personnage magnifiquement écrit ; un tour de préstidigitation ; du très grand art - m'a rendu le final au bord des larmes. Faut il que j'aborde le personnage de Caine ? :o Ou encore les morts précipités de quelques autres ? Sans parler de Julian Moore, sublime, dont le personnage marque de son emprunte le film alors que pourtant...

Les plans séquences distribuent l'émotion. La paralysie d'abord, la naissance ensuite, le silence enfin. Ils ne laissent pas seulement bouche bée. Ils distribuent. Ils sont nécéssaires. Ils permettent la pause finale. Sublime pause finale.

C'est dommage de passer à côté de ce film. De ne pas rentrer dedans. Ceci dit sans prétention aucune - comme toujours. :D
Jordan White
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Message par Jordan White »

Ubik a écrit :Difficile de s'attacher aux personnages ? :shock:
En raison de l'ambiance générale, glaciale, apocalyptique. Ce n'est pas que j'attendais une soirée disco ou le royaume de Candy (ou il y a aussi des méchants) mais une plus grande profondeur dans le traitement des personnages. Hormis Clive, Michael Caine et la porteuse de l'enfant, quelles autres figures marquantes retient-on, notamment au niveau des personnages secondaires ?
Julianne est à part. Son charisme suffit
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Et sa mort associée à quelque chose d'inattendu et de très violent y aide.
Clive Owen - acting de l'année perso : une évolution sans qu'on puisse la pointer du doigt et un personnage magnifiquement écrit ; un tour de préstidigitation ; du très grand art - m'a rendu le final au bord des larmes.
Je n'ai pas dit le contraire à son propos.

Faut il que j'aborde le personnage de Caine ? :o
Un de ceux qui m'ont d'abord un peu amusés puis énervés. Mais l'image finale qu'il renvoie fait pencher légèrement la balance dans le positif.
Mais sinon ça reste très caricatural.
Les plans séquences distribuent l'émotion. La paralysie d'abord, la naissance ensuite, le silence enfin. Ils ne laissent pas seulement bouche bée. Ils distribuent. Ils sont nécéssaires. Ils permettent la pause finale. Sublime pause finale.
Sans nier leur efficacité, leur technique aboutie, leur maîtrise quoi, je les ai trouvés aussi un peu ostentatoires à force de durer.
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cinephage
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Message par cinephage »

Ubik a écrit :C'est dommage de passer à côté de ce film. De ne pas rentrer dedans. Ceci dit sans prétention aucune - comme toujours. :D
Je comprends ce que dit Jordan sur le coté esbrouffe de la mise en scène, c'est un reproche qui se tient (mais n'a-t-on pas reproché la même chose au Welles de Citizen Kane ?? Un film qui affiche sa virtuosité n'est pas forcément qu'un bel objet vide).

Je comprends ce qu'il dit sur le coté partisan du récit, qui simplifie les forces de l'oppression policière (malgré pourtant un policeman rigolo et plutôt humain, qui à mon sens nuance le propos) et prend le parti des illégaux maltraités. Je répondrais cela dit que Cuaron est Mexicain, et sa prise de position, comme son choix d'un tel sujet, me parait assez légitime.

En revanche, comme toi, Ubik, je trouve regrettable de ne pas s'être laissé émouvoir par les personnages, pourtant bien humains (Michael Caine, très attachant, la relation d'amour gachée entre J.Moore et Owen, dont on perçoit un moment le potentiel dans la séquence de l'oeuf dans la voiture, un grand moment d'émotion lors de la descente d'escalier, à mes yeux la plus belle descente d'escalier depuis, dans un autre registre il est vrai, Sunset Boulevard).
Pour ma part, si j'ai apprécié la mise en scène, ce sont avant tout les personnages et le récit qui m'ont emballé. Comme quoi, la technique a peut-être fait écran dans le cas de Jordan...
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Helward
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Message par Helward »

Jordan White a écrit : Autre chose concernant l'immigration : ne peut-elle être qu'assimilée à la clandestinité et donc à l'illégalité ? Le réal nous montre surtout celle qui est concernée par la clandestinité et là encore j'ai trouvé sa patte lourde. Tout ce qui est militaire, policier est ici traité comme un mal incurable, une forme d'agression constante.
Ca m'a vraiment gêné en tout cas, tout comme l'image de la manifestation des arabes armés de kalachnikov et criant Allah Akbar ! car j'avais l'impression qu'on assimilait cela à des milices plus dangereuses encore que les groupuscules activistes.
J'avoue ne pas trop te comprendre sur ces points. Le postulat du film se base sur un monde en déroute, ruiné, où seul l'Angleterre a réussi un maintenir un semblant d'ordre. La contrepartie est justement une augmentation des phénomènes clandestins et de la répression policière (l'état est devenu fasciste et, finalement, c'est ce qui lui a permis de subsister*). Je ne pense pas que Cuaron nous fasse un cours de politique intérieure. Il illustre juste ce qui pourrait advenir dans un pareil cas. Et finalement çà me parait assez réaliste.
Par contre je suis plutôt d'accord avec toi concernant l'empathie éprouvée vis à vis des personnages. J'en suis resté assez distant. :wink:


*edit: Même si ma phrase peut laisser l'entendre, je ne cautionne pas les états fascistes ou en voie de fascisation, hein... :|
Ubik
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Message par Ubik »

cinephage a écrit :
Ubik a écrit :C'est dommage de passer à côté de ce film. De ne pas rentrer dedans. Ceci dit sans prétention aucune - comme toujours. :D
Je comprends ce que dit Jordan sur le coté esbrouffe de la mise en scène
Ou de l'esbrouffe dans Children Of Men ? :o
C'est un sentiment que j'aurai jamais pu avoir à la vision de ce film. Je la reconnais dans plein d'autre mais juste pas dans celui la.
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cinephage
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Message par cinephage »

Ubik a écrit :Ou de l'esbrouffe dans Children Of Men ? :o
C'est un sentiment que j'aurai jamais pu avoir à la vision de ce film. Je la reconnais dans plein d'autre mais juste pas dans celui la.
Rien qu'à lire les interventions sur ce topic, on y voit combien chacun loue la maestria technique du film, son visuel époustouflant, sa mise en scène élégante, ses longs et superbes plans si construits... Même les détracteurs du films concèdent sa force technique.

Pour moi, rendre apparente la mise en scène d'un film n'est pas un défaut, mais il y a des gens qui préfèrent une caméra plus discrète. Dans Children of Men, la caméra n'est pas discrète. Je disais juste que je comprenais qu'on critique ce coté "m'as-tu-vu" de la mise en scène, même si pour moi, elle est plutôt une qualité qu'un défaut.

Edit : Par "je comprends", je veux dire que je perçois ce qui lui a donné cette impression.
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