Werner Herzog

Rubrique consacrée au cinéma et aux films tournés à partir de 1980.

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Rick Blaine
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Re: Werner Herzog

Message par Rick Blaine »

Merci. :wink:

Les raisons exposées sont plutôt compréhensibles.
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Kevin95
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Re: Werner Herzog

Message par Kevin95 »

AGUIRRE, LA COLÈRE DE DIEU / Aguirre, der Zorn Gottes - Werner Herzog (1972) révision

Mon attirance pour Aguirre s'accroit avec les visions. D'abord sceptique face à sa lenteur et l'absence manifeste d'une tension forte (l'adolescence et son cortège d'avis foireux), j'ai appris ensuite à me laisser guider par le guide Werner Herzog avant d'y déceler une beauté, une rage latente, une fascination. Tout se joue dès les premiers plans, dans cette vision hallucinée et hallucinante d'un groupe de dingos en expédition en Amérique du Sud. Des colons sûrs de leur suprématie et de leur divinité empêtrés dans un décors trop grand, trop sauvage et trop violent pour eux. Les notes trippantes de Popol Vuh murmurent de baisser la garde, de respirer un bon coup et de laisser le regard se perdre dans le film. La suite n'est qu'une longue agonie d''occidentaux en déroute. Klaus Kinski mène la barque jusqu'au point final. Seul sur son radeau, il règne sur une armée de singes tandis qu'autour de lui, il n'y a que le calme du chaos. L'influence d'Aguirre est évidente, nous sautent à la gueule des images de films aussi différents qu'Apocalypse Now de Francis Ford Coppola (1979) et Cannibal Holocaust de Ruggero Deodato (1980). Trippant c'est le mot.
Les deux fléaux qui menacent l'humanité sont le désordre et l'ordre. La corruption me dégoûte, la vertu me donne le frisson. (Michel Audiard)
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Jeremy Fox
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Re: Werner Herzog

Message par Jeremy Fox »

Kevin95 a écrit :AGUIRRE, LA COLÈRE DE DIEU / Aguirre, der Zorn Gottes - Werner Herzog (1972) révision

Mon attirance pour Aguirre s'accroit avec les visions. D'abord sceptique face à sa lenteur et l'absence manifeste d'une tension forte (l'adolescence et son cortège d'avis foireux), j'ai appris ensuite à me laisser guider par le guide Werner Herzog avant d'y déceler une beauté, une rage latente, une fascination. Trippant c'est le mot.
Voilà. Et malgré toutes mes autres tentatives, jamais un autre Herzog ne m'a autant fasciné par la suite, seul Fitzcarraldo arrivant à s'en approcher.
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Carlito Brigante
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Re: Werner Herzog

Message par Carlito Brigante »

Jeremy Fox a écrit :
Kevin95 a écrit :AGUIRRE, LA COLÈRE DE DIEU / Aguirre, der Zorn Gottes - Werner Herzog (1972) révision

Mon attirance pour Aguirre s'accroit avec les visions. D'abord sceptique face à sa lenteur et l'absence manifeste d'une tension forte (l'adolescence et son cortège d'avis foireux), j'ai appris ensuite à me laisser guider par le guide Werner Herzog avant d'y déceler une beauté, une rage latente, une fascination. Trippant c'est le mot.
Voilà. Et malgré toutes mes autres tentatives, jamais un autre Herzog ne m'a autant fasciné par la suite, seul Fitzcarraldo arrivant à s'en approcher.
Je suis assez d'accord même si j'aime (quasiment) toute l’œuvre (du moins dans ce que j'ai vu).
Coeur de Verre aussi m'hypnotise immensément.
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Re: Werner Herzog

Message par gnome »

Carlito Brigante a écrit :
Jeremy Fox a écrit : Voilà. Et malgré toutes mes autres tentatives, jamais un autre Herzog ne m'a autant fasciné par la suite, seul Fitzcarraldo arrivant à s'en approcher.
Je suis assez d'accord même si j'aime (quasiment) toute l’œuvre (du moins dans ce que j'ai vu).
Coeur de Verre aussi m'hypnotise immensément.
Idem. Aguirre est un film particulier. je n'ai pas trop accroché à la première vision non plus, mais il s'insinue petit à petit dans votre esprit à chaque vision ou révision. Un immense film.
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Flol
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Re: Werner Herzog

Message par Flol »

Personne n'a été voir Salt and Fire ? Bon on va encore dire que je suis pas objectif, mais c'est indéniablement un étrange objet typiquement herzogien. Un trip absurde aux allures de rêve éveillé, totalement casse-gueule mais fascinant.
Par contre, si vous voulez y aller uniquement parce que vous êtes fan de Gael Garcia Bernal, vous risquez de tirer la gueule. Et ça tombe bien, je pense que c'est pile poil ce que voulait provoquer ce bon Werner. :D
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Re: Werner Herzog

Message par Colqhoun »

Donc cette année, en plus de Into the Inferno et Lo & Behold, il a encore trouvé le temps de tourner une fiction ?
D'ailleurs, Into the Inferno me reste bien en tête depuis que je l'ai vu. Je crois que je vais le revoir assez rapidement.
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Flol
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Re: Werner Herzog

Message par Flol »

Colqhoun a écrit :Donc cette année, en plus de Into the Inferno et Lo & Behold, il a encore trouvé le temps de tourner une fiction ?
Toutafé. Je sais pas comment il fait.
Et on attend encore de découvrir Queen of the Desert, présenté à Berlin en 2015 et à la sale réputation, mais qui m'intrigue quand même (forcément).
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Re: Werner Herzog

Message par reuno »

Apparemment, d'après allociné, il n'est diffusé que dans 18 salles. C'est toujours mieux que rien mais j'espère qu'il arrivera quand même près de chez moi.

Sinon oui Into the Inferno, un des grands moments de mon année cinématographique aussi.
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Re: Werner Herzog

Message par TheGentlemanBat »

Ratatouille a écrit :Personne n'a été voir Salt and Fire ? Bon on va encore dire que je suis pas objectif, mais c'est indéniablement un étrange objet typiquement herzogien. Un trip absurde aux allures de rêve éveillé, totalement casse-gueule mais fascinant.
Par contre, si vous voulez y aller uniquement parce que vous êtes fan de Gael Garcia Bernal, vous risquez de tirer la gueule. Et ça tombe bien, je pense que c'est pile poil ce que voulait provoquer ce bon Werner. :D
Moi c'est plutôt mon côté "groupie" de Michael Shannon qui m'aurait donné envie de tenter le coup :mrgreen: Mais bon, ça c'était avant de lire les critiques qui globalement descendent pas mal le film (je suis toujours prompt à aller me faire mon opinion par moi-même mais faut que je sois un minimum encouragé quand même).
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Shin Cyberlapinou
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Re: Werner Herzog

Message par Shin Cyberlapinou »

Franchement je ne comprends pas la volée de bois vert que se prend ce Salt and fire ("digne d'une série Z des années 80", "un Herzog au ras des pâquerettes", "bavard, nunuche et factice"... ), ce n'est clairement pas un opus majeur, le sujet se prêtait peut-être plus à un documentaire, il y a souvent des airs de film de récréation (2 semaines de tournage), ça flotte et c'est même parfois "chiant" mais il y a quelque chose, des images qui marquent, ce sens de la poésie déglinguée que l'on peut retrouver dans La ballade de Bruno ou Bad Lieutenant, bref à son échelle c'est une bonne surprise et c'est à croire que les gens s'attendaient à un ecothriller (qui n'a rien de thrillant, et c'est à l'évidence un choix) conventionnel. 6,5/10 en ce qui me concerne.
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Flol
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Re: Werner Herzog

Message par Flol »

On est bien d'accord. Quand j'entends ou lis qu'il n'y a rien à y sauver, que le film est carrément nul, un nanar ou autre appellation à peine exagérée, ça me désespère. On peut pas accrocher, on peut être perturbé par le ton du film (qui fait constamment dans l'humour noir, à un tel point qu'on peut presque avoir l'impression que Herzog se fout du spectateur), mais il y a forcément quelque chose à en tirer, des images qui marquent comme tu le dis (les scènes de fin avec l'iPad, par exemple).
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Re: Werner Herzog

Message par Anorya »

Leçons de ténèbres (Werner Herzog - 1992)

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La guerre fait rage au Koweït, les puits de pétrole sont en feu, partout ce n'est que ruines et désolation... Herzog met en scène cette Apocalypse à la manière d'un film de science-fiction où la terre serait une planète inconnue, un monde perdu. Rappelant Fata Morgana (1972), Leçons de ténèbres est somptueux, hypnotisant, grandiose. Ambigü, ô combien, dans son esthétisation extrême du désastre, mais absolument nécessaire à la compréhension d'une oeuvre qui n'a peut-être qu'un sujet : la création, la recréation ou la destruction du monde.



"Préserver tout : Cela semble être votre conception du cinéma, particulièrement dans vos documentaires. Préserver quelque chose d'extraordinaire qui a lieu, et dont les gens ne se souviendraient pas, s'il n'y avait vos films. Nous pensons à Little Dieter needs to fly (1997), Wings of hope (2000), Grizzly man (2005)...

_ Certes mais je crois que c'est le cas de tous les documentaires. Prenez Lessons of Darkness (1992), qui se passe au Koweit. Chaque jour, pendant 2 ou 3 mois, toutes les chaînes de télé ont montré les feux, mais jamais pendant plus de 5 ou 10 secondes. Je les ai filmés selon un autre timing et avec une autre patience, une autre insistance. Je les ai filmés pour la mémoire de la race humaine."

Werner Herzog, entretien avec Hervé Aubron et Emmanuel Burdeau, ed. Capricci, p.35.



Au vu des images, on peut comprendre l'ambiguïté du film et le fait qu'il fut très mal perçu à sa sortie. Ces longs plans contemplatifs en hélicoptère sur fond de Wagner, Grieg ou Arvo Pärt sont probablement ce que le cinéaste a fait de plus puissant esthétiquement dans son cinéma. Bien sûr les images parlent déjà d'elle-mêmes, le spectacle est bigger-than-life, mais même ici, le travail de Herzog pour mettre en forme l'apocalypse révèle de l'inédit, surtout si lui-même garanti le projet de filmer pour la mémoire de la race humaine. Rien de moins que ça, Herzog veut filmer de l'intemporel, une perception qui part de l'épicentre pour ensuite longer (tel ce plan d'une conduite de pipeline que l'on suit méthodiquement dans les dunes de sables) la catastrophe et rester constamment à la fois à ses abords et en son centre.

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Après deux chapitres avec leurs cartons de textes ("La ville" puis "La guerre") sur lesquels le cinéaste passe très vite, le vrai projet arrive et prend toute son ampleur. Le parc national de Satan révèle après la bataille des restes confus, des ossements d'animaux, des carcasses et des ruines mais d'où toute présence humaine semble avoir été annihilée. Et pour mieux doter le film des contours de la science-fiction, Herzog ne fera quasiment pas apparaître les humains ou si peu. Un pompier en ouverture, filmé comme une étrange créature qui tente de communiquer de loin avec l'équipe de tournage. D'autres pompiers à la fin qui tentent vainement d'éteindre l'un des 732 puits de pétroles enflammés ouverts par les forces irakiennes se retirant (incendies qui ne s'éteindront qu'au bout de plusieurs mois)... avant finalement de le rallumer (?). Au milieu, une femme presque muette ne pouvant plus parler suite à la torture de son fils, puis une jeune mère qui raconte que son enfant a été traumatisé et depuis ne parle plus.


La parole, le grand sujet caché d'Herzog, ce dernier n'ayant jamais caché vouloir tourner sur les langues mortes ou en train de disparaître comme il le révélait dans un (passionnant) entretien en 2008 à Aubron et Burdeau. Or justement, que fait Werner ? Il parle, en voix-off... Mais soudain en plein milieu du film ne dit plus rien, se retire. En effet, que dire de plus quand les images et les titres des chapitres parlent d'eux-mêmes ? De ces "Protubérances" qui dévoilent des bulles constamment en mouvement et brûlantes qui explosent comme sur une Solaris décérébrée ? De ces arbres figés à toujours dans le pétrole ? De ces lacs bleutés qui ne sont en fait que des tonnes et des tonnes de litres de pétroles déversés qui renvoient en fait juste le bleu du ciel dans une illusion parfaite ?


Jamais autant le constat de fin du monde n'a jamais été aussi bien ressenti dans son oeuvre. Ces longs plans et la musique, tout cela secoue plus que prévu et éloigne définitivement la piètre image banalisée que pouvaient offrir les télévisions d'hier. Le cinéaste ne cache d'ailleurs pas lui-même son constat désabusé devant un gâchis immense dont la beauté n'a d'égale ici que la profonde terreur qui en résulte. Un monde devenu vide et où puisque l'on a plus besoin du pétrole et par définition de la nature, l'on a dès lors plus besoin en filigrane de l'humain. Et c'est terrible. C'est de ce constat final que le film met K.O et l'épilogue de ces pompiers qui doutent soudain de leurs gestes n'en finit plus dès lors de nous interroger sur le sens qu'on peut donner à notre existence face à toute cette destruction qui nous dépasse.
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Anorya
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Re: Werner Herzog

Message par Anorya »

Petit Dieter doit voler (1997)
Les ailes de l'espoir (2000)



" (...) Ou bien encore le film avec Juliane Koepcke, Wings of hope : je le dis dans le commentaire, c'est aussi un projet qui dormait en moi depuis de très nombreuses années. J'ai été si prêt de partager son sort... En 1972, je devais être dans le même avion qu'elle, mon billet était réservé. Mais tous les avions de la compagnie aérienne s'étaient crashés au cours des deux années précédentes. C'était le dernier appareil et il n'y avait pas assez de places pour tout le monde."

Werner Herzog, entretien avec Hervé Aubron et Emmanuel Burdeau, ed. Capricci, p.51.



Voilà deux documentaires qui se répondent comme les deux faces d'une même pièce, des films jumeaux en quelque sorte.
Et même si dans la forme les histoires varient, Little Dieter needs to fly (1997) et Wings of hope (2000) racontent au fond toutes les deux des histoires de survivants. Dans le premier, l'histoire de Dieter Dangler qui inspirera plus tard à Herzog un pur film de fiction, Rescue Dawn (vraiment très fidèle du coup avec le recul). S'écrasant au dessus du Laos en pleine guerre du Vietnam, Dangler est très vite fait prisonnier et emmené à la frontière Nord-Vietnam pour y croupir avec d'autres prisonniers. Dès lors dans sa propre survie, il n'aura plus qu'une idée fixe : s'enfuir. Dans le second, l'histoire de Juliane, unique rescapée d'un vol contenant 92 personnes. Ayant survécu quasi-miraculeusement au crash mais pas forcément indemme, la jeune fille d'alors 17 ans tente lentement de sortir de la forêt pour y espérer un peu de secours, les recherches ayant cessées depuis plusieurs jours...

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Des films jumeaux où, Werner Herzog dans les deux cas va demander aux rescapés de refaire le trajet qu'ils ont vécus. Cela implique pour l'un de retrouver presque les conditions de survie qu'il a dû subir (pour les besoins du film, Dangler montre donc comment il était allongé au sol, écartelé, puis on l'emmène, les mains liées d'un camp à un autre. En chemin il explique les astuces des soldats pour eux-même survivre avec quasiment rien : faire un feu, maintenir des braises allumées, bâtir un campement avec des grandes branches... Enfin il rejoue presqu'à l'identique ses conditions d'emprisonnement avec les autres prisonniers puis comment lui et un autre américain devenu alors son ami vont pouvoir s'échapper), pour l'autre, de retrouver, à partir du crash, le trajet retour en longeant un ruisseau qui devient ensuite une rivière, puis un fleuve...


Bien que Les ailes de l'espoir ait été mûrement réfléchi pendant un long moment par Herzog, Petit Dieter doit voler est aussi pour le coup un film très personnel. En faisant raconter au bonhomme sa jeunesse dans une petite ville d'Allemagne près de la forêt noire pendant la seconde guerre mondiale, c'est aussi Herzog qui déroule sa propre vie. Une jeunesse similaire perçue à travers ce compatriote éloigné mais aussi un même désir de vivre. Pour l'un, l'obsession de voler, inaltérable depuis le moment où un avion de guerre balançant des bombes frôlera le toit de la petite maison familiale, pour l'autre, le désir de tourner et surtout voyager constamment (a ce jour, Herzog reste d'ailleurs l'un des seuls cinéastes à avoir "tourné sur les cinq continents". La seule chose qu'il n'a pas (encore ?) exploré, c'est l'espace). Dieter comme Werner frôlera d'ailleurs plusieurs fois la mort (il survivra d'ailleurs à 4 autres crashs par la suite).

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L'histoire de Juliane frôle également l'histoire personnelle d'Herzog puisqu'à l'origine, les deux devaient être sur le même avion, le cinéaste devant tourner alors son Aguirre. Herzog ne pu prendre le vol. Par la suite, ironie du sort (la même qui fait frôler des avions et hélicoptères près de Dieter dans la jungle sans qu'on ne puisse jamais alors le repérer), le cinéaste remarquera avoir tourné des plans d'Aguirre non loin de là où Julianne au même moment errait seule dans la jungle !


A nouveau Juliane et Dieter se ressemblent, rescapés d'une expérience extrême, ils ont appris à l'enfouir en eux pour survivre et dans les deux cas on remarque un Dieter troublé de revivre certaines choses (le passage éprouvant de la mort de son ami, on le sent près à s'effondrer en pleurant. Par pudeur il détourne alors à plusieurs reprises la tête et reste à contempler le pont et la route près de lui. A tel point que Herzog le laisse comme ça sans intervenir. On comprend ensuite à la nuit tombée que le cinéaste a continué à tourner, laissant l'homme dans ses souvenirs tristes, ayant probablement juste au montage enlevé les plans du jour finissant) et une Juliane dont la supposée carapace se craquelle lentement.


Dans un cas comme dans l'autre dans l'extrême fatigue, leurs frontières entre le réel et l'illusion s'en trouvèrent à chaque fois brouillées, les hallucinations, les rêves, Herzog leur fait raconter cet aspect là, ce non-dit, aussi fascinant que ce qui filmé du réel. Ce sont d'ailleurs presque les meilleurs moments de ces deux films brillants : quand Herzog fait triompher un autre monde, presque palpable, à la limite de l'onirique comme dans ses films de fiction. Sauf qu'ici le rêve se déroule presque par extension dans le mental d'un spectateur médusé. Arriver à nous donner de telles images sans avoir besoin de le filmer, c'est en somme que le cinéaste est passé maître de son art.
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Flavia
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Re: Werner Herzog

Message par Flavia »

Ciné+ Club rend hommage au réalisateur Werner Herzog et à l’acteur Klaus Kinski le dimanche 3 février lors d’une soirée spéciale.

https://www.mycanal.fr/articles/actuali ... -vs-kinski
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