Quand les grands cinéastes s'insultent...

Rubrique consacrée au cinéma et aux films tournés à partir de 1980.

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mannhunter
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Re: Quand les grands cinéastes s'insultent...

Message par mannhunter »

Olivier ASSAYAS mitigé sur John McTIERNAN...:

"Je me souviens avoir observé avec une immense perplexité l'intérêt suscité par John McTiernan, réalisateur occasionnellemen efficace de quelques films d'action à grand spectacle, mais auquel il est tout à fait délicat d'appliquer la lecture auteuriste qu'on plaquait sur son travail. Ses qualités et ses défauts sont ceux de la majorité des réalisateurs hollywoodiens d'aujourd'hui:
chaque année sortent des écoles de cinéma californiennes de très jeunes gens qui, techniquement, savent à peu près tout faire, et avec une précision diabolique. Par contre ils ne savent pas faire jouer un acteur, construire un personnage. Mais reste qu'ils ont des compétences impressionnantes dans des domaines où littéralement aucun cinéaste européen ne peut s'aligner."
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Message par Federico »

Bon, ça a peut-être déjà été cité parmi les 70 pages précédentes mais comme il est beaucoup question d'Orson Welles en ce moment et qu'il se faisait rarement prier pour médire du milieu et en particulier de ses confrères, je me souviens d'une interview/conférence vers la fin de sa vie (c'était peut-être dans l'émission Cinéma, cinémas) où il avait eu à la fois des mots très durs sur Elia Kazan à propos de son comportement durant le Maccarthisme... tout en achevant sa diatribe assez furibarde par quelque chose comme : "But he's a great director".

Et puis je n'arrive plus à retrouver les termes exacts de sa très vacharde description de la physionomie de son pourtant grand ami John Huston, lue ou entendue également dans ses dernières années. C'était cinglant mais formidablement bien vu (en gros, il décrivait toutes les marques de cruauté et de dureté, presque ride après ride pour finir vers le mauvais sourire enjôleur de son "pote").
The difference between life and the movies is that a script has to make sense, and life doesn't.
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Message par Kevin95 »

Federico a écrit :Bon, ça a peut-être déjà été cité parmi les 70 pages précédentes mais comme il est beaucoup question d'Orson Welles en ce moment et qu'il se faisait rarement prier pour médire du milieu et en particulier de ses confrères, je me souviens d'une interview/conférence vers la fin de sa vie (c'était peut-être dans l'émission Cinéma, cinémas) où il avait eu à la fois des mots très durs sur Elia Kazan à propos de son comportement durant le Maccarthisme... tout en achevant sa diatribe assez furibarde par quelque chose comme : "But he's a great director".

Et puis je n'arrive plus à retrouver les termes exacts de sa très vacharde description de la physionomie de son pourtant grand ami John Huston, lue ou entendue également dans ses dernières années. C'était cinglant mais formidablement bien vu (en gros, il décrivait toutes les marques de cruauté et de dureté, presque ride après ride pour finir vers le mauvais sourire enjôleur de son "pote").
Je ne peux que renvoyer au récent livre EN TÊTE À TÊTE AVEC ORSON d'Henry Jaglom où l'ami Welles dézingue (avec une louche XXL de mauvaise foi) une ribambelle de (grands) réalisateurs. Huston est un feignant, Chaplin est un égoïste radin, Kazan un donneur (même si Welles se dit encore ami avec son camarade grec), Powell est un amateur etc etc etc.

C'est vache c'est clair, mais rigolo comme tout (comme le livre d'ailleurs).
Les deux fléaux qui menacent l'humanité sont le désordre et l'ordre. La corruption me dégoûte, la vertu me donne le frisson. (Michel Audiard)
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Message par mannhunter »

Bertrand Tavernier revient sur De Palma, Carpenter et Friedkin, 10 ans après...:

"Je fais des réserves sur ces trois cinéastes (surtout les deux premiers) tout en défendant nombre de leurs films et en louant d’autres que j’ai découvert par la suite (BUG, L’ENFER DU DEVOIR) car je trouve que nombre de leurs films patinent par manque d’intelligence ou d’intuition scénaristique, que leur technique parfois brillante s’épuise ce qui n’est la cas des meilleurs Frankenheimer pour ne pas parler d’Altman, de Scorsese ou de Malick. Certains des derniers de Palma sont consternants, d’une pauvreté intellectuelle terrible avec des obsessions érotiques qui virent au rabâchage (a-t- il signé un film qui égale CARLITO’S WAY?). Ce n’est pas le cas de Friedkin dont les derniers films sont surprenants. Cela dit les cinéastes existent par leurs bons films et nous avons tous des idées préconcues (Moi sur le film d’horreur qui m’ennuie de plus en plus). Et je ne suis pas là pour commenter les critiques. J’ai été parfois d’accord avec Thoret mais je trouve parfois qu’il parle à coté des films et que ce qu’il décrit ou ressent n’est pas sur l’écran"
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Dale Cooper
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Message par Dale Cooper »

mannhunter a écrit :J’ai été parfois d’accord avec Thoret mais je trouve parfois qu’il parle à coté des films et que ce qu’il décrit ou ressent n’est pas sur l’écran"
Voilà. Un peu comme mannhunter en fait.
Je comprends tout à fait son point de vue (plus mesuré qu'autrefois j'ai l'impression) sur les cinéastes qu'il évoque. Mais ça n'a pas grand chose à voir avec ce topic ("Quand les grands cinéastes s'insultent"), on sent l'opinion avec un respect derrière. On est loin des Jodorowsky, Rivette ou Gans (même s'il n'est pas un grand cinéaste) qui dit "c'est d'la merde"...
Dernière modification par Dale Cooper le 5 oct. 15, 12:11, modifié 1 fois.
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Re: Quand les grands cinéastes s'insultent...

Message par mannhunter »

Dale Cooper a écrit :
mannhunter a écrit :J’ai été parfois d’accord avec Thoret mais je trouve parfois qu’il parle à coté des films et que ce qu’il décrit ou ressent n’est pas sur l’écran"
Voilà. Un peu comme mannhunter en fait.
Oui comme il le dit on a tous nos idées préconçues!
Dale Cooper a écrit :on sent l'opinion avec un respect derrière. On est loin des Jodorowsky, Rivette ou Gans (même s'il n'est pas un grand cinéaste) qui dit "c'est d'la merde"...
Il y a effectivement une nuance entre l'exaltation du "C'est nul! C'est génial!" et s'exprimer avec les plus modérés "J'aime/Je n'aime pas"...
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-Kaonashi-
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Message par -Kaonashi- »

Watkinssien a écrit :
Extrait du documentaire Big John, de Julien Dunand, et sur lequel j'ai bossé...
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Watkinssien
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Re: Quand les grands cinéastes s'insultent...

Message par Watkinssien »

-Kaonashi Yupa- a écrit :
Watkinssien a écrit :
Extrait du documentaire Big John, de Julien Dunand, et sur lequel j'ai bossé...
:wink:
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Re: Quand les grands cinéastes s'insultent...

Message par mannhunter »

Bertrand Tavernier visiblement peu client de Michael Cimino et son cinéma...:


"HEAVEN’S GATE contient en germe tous les défauts des films ultérieurs de Cimino, casting improbable ou médiocre, sauf Huppert « que Vincent Canby jugeait la moins credible de toutes les madames du western », ce qui est peut être juste historiquement mais faux quant à la qualité de l’interprétation), direction d’acteur médiocre (John Hurt, Walken, Sam Wasterson), scénario et dialogue écrits parfois avec les pieds. C’était en partie racheté par un flamboiement visuel, une vraie virtuosité plastique mais à chaque vision, la sottise de certains dialogues, saute aux yeux. Et cela s’aggravera dans l’Année du Dragon. Il reste des passages brillants mais la dramaturgie est inerte (4 ou 5 fois la même scène entre le héros et son supérieur), la vision de l’Orient infantile (il choisira une japonaise pour jouer une chinoise ce qui lui vaudra des attaques très violente de la communauté asiatique).
Je l’ai vu plusieurs fois à Lyon et le trouvait très pénible, arrogant et pas du tout intelligent. Reste le sublime DEER HUNTER son seul film abouti. Le Canardeur est agréable mais mineur. Volker Schlonndorf me disait qu’il était inculte, ne lisait rien et vivait sur l’argent de Heaven’s Gate.
J’ai rencontré des dizaines de réalisateurs américains. Il était le moins intéressant.
Rien chez Walken dans HEAVEN'S GATE ne sonne juste par rapport à l’époque, au lieu. Ni son accent, ni sa manière de marcher Il joue son personnage comme un maffieux new yorkais d’aujourd’hui. Très peu d’acteurs américains étaient capables de se déplacer dans des rôles historiques (d’où le recours aux comédiens britanniques ou européens), sauf certains acteurs de western (Lancaster était formidable dans le Guépard et Sterling Hayden dans 1900. Il suffit de comparer Walken qui a été bon dans des polars modernes et Jack Palance qui joue le même personnage dans SHANE (inspiré par les mêmes évènements historiques) pour voir la différence, la justesse de Palance, cette manière d’être à la fois étranger à la communauté, au décor et pourtant faisant partie de la même époque, respirant le même air. Hurt n’a qu’une seule note. Je n’aime guère non plus cette manière de filmer les étrangers (des braillards « qui semblent sortis d’une opérette de Sigmung Romberg » écrivait Pauline Kael) qui sont incapables d’avoir un plan sensé. Il faudra un Américain pour leur donner l’idée de la tortue, ce à quoi ces professeurs, ces intellectuels, ces chasseurs n’ont pas pensé. Heureusement un Américain blanc veille et leur donne un surplus d’intelligence et de tactique (dans la réalité ils ont été intelligents, se sont planqués sans se faire tirer dessus, ont cerné les éleveurs qui ont été délivrés par l’armée). En fait il n’y a aucune différence dans la vision de Cimino entre la manière dont il filme cette communauté et son approche délirante de fausseté de Salvatore Giuliano. C’est la même arrogance américaine (qui lui fait reprocher à Rosi de se tromper sur l’age de Giuliano qu’on ne voit jamais dans le film, ce qu’il n’a pas réalisé – il n’a pas vu le film. La différence entre LE SICILIEN et HEAVEN’S GATE, réside dans la splendeur visuelle du second (alors que Cimino à Lyon vomissait sur Vilmos Szgismond avec une hargne incompréhensible). Ses autres films en dehors de l’Année du Dragon sont beaucoup plus platement photographié. Et puis l’entendre parler de la Condition Humaine de Malraux vous achevait. C’était une vision de bande dessinée qui ne comprenait rien à la situation politique"
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AtCloseRange
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Re: Quand les grands cinéastes s'insultent...

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mannhunter a écrit :Bertrand Tavernier visiblement peu client de Michael Cimino et son cinéma...:


"HEAVEN’S GATE contient en germe tous les défauts des films ultérieurs de Cimino, casting improbable ou médiocre, sauf Huppert « que Vincent Canby jugeait la moins credible de toutes les madames du western », ce qui est peut être juste historiquement mais faux quant à la qualité de l’interprétation), direction d’acteur médiocre (John Hurt, Walken, Sam Wasterson), scénario et dialogue écrits parfois avec les pieds. C’était en partie racheté par un flamboiement visuel, une vraie virtuosité plastique mais à chaque vision, la sottise de certains dialogues, saute aux yeux. Et cela s’aggravera dans l’Année du Dragon. Il reste des passages brillants mais la dramaturgie est inerte (4 ou 5 fois la même scène entre le héros et son supérieur), la vision de l’Orient infantile (il choisira une japonaise pour jouer une chinoise ce qui lui vaudra des attaques très violente de la communauté asiatique).
Je l’ai vu plusieurs fois à Lyon et le trouvait très pénible, arrogant et pas du tout intelligent. Reste le sublime DEER HUNTER son seul film abouti. Le Canardeur est agréable mais mineur. Volker Schlonndorf me disait qu’il était inculte, ne lisait rien et vivait sur l’argent de Heaven’s Gate.
J’ai rencontré des dizaines de réalisateurs américains. Il était le moins intéressant.
Rien chez Walken dans HEAVEN'S GATE ne sonne juste par rapport à l’époque, au lieu. Ni son accent, ni sa manière de marcher Il joue son personnage comme un maffieux new yorkais d’aujourd’hui. Très peu d’acteurs américains étaient capables de se déplacer dans des rôles historiques (d’où le recours aux comédiens britanniques ou européens), sauf certains acteurs de western (Lancaster était formidable dans le Guépard et Sterling Hayden dans 1900. Il suffit de comparer Walken qui a été bon dans des polars modernes et Jack Palance qui joue le même personnage dans SHANE (inspiré par les mêmes évènements historiques) pour voir la différence, la justesse de Palance, cette manière d’être à la fois étranger à la communauté, au décor et pourtant faisant partie de la même époque, respirant le même air. Hurt n’a qu’une seule note. Je n’aime guère non plus cette manière de filmer les étrangers (des braillards « qui semblent sortis d’une opérette de Sigmung Romberg » écrivait Pauline Kael) qui sont incapables d’avoir un plan sensé. Il faudra un Américain pour leur donner l’idée de la tortue, ce à quoi ces professeurs, ces intellectuels, ces chasseurs n’ont pas pensé. Heureusement un Américain blanc veille et leur donne un surplus d’intelligence et de tactique (dans la réalité ils ont été intelligents, se sont planqués sans se faire tirer dessus, ont cerné les éleveurs qui ont été délivrés par l’armée). En fait il n’y a aucune différence dans la vision de Cimino entre la manière dont il filme cette communauté et son approche délirante de fausseté de Salvatore Giuliano. C’est la même arrogance américaine (qui lui fait reprocher à Rosi de se tromper sur l’age de Giuliano qu’on ne voit jamais dans le film, ce qu’il n’a pas réalisé – il n’a pas vu le film. La différence entre LE SICILIEN et HEAVEN’S GATE, réside dans la splendeur visuelle du second (alors que Cimino à Lyon vomissait sur Vilmos Szgismond avec une hargne incompréhensible). Ses autres films en dehors de l’Année du Dragon sont beaucoup plus platement photographié. Et puis l’entendre parler de la Condition Humaine de Malraux vous achevait. C’était une vision de bande dessinée qui ne comprenait rien à la situation politique"
Je ne sais pas d'où ça vient mais c'est en contradiction - presque - totale avec ce qui est dit dans son dictionnaire (surtout pour Heaven's Gate).
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Re: Quand les grands cinéastes s'insultent...

Message par mannhunter »

AtCloseRange a écrit :
mannhunter a écrit :Bertrand Tavernier visiblement peu client de Michael Cimino et son cinéma...:


"HEAVEN’S GATE contient en germe tous les défauts des films ultérieurs de Cimino, casting improbable ou médiocre, sauf Huppert « que Vincent Canby jugeait la moins credible de toutes les madames du western », ce qui est peut être juste historiquement mais faux quant à la qualité de l’interprétation), direction d’acteur médiocre (John Hurt, Walken, Sam Wasterson), scénario et dialogue écrits parfois avec les pieds. C’était en partie racheté par un flamboiement visuel, une vraie virtuosité plastique mais à chaque vision, la sottise de certains dialogues, saute aux yeux. Et cela s’aggravera dans l’Année du Dragon. Il reste des passages brillants mais la dramaturgie est inerte (4 ou 5 fois la même scène entre le héros et son supérieur), la vision de l’Orient infantile (il choisira une japonaise pour jouer une chinoise ce qui lui vaudra des attaques très violente de la communauté asiatique).
Je l’ai vu plusieurs fois à Lyon et le trouvait très pénible, arrogant et pas du tout intelligent. Reste le sublime DEER HUNTER son seul film abouti. Le Canardeur est agréable mais mineur. Volker Schlonndorf me disait qu’il était inculte, ne lisait rien et vivait sur l’argent de Heaven’s Gate.
J’ai rencontré des dizaines de réalisateurs américains. Il était le moins intéressant.
Rien chez Walken dans HEAVEN'S GATE ne sonne juste par rapport à l’époque, au lieu. Ni son accent, ni sa manière de marcher Il joue son personnage comme un maffieux new yorkais d’aujourd’hui. Très peu d’acteurs américains étaient capables de se déplacer dans des rôles historiques (d’où le recours aux comédiens britanniques ou européens), sauf certains acteurs de western (Lancaster était formidable dans le Guépard et Sterling Hayden dans 1900. Il suffit de comparer Walken qui a été bon dans des polars modernes et Jack Palance qui joue le même personnage dans SHANE (inspiré par les mêmes évènements historiques) pour voir la différence, la justesse de Palance, cette manière d’être à la fois étranger à la communauté, au décor et pourtant faisant partie de la même époque, respirant le même air. Hurt n’a qu’une seule note. Je n’aime guère non plus cette manière de filmer les étrangers (des braillards « qui semblent sortis d’une opérette de Sigmung Romberg » écrivait Pauline Kael) qui sont incapables d’avoir un plan sensé. Il faudra un Américain pour leur donner l’idée de la tortue, ce à quoi ces professeurs, ces intellectuels, ces chasseurs n’ont pas pensé. Heureusement un Américain blanc veille et leur donne un surplus d’intelligence et de tactique (dans la réalité ils ont été intelligents, se sont planqués sans se faire tirer dessus, ont cerné les éleveurs qui ont été délivrés par l’armée). En fait il n’y a aucune différence dans la vision de Cimino entre la manière dont il filme cette communauté et son approche délirante de fausseté de Salvatore Giuliano. C’est la même arrogance américaine (qui lui fait reprocher à Rosi de se tromper sur l’age de Giuliano qu’on ne voit jamais dans le film, ce qu’il n’a pas réalisé – il n’a pas vu le film. La différence entre LE SICILIEN et HEAVEN’S GATE, réside dans la splendeur visuelle du second (alors que Cimino à Lyon vomissait sur Vilmos Szgismond avec une hargne incompréhensible). Ses autres films en dehors de l’Année du Dragon sont beaucoup plus platement photographié. Et puis l’entendre parler de la Condition Humaine de Malraux vous achevait. C’était une vision de bande dessinée qui ne comprenait rien à la situation politique"
Je ne sais pas d'où ça vient mais c'est en contradiction - presque - totale avec ce qui est dit dans son dictionnaire (surtout pour Heaven's Gate).
Peut-être que dans les "50 ans" l"article était écrit par Coursodon?
Il me semble que le passage consacré à Cimino dans ce bouquin était assez mitigé déjà ("le sicilien", "l'année du dragon"..)...sinon ses derniers propos sur Cimino sont très récents, postés sur le blog de Tatav!
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Re: Quand les grands cinéastes s'insultent...

Message par AtCloseRange »

mannhunter a écrit :
AtCloseRange a écrit : Je ne sais pas d'où ça vient mais c'est en contradiction - presque - totale avec ce qui est dit dans son dictionnaire (surtout pour Heaven's Gate).
Peut-être que les 50 ans l"article était écrit par Coursodon?
Il me semble qu'il était assez mitigé déjà sur Cimino dans ce bouquin (voir l'avis sur "le sicilien", "l'année du dragon"..)...sinon ses propos sur Cimino sont très récents, postés sur son blog.
J'ai vérifié: il est bien précisé "nous" quant à l'admiration qu'ils avaient pour Heaven's Gate (surtout la version initiale vue finalement par peu de monde). Ils pointaient un certain nombre de faiblesses mais là, c'est un gros revirement de veste sur le film.
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Re: Quand les grands cinéastes s'insultent...

Message par mannhunter »

AtCloseRange a écrit :c'est un gros revirement de veste sur le film.
ça peut arriver de changer d'avis 25 ans après :) ...et il parle justement de ce revirement:

"Je l’ai trouvé (Cimino) arrogant et inintéressant mais habile face au public et mon aversion pour ce que je n’aime pas dans le film a grandi à chaque vision alors que certaines qualités s’estompaient. Harvard me parait maintenant beaucoup trop long et pour des conséquences infimes. J’ai tellement détesté les derniers films. Par ailleurs on peut voir sur le site de Steven Soderbergh, son remontage de Heaven’s Gate qui est passionnant. Il en fait un film d’une heure 40, coupe tout Harvard, ce qui rend l’arrivée dans l’histoire de Kris Kristofferon beaucoup pluie forte et crédible. Le personnage prend étrangement de l’assurance"
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Alexandre Angel
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Re: Quand les grands cinéastes s'insultent...

Message par Alexandre Angel »

AtCloseRange a écrit :Je ne sais pas d'où ça vient mais c'est en contradiction - presque - totale avec ce qui est dit dans son dictionnaire (surtout pour Heaven's Gate).
Je pense que Bertrand Tavernier est en grande partie l'auteur du texte de 50 ans car, entre autres preuves, il cite déjà Pauline Kael et son histoire d'opérette de Romberg. Mais son commentaire actuel, aussi sévère soit-il, n'est pas un total revirement. Si tu relis bien le texte de 50 ans, tu comprends qu'il y a le parti-pris (celui que j'ai personnellement toujours eu) de se laisser porter par le film, comme si il était une rêverie, mue par sa propre logique, sa cohérence interne, son souffle et sa puissance. Déjà, tu peux percevoir les réserves de par la remise en cause de la vraisemblance du film (les immigrants, une fois de plus, au cœur de ces réflexions) mais Tavernier et/ou Coursodon font le choix de ne pas chercher la petite bête et de s'étourdir du spectacle offert.
Depuis, l'eau a coulé sous les ponts et ce n'est pas à un revirement que nous assistons mais plutôt à la progression, façon métastases, des griefs sur les louanges. Avec le temps, la question de la vraisemblance a pris chez Tavernier le pas sur tout le reste, surtout s'il s'agit d'Histoire et de westerns (voir son obsession de la crédibilité de la littérature westernienne). Après dans le discours, c'est toujours la même histoire : quand tu commences à avoir quelqu'un, ou quelque chose, dans le nez, tu finis par ne plus t'intéresser à ses qualités, à ne plus les voir même. Je crois qu'il arrive à Tavernier quelque chose de similaire vis-à-vis de Cimino. Même si il ne touche pas au "sublime" Deer Hunter.
Dernière modification par Alexandre Angel le 12 juil. 16, 22:24, modifié 1 fois.
Comme "le Temps de l'innonce" et "A tombeau ouvert", "Killers of the Flower Moon" , très identifiable martinien, est un film divisiblement indélébile et insoluble, une roulade avant au niveau du sol, une romance dramatique éternuante et hilarante.

m. Envoyé Spécial à Cannes pour l'Echo Républicain
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