odelay a écrit :Ce qui me fait rigoler c'est que si ça se trouve dans 10 ans on s'indignera d'oeuvres faites aujourd'hui qui maintenant ne posent aucun problème.
Oui, de façon générale, on est les cons des générations futures.
Je crois néanmoins qu'elles nous en voudront plus pour la façon dont on leur laissera la planète que pour autre chose.
Mais je pense que tout est cyclique aussi, heureusement.
"L'Histoire ne se répète pas mais elle rime" disait Mark Twain. À une époque de restrictions sévères, suit une période de nouveauté et de liberté parfois totale. Cette dernière étant aujourd'hui, de façon plus qu'évidente, close, on en revient peu à peu à la première. Je pense que c'est un mauvais moment à passer qui arrive, où des cinéastes n'auront plus tout à fait le droit de raconter tout ce qu'ils veulent.
Toutes ces polémiques consécutives plus absurdes les unes que les autres me rappellent, dans le même genre, la sortie de l'album de Saez présentant une photo de Mondino avec une femme nue dans un caddy. Ça avait scandalisé les assos féministes qui étaient parvenues à la faire censurer ("
La photo initialement prévue pour cet affichage a été interdite dans les couloirs de nos métros"). Cette pochette évidemment féministe et dénonçant la présentation dégradante de la femme dans la publicité (s'il fallait vraiment l'expliquer), avait été précisément perçue comme dégradante et misogyne. Ça n'a peut-être pas commencé là, mais cela montre, je crois, comment sont les choses aujourd'hui à un degré vachement plus étendu.
Friends sexiste ou homophobe ? Vrai ou faux, le public serait trop con pour juger ou contextualiser tout seul. Il faut lui dire ce qui est bien et pas bien. Pareil avec toutes les autres œuvres analysées à travers un regard contemporain désapprobateur, forcément. C'est avec cette découverte d'une conscience qu'on change la fin de l'opéra de
Carmen en pensant bien faire (c'est le genre de précédent très dangereux qui, s'il est couronné de succès, peut justifier plus tard qu'on récidive, en réécrivant les œuvres jugées inacceptables), ou qu'on assiste au buzz créé par une chanteuse inculte choquée par le titre d'une adaptation TV des
Dix petits nègres, et qui taxe les défenseurs de racisme. À l'instar de Thomas Pesquet s'étonnant que des médias "sérieux" puissent relayer l'interrogation des platistes (ceux qui pensent que la Terre est plate), on peut légitimement s'étonner de voir publiés dans la presse les tweets, polémiques d'internautes, en gros la merde de la masse médiocre, comme j'aime l'appeler. C'est juste notre époque, et je ne pense pas que ça va aller en s'arrangeant de sitôt. Déjà aujourd'hui on commence à voire cette aseptisation justifiée par le contexte et la bonne cause, mais c'est comme lorsqu'un gouvernement repeint les maisons, vire les SDF et signes de pauvreté au passage du convoi d'un président en visite. On préfère masquer un contexte, réécrire, remplacer par quelque chose de plus joli et surtout "convenable".