Peter Bogdanovich (1939-2022)

Rubrique consacrée au cinéma et aux films tournés à partir de 1980.

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julien
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Re: Peter Bogdanovich

Message par julien »

Il m'avait bien fait marrer Bogdanovitch, lorsqu'il avait dit, au sujet de je ne sais plus quel film ; son premier peut-être, qu'au moment de la pause-repas, il avait était bouffer au resto avec les comédiens, mais pas avec les techniciens qui étaient restés à la cantine. Après il disait. "Bon j'ai fait ça une fois dans ma carrière, mais plus jamais par la suite." Pour flinguer l'ambiance d'un tournage, y'a rien de pire que de faire un truc pareil. :mrgreen:
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ed
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Re: Peter Bogdanovich

Message par ed »

Federico a écrit : Maintenant, j'ai l'air malin avec ma critique que j'ai commencé à bidouiller il y a un mois et toujours pas postée... et où je ne fais qu'énoncer (en beaucoup moins bien écrit et organisé) tout ce que vient si bien de mettre en lumière Antoine Royer... :?
C'est gentil, mais si c'est ça qui ressort
Wagner a écrit :Plutôt sévère d'attribuer autant de crédit à Tatum O 'Neal (futur junkie et épouse de John McEnroe), alors que le tour de force de ce film me semble avant tout d'ordre visuel.
elle n'est pas si bien écrite que cela :?
Pour moi, le travail visuel (cadrages + photo) et la comédienne sont les deux grandes facteurs de réussites du film, et je n'aurais pas envie d'en privilégier à ce point l'un des deux

Et pour revenir sur ce que dit AtCloseRange, j'ai revu La Dernière séance pour éclairer un peu Paper Moon, et je trouve vraiment le film assez remarquable. Modeste (la comparaison avec Citizen Kane est quand même délirante), mais admirable dans tous ses aspects. What's up Doc est un peu lourdingue dans sa dernière partie, mais j'aime en effet beaucoup ce qu'y fait Streisand. Après, je n'ai pas tout vu, mais il me semble vraiment que, sorti de ces 4-5 premiers films, la filmo de Bogdanovich n'a quand même pas gros intérêt.
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Federico
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Re: Peter Bogdanovich

Message par Federico »

ed a écrit :Et pour revenir sur ce que dit AtCloseRange, j'ai revu La Dernière séance pour éclairer un peu Paper Moon, et je trouve vraiment le film assez remarquable. Modeste (la comparaison avec Citizen Kane est quand même délirante), mais admirable dans tous ses aspects.

What's up Doc est un peu lourdingue dans sa dernière partie, mais j'aime en effet beaucoup ce qu'y fait Streisand. Après, je n'ai pas tout vu, mais il me semble vraiment que, sorti de ces 4-5 premiers films, la filmo de Bogdanovich n'a quand même pas gros intérêt.
Je connais malheureusement (ou heureusement ?) trop peu la suite de sa filmo mais j'avais énormément aimé Et tout le monde riait à sa sortie. Revu il y a un ou deux ans, un peu moins enthousiasmé mais ça reste un film fort sympathique qui met la banane. Et comment rater un film avec Ben Gazzara et Audrey Hepburn, hein ? :)
Sans parler de ce qu'a bien noté AtCloseRange (bien qu'ayant trouvé le film "imbuvable") : deux fort mignonnes actrices. L'étoile filante Dorothy Stratten et plus encore Patti Hansen dans le rôle mutin de Sam le taxi. J'adore Borgnine dans New York 1997 mais si j'avais le choix entre monter dans son vieux Checker et celui de la craquante Patti, désolé mon vieux Ernest...
Je préfère laisser le mot de la fin à ce sale beau gosse de Ben :wink:
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AtCloseRange
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Re: Peter Bogdanovich

Message par AtCloseRange »

Madame Keith Richards.
Je suis bien d'accord avec toi mais c'est très très insuffisant.

Saint Jack, en copie Cassavetienne, est plutôt intéressant (mais souvenir lointain).
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manuma
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Re: Peter Bogdanovich

Message par manuma »

Saint Jack, on en parle peu et c'est dommage. Mon préféré de sa période seventies derrière Paper Moon.

En revanche, What's up, doc ?, j'avais trouvé l'exercice creux et extrêmement lourd. Et Illegally yours, relevant de la même veine comique, c'est pire encore.They all laughed en revanche, j'en garde en bon souvenir mais si je suis assez d'accord avec At Close pour dire que ça n'a rien de franchement drôle.

La comédie pure, pour moi ce n'est pas trop son truc à Bogdanovich. Il me semble beaucoup plus à l'aise dans le doux-amer.
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Re: Peter Bogdanovich

Message par Federico »

manuma a écrit :Saint Jack, on en parle peu et c'est dommage. Mon préféré de sa période seventies derrière Paper Moon.

En revanche, What's up, doc ?, j'avais trouvé l'exercice creux et extrêmement lourd. Et Illegally yours, relevant de la même veine comique, c'est pire encore.They all laughed en revanche, j'en garde en bon souvenir mais si je suis assez d'accord avec At Close pour dire que ça n'a rien de franchement drôle.
Ce n'est pas super pouet-pouet, j'en conviens mais le ton est léger et pétillant.
La comédie pure, pour moi ce n'est pas trop son truc à Bogdanovich. Il me semble beaucoup plus à l'aise dans le doux-amer.
Je continue de penser qu'il a réussi avec What's up, doc ? mais je suis d'accord : son truc, c'est plus les tonalités Mitchum-mi-raisin comme disait l'autre. Et mon préféré reste The last picture show, film poético-amer s'il en est.
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Re: Peter Bogdanovich

Message par Wagner »

ed a écrit :elle n'est pas si bien écrite que cela :?
J'ai réagi sur cette phrase de la critique: "il est incontestable que la réussite de Paper Moon doit beaucoup, pour ne pas dire l’essentiel, au tempérament de sa jeune interprète principale"

Rien de grave non plus :wink:
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7swans
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Re: Peter Bogdanovich

Message par 7swans »

Lire pire reste à mon avis Illegally Yours, rien ne marche, tout y est poussif et la direction d’acteurs est absolument calamiteuse.
Dans le rayon comédie pure, Noises Off est plutôt réussi (mais c'est assez mineur). Ça reste assez vieillot dans le principe, et l’humour burlesque peut paraitre daté, mais il y a une belle énergie d’ensemble qui l’emporte à chaque visionnage. C’est aussi le plus totalement drôle (bien que ça reste a priori subjectif), avec un timing comique imparable.
AtCloseRange a écrit :Et tout le monde Riaitet drôle comme une rage de dents.
Concernant They All Laughed, oui ça n’est pas une franche comédie, c’est une « légèreté New Yorkaise », un genre en soi. Une déambulation entre Woody Allen (sans malice, certains diraient sans génie) et Robert Altman, qui annonce les décalage colorés et la pétillance des films de Wes Anderson (dans une certaine mesure).
AtCloseRange a écrit :What's Up, Doc? est sinistre.
What’s up doc ? Sinitre ? C’est bien beau de lâcher un mot comme ça, mais faut voir à expliquer, parce que là c’est cryptique. Parce que Bogdanovich se réapproprie les codes d’un genre alors disparu depuis un bon moment ?
Je n’y vois rien de sinistre, j’y vois un bel hommage aux Screw Ball comédies, avec un rythme endiablé et Streisand parfaite en tornade incontrôlable.
AtCloseRange a écrit :Je continue à ne pas penser beaucoup de bien de La Dernière Séance
Et pouquoi déjà ?
Comme les Notting Hillbillies : "Missing...Presumed Having a Good Time (on Letterboxd : https://letterboxd.com/ishenryfool/)"
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AtCloseRange
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Re: Peter Bogdanovich

Message par AtCloseRange »

7swans a écrit :
AtCloseRange a écrit :Je continue à ne pas penser beaucoup de bien de La Dernière Séance
Et pouquoi déjà ?
Pour tout dire, j'ai beau l'avoir revu 20 ans après la première fois, je n'en sais déjà plus trop rien. Mais en fait, je lui ai mis un 6/10 donc ce n'est pas si mal. J'ai un peu surréagi (comme d'hab :mrgreen: et je pense que la position de Tatave est du même ordre en réaction aux critiques US totalement dithyrambiques de l'époque) parce que je continue à ne pas du tout y voir le grand film qu'on nous vante.
ça ne me parle pas beaucoup mais ce n'est pas le seul dans ce cas dans les prémices du Nouvel Hollywood en ce qui me concerne (je pense aux Monte Hellman ou aux premiers Bob Rafelson).
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Re: Peter Bogdanovich

Message par Federico »

7swans a écrit :
AtCloseRange a écrit :Et tout le monde Riaitet drôle comme une rage de dents.
Concernant They All Laughed, oui ça n’est pas une franche comédie, c’est une « légèreté New Yorkaise », un genre en soi. Une déambulation entre Woody Allen (sans malice, certains diraient sans génie) et Robert Altman, qui annonce les décalage colorés et la pétillance des films de Wes Anderson (dans une certaine mesure).
Bien vu, il y a un peu de tout ça. Avec un soupçon de Blake Edwards.
7swans a écrit :
AtCloseRange a écrit :What's Up, Doc? est sinistre.
What’s up doc ? Sinistre ? C’est bien beau de lâcher un mot comme ça, mais faut voir à expliquer, parce que là c’est cryptique. Parce que Bogdanovich se réapproprie les codes d’un genre alors disparu depuis un bon moment ?
Je n’y vois rien de sinistre, j’y vois un bel hommage aux Screw Ball comédies, avec un rythme endiablé et Streisand parfaite en tornade incontrôlable.
J'y ai même vu LE plus bel hommage à la screwball comedy (et aux cartoons de l'âge d'or, comme son titre l'indique bien). Avec un art consommé du très délicat rythme comique et des personnages irrésistibles (comme l'hénaurme Kenneth Mars, aussi génial que dans Frankenstein Jr).
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Re: Peter Bogdanovich

Message par Federico »

AtCloseRange a écrit :
7swans a écrit : Et pouquoi déjà ?
Pour tout dire, j'ai beau l'avoir revu 20 ans après la première fois, je n'en sais déjà plus trop rien. Mais en fait, je lui ai mis un 6/10 donc ce n'est pas si mal. J'ai un peu surréagi (comme d'hab :mrgreen: et je pense que la position de Tatave est du même ordre en réaction aux critiques US totalement dithyrambiques de l'époque) parce que je continue à ne pas du tout y voir le grand film qu'on nous vante.
ça ne me parle pas beaucoup mais ce n'est pas le seul dans ce cas dans les prémices du Nouvel Hollywood en ce qui me concerne (je pense aux Monte Hellman ou aux premiers Bob Rafelson).
Fort possible que la réaction de Tavernier et autres critiques ait été d'ordre épidermique, agacés voire choqués d'entendre parler du "Nouvel Orson Welles" comme fut alors surnommé Bogdanovich. N'empêche qu'en ce qui me concerne, le mec qui comme premiers films et en l'espace de cinq ans aura successivement réalisé La cible, La dernière séance, On s'fait la valise, docteur ? et La barbe à papa, je lui tire mon chapeau. :shock: :D
Ensuite il faut tenir compte des effets de mode et du gout (ou tendance) +/- intellos consistant à exhumer des réalisateurs un peu oubliés ou méconnus. Mais je pense que Bogdanovich ne bénéficie pas autant de cette forme d'encartage (pour simplifier un peu sommairement) qu'un Monte Hellman, cinéaste souvent présenté comme un génie ou un artiste maudit, qui a réalisé il est vrai quelques films étonnants, d'autres un peu chiants quand même...
Mais bon, il faut aussi savoir redonner une chance à des réalisateurs tombés dans l'oubli sinon on tournerait toujours en boucle avec les mêmes, si bons soient-ils.
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manuma
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Re: Peter Bogdanovich

Message par manuma »

Ai découvert son Daisy Miller ce week-end.

J'ai vraiment accroché à ce court récit romantique, à la réalisation distillant assez remarquablement langueur et mélancolie, condamnant ses personnages à l'infortune amoureuse tout en douceur. Le travail accompli sur les décors par Ferdinando Scarfiotti (Il Conformista, Scarface) est superbe et les deux acteurs principaux m’ont semblé absolument parfaits, chacun dans leur registre, dégageant l’un comme l’autre une fragilité instantanément touchante.

Je crois que le film avait été plutôt froidement accueilli par la critique en son temps. Je le range pourtant parmi les plus belles réussites de Bogdanovich.
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Re: Peter Bogdanovich

Message par lecoinducinéphage »

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Re: Peter Bogdanovich

Message par Supfiction »

Prochainement .. (ou pas)

She’s Funny That Way (2014)

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In 2012, when the film was officially announced, Owen Wilson, Brie Larson, and Olivia Wilde were signed on in lead roles. Larson was to play the prostitute turned actress and Wilde would play the role of her therapist. Jason Schwartzman was also rumored to be in negotiations to play Wilde's playwright boyfriend. Due to production delays, Owen Wilson is the only actor to remain with the project.[10] In February 2013, it was announced that Jennifer Aniston would replace Olivia Wilde in the role of the therapist, the same time Kathryn Hahn, Cybil Shepard, and Eugene Levy were announced as cast members.[11] Despite filming scenes since the start of filming, Imogene Poots and Will Forte were announced as taking roles of the prostitute and playwright July 23, 2013 and July 24, 2013. The same week, Joanna Lumley, Debie Mazar, Rhys Ifans, Lucy Punch, Ahna O'Reilly, Jake Hoffman as being cast in the film.

Peter Bogdanovich said that Jennifer Aniston was first selected to play Delta Simmons but finally she preferred to play the role of the therapist, which is a much showier part.
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Profondo Rosso
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Re: Peter Bogdanovich

Message par Profondo Rosso »

La barbe à papa (1973)

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Kansas, dans les années 30, Moses Pray, escroc à la petite semaine, assiste à l’enterrement d’une ex-maîtresse et accepte d’emmener sa prétendue fille de 9 ans, Addie, chez une tante. Pendant leur trajet, leurs rapports sont tendus. L’orpheline est persuadée que celui-ci est son père, en raison de la ressemblance de leur menton mais Moses refuse d’endosser ce rôle. Etonnamment mature pour son âge, la petite Addie s’avère être une coéquipière très efficace : c’est le début de leur épopée.

Cinéphile averti et critique cinéma érudit avant d’embrasser la carrière de réalisateur, Peter Bogdanovich aura toujours montré une grande déférence à ses aînés et au cinéma classique. Ce se fera notamment à travers l’amitié qui nouera avec nombre de grands cinéastes de l’âge d’or hollywoodien et des portrait documentaire qu’il leur consacrera comme The Great Professional : Howard Hawks (1967) ou encore Directed by John Ford (1971). Dès lors il n’est pas étonnant que le pic de sa carrière soit atteint avec la trilogie nostalgique que forment La Dernière Séance (1971) chronique douce-amère d’une petite ville texane, On s'fait la valise, docteur ? (1972) pétaradant hommage à la screwball comedy et ce Papermoon. Ce dernier film opère d’ailleurs un pont esthétique et thématique idéal des précédent, mêlant l’émotion de La Dernière Séance et la drôlerie de On s'fait la valise, docteur ?. Le réalisateur adapte ici Addie Pray de Joe David Brown paru en 1971 et initialement destiné à John Huston qui souhaitait y diriger Paul Newman et sa petite fille Nell Potts. Lorsqu’il reprend le projet, Bogdanovich va optera pour le duo complice que constitue Ryan O’Neal et sa fille Tatum. Le réalisateur souhaite rendre hommage aux comédies de la Grande Dépression, où le contexte difficile était dépeint dans une tonalité en équilibre entre réalisme et légèreté. Il choisira rapidement l’option d’un tournage en noir tant cette période y est associée et tâtonnera longuement avec son directeur photo László Kovács pour en trouver la texture exacte. La solution lui sera donnée par Orson Welles qui lui suggère d’utiliser un filtre rouge qui donne au blanc une teinte plus crayonneuse et aux couleurs un noir plus prononcé qui fige littéralement les images dans ce passé voulu.

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L’histoire dépeint le périple de deux laissés pour compte qui vont s’entraider dans ce contexte difficile de la Grande dépression. Moses Pray (Ryan O’Neal), escroc à la petite semaine se retrouve soudain encombré d’une petite fille, Addie (Tatum O’Neal) alors qu’il assiste à l’enterrement d’une ancienne maîtresse. Soupçonné malgré ses dénégations d’en être le père (ils ont le même menton), il est chargé de la raccompagner chez sa tante et va donc traverser le Kansas jusqu’au Missouri afin de la ramener chez sa tante. La relation entre l’orpheline et l’escroc est difficile, d’autant qu’elle va découvrir ses activités douteuses à savoir la vente de bible à des veuves crédules. Une certaine complicité va pourtant naître lorsque Moses va découvrir les talents de la fillette pour ses affaires et en faire une coéquipière chevronnée. Tatum O’Neal rentre dans la catégorie des enfants-acteurs de génie avec cette Addie si attachante. Bouille craquante sachant se faire renfrognée ou candide et enjouée avec un naturel confondant, adulte précoce par l’adversité de la période mais aussi vraie petite fille sachant jouer de son allure innocente pour duper ses victimes et surtout en faire voir de toute les couleurs à Moses. Dur au cœur tendre tiraillé entre le cynisme de l’arnaqueur chevronné et une certaine naïveté, Ryan O’Neal est absolument parfait en « père » indigne et beau parleur. L’alchimie avec sa fille est d’un euphorisant dynamisme et sait susciter l’émotion par le seul ressenti de cette complicité, sans que le scénario surligne les situations ou les dialogues. Bogdanovich crée en fait une pure énergie de screwball comedy dans les situations et l’antagonisme de ses deux héros (on pense souvent à New York-Miami de Frank Capra) sauf c’est un couple père/fille et non plus amoureux qui se déchaîne. On le ressentira à la fois par la jalousie d’Addie lorsque la plantureuse Trixie (Madeline Kahn) viendra s’immiscer dans le duo (et du stratagème pour s’en débarrasser) mais aussi dans la manière de faire se renvoyer la balle entre Addie et Moses. Bogdanovich reprend à son compte cette esthétique de la screwball comedy où les plans fixes étaient privilégiés pour mettre en valeur les joutes verbales épiques des couples antagonistes façon Hawks de La Dame du Vendredi (1940).

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Le réalisateur conserve cette énergie tout en lui donnant une dimension plus contemplative en inscrivant ce ping pong verbal dans de longs plan- séquence donnant une fluidité naturelle à ses échanges. On pense au long dialogue en voiture au début du voyage, l’échange à la fête foraine où certaines discussions en mouvement en pleine rue où tout coule de source et la prouesse narrative et visuelle semblent invisibles. Cela n’ira pas sans donner quelques sueurs froides à Bogdanovich puisque Tatum O’Neal s’emmêlera plus d’une fois les pinceaux dans les longs tunnels de dialogues à apprendre, la discussion en voiture nécessitant 36 prises en deux jours mais pour un sacré résultat. La gravité et la dureté de cette période n’est jamais oubliée même si teintée de cette aura insouciante. Hormis les shérifs et bootleggers jumeaux et retors croisés en fin de film, aucun personnage n’est réellement mauvais et tente de survivre. La tirade émouvante de Trixie à Addie est ainsi très touchante, la danseuse cherchant clairement à essorer Moses demandant à la fillette de la comprendre et de lui laisser tenter sa chance.

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Addie se pliera à sa demande mais de même dans cette volonté de s’en sortir lui jouera un sacré tour pour poursuivre sa route avec Moses. Les familles plus ou moins bien loties croisée lors de l’escroquerie à la bible, celles vues dans la misère sur les bords des routes dressent ainsi les contours de ce contexte même dans un pur esprit d’aventure picaresque, Bogdanovich fait toujours filer son récit tout droit en concluant les trois grandes parties du film par une image montrant la voiture de nos héros traçant son chemin à toute allure. L’ultime arnaque fait basculer ce sentiment de jeu permanent dans une dangerosité plus prononcée mais qui laisse libre cours au réalisateur à exprimer son gout pour la course poursuite en voiture (au virtuose que celle extraordinaire de On s'fait la valise, docteur ?). Lorsque la dure réalité semble vouloir rattraper le duo un final magnifique et tendre vient sceller leur lien. Plutôt que de jouer sur les violons et une émotions forcée qu’il a su éviter de bout en bout, Bogdanovich dresse un lien invisible entre Moses et Addie séparés puis réunis par différents éléments ayant traversés le récit : la photo d’Addie sur la lune de papier laissée à Moses, le running gag sur sa dette « You still owe me two hundred dollars » et la brinquebalante voiture sans frein à rattraper.

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L’énergie entre les deux héros se maintient sans s’appesantir avec pudeur sur leur attachement palpable et ils peuvent reprendre la route de plus belle dans une magnifique dernière séquence où ils disparaissent dans le lointain, vers de nouvelles et trépidantes aventures.Un grand classique des 70s qui remportera un immense succès et qui vaudra l'Oscar du meilleur second rôle à Tatum O'Neal, en faisant la plus jeune lauréate à ce jour. 6/6
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