Le Mariage de Maria Braun (R. W. Fassbinder, 1979)

Rubrique consacrée au cinéma et aux films tournés à partir de 1980.

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Guybrush Threepwood
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Le Mariage de Maria Braun (R. W. Fassbinder, 1979)

Message par Guybrush Threepwood »

A l'occasion de la retrospective Fassbinder j'ai pu aller avec ma classe d'allemand voir ce film, qui fut mon premier Fassbinder.
Au final, j'ai été assez emballé, le personnage principal est fascinant, devant de plus en plus cynique et blasée malgrès sa réussite matérielle, et la réalisation m'a éblouit, je dois dire que malgrès tout le bien que j'avais lu sur Fassbinder je ne m'attendais pas à une mise en scène aussi réussie.
Le film propose en plus une plongée dans l'allemagne en ruine durant la guerre très interessante (qui était d'ailleurs la principale raison pour laquelle nous sommes allé le voir avec ma classe).

Bon signe, depuis que je l'ai vu j'y repense souvent. Un film qui marque.
D'autres l'ont vu ? Quel est votre avis sur ce film ?

Note : il y avait déjà un topic sur Fassbinder mais je pensais que ce film méritait le sien.
John Constantine
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Message par John Constantine »

Il s'agit probablement du film le plus équilibré de sa trilogie BRD, par rapport aux plus excessifs et expressifs Lola ou Veronika Voss: couleurs délavées rendant compte de l'époque détruite/reconstruite, scénario collant à Maria Braun - les autres portraits de femme Lola et Veronika sont plus distants. On parle donc souvent de mélos "artificiels", à distance pour ces 3 films [ou même pour bcp de ses films], mais j'aime bcp Maria Braun, ses surcadrages, l'opacité d'Hannah Schygullah (la fin?), femme forte ambigüe mais finalement à côté de la plaque: dans sa quête d'idéal romantique [le retour d'Herman Braun], elle devient finalement un glaçon incapable de sentiments d'où ces retrouvailles malaisées. Il est très tentant - et c'est l'interprétation commune - de superposer le fabuleux destin de Maria avec la RFA telle que la critique Fassbinder, en quête d'un idéal identique - de reconstruction, d'unité nationale, de paix avec son passé - mais se perdant dans le processus pour ne garder que le mot "matériel" dans l'expression "bonheur matériel".
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Message par Max Schreck »

Sans trop d'hésitation l'un des meilleurs Fassbinder que j'aie vus. Je n'hésite plus à le dire : RWF est un génie. Comment peut-on à ce point offrir un exemple constant de mise en scène d'une grande virtuosité, jamais en défaut d'inspiration, et ne sentant jamais l'effort laborieux, la surstylisation trop évidente et facile ? Comment peut-on à ce point brasser des destins dans une écriture ambitieuse et romanesque, tout en disant des choses sur l'Histoire d'un pays ? En fait, ce n'est ni du roman, ni du théâtre (bien que les intérieurs soient majoritaires), mais bien du cinéma. On ne peut détacher le travail des acteurs (leur jeu, leurs dialogues) de celui de la caméra (ses mouvements, la façon dont elle isole un personnage dans le cadre). Il y a une totale, rare et flagrante complémentarité de sens. Le travail sur le son est ici encore étonnant. Les seuls éléments temporels ne sont donnés que par la radio qui vient parfois couvrir les voix des personnages.

Die Ehe der Maria Braun est à tous égards passionnant. Dans une distanciation très brechtienne, le personnage de Maria se révèle progressivement sous nos yeux. Sa volonté jusqu'auboutiste, s'adaptant à la logique de son époque qu'elle anticipe toujours, est impressionnante. Je trouve qu'elle a un petit côté Nana de Zola, ou Lola-Lola de L'Ange bleu, dans sa façon de rendre fous les hommes (voir le traitement qu'elle réserve à Oswald l'homme d'affaire).

Hanna Schygulla est véritablement géniale, d'une subtilité admirable. J'adore cette impression de me retrouver en terrain connu, guettant les apparitions des acteurs fétiches de Fassbinder.

Chef-d'oeuvre, qui en plus ne manque pas d'humour.
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Message par John Constantine »

J'aime bcp la scène où Herman Braun surprend Maria en flagrant délit avec le GI. Fantômatique et excellement composée dans mon souvenir : il a l'air d'être pas là mais il est là.
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Message par Max Schreck »

John Constantine a écrit :J'aime bcp la scène où Herman Braun surprend Maria en flagrant délit avec le GI. Fantômatique et excellement composée dans mon souvenir : il a l'air d'être pas là mais il est là.
Magnifique scène en effet. D'un côté un homme dans l'entrebaillement de la porte (on imagine que c'est Herman Braun mais on peut aussi en douter vu qu'on ne l'a jamais vu auparavant), de l'autre Maria et le GI qui se déshabillent. Le couple se livre à un véritable jeu érotique, d'autant plus troublant que la caméra fixe nous place dans une double position de voyeur puisqu'on voit Herman qui les voit aussi. Le résultat est très dérangeant, à la fois excitant, comique, pathétique et tragique. On est content pour Maria parce qu'elle a l'air enfin de s'amuser, de profiter de la vie, et puis il y a cet homme qu'elle a tant attendu (on a suivi ses efforts) et qui va enfin la revoir au moment où elle présente toutes les apparences de l'oubli.

La photographie est étonnante dans cette scène, comme dans le reste du film, donnant constamment l'impression d'être sous-exposée, terne (c'est-à-dire sans couleurs qui se détachent).

Quel filou de Fassbinder !
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Profondo Rosso
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Re: Notez les films Naphtas- Janvier 2009

Message par Profondo Rosso »

Le Mariage de Maria Braun de Rainer Werner Fassbinder (1979)

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Première incursion pas très convaincante dans le cinéma de Fassbinder. Un début pourtant très bon nous plongeant dans l'Allemagne dévastée d'après guerre, où la population vit dans la misère et les hommes brisés par les combats et le régime hitlerien ne sont plus que des larves soumises et craintives. Dans ce contexte l'héroïne Maria Braun attends le retour de son mari disparu au front avec qui elle n'a que brièvement vécu, et fini par désespoir par tomber dans la bras d'un GI noir qui va s'ooccuper d'elle (et la mettre ecneinte) jusqu'au retour contre toute attente de son mari. Une situation forte que Fassbinder se débarasse en 5 minutes par une péripétie assez grossière pour faire partir le film dans une toute autre direction. En effet au repasse au postulat du début du film avec Maria en attente du retour de son mari mais cette fois bien décidé à réussir afin que son retour soi confortable. Le personnage déjà pas bien attachant au départ devient franchement détestable et pathétique et la deuxième heure enchaînant les méchancetés et les mots cruels qu'elle peu avoir pour sont entourage est assez laborieuse à suivre. N'ayant pu s'intéresser un minimum au sort du personnage, la rébondissement intervenant à la fin et la conclusion abrupte et cinglante laisse donc plutôt froid au final, malgré la maîtrise de Fassbinder. Une très belle prestation de Hanna Schygulla néanmoins. 3/6
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