Commentaires à propos de votre film du mois

Rubrique consacrée au cinéma et aux films tournés à partir de 1980.

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Max Schreck
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Re: Commentaires à propos de votre film du mois

Message par Max Schreck »

Pas d'enthousiasmes francs face à la poignée de découvertes de ce mois-ci. Pas un film qui m'ait semblé réussi et accompli du début à la fin. Même quand je reconnais leur originalité ou leur prise de risque, restent toujours des faiblesses qui m'auront empêché de pleinement adhérer. Je reste donc sur le moins frustrant, celui qui m'aura finalement procuré le meilleur dépaysement. Mais sans comparaison avec la jubilation instantanée offerte par les 2 titres revus.


Film du mois
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Les Chemins de la liberté (Weir), apprécié sa sobriété, touché par sa mélancolie


Films découverts
Midnight special (Nichols), porté par une belle tension, un jeu sur le non-dit risqué mais finalement payant, quand bien même l'émotion est trop rarement conviée
L'Année de tous les dangers (Weir), déstabilisant et étrangement envoûtant
Tomorrowland (Bird), un sens de la narration emballant, mais qui se dégonfle malheureusement dans le dernier 1/4h au lieu de nous faire décoller
Le Déjeuner du 15 août (Di Gregorio), le choix curieux d'un style documentaire fait qu'on ne sait pas toujours si on a affaire à une franche comédie ou à un film d'horreur. Pas désagréable et a l'avantage d'être court
Exodus : gods and kings (Scott), désolant de voir de gros moyens déployés pour un résultat aussi insipide
Cartel (Scott), des intentions louables, pour un résultat presque agaçant de prétention


Films revus (Hors compétition)
The Blues brothers (Landis), un bijou
Ghostbusters (Reitman), bonheur à tous les étages


Séries TV
Sherlock (S.1), pas convaincu par la partie enquête, mais les dialogues et relations entre persos sont un régal
Better call Saul (S.2), en cours...
« Vouloir le bonheur, c'est déjà un peu le bonheur. » (Roland Cassard)
Mes films du mois...
Mes extrospections...
Mon Top 100...
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Flol
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Message par Flol »

cinephage a écrit :
Ratatouille a écrit : Sympa pour celui des autres. :?
Mets plus de naphta dans tes plats... :wink:
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Jeremy Fox
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Message par Jeremy Fox »

Ratatouille a écrit :
cinephage a écrit : Mets plus de naphta dans tes plats... :wink:
Je fais ce que je veux.

Évite au moins de mettre 5 films que je n'ai pas vu si tu veux que j'approuve.
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Alexandre Angel
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Re: Commentaires à propos de votre film du mois

Message par Alexandre Angel »

cinephage a écrit : Hausu, c'est pourtant un gros jalon dans l'histoire du cinéma "bis" japonais
Yasujiro Hausu ??? Comme tu y vas :mrgreen:
Comme "le Temps de l'innonce" et "A tombeau ouvert", "Killers of the Flower Moon" , très identifiable martinien, est un film divisiblement indélébile et insoluble, une roulade avant au niveau du sol, une romance dramatique éternuante et hilarante.

m. Envoyé Spécial à Cannes pour l'Echo Républicain
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Kevin95
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Message par Kevin95 »

cinephage a écrit :
Jeremy Fox a écrit :Celui du milieu je ne le connais pas mais j'approuve fortement les 4 autres :)
Pas sur que tu l'aimes. Hausu, c'est pourtant un gros jalon dans l'histoire du cinéma "bis" japonais, un film totalement déjanté et d'une imagination folle.
Effectivement, je ne pense pas que le film soit ta came (en revanche amateurs de gros n'importe quoi, sortez les couverts).
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Message par Jack Carter »

Kevin95 a écrit :
cinephage a écrit :
Pas sur que tu l'aimes. Hausu, c'est pourtant un gros jalon dans l'histoire du cinéma "bis" japonais, un film totalement déjanté et d'une imagination folle.
Effectivement, je ne pense pas que le film soit ta came (en revanche amateurs de gros n'importe quoi, sortez les couverts).
Il est en haut de ma pile depuis que j'en ai vu un extrait lors de la soirée Anniversaire du Festival Hallucinations Collectives.
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The Life and Death of Colonel Blimp (Michael Powell & Emeric Pressburger, 1943)
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Kevin95
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Message par Kevin95 »

J'en connaissais rien de chez rien. Je suis resté une heure et demi la bouche ouverte.
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Flol
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Message par Flol »

AtCloseRange a écrit :covfefe
Ah non pas toi.
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Message par AtCloseRange »

Ratatouille a écrit :
AtCloseRange a écrit :covfefe
Ah non pas toi.
oh ça va, ça n'allait durer que jusqu'à mon premier film...
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Message par manuma »

Mois de vaches maigres de mon côté. Je retiens ce petit survival dégraissé à l'os :

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cinephage
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Message par cinephage »

AtCloseRange a écrit :
Ratatouille a écrit : Ah non pas toi.
oh ça va, ça n'allait durer que jusqu'à mon premier film...
Atcloserange, making dvdclassik great again ! :D
I love movies from the creation of cinema—from single-shot silent films, to serialized films in the teens, Fritz Lang, and a million others through the twenties—basically, I have a love for cinema through all the decades, from all over the world, from the highbrow to the lowbrow. - David Robert Mitchell
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Message par AtCloseRange »

cinephage a écrit :
AtCloseRange a écrit : oh ça va, ça n'allait durer que jusqu'à mon premier film...
Atcloserange, making dvdclassik great again ! :D
y a du boulot! :mrgreen:
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Message par Harkento »

Comme certains, le mois de mai est plutôt pauvre en découverte, c'est pour cette raison que mon film du mois sera une redécouverte (comme le deuxième d'ailleurs...) :

1. Perfect Blue (Satoshi Kon)
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2. Green Snake (Tsui Hark)
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Sinon, en pure découverte, des films très sympas :

3. Le château des Carpathes (Oldrich Lipsky)
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4. Hard Day (Seong-hun Kim)
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5. Brendan et le secret de Kells (Tomm Moore, Nora Twomey)
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6. Le chant de la mer (Tomm Moore)
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7. White material (Claire Denis)
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Thaddeus
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Message par Thaddeus »

Film du mois de mai


1. Les Cloches de Sainte-Marie (Leo McCarey, 1945)


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2. Fedora (Billy Wilder, 1978)


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3. Norma Rae (Martin Ritt, 1979)


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Mes découvertes en détail :
Spoiler (cliquez pour afficher)
Et là-bas quelle heure est-il ? (Tsai Ming-liang, 2001)
S’il y a encore chez Tsai une famille, toujours la même, cette fois il y a moins d’eau, seulement un gros poisson blanc dans un aquarium, peut-être l’esprit du père qui vient de mourir. Son fils, vendeur à la sauvette, cède à son montre à une jolie inconnue en partance pour l’étranger, et aussitôt un lien mystérieux unit le garçon à cet objet, au poignet qui la porte et l’emporte. Belle idée poétique, installant un climat d’attente qui fustige frontières et fuseaux horaires et se dérobe sans cesse devant le prévisible et le trop simple. Tricotant ensemble les petits moments de vie de l’une, seule et paumée dans un Paris claustro, et de l’autre, qui doit gérer la folie douce de sa mère en plus de son propre deuil, le cinéaste climatise par l’intérieur le besoin de rêverie de ses héros, leur profond désarroi, leur touchante tristesse. 4/6

Les cloches de Sainte-Marie (Leo McCarey, 1945)
Parce que McCarey était un catholique fervent et que ce film ne fait aucun effort pour échapper à une imagerie que l’ont pourrait qualifier de sulpicienne, il serait facile pour certains esprits forts d’en brocarder les bons sentiments surannés. C’est méconnaître une manière profondément américaine d’aborder l’affectif, qui n’implique le recours ni à la distance ni à la caricature et qui est le signe franc et sans apprêt d’une approche se distinguant par son absence de préjugés et de fausse pudeur. Avec cette œuvre aussi drôle qu’émouvante, le cinéaste atteint par l’intrusion du profane à une sorte de mysticisme et décline à travers la relation du prêtre et de la nonne le motif de l’amour terrestre frustré et de sa sublimation. Le rayonnement solaire d’Ingrid Bergman en figure l’intensité comme nul autre. 5/6

Les inconnus dans la ville (Richard Fleischer, 1955)
Où le réalisateur applique à la lettre l’un des axiomes cachés du cinéma policier : les criminels courent les rues. Ici le trio de malfrats se mêle à une communauté provinciale avant d’en braquer la banque, et le suspense se double d’une brutale coupe socio-psychologique dans l’épaisseur de la petite ville. On y observe des braves gens qui ont tous quelque chose à se reprocher. Un entrelacs quasi faulknerien de frustrations, de névroses et de secrets honteux y affleure sous des dehors placides. Les outsiders agissent comme des catalyseurs, tendant un miroir où chacun peut se reconnaître, et la marge est si étroite que les violents sont neutralisés par les deux citoyens les plus pacifiques. Sans doute un peu trop tributaire de ses intentions, cette tentative hybride n’en demeure pas moins assez captivante. 4/6

A scanner darkly (Richard Linklater, 2006)
La technique employée sur Waking Life était une approche judicieuse pour adapter le Substance Mort de Philip K. Dick, où un flic infiltré se voit confier la mission d’enquêter sur lui-même. Car s’il interroge la schize identitaire et la ligne floue séparant la réalité du délire, chères à l’écrivain, Linklater réfléchit aussi ce qui de la SF est devenu réel : Big Brother, les narcotrafics associés aux intérêts d’état, les circuits autarciques de vidéosurveillance reliant les bureaux d’une multinationale et le pavillon pouilleux des camés dans un kaléidoscope sans profondeur, uniquement préoccupé par la contamination du corps par l’esprit. Fondant les hallucinations des uns et des autres en un même flux émollient, l’exercice parvient à donner une forme assez frappante à cet univers d’aboulie et de brouillage généralisés. 4/6

Urga (Nikita Mikhalkov, 1991)
Emporté par les ciels qui roulent des nuages de lumière, par les collines qui passent du vert acide à l’ocre chaud, par ces visages fendus de deux yeux où se lit quelque chose de l’éternité, Mikhalkov fait son Dersou Ouzala. Sans troquer son regard de cinéaste contre celui d’ethnologue, il filme l’immensité de la steppe mongole comme une terra mater livrée à la temporalité intérieure de la contemplation, à deux modes de rapport contradictoires (le plein et le vide, la plénitude et le manque), et livre un film réactif, vif, dépouillé de tout signe extérieur de richesse. Mais s’il manifeste son amour des personnages en faisant ressentir plutôt que dire, il finit rattrapé dans son échappée belle par un débat conventionnel entre nature et culture, artifices de la société de consommation moderne et valeurs écolos. 4/6

Alien : Covenant (Ridley Scott, 2017)
Cryogénie, réveil anticipé, réception d’un signal d’origine inconnue, déroutage de la mission initiale, excursion sur une planète hostile, élimination sanglante de l’équipage. Ce synopsis est désormais un patron narratif que le cinéaste, occupé à faire briller son aisance de vieux routier du genre qui a fait sa gloire, ne cherche plus à faire dérailler. Enfilant les scènes aussi efficaces et limpides que sans surprise, il substitue d’une part au cambouis, aux stries de vapeur, au noir d’encre de jadis la clarté de l’hygiénisme technologique, et gonfle d’autre part la minceur du schéma programmé en faisant de l’androïde David, apprenti sorcier gagné par une opératique folie des grandeurs, le personnage central de la fiction. En résulte un film certes bancal et inachevé, mais dont la confection premium garantit un vrai plaisir. 4/6

Le prestige (Christopher Nolan, 2006)
Magie, magie, c’est la cuisine d’aujourd’hui façon Nolan, qui se déguise en prince de l’entourloupe mais a le bon goût de ne jamais vraiment abuser de la crédulité de son spectateur. La rivalité entre ces prestidigitateurs de l’Angleterre victorienne se battant en duel, se piquant trucs, astuces et jupons et se disputant jusqu’à la mort la suprématie de leur art n’est guère passionnante, mais l’humilité du réalisateur consiste à ne pas gonfler artificiellement un twist que l’on voit venir à des kilomètres pour mieux prendre son sujet à revers : l’affaire déçoit à dessein car tout prestige porte en lui la déception d’une promesse. Moins film d’actions que film d’idées, cette construction emberlificotée pleine de fausses pistes et de chausse-trappes aurait par ailleurs gagné à faire jouer un peu plus le ciseau au montage. 4/6

Ce plaisir qu’on dit charnel (Mike Nichols, 1971)
Radiographie du mâle américain, disséqué dans ses raisonnements, ses complaisances et son désir tôt affirmé de rationalité et de rendement, sur vingt ans d’après-guerre. Si l’accusation de vulgarité à son égard n’est pas illégitime, il faut convenir qu’elle est de toute évidence fort calculée, et que la pachydermie en sudation de ce grand déballage grivois correspond parfaitement à l’objet choisi. D’où une réussite à peu près totale sur le sujet number one : le sexe, ses problèmes, dérobades et triomphes. Optant pour un ton satirique d’une grande cruauté, servi par d’excellents comédiens (mention à Ann-Margret, très en forme-s), le cinéaste suscite une amertume de plus en plus prononcée à mesure qu’il dévoile, par-delà l’acide décapant de l’humour, le désarroi d’un pays qui n’en finit pas de s’autocritiquer. 5/6

Thé et sympathie (Vincente Minnelli, 1956)
L’histoire d’une différence. Si la censure de l’époque ne lui permet d’expliciter un sujet qui apparaît cependant parfaitement clair, rarement le cinéaste a tenu un discours aussi transparent : pour lui l’artiste se situe toujours en marge de la société, de la foule, de la norme. On ne rêve pas impunément. La persistance et l’acuité de son regard montrent le point précis où les passions ne peuvent plus se dérober à elles-mêmes, où l’on est obligé de remettre sa vie en jeu. Et la douceur de sa mise en scène ne fait que rendre plus sensibles les moments d’abandon, de désespoir et de courage des personnages – jusqu’à l’ultime rencontre dans la clairière automnale d’une nature édénique qui témoigne, plus que l’arrière-saison, de la découverte éblouie de la beauté du monde. Subtilité et délicatesse au zénith. 5/6

Versailles Rive gauche (Bruno Podalydès, 1992)
En 1931 Jean Renoir fit rire avec le bruit d’une chasse d’eau. Soixante ans plus tard Podalydès s’amuse en postulant son interdit. Censurez la trivialité, il en découle une série de désagréments. Appelés au secours, frères, voisins, copains, amie (ronde, dans tous les sens du terme) du copain, copains des copains affluent. La mise en scène du héros s’écroule, son territoire étroit est submergé sous l’effet cabine du paquebot des Marx brothers. Plus la concentration humaine est dense, plus les écarts sociaux sont vastes, que l’auteur repère sans rien pour faire les atténuer ou les colmater. Et le film, formidablement interprété par la troupe fidèle du cinéaste versaillais, liquide tout écrasant surmoi Nouvelle Vague en intégrant le principe sine qua non de la comédie : le crescendo. Quarante minutes de bonheur. 5/6

La pendaison (Nagisa Ōshima, 1968)
Au commencement est l’information sèche, précise, abondante, qui introduit dans un cadre propice au huis-clos. Puis vient une sorte de psycho-farce renvoyant les genres reçus dans un apparent fourre-tout, lié par une idée-directrice : dynamiter la notion d’État justicier. Dès lors que le rituel de l’exécution est sabordé, les engrenages du système se grippent et bourreau, huissier, médecin, prêtre, procureur renvoient l’image grinçante d’une humanité livrée à ses fantasmes inavouables. Par la pantomime, les mécanismes de l’imaginaire, les jeux de rôles et de miroirs entre illusion et réalité, vie et théâtre, le cinéaste confère à l’abjection une dimension fantastique et livre une parabole politique sur la coercition infligée par la société à l’individu. Son outrance et sa rigidité conceptuelle fatiguent quelque peu. 3/6

Les fantômes d'Ismaël (Arnaud Desplechin, 2017)
Comme souvent chez Desplechin, la fiction naît de cette fraction de la vie qui marque la fin d’une longue période d’immobilisme et le début d’autre chose : autrement dit une crise. L’humaine matière ne présente de l’intérêt que par ses failles, et l’artiste affectionne le vif du sujet dans le plaisir de la pensée qui s’énonce, le raisonnement par la parole, les entrelacs d’une langue considérée comme interface de l’imaginaire et de l’inconscient. Et si ses effusions romanesques semblent ici grippées, si son propos se cogne aux contingences de l’intrigue comme une mouche contre les parois du verre qui l’emprisonne, c’est sans doute parce que, derrière l’alibi revendiqué des effets de signature et des références cinéphiles, le film invite à une farce narquoise sur les atermoiements et les impasses de la création. 4/6

Amère victoire (Nicholas Ray, 1957)
Étrange film de guerre, sec, décharné, assez théorique. Les personnages s’y opposent selon les règles manichéennes du blanc (le capitaine Leith) et du noir (le major Brand), insistant en cela sur la distinction entre militaire de carrière et soldat d’occasion qu’Attaque ! d’Aldrich contenait avec une autre adresse. Certes la nature y a une certaine existence, on y voit le soleil, la soif, la fatigue, la douleur retarder la progression difficile du commando dans les dunes libyennes, et certains passages d’une sobre grandeur entretiennent l’intérêt (Richard Burton restant en arrière avec les blessés pour les achever). Mais si l’on retrouve parfois des échos de T.E. Lawrence dans ce portrait d’archéologue nihiliste et aventureux, la réflexion sur le courage et la lâcheté s’enlise dans certains symboles trop voyants. Mineur. 3/6

Le rideau déchiré (Alfred Hitchcock, 1966)
Même le plus grand menteur de l’histoire du cinéma peut oublier que le mensonge est un art et qu’il suppose une perfection de la narration. Faute de quoi on risque de décrocher, avec la tentation de crier au bluff. Il y a dans cette nouvelle déclinaison de l’espionnage made-by-Hitch assez de séquences techniquement brillantes (le meurtre interminable de Gromek, la poursuite au musée) pour donner crédit à une politique des auteurs exposant pourtant à bien des extrémités. Car l’auteur mêle toutes les cartes : anticommunisme primaire, humour pince-sans-rire, esbroufe pour crédulité moyenne, clins d’yeux pour cinéphiles complices, facilités pour inconditionnels serviles. Mais sa fiction évolue dans une ligne dramatique discontinue, et au sein d’une stylisation qui frise parfois la caricature amusée. 4/6

Rodin (Jacques Doillon, 2017)
Prosaïque, rugueux et sans forfanterie, voici un énième avatar de ce cinéma minéral, typiquement français, dont le principe consiste à se retrancher derrière la carrure de son sujet pour ne pas avoir à risquer de proposition un tant soit peu audacieuse. Partagé entre l’admiration intimidante qu’il porte au père de la sculpture moderne et la volonté de ne pas céder aux débordements d’une évocation trop hagiographique, Doillon s’en remet à une neutralité de bon aloi, capte le travail créatif de son personnage en favorisant l’ouvrage au lyrisme, caresse le plâtre, l’eau et la pierre avec une prudence dans la forme et un anonymat dans le discours que ne relève guère la banalité de l’analyse sociale, politique et historique. En résulte deux heures pas plus honteuses qu’exaltantes, mais peu avares en longueurs. 3/6

L’amant double (François Ozon, 2017
Pris d’un délire assez carabiné d’invraisemblance, d’une volonté presque suicidaire d’exploser les marqueurs du psycho-thriller à twist, le cinéaste fait fi de toute mesure, chausse les gros sabots de la manipulation et accumule les clichés les plus éhontés d’un genre avec lequel il ne cherche jamais à louvoyer. Il y a même une certaine délectation à anticiper les rebondissements et le fin mot d’une histoire qui, échouant à générer l’ambigüité, mêle gémellité problématique, traumatisme refoulé, jeux de miroir ou autres tartes à la crème du bazar freudien. En soit rien de déplaisant dans cette relecture érotico-toc de Faux-semblants, d’autant qu’Ozon en assume crânement la vanité, mais par magnanimité mieux vaut ne pas en énumérer les multiples influences, dont l’ombre se fait plus qu’écrasante. 3/6

Mademoiselle (Tony Richardson, 1966)
Un village de Corrèze où règnent le maire, le curé, les gendarmes et l’institutrice, mante perverse et impavide, âme aux mille désirs refoulés dans laquelle se tord un nœud de vipères. Parce qu’elle se languit pour le bûcheron Italien dont le culte lui est refusé, elle déclenche les catastrophes par le feu, l’eau, le poison. Chaque fois qu’il lui offre le festival de son grand corps athlétique se démenant dans l’effort, la colère xénophobe des paysans s’enfle, entourant d’un véritable brasier de haine ce mâle à qui elle voudrait tant se donner. Sans toujours éviter les complexes montés au collier ni les symboles en solde, Richardson féconde ces fleurs vénéneuses et explore la face secrète de cette chatte sur le foin brûlant, le puits profond de sa conscience où grouillent et se tapissent les voluptés fétides du malheur. 4/6

Le Christ s’est arrêté à Eboli (Francesco Rosi, 1979)
Auparavant polémiste, enquêteur scrupuleux, horloger de suspenses politiques, Rosi laisse cette fois parler son goût de l’atmosphère et du silence, applique son regard contemplatif sur les travaux et les jours. Il cherche à éclairer les rapports entre la modernité et le tiers-monde, les riches et les déshérités, le pouvoir central et la culture lucanienne, au fil d’une chronique austère qui se veut aussi étude du fascisme et de ses contradictions. Difficile de nier son scrupule, son doute, son refus de l’ornement, impossible de l’accuser de céder à la tentation du passéisme ou de ne voir dans cette évocation quasi virgilienne qu’une nostalgie d’esthète citadin à l’égard des sociétés frugales. Mais la sévérité du film empêche toute véritable implication et met plus d’une fois à mal la curiosité et la concentration. 3/6

Fedora (Billy Wilder, 1978)
Wilder sait bien qu’après minuit la plus belle des pantoufles de vair peut tomber en poussière. Fedora, la star qui se retire à Corfou après l’échec d’un film inachevé, dresse le portrait d’une société du rêve qui ne cesse de se heurter au mur de la réalité. Retrouvant le registre noir et mélodramatique de Sunset Boulevard, ce puzzle cruel et désenchanté se construit en plusieurs strates autour du cinéma dans ce qu’il a de plus destructeur, mais aussi de la mort, du mirage de l’éternelle jeunesse, de la quête d’identité et de la force des souvenirs. Il offre une admirable méditation sur le néant de l’existence et le néant du spectacle affrontés puis renvoyés en match nul, sur la mise en scène également telle que la pratique son auteur – toile de mensonge et d’artifice dont le dévoilement progressif amène à la vérité. 5/6


Et aussi :

Get out (Jordan Peele, 2017) - 4/6
Tunnel (Seong-hun Kim, 2016) - 4/6
I'm not your negro (Raoul Peck, 2016) - 4/6
Norma Rae (Martin Ritt, 1979) - 5/6
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Films des mois précédents :
Spoiler (cliquez pour afficher)
Avril 2017Maria’s lovers (Andreï Kontchalovski, 1984)
Mars 2017À la recherche de Mr Goodbar (Richard Brooks, 1977)
Février 2017Raphaël ou le débauché (Michel Deville, 1971)
Janvier 2017La la land (Damien Chazelle, 2016)
Décembre 2016Alice (Jan Švankmajer, 1987)
Novembre 2016 - Dernières nouvelles du cosmos (Julie Bertuccelli, 2016)
Octobre 2016 - Showgirls (Paul Verhoeven, 1995)
Septembre 2016 - Aquarius (Kleber Mendonça Filho, 2016)
Août 2016 - Le flambeur (Karel Reisz, 1974)
Juillet 2016 - A touch of zen (King Hu, 1971)
Juin 2016 - The witch (Robert Eggers, 2015)
Mai 2016 - Elle (Paul Verhoeven, 2016)
Avril 2016 - La pyramide humaine (Jean Rouch, 1961)
Mars 2016 - The assassin (Hou Hsiao-hsien, 2015)
Février 2016Le démon des femmes (Robert Aldrich, 1968)
Janvier 2016La Commune (Paris 1871) (Peter Watkins, 2000)
Décembre 2015Mia madre (Nanni Moretti, 2015)
Novembre 2015Avril ou le monde truqué (Franck Ekinci & Christian Desmares, 2015)
Octobre 2015Voyage à deux (Stanley Donen, 1967)
Septembre 2015Une histoire simple (Claude Sautet, 1978)
Août 2015La Marseillaise (Jean Renoir, 1938)
Juillet 2015Lumière silencieuse (Carlos Reygadas, 2007)
Juin 2015Vice-versa (Pete Docter & Ronaldo Del Carmen, 2015) Top 100
Mai 2015Deep end (Jerzy Skolimowski, 1970)
Avril 2015Blue collar (Paul Schrader, 1978)
Mars 2015Pandora (Albert Lewin, 1951)
Février 2015La femme modèle (Vincente Minnelli, 1957)
Janvier 2015Aventures en Birmanie (Raoul Walsh, 1945)
Décembre 2014Enquête sur un citoyen au-dessus de tout soupçon (Elio Petri, 1970)
Novembre 2014Lifeboat (Alfred Hitchcock, 1944)
Octobre 2014Zardoz (Sean Connery, 1974)
Septembre 2014Un, deux, trois (Billy Wilder, 1961)
Août 2014Le prix d’un homme (Lindsay Anderson, 1963)
Juillet 2014Le soleil brille pour tout le monde (John Ford, 1953)
Juin 2014Bird people (Pascale Ferran, 2014)
Mai 2014Léon Morin, prêtre (Jean-Pierre Melville, 1961) Top 100
Avril 2014L’homme d’Aran (Robert Flaherty, 1934)
Mars 2014Terre en transe (Glauber Rocha, 1967)
Février 2014Minnie et Moskowitz (John Cassavetes, 1971)
Janvier 201412 years a slave (Steve McQueen, 2013)
Décembre 2013La jalousie (Philippe Garrel, 2013)
Novembre 2013Elle et lui (Leo McCarey, 1957)
Octobre 2013L’arbre aux sabots (Ermanno Olmi, 1978)
Septembre 2013Blue Jasmine (Woody Allen, 2013)
Août 2013La randonnée (Nicolas Roeg, 1971)
Juillet 2013Le monde d’Apu (Satyajit Ray, 1959)
Juin 2013Choses secrètes (Jean-Claude Brisseau, 2002)
Mai 2013Mud (Jeff Nichols, 2012)
Avril 2013Les espions (Fritz Lang, 1928)
Mars 2013Chronique d’un été (Jean Rouch & Edgar Morin, 1961)
Février 2013 – Le salon de musique (Satyajit Ray, 1958)
Janvier 2013L’heure suprême (Frank Borzage, 1927) Top 100
Décembre 2012 – Tabou (Miguel Gomes, 2012)
Novembre 2012 – Mark Dixon, détective (Otto Preminger, 1950)
Octobre 2012 – Point limite (Sidney Lumet, 1964)
Septembre 2012 – Scènes de la vie conjugale (Ingmar Bergman, 1973)
Août 2012 – Barberousse (Akira Kurosawa, 1965) Top 100
Juillet 2012 – Que le spectacle commence ! (Bob Fosse, 1979)
Juin 2012 – Pique-nique à Hanging Rock (Peter Weir, 1975)
Mai 2012 – Moonrise kingdom (Wes Anderson, 2012)
Avril 2012 – Seuls les anges ont des ailes (Howard Hawks, 1939) Top 100
Mars 2012 – L'intendant Sansho (Kenji Mizoguchi, 1954)
Février 2012 – L'ombre d'un doute (Alfred Hitchcock, 1943)
Janvier 2012 – Brève rencontre (David Lean, 1945)
Décembre 2011 – Je t'aime, je t'aime (Alain Resnais, 1968)
Novembre 2011 – L'homme à la caméra (Dziga Vertov, 1929) Top 100 & L'incompris (Luigi Comencini, 1967) Top 100
Octobre 2011 – Georgia (Arthur Penn, 1981)
Septembre 2011 – Voyage à Tokyo (Yasujiro Ozu, 1953)
Août 2011 – Super 8 (J.J. Abrams, 2011)
Juillet 2011 – L'ami de mon amie (Éric Rohmer, 1987)
Dernière modification par Thaddeus le 1 juin 17, 23:11, modifié 1 fois.
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AtCloseRange
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Re: Commentaires à propos de votre film du mois

Message par AtCloseRange »

ça a l'air vachement bien Alien: Covenant...
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