Commentaires à propos de votre film du mois

Rubrique consacrée au cinéma et aux films tournés à partir de 1980.

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feb
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Re: Commentaires à propos de votre film du mois

Message par feb »

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La Source - Ingmar Bergman

La scène finale est sublime.
Federico
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Message par Federico »

Décembre débute à peine que c'est déjà Noël...

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J'ai même vu passer un ange... :oops: :oops: :oops:

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Jeremy Fox
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Message par Jeremy Fox »

Federico a écrit :
J'ai même vu passer un ange... :oops: :oops: :oops:

J'avais vu le même passer et dans ce sublime film, elle est épatante.
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Thaddeus
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Message par Thaddeus »

Tu ne l'avais jamais vu, Federico ?
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Jeremy Fox
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Message par Jeremy Fox »

Ca me fait d'ailleurs me rendre compte l'avoir oublié dans mon top 100 ; je vais aller remédier à cet erreur.
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Demi-Lune
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Message par Demi-Lune »

feb a écrit :La Source - Ingmar Bergman

La scène finale est sublime.
8)
feb
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Message par feb »

Voilà c'est dit. 8)
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Message par Federico »

Thaddeus a écrit :Tu ne l'avais jamais vu, Federico ?
Ben non et si tu savais le nombre de grands classiques qu'il me reste à découvrir... :?
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Message par Supfiction »

Federico a écrit :
Thaddeus a écrit :Tu ne l'avais jamais vu, Federico ?
Ben non et si tu savais le nombre de grands classiques qu'il me reste à découvrir... :?
Des fois on s'aventure dans des coins obscures, et on oublie ce qu'il y a dans la lumière..

Sinon, tu en es déjà à ton film du mois de décembre si je comprends bien ?
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Flavia
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Message par Flavia »

Federico a écrit :Décembre débute à peine que c'est déjà Noël...
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J'ai même vu passer un ange... :oops: :oops: :oops:
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:D Tu démarres très fort avec ce puissant mélodrame.
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Thaddeus
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Message par Thaddeus »

Mélo power, ce mois-ci.
Film du mois de novembre 2013

1. Elle et Lui (Leo McCarey, 1957)

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2. Trois Camarades (Frank Borzage, 1938)

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3. Des Gens comme les Autres (Robert Redford, 1980)

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Mes découvertes en détails :
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L’amour fou (Jacques Rivette, 1968)
Quatre heures. C’est le temps que s’octroie Rivette pour tenter de capter, en une sorte de cinéma-vérité-reportage à la construction libre, la réalité intime d’un couple en désunion. Il pousse à l’extrême ses recherches sur l’expression et l’enregistrement du réel, l’entremêlement du document brut et de la fiction, en faisant durer jusqu’à l’épuisement les séquences d’improvisation, de répétition, de jeu. Le rapport de la vie au théâtre, le dialogue complexe entre création scénique et crise amoureuse, la recherche de l’écoulement du temps et de l’intensité des passions valent autant de tunnels d’ennui que de moments de grâce, autant de dialogues plombants que de fulgurances magiques. L’expérience est assez abrupte mais illuminée par la présence de Bulle Ogier en petite chose lunaire, fragile et dépressive. 4/6

Inside Llewyn Davis (Joel & Ethan Coen, 2013)
Pour ceux qui en doutaient, cette superbe tragi-comédie musicale vient rappeler que les Coen sont imperméables au mépris, au cynisme et la misanthropie. Jamais sans doute ils ne s’étaient ouverts à une telle douceur et à une telle mansuétude dans l’évocation des infortunes, dans la peinture mélancolique de l’hostilité du monde, dans les manifestations obstinées d’une malchance dessinant comme un résumé désabusé de nos existences. Étrange parcours immobile que celui de Llewyn Davis, ce looser magnifique qui ne pose jamais ses valises, et dont les tribulations kafkaïennes rejoignent celles d’un alter ego à poil roux, témoin muet de ses blessures. Son errance gelée se nourrit aux images pathétiques d’une splendide photo hivernale, et son refus du compromis offre à sa défaite la dignité d’une irréductible grandeur. 5/6

Bob le flambeur (Jean-Pierre Melville, 1956)
Le premier polar de Melville s’inscrit dans la tradition du film noir à la française mais s’en démarque par une fascination du décor et de la mythologie américaines en même temps qu’un regard presque ethnologique sur le milieu. On y perçoit d’emblée une ligne personnelle, une forme de moralisme désenchanté exaltant une image qui serait désuète si elle ne composait une poétique de la virilité et des sociétés d’hommes. Captivant mais d’une sécheresse peu amène, un tantinet raidi par ses composantes théoriques (la voix off commentant avec neutralité le déroulement de l’action), le film secrète l’ironie tragique d’un parcours condamné d’avance. 4/6

Les désemparés (Max Ophüls, 1949)
La petite surprise de voir Ophüls s’emparer d’une intrigue de film noir ne dure qu’un temps : l’intérêt du cinéaste pour le mélodrame reprend le dessus et recouvre vite les enjeux du suspense criminel. C’est dans la description précise d’une petite ville de province américaine et la portrait nuancé d’une femme en détresse, écartelée entre plusieurs influences, que le cinéaste, à la manière d’un Douglas Sirk, fait tomber les masques et cherche à capter la vérité intérieure d’êtres pris dans les rets de la fatalité. La mise en scène, d’une virtuosité invisible, et les prestations très justes de Joan Bennett et James Mason offrent un surcroît d’intensité et d’élégance à ce beau film sur le sacrifice. 4/6

Je sais où je vais (Michael Powell & Emeric Pressburger, 1945)
Powell et Pressburger poursuivent leur exaltation sereine des trésors de la province avec cette romantique comédie de mœurs battue par les vents de la lande écossaise, sur laquelle rôdent des légendes millénaires et veillent de pittoresques et sympathiques figures. Une fois de plus, leur art mêle évidence et raffinement et consiste à faire évoluer les certitudes d’un personnage en le confrontant à une réalité ignorée – ce secret résidant autant dans son cœur que dans les manifestations envoûtantes des merveilles du monde. C’est tout le périple intérieur effectué par l’héroïne, qui pensait que la clé du bonheur se trouvait dans un bon mariage et la découvre finalement dans l’altruisme généreux et le bonheur simple des petites choses. 4/6

Un nommé Cable Hogue (Sam Peckinpah, 1970)
Rarement Peckinpah aura porté une telle tendresse à ses personnages. Ce film injustement méconnu se lit comme le contre-pied salutaire à la fureur nihiliste et désespérée de son inspiration habituelle. Brave et sympathique prospecteur ayant trouvé tardivement sa fortune, Cable Hogue sirote son bonheur au milieu du désert, recevant les visites de la ville comme autant de spectres du passé, partageant l’amour d’une jolie prostituée, se liant avec un prêtre porté sur la jeune chair mais pas mauvais bougre, fraternisant enfin avec un ennemi en qui il se reconnaît. Le western naturaliste, gorgé de truculence et d’ironie, revêt ainsi les couleurs d’un lamento d’opéra humoristique dont la grandeur se nourrit d’humilité et de sensibilité. 5/6

Nos plus belles années (Sydney Pollack, 1973)
Il est mince, il est beau, il sent bon le sable chaud : Robert Redford, alter ego privilégié du cinéaste, est ici l’un de ces déserteurs de l’Histoire sommés de prendre position et apprenant sur le tard qu’on ne fuit pas impunément la réalité de son temps. Face à lui, Barbra Streisand bâtit un personnage complexe et chaleureux, volontariste mais vulnérable affectivement, dont elle rend avec un naturel pathétique les contradictions et les hésitations. Ces deux acteurs formidables éclairent une belle chronique romanesque à la Fitzgerald, qui dissout l’illusion lyrique à la faveur d’une analyse précise des ambigüités de l’Amérique, et recouvre d’une sourde mélancolie la relation intense mais manquée entre deux êtres profondément différents. 4/6

Femmes entre elles (Michelangelo Antonioni, 1955)
Héritière pour une part du néoréalisme dans ses constats d’échecs sociaux et de l’interrogation intime sur la solitude et la difficulté à nouer des liens affectifs stables, cette subtile étude psychologique témoigne très tôt de l’intérêt d’Antonioni pour le portrait féminin. Les amies du titre original sont des femmes modernes et énergiques, moins indolentes et irresponsables que les hommes, dont le cinéaste analyse la camaraderie comme un tissu complexe de rivalités, de jalousies, de médisances, terreau de moult inquiétudes et turbulences. D’une belle fluidité chorale, la mise en scène les observe vivre, aimer, se chercher, en privilégiant un sens de la litote qui invite le spectateur à remplir les vides avec ses propres conjectures. 4/6

L’homme qui venait d’ailleurs (Nicolas Roeg, 1973)
Lorsque Nicolas Roeg investit le champ de la SF allégorique, celle du Jour où la Terre s’arrêta, il en offre une désinence singulière. Extraterrestre à la silhouette étique et à la chevelure de feu, David Bowie s’efforce de s’adapter à la vie terrestre mais se heurte à l’incompréhension d’une société de consommation hostile aux marginaux. Influencé par le psychédélisme et la libération sexuelle de son époque, toujours prompt à fuir les conventions pour privilégier les climats étranges, composer des images équivoque et mystérieuses, bousculer la logique traditionnelle du récit, le cinéaste trouve une tonalité bien particulière, conforme à la personnalité déphasée de son héros peu à peu réduit à l’impuissance et à l’anonymat. Mais son film intrigue bien plus qu’il ne touche. 4/6

Inferno (Dario Argento, 1980)
On peut considérer ce nouvel avatar de l’orrore all’italiana comme un remake de Suspiria précédent tant Argento y redécline ses marottes et ses recherches sur l’image en n’essayant même plus de cacher les faiblesses d’une intrigue inexistante. Résultat : une succession répétitive de variations sur la couleur, l’éclairage et le décor (oh le beau violet, ah le joli vert), qui pousse à fond les curseurs du grand-guignol barbouillé et du kitsch impavide. Morts sanguinolentes à gogo (il ne fait pas bon être une fille chez Argento), festival d’effets grandiloquents à la lisière du ridicule et chœurs électro-rock bien ringards produisent un cocktail dont l’incontestable originalité flirte constamment avec le nanar. 3/6

Dracula (Todd Browning, 1931)
Si la redoutable épreuve du temps qui passe lui a infligé quelques dommages (les chauves-souris en carton animées par des fils, ça le fait plus trop aujourd’hui), le maître-étalon du film de vampires à l’américaine est loin d’avoir perdu toutes ses couleurs (métaphoriquement parlant). Car Browning possède un sens impeccable de la rétention, voire de l’épure, et qu’il sait raconter en images sobres mais expressives la célébrissime histoire du compte transylvanien. Sans jamais verser dans le guignol, en misant davantage sur l’immobilité et la suspension que sur l’action, il invente un climat de fantastique et d’angoisse qui, sans égaler le Nosferatu de Murnau, captive d’un bout à l’autre. 4/6

Printemps précoce (Yasujirō Ozu, 1956)
Chez Ozu, depuis toujours, le milieu du travail est le bureau, situé au cœur du complexe urbain, et le travailleur un employé soumis à un rythme, des codes, des impératifs qui régulent sa vie familiale. Cette condition offre le sujet central d’une étude de mœurs qui fouille les interférences de la vie professionnelle et de la vie affective, les petits mensonges et les menus compromis que s’autorisent des personnages sans héroïsme mais sans médiocrité, dont le caractère ordinaire se révèle par un gommage de toute dramatisation. L’aventure adultérine, le remords et la déception, la réconciliation conjugale forment les étapes banales d’un segment d’existence vide d’accomplissement, et dont le pathos nous est rendu sans analyse psychologique. 4/6

Evil dead 2 (Sam Raimi, 1987)
Au bout de cinq minutes, la copine du héros est déjà passée par les cases possession, lévitation, démembrement et confiture. Le pauvre Ash commence tout juste à dérouiller et encaissera jusqu’à la fin plus de turpitudes physiques que John McClane n'en a jamais enduré pendant toute sa carrière. La fureur formelle de Sam Raimi est à la hauteur, faisant de son gourbi macabre un oasis grouillant de maléfices, de visions horrifiques, de créatures pustuleuses et de gags sanguinolents, affirmant une créativité dans l’escalade du chaos qui force le respect. La peur y est toujours stimulée avec l’humour et la malice, le déferlement des images tient autant du burlesque que de la poésie plastique, et l’on sort de cette foire baroque aussi repu que ravi. 5/6

La vénus à la fourrure (Roman Polanski, 2013)
Polanski et le huis-clos c’est une grande histoire d’amour, et c’est une fois de plus en s’en remettant à sa gestion impeccable du champ et à son sens consommé du tempo qu’il évite de s’enliser dans la raideur du théâtre filmé. Un homme, une femme, un rapport d’interdépendance biaisé dès le départ et tout le corpus thématique de l’auteur qui, autour du travestissement, de l’ambiguïté du rapport de domination et du vacillement des apparences, converge en une forme de substrat polanskien élémentaire. Mais à 80 ans le cinéaste est plus enclin à s’amuser qu’à disserter, et c’est sur le ton de la farce narquoise, dans un grand bouillon de pulsions, qu’il égratigne certains codes et comportements régis par la misogynie et l’hypocrisie. 4/6

Quai d’Orsay (Bertrand Tavernier, 2013)
Pas né de la dernière pluie, Tavernier a su éviter les pièges les plus dangereux de la satire en ne versant ni dans le cynisme de mauvais aloi, ni dans la caricature au pilon. L’énergie qu’il injecte à sa plongée grinçante au milieu du bocal ministériel se nourrit à la vitalité d’un milieu explosif où s’agitent une flopée de cols blanc tous plus ou moins proches de l’incident de surchauffe. La nervosité bouillonnante du récit s’accorde à la vigueur de l’interprétation (grand numéro de Nils Arestrup), et l’on sait gré au cinéaste de rendre, au-delà d’un vaudeville frisant parfois le burlesque, un hommage railleur mais sincère à l’action politique et à la volonté qu’il faut affirmer pour faire passer ses idées et tenter de rendre le monde meilleur. 4/6

Guerre et paix (King Vidor, 1956)
Personne ne pouvait mieux que King Vidor porter à l’écran le monument littéraire de Tolstoï. Surprise et déception : son goût de la démesure se voit ici curieusement domestiqué, aplani, appauvri, peut-être incompatible avec les impératifs de la superproduction. L’adaptation porte la marque d’un travail bien fait mais sans véritable souffle épique ni envergure idéologique, assez platement illustratif dans son intrigue et ses enjeux relationnels. Les trois heures et demie passent telles un fastueux livre d’images, et si le statisme de la mise en scène se voit parfois contredit par quelques séquences fougueuses et très inspirées, il vaut mieux ne pas comparer ce film avec la version grandiose et très audacieuse qu’en livrera Sergueï Bondartchouk dix ans plus tard. 3/6

Elle et lui (Leo McCarey, 1957)
Ce film se découvre comme un sanctuaire fondateur canonisé par les hommages et adulé par ses héritiers. Il marque à la fois l’année zéro et l’apogée du drame romantique, qu’il magnifie avec une forme de qualité provocatrice, réaffirmant à contre-courant des modes et des idées reçues la beauté anachronique d’un cinéma tour à tour tendre, grave et comique. Inutile de résister devant tant de pudeur et de justesse, on se fait avoir sur toute la ligne : en souriant à l’apprivoisement mutuel de Cary Grant et Deborah Kerr (couple de légende), en respirant le doux parfum du temps qui s’en va lors d’une escale édenique dans la baie de Villefranche, en goûtant à la noblesse de ces personnages, à leur amour fauché par le destin, à leurs élans utopiques dont la pureté harmonieuse tient autant de l’épiphanie que de l’assomption. 5/6

Capitaine Phillips (Paul Greengrass, 2013)
La prise d’otage que Greengrass reconstitue ici aurait pu fournir l’argument d’une interrogation sur la mauvaise conscience occidentale et les ravages du capitalisme mondialisé. Hélas, l’excès de confiance et la vue un peu courte du réalisateur la réduisent à une simple démonstration de savoir-faire. Plus problématique, ce qui affleure derrière ce thriller maritime et stratégique, au-delà de la tension entretenue par une incurable shaky cam, c’est le reflux des automatismes hollywoodiens : pirates somaliens réduits à une typologie simpliste, star héroïsée dans sa faillible humanité, efficacité logistique d’une Marine américaine invincible, exposée avec une complice fascination. 3/6

Hôtel du nord (Marcel Carné, 1938)
Œuvre jumelle de Quai des brumes, dont elle exporte le réel reconstitué aux quais populaires de Paris. L’univers de Carné se déploie à la faveur de deux artifices caractéristiques : celui expressionniste de la mise en scène, celui poétique du scénario. Mais cette fois tous les horizons ne sont pas barrés, trouvant une lumière pâle à laquelle se nourrir, quand bien même les illusions des prolétaires et des déclassés se noieront dans la joie amère d’un bal du 14 juillet. Le meilleur de ce cinéma pittoresque mais dépassé est évidemment à trouver dans ses personnages-emblèmes, bons ou mauvais diables, meurtris par l’amour : plus que la pourtant centrale Annabella, on retient le cynisme désabusé de Jouvet et l’atmosphérique Arletty en tapineuse à grande gueule. 4/6

Shanghai express (Josef von Sternberg, 1932)
Direction la Chine révolutionnaire et un train roulant vers Pékin au travers du chaos : l’inspiration de Sternberg se déploie à nouveau à la faveur d’un cadre radicalement étranger dont l’altérité et la plénitude sont les gages de l’authenticité artistique. C’est un espace de rêve et de convention qui favorise l’évolution de plus en plus fétichiste de ses motifs et de sa thématique : ici, chacun joue un double rôle et cherche à cacher la nature de ses motivations et de ses sentiments. Jeu dangereux où la séduction et la trahison entament un peu de deux avec la mort, où la sincérité se drape dans des voiles de venin, et dont l’irréalité est magnifiée par la maîtrise impériale de la lumière : ici deux mains jointes au milieu de l’obscurité, là le visage tremblant de l’héroïne, incliné vers le haut, dans un îlot de blancheur. 4/6

Trois camarades (Frank Borzage, 1938)
F. Scott Fitzgerald et Joseph L. Mankiewicz ont conflictuellement collaboré à cette œuvre pleinement borzagienne, portée par une très sensible interprétation, où la mort et son idéalisation fournissent l’échappatoire à d’insolubles problèmes sociaux. Car s’il est un document sur la République de Weimar et sa génération perdue, en proie au chômage et la montée du fascisme, le film célèbre surtout la force d’un amour couvé par une amitié inébranlable, dont l’image finale des héros flottants entre le ciel et la terre, le présent et l’éternité, synthétise toute la poésie. L’adieu de Margaret Sullavan sur le balcon neigeux du sanatorium, la chaleur folkloriste de la brasserie, le mariage improvisé participent d’une même flamme poignante et rêveuse, d’un même prosaïsme quotidien habillé d’accents célestes. 5/6

L’intrus (Claire Denis, 2004)
Comme toujours Claire Denis opère par sensation tactile et imagerie instinctive. Plus qu’aucun autre de ses films, cette fugue au cœur d’une nature qui frémit, vibre, se glace ou s’échauffe porte le credo d’un art délesté des contingences dramatiques. Tout ici est indéfinissable, incertain, amovible, tout oscille de la chair à la psyché, du temps présent au ravivement de la mémoire, dans une logique d’éparpillement spatial et temporel qui irrite constamment la compréhension rationnelle. Des montages du Jura au soleil de Pusan, de la ville-banque genevoise au charme mortifère de Tahiti, on suit un voyage intérieur marqué par la quête de rachat et de la transmission, mais dont l’obscurité me laisse perplexe et très peu concerné. 3/6

Un thé au Sahara (Bernardo Bertolucci, 1990)
Peu de lieux sont aussi photogéniques que le désert, ses dunes lisses et blondes ou sa nuit étoilée. Bertolucci n’élude pas le chromo mais l’exagère pour mieux s’en dépoisser. Il raconte l’histoire d’un couple à la dérive qui cherche à se retrouver entre les escales et les chambres de torchis : pour cela, chacun devra aller jusqu’au bout de lui-même, se noyer puis finalement peut-être se trouver dans le sable, la chaleur, le froid, la poussière, l’architecture barbare d’Agadès ou les bas-fonds de Tanger. L’amour est un mirage, l’homme et sa mort un grain de sable dans le néant, mais le film distille, à travers sa dimension initiatique et le mystère cruel de ses images, une philosophie amère que la toujours émouvante Debra Winger parvient joliment à incarner. 4/6

The immigrant (James Gray, 2013)
Ne pas se fier à sa facture mate, étouffée, presque déceptive : le premier film d’époque de James Gray est un nouveau joyau noir qui s’applique à plonger son héroïne dans la déréliction pour mieux la grandir moralement et spirituellement. Constamment bordé par un espoir et une lumière gardant tout misérabilisme à distance, son chemin de croix se vit comme un cauchemar alangui dont l’expressivité archaïque puise aux sources vives du cinéma muet. C’est toute la puissance sourde et enténébrée d’un mélodrame qui conjugue les désillusions du rêve américain à la circulation complexe des rapports de pouvoir et de dépendance, des tourments de l’amour et du sacrifice, vécus comme autant d’enjeux mouvants, troubles et réversibles. 5/6

Des gens comme les autres (Robert Redford, 1980)
Le premier essai de Redford réalisateur a-t-il volé ses Oscars ? Certainement au regard de ses immenses concurrents ; nullement si l’on juge de la maturité et de l’acuité psychologique avec laquelle il explore les blessures secrètes d’une famille apparemment sans histoire. Par petites touches, il dresse le portrait subtil de cette bourgeoisie WASP qui n’a jamais cessé d’empreindre le système de valeurs américain : être performant, rester maître de soi, parvenir à sauver les apparences lorsque tout s’effrite derrière les façades aseptisées. Miné par la culpabilité et l'engourdissement affectif, l'adolescent trouvera dans la bienveillance du psy et l’amour désemparé du père le moyen de vaincre son mal de vivre, qu’entretiennent la distance glaciale et le ressentiment inconscient de sa mère. Un très beau film. 5/6

Boudu sauvé des eaux (Jean Renoir, 1932)
L’altruisme libéraliste peut vite révéler ses limites. Il suffit de le confronter à l’anarchisme de Boudu le clochard, pique-assiette sans gêne, invité ingrat, fornicateur invétéré qui roule sur les tables, met la maison sens dessus dessous, lutine la bonne et couche avec la bourgeoise. Si la subversion et la cocasserie bouffonne de la comédie demeurent truculentes, c’est par son discours en creux : le libraire reconnaît chez le vagabond son double désinhibé, le satyre de ses propres fantasmes de liberté. Renoir ne cache pas sa sympathie pour le bon sauvage, cet électron libre qui scandalise ou décoince les gens respectables, ce goujat malicieux et insouciant qui préfèrera bien sûr, au terme d’un faux mariage en guinguette, se laisser porter par les eaux. 4/6


Et aussi :

Loulou (Georg Wilhelm Pabst, 1929) - 4/6
La couleur de la grenade (Sergueï Paradjanov, 1969) - 2/6
Prince of Texas (David Gordon Green, 2013) - 3/6
The swimmer (Frank Perry, 1968) - 5/6
Guillaume et les garçons, à table ! (Guillaume Gallienne, 2013) - 3/6
Films des mois précédents :
Spoiler (cliquez pour afficher)
Octobre 2013 - L'Arbre aux sabots (Ermanno Olmi, 1978)
Septembre 2013 - Blue Jasmine (Woody Allen, 2013)
Août 2013 - La randonnée (Nicolas Roeg, 1971) Top 100
Juillet 2013 - Le monde d'Apu (Satyajit Ray, 1959)
Juin 2013 - Choses secrètes (Jean-Claude Brisseau, 2002)
Mai 2013 - Mud (Jeff Nichols, 2012)
Avril 2013 - Les espions (Fritz Lang, 1928)
Mars 2013 - Chronique d'un été (Jean Rouch & Edgar Morin, 1961)
Février 2013 - Le salon de musique (Satyajit Ray, 1958)
Janvier 2013 - L'heure suprême (Frank Borzage, 1927) Top 100
Décembre 2012 - Tabou (Miguel Gomes, 2012)
Novembre 2012 - Mark Dixon, détective (Otto Preminger, 1950)
Octobre 2012 - Point limite (Sidney Lumet, 1964)
Septembre 2012 - Scènes de la vie conjugale (Ingmar Bergman, 1973)
Août 2012 - Barberousse (Akira Kurosawa, 1965) Top 100
Juillet 2012 - Que le spectacle commence ! (Bob Fosse, 1979)
Juin 2012 - Pique-nique à Hanging Rock (Peter Weir, 1975)
Mai 2012 - Moonrise kingdom (Wes Anderson, 2012)
Avril 2012 - Seuls les anges ont des ailes (Howard Hawks, 1939) Top 100
Mars 2012 - L'intendant Sansho (Kenji Mizoguchi, 1954)
Février 2012 - L'ombre d'un doute (Alfred Hitchcock, 1943)
Janvier 2012 - Brève rencontre (David Lean, 1945)
Décembre 2011 - Je t'aime, je t'aime (Alain Resnais, 1968)
Novembre 2011 - L'homme à la caméra (Dziga Vertov, 1929) Top 100 & L'incompris (Luigi Comencini, 1966) Top 100
Octobre 2011 - Georgia (Arthur Penn, 1981)
Septembre 2011 - Voyage à Tokyo (Yasujiro Ozu, 1953)
Août 2011 - Super 8 (J.J. Abrams, 2011)
Juillet 2011 - L'ami de mon amie (Éric Rohmer, 1987)
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AtCloseRange
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Message par AtCloseRange »

Thaddeus a écrit :3. Des Gens comme les Autres (Robert Redford, 1980)

Image[/center]
ça fait plaisir de voir que plusieurs l'ont mis dans leur top ce mois-ci. Je trouve sa réputation de ce côté-ci de l'Atlantique un peu timide. Peut-être à l'aune de la carrière de la réalisateur de Redford qui n'a sans doute pas confirmé après ce très beau premier film.
Best
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Re: Commentaires à propos de votre film du mois

Message par Best »

Thaddeus a écrit :Mélo power, ce mois-ci.
Film du mois de novembre 2013

1. Elle et Lui (Leo McCarey, 1957)

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2. Trois Camarades (Frank Borzage, 1938)

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Et pas n'importe quels mélos. Deux merveilles :D
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Re: Commentaires à propos de votre film du mois

Message par AtCloseRange »

Un trio dominé par Jean Eustache ce mois-ci

1 La Maman et la Putain (Eustache)

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2 Le Jardin des Finzi-Contini (de Sica)

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3 Before Midnight (Linklater)

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Flavia
My Taylor is rich
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Re: Commentaires à propos de votre film du mois

Message par Flavia »

Thaddeus a écrit :Mélo power, ce mois-ci.
Film du mois de novembre 2013
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1. Elle et Lui (Leo McCarey, 1957)

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2. Trois Camarades (Frank Borzage, 1938)

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3. Des Gens comme les Autres (Robert Redford, 1980)

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Quel beau podium ! Je suis ravie que Des gens comme les autres t'ait plu. :D
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