Commentaires à propos de votre film du mois

Rubrique consacrée au cinéma et aux films tournés à partir de 1980.

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semmelweis
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Message par semmelweis »

Nouveau concurrent du mois de juin (c'est de la folie ce début de mois):
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Anorya
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Message par Anorya »

semmelweis a écrit :Nouveau concurrent du mois de juin (c'est de la folie ce début de mois):
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Un putain de bon film. :D
Tu l'as vu en dvd ? Zone 1 ou 2 ?
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Gounou
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Message par Gounou »

Mon film du mois de mai :

L'amour l'après-midi
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semmelweis
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Message par semmelweis »

Anorya a écrit :
semmelweis a écrit :Nouveau concurrent du mois de juin (c'est de la folie ce début de mois):
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Un putain de bon film. :D
Tu l'as vu en dvd ? Zone 1 ou 2 ?
En dvd , zone 2 d'occasion néerlandais il me semble !
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Boubakar
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Message par Boubakar »

Premier prétendant du mois :

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cinephage
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Message par cinephage »

Pour la faire brève (encore 47 titres vus en mai), mon film du mois restera le très beau Walkabout, de Nicolas Roeg. Un film superbe, émouvant, et imprégné d'une profonde spiritualité.
Derrière, quelques excellents films :
Haute pègre/Trouble in Paradise, d'Ernst Lubitsch
La porte du Diable/Devil's Doorway, d'Anthony Mann

Mention spéciale à la mini-série western Lonesome Dove, grandiose et touchante, qui offre à Robert Duvall un de ses meilleurs roles.

En salle, quelques films méritent également d'être mentionnés :

Le passé, d'Asgar Fahradi
Mud, de Jeff Nichols
The grandmaster, de Wong Kar-Wai

Dans l'ensemble, un mois plus que satisfaisant.
I love movies from the creation of cinema—from single-shot silent films, to serialized films in the teens, Fritz Lang, and a million others through the twenties—basically, I have a love for cinema through all the decades, from all over the world, from the highbrow to the lowbrow. - David Robert Mitchell
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Message par Colqhoun »

Hier, grosse découverte, qui pourrait déjà s'installer comme mon film du mois de juin (et se placer sans problèmes dans mes plus belles découvertes de l'année):

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The Master de Paul Thomas Anderson.
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Message par Harkento »

Le Top 8 du mois de Mai :

1. Bad timing (Nicolas Roeg)
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2. Un conte d'été polonais (Andrzej Jakimovski)
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3. Dagon (Stuart Gordon)
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4. L'insoutenable légèreté de l'être (Philip Kaufman)
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5. The crying game (Neil Jordan)
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6. Grand prix (John Frankenheimer)
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7. Le coup de l'escalier (Robert Wise)
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8. The Cotton Club (Francis Ford Coppola)
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PS : les 5 premiers sont des coups de coeurs énormes. Je ne me souviens pas avoir été autant bouleversé par tant de films en un seul mois !
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Message par scottspeed »

Le mois de juin commence bien avec Ghost World, vu hier et qui aurait été le film du mois de mai à un jour près. Enorme coup de coeur.
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Message par Miss Nobody »

Gounou a écrit :Mon film du mois de mai :

L'amour l'après-midi
:D
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Message par Miss Nobody »

Un tout petit mois en terme de quantité, mais un joli quinté de tête malgré tout.
Mon film du mois de mai est le sublime film de Haneke
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Le ruban blanc. Découvert par hasard sur arte, alors que j'en attendais rien de particulier (je pensais même m'ennuyer poliment), j'ai été complètement soufflée par la force de la mise en scène et la violence du propos. C'est dirigé, écrit, réalisé, interprété, de manière admirable. Mon top 100 pourrait d'ailleurs s'en trouver bousculé.

Le top 5 du mois:

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1/ Le ruban blanc (Haneke)

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2/ Une vie simple (Hui)

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3/ Boule de feu / Ball of fire (Hawks)

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4/ The fall (Singh)

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5/ Barton Fink (Coen)

Récapitulatif et "critiques":
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Films vus

* The fall (Singh) ●●●○○
Un monde imaginaire épure et bariolé, esthétisé à l'extrême, qui se transforme au fil des mots et se façonne des expériences de chacun. Un monde réel attachant, dont on s'évade avec plaisir, porté par une jeune actrice adorable et un conteur séduisant. Tout ne m'a pas toujours convaincue mais ce fut un beau voyage.
>> quelques mots supplémentaires par ici

* Daisy Clover (Mulligan) ●○○○○
J'ai dû m'y reprendre à 4 fois avant de pouvoir finir ce film sans tonalité, sans rythme et sans subtilité que ni Mulligan, ni Wood, ni Redford ne sauve des abysses. Natalie Wood y est particulièrement minaudière, agaçante, et pour couronner le tout, elle ne sait absolument pas chanter. Tout cela est fort dommage... d'autant qu'à quelques rares moments (la scène de pétage de plomb asonorisée par exemple), on sent bien que quelque chose aurait pu poindre.
* Barton Fink (Coen) ●●●○○
Film d'atmosphères. Film libre. Intelligent. Surprenant. "Barton Fink" joue des codes, nous promène et nous égare dans les arcanes de l'inspiration, les dédales de l'imagination... Imparfait mais fascinant.
* Le passé (Farhadi) ●●○○○
D'un côté, il y a une vraie finesse dans l'écriture et l'interprétation, de l'autre, il y a des personnages qui s'enlisent de manière exaspérante dans leurs problèmes, leurs doutes, leurs confusions... et un scénario qui se pèle comme un oignon autour d'une recherche de vérité mais qui finit par tomber en lambeaux à force de révélations et de tiroirs. "Le passé" devient alors une longue et sinistre descente, où l'on expérimente la culpabilité, le mal de vivre, d'aimer ou de communiquer, où l'on gratte les plaies, on se torture, on retourne le couteau...
>> quelques mots supplémentaires par ici

* Une vie simple (Hui) ●●●●○
Simple... beau... et rare... comme un sourire communicatif qui transfigure tout ce qu'il peut y avoir de glauque (cette maison de retraite en "open-space"!!!) ou sinistre (la solitude, le célibat, la vieillesse... la mort) dans l'existence. Ann Hui livre un film sans prétention mais définitivement précieux qui traite de la vie et de la fin de la vie avec une subtilité exemplaire.
* Le ruban blanc (Haneke) ●●●●● ♡ FILM DU MOIS ♡
Chronique d'une époque, "Le ruban blanc" est surtout un film de violence, rentrée ou manifeste, toujours éprouvante. Formellement, c'est bluffant de maîtrise. Sur le fond, c'est d'une dureté bouleversante. A la pureté de la mise en scène s'opposent les gangrènes de l'âme humaine et Haneke a trouvé le dosage parfait entre un propos tranché, sans équivoque, et une progression narrative subtile et immersive. C'est vraiment brillant.
* Ball of fire (Hawks) ●●●●○
Oh la délicieuse comédie que voilà! Relecture improbable de "Blanche neige", le scénario signé Wilder et Brackett est tout à fait truculent. On se régale également des charmes du couple vedette : Gary Cooper est adorable et Barbara Stanwyck aura rarement été aussi irrésistible qu'ici. Yum yum!
* La cage dorée (Alves) ●○○○○
Il y a de bonnes intentions -peut-être- mais le tout se noie dans un scénario médiocre, prévisible dès la première minutes pour quiconque a déjà vu plus de trois (télé)films dans sa vie, dans une fausse bonne-humeur et des clichés à la pelle. Evidemment, il y a pire... mais n'est-ce pas justement le pire?

* [série] The office - saison 9 ●●●○○
Ce n'est pas la première saison de trop pour "The office". C'est donc avec un certain soulagement que l'on regarde la neuvième en sachant qu'il s'agira de la dernière. Très très inégale dans les premiers épisodes, la série retrouve un peu de sa magie à mesure que la boucle se boucle. Quant au grand final en 4 épisodes, il clôt la série de manière très honorable et avec émotion.

Films revus

* Chat noir chat blanc (Kusturica) ●●●○○
Foutraque, truculent, complétement barré : ce film fout une sacrée banane... pourvu qu'on tienne le cap... Avec un rythme effréné et un humour pas toujours léger, on peut être emporté comme légèrement fatigué. Encore une fois mon coeur balance. :oops:
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Thaddeus
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Message par Thaddeus »

Mon mois de mai aura été dominé, qualitativement, par les sorties ciné.

Je vais attendre le mois d'octobre pour faire figurer le Kechiche, comme tout le monde (ou pas). Et puis ça me permet de ne pas avoir à me torturer pour trancher entre deux films et donc d'imposer l'éblouissante suprématie du dernier film de Jeff Nichols.


Film de mai 2013

Mud (Jeff Nichols, 2013)

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Le détail de mes découvertes :
Spoiler (cliquez pour afficher)
Intolérance (David Wark Griffith, 1916)
Un an après Naissance d'une nation, Griffith renchérit dans le gigantisme (avec le siège apocalyptique de Babylone en point d’orgue) et l’audace d’une narration qui surpasse son principe d’alternance, multiplie téléscopages, analogies symboliques, contre-points ou échos temporels. Les chevaux de Mésopotamie au galop, le train lancé sur les rails, le sang de la Saint-Barthélémy, la ruine du peuple de Balthazar… tout se répond, se développe, se transfigure, témoignant d’une éblouissante osmose. La ponctuation est donnée par la mère et son berceau qui se balance sans fin à travers les siècles, conjurant la diversité illusoire et le fanatisme dont l’Histoire a pu être témoin. Symphonie grandiose et impétueuse, Intolérance est de ces films statufiés dont on comprend, lorsqu’on les découvre, pourquoi ils ont conquis leur statut. On s’incline. 5/6

Huit heures de sursis (Carol Reed, 1947)
Ce pourrait être un modèle de film policier, c’est une allégorie de la solitude et du destin, la complainte d’un être condamné sur lequel pèse l’inéluctable. Cet homme erre blessé dans la nuit noire de Belfast, aux abois, recherché par tous. Dilemmes, rencontres étranges, questions existentielles émaillent son itinéraire : une femme le soigne avant de le renvoyer malgré elle aux flocons de la rue, un vagabond alcoolique reconnaît en lui un alter ego, un peintre illuminé cherche à capter sur la toile l’étincelle de la mort qu’il entrevoit dans son regard. Prêtre humaniste, chef de police, amis ou maîtresse, tous sont mis à l’épreuve de leur foi et de leur engagement – moral, idéologique, amoureux. Poème funèbre en forme de suspense allégorique, le film impose une rigueur admirable qui culmine lors de la conclusion, saisissante de grandeur tragique. 5/6

L’anguille (Shohei Imamura, 1997)
Pas facile de renaître au monde après avoir assassiné la femme aimée. Avec huit ans de prison au compteur, le héros est devenu presque mutique, détaché de tout si ce n’est du lien qu’il a noué avec une anguille rescapée de ses parties de pêche, et à laquelle il livre ses pensées. Pour dépeindre ce bonheur fuyant, cette impuissance à aimer, à se toucher, à se rejoindre, Imamura oppose au désespoir des touches de cocasserie débridée, filme des couleurs vives jaillissant d’un no man’s land marécageux, flirte avec l’absurde et l’onirisme, suggère lors d’un épilogue en forme de pugilat burlesque la possibilité d’un renouveau amoureux. C’est à travers cet optimisme prudent mais lumineux que le film parvient, in fine, à emporter véritablement l’adhésion. 4/6

Le maître de marionnettes (Hou Hsiao-hsien, 1993)
Second volet, après La Cité des Douleurs, consacré par l’auteur à l’histoire de son pays : même absence totale de dispositifs narratifs, même respiration languissante à la limite du statisme. Il faut oublier toute satisfaction immédiate pour apprécier les élégantes natures mortes, les intérieurs blutés, les vastes paysages captés par une caméra immobile, comme autant de compositions qui ne délivreraient leurs secrets qu’au compte-goutte. Un vieillard raconte la japanisation de Taïwan, la douleur ordinaire de son peuple, du deuil, du couple et de la famille ; sa voix facétieuse est notre point d’ancrage au sein de ce cinéma coulant comme une rivière à la constance obstinée, et dont le vide apparent doit être rempli par la seule implication du spectateur. J’avoue en manquer pas mal. 3/6

Stoker (Park Chan-wook, 2013)
Au cas où l’on aurait encore un doute, ce thriller vient définitivement plier l’affaire et confirme que Park n’est guère plus qu’un maniériste exclusivement attaché à esthétiser et maximiser les effets de motifs superficiellement exploités. Il convient d’en accepter les limites afin d’apprécier le film pour ce qu’il est, ne pas trop sourire des clichés alignés par ce portrait d’une jeune fille conquise par la séduisante ambiguïté du mal, expérimentant la noirceur de sa violence et de sa sexualité en éveil. Alignant consciencieusement références hitchcockiennes (avec relecture explicite de L’Ombre d’un doute) et effets de manche grandiloquents, l’exercice de style séduit par son coté profil bas, ses enluminures de conte de fées gentiment vénéneux. 4/6

La porte du diable (Anthony Mann, 1950)
Concomitant à la sortie de La Flèche Brisée, le film fait contre-point à l’idéologie pacifique, légèrement sentimentaliste, défendue par Delmer Daves. Ici peu de place pour le compromis, l’échange des valeurs et le dialogue entre les cultures : la rupture est consommée, l’opposition inéluctable, et la victoire des uns fatalement liée à la disparition des autres. Le partage des terres et son ouverture aux migrants bute sur l’intraitable fermeté de l’Indien trahi une fois de trop : cette impasse, le cinéaste l’illustre jusqu’à une ultime confrontation en forme de tombeau, où même les promesses de réconciliation de l’avocate sont condamnées par l’inextinguible soif de domination des têtes pensantes. Le constat est amer, d’une noirceur inédite pour l’époque, et sa déploration nourrie d’une impuissance navrée. 5/6

Les damnés (Joseph Losey, 1961)
Premier engagement sur les traces d’une bande de zonards dans les rues de Portland, blousons noirs qui tabassent les touristes en sifflotant des airs rock et en faisant tournoyer des parapluies. En parallèle, une organisation étatique développe un sombre projet de domestication générationnelle. Orange Mécanique avant l’heure ? On le croit, avant que le film ne revête les accents d’un Village des Damnés à l’étrangeté diffuse, puis ne bascule dans l’inquiétude d’une parabole prémonisant le funeste devenir atomique du monde. Les sculptures pétrifiées, les cris des enfants enfermés sous les falaises au large de la ville, l’ombre de la Mort Noire qui plane au-dessus de notre destin commun prouvent que, même dans un genre a priori éloigné de son univers, l’inspiration de Losey reste féconde. 5/6

Performance (Donald Cammell & Nicolas Roeg, 1970)
Il ne faut pas limiter l’intérêt du premier film réalisé par Nicolas Roeg à sa dimension sociologique. Concomitant à la veine contestataire britannique portée notamment par Lindsay Anderson, sans doute conçu pour promouvoir Mick Jagger, il excède cependant cette seule lecture et recherche un nouvel agencement des images, de leur temporalité et de leur rapport, multiplie les propositions esthétiques visant à brouiller les frontières entre transe et réalité, désir et conformisme. La tonalité cocasse et grotesque du polar naturaliste cède la place au trip : héros vampirisé par la rock star décadente dans un double processus de transfert et d’émulation, personnages aux contours indécis (la jeune fille androgyne), rigidité de l’establishment grignoté par un imaginaire fantasmatique... L’exercice est totalement fascinant. 5/6

Les voyages de Sullivan (Preston Sturges, 1941)
Passé une entrée en matière particulièrement explosive en forme de course-poursuite texaveryesque, le film se range quelque peu et emprunte un sentier à la fois plus prévisible et plus retors, qui vise à réfléchir le propre statut de son auteur en le confrontant à la réalité sociale des victimes populaires, ces laissés-pour-compte jetés par milliers sur les routes, stigmates tardifs de la Grande Dépression. Preston Sturges problématise sans le moindre esprit de sérieux la légitimité du rire, emploie les armes de la fable pour imposer sa foi aux yeux de l’hypocrite spectateur, et use d’une savante série de jeux de miroir (Veronika Lake caricaturant sa mèche blonde avant de se déguiser en garçon) pour faire pétiller son cocktail. Difficile de ne pas marcher devant tant de conviction. 4/6

Identification d’une femme (Michelangelo Antonioni, 1982)
C’est à nouveau le motif de l’entre-deux, de l’indécision, de l’hésitation irrésolue (motivée cette fois par une quête artistique – le héros est un réalisateur à la recherche de son actrice, la mort d’une passion peut-être la naissance d’une œuvre) qui est au centre du questionnement antonionien. La dichotomie symétrique de la construction, qui sépare deux brèves idylles par une fascinante séquence de rupture en plein brouillard fantomatique, rappelle les recherches de L’Avventura. Mais une urgence nouvelle se fait jour, une forme de nervosité affective a remplacé la langueur étirée qui présidait auparavant à la peinture de la désagrégation sociale et relationnelle. Voilà comment cette enquête intérieure s’avère l’un des films les plus enveloppants du cinéaste. 5/6

Le passé (Asghar Farhadi, 2013)
Muette, la première scène figure le passage de témoin avec une élégante éloquence : pour Farhadi, la barrière de la langue française n’entame en rien l’affolante justesse d’analyse et d’observation. Sa méthode repose à nouveau sur une dramaturgie pointilleuse et hypertendue qui ne serait rien si elle n’était au service de tout autre chose. Car c’est bien le passé qui pèse le long du drame, et son dévoilement progressif par le biais d’une multitude de secrets conditionnant la culpabilité et l’impuissance, la responsabilité et le pardon. Peu importe que la dernière partie soit un chouïa chargée en retournements lorsqu’une telle latitude est accordée aux sentiments : mine butée d’un garçon perdu entre deux familles, triste malentendu qui empoisonne les relations, douceur magnifique de l’ex-époux devenu médiateur, en qui se fixe notre désir à tous de bienveillance et de compassion. 5/6

Contes cruels de la jeunesse (Nagisa Oshima, 1960)
La caméra est fougueuse, mobile, le style sec et rythmé, en accord avec la nouveauté d’un sujet qui refuse de détourner le regard de la réalité urbaine et industrielle de son époque. Dans une palette de couleurs vives et tranchées, Oshima exprime le désarroi d’une jeunesse qui, pour fuir les désillusions vécues par ceux qui ont seulement quelques années de plus, basculent dans la petite criminalité. La cruauté des rapports amoureux, souvent couvés par une tension sourde, la lucidité coléreuse d’un propos qui pousse le drame jusqu’à la tragédie n’empêchent pas l’humanité d’éclore, et une réelle émotion de poindre à travers le personnage de Mako, cette jeune fille fragile, désorientée, fatalement éprise d’un petit voyou capable, au-delà de sa muflerie brutale, de lui manifester une grande tendresse. 5/6

Hope and glory (John Boorman, 1987)
Pour Billy, sept ans et alter ego évident de l’auteur au même âge, l’entrée en guerre de l’Angleterre en 1939 ouvre une parenthèse enchantée, le début d’une longue récréation sous l’égide de l’insouciance et de l’initiation heureuses. Si aucun poncif ne manque à l’appel (la grande sœur fait le mur pour rejoindre les soldats aux soirées dansantes, la mère aimante se fait du mouron, le grand-père bougon s’avère un complice fantasque…), Boorman sait y conférer un charme persistant. Entre un foyer dopé d’œstrogène et les ruines de la banlieue londonienne bombardée, devenu un immense terrain de jeu pour galopins, le recueil de souvenirs développe un ton nostalgique et souriant, qui diffuse par touches discrètes ses accents de fable. 4/6

Irma Vep (Olivier Assayas, 1996)
Jean-Pierre Léaud, réalisateur limite nervous breakdown, engage Maggie Cheung pour remaker Feuillade. Assayas aligne ces collisions culturelles avec le même ton désinvolte, incongru, facétieux. Les nuits de Paris sont baignées des airs de Sonic Youth ou d’Ali Farka, un journaliste branché John Woo conchie le cinéma intellectuel, un réalisateur un peu décalqué accepte de reprendre le projet parce qu’il arrive en fin d'Assedic (sic). Narcissisme des uns, mesquinerie des autres, douce et succulente folie d’un petit monde observé avec tendresse, à la solde du cinéma et de sa singulière magie : du directeur de production sur les dents (coucou Alex Descas) à la costumière enhardie (salut Nathalie Richard) qui en pince pour la superbe, la divine, la gracieuse Maggie. 5/6

Il était un père (Yasujiro Ozu, 1942)
Le réalisateur semble ici se fixer un défi peu banal : faire disparaître purement et simplement l’élément féminin. Mères, épouses, filles brillent donc par leur absence, sans que jamais celle-ci ne soit envisagé comme un manque, un déséquilibre ou la remise en lumière inversée d’une donnée sociale et familiale. Comme toujours l’art d’Ozu se fait simple, frontal, dénué de dispositifs retors, consacré à exploiter au maximum les ressources définies par son programme. C’est donc l’histoire d’une complicité inébranlable, celle liant un père et son fils, petit garçon devenu jeune homme, et aussi celle nouée entre deux générations – professeurs et élèves, transmetteurs et héritiers, portés par une admiration, une confiance réciproques. Philosophie heureuse, rassérénante douceur. 4/6

Paris nous appartient (Jacques Rivette, 1961)
Mais à qui appartenons-nous ? Comme l’étudiante devenue actrice en herbe, nous nous demandons lequel, du metteur en scène romantique rattrapé par une sombre fatalité, de l’exilé américain prophétisant l’apocalypse, ou de la maîtresse distante et mystérieuse, tire les ficelles de ce que l’on voit. Tout n’est peut-être qu’invention, supputation, délire, et pourtant tout paraît étrangement probable : une menace diffuse plane sur les rues de Paris, un fantastique brumeux envahit chaque poche du réel, un complot mortel et planétaire se trame sans que jamais ses termes ne soient explicités. Goût du secret cabalistique, des énigmes enchâssées, d’un imaginaire égaré dans sa propre profusion… L’enquête est fascinante, et tisse une toile arachnéenne à la Umberto Eco. 5/6

Les indomptables (Nicholas Ray, 1952)
Les hommes défient la mort afin de pouvoir s’acheter un foyer, se convaincre qu’ils valent quelque chose, ou juste se prouver qu’ils existent encore. Rattrapés par l’ivresse de l’argent, du risque et de la gloire, certains ont oublié ce en quoi ils avaient prêté serment autrefois, lorsqu’ils ne vivaient pas dans l’ombre de leur succès. Les femmes trinquent, étouffent de dépit et d’angoisse, trouvent néanmoins la force de rappeler à leurs époux ce qu’ils se sont promis. Étonnant document sur le monde séduisant et dangereux du rodéo, qui vend du spectacle en épuisant les rêves de ceux qui le font, le film accompagne une poignée de ces désaxés avant l’heure sur la route sinueuse de leur prise de conscience. 4/6

La vie d'Adèle (Abdellatif Kechiche, 2013)
La locomotive Kechiche plonge dans le même bain jeunesse contemporaine et chronique au long cours d’un amour fusionnel : c’est une immense bourrasque de vie et d’exaltation, de sentiments et de sexe, de joies et de pleurs, trois heures tumultueuses et cruelles qui mettent une grande claque dans la gueule. De la fournaise de la passion et à son étiolement inéluctable, de la cristallisation aux turbulences et aux contrariétés sociales, le film fait crépiter mille questions universelles, invite à peser la valeur de la culture et de la transmission, télescope le naturalisme cru de sa facture à l’amplitude d’une narration gloutonne. Adèle Exarchopoulos et Léa Seydoux, renversantes de puissance et d’abandon, conquièrent quant à elles, haut la main, le titre de plus beau couple de cinéma depuis bien longtemps. 5/6 (tendance 5.5...)

L’ange de la rue (Frank Borzage, 1928)
Même couple d’acteurs que dans L'Heure Suprême, même goût des lignes de vie qui se rencontrent, se quittent et se destinent à se retrouver, même abandon enhardi aux effusions torrentielles du mélodrame. Équilibriste hors pair, orfèvre des incidences et de la révélation des personnages à eux-mêmes, Borzage ose faire durer un poignant repas d’adieu jusqu’à son point de rupture, inverser les rôles en cours de récit (l’artiste romantique devient vagabond amer, la fille endurcie par la vie s’abandonne à l’amour, avant que le destin ne scelle leur union définitive), ou nimber son cadre napolitain d’une irréalité brumeuse, spectrale, frisant l’expressionnisme. Il a surtout un atout dévastateur : Janet Gaynor, sa silhouette fine comme un roseau, son minois chiffonné aux larmes perlantes et au sourire attendri. Elle est à l’image du film : irrésistiblement émouvante. 5/6

Woody et les robots (Woody Allen, 1973)
Cryogénisé à la suite d’une infortunée mésaventure médicale, notre héros, amuseur déjà suffisamment célèbre pour donner au film son titre français, se réveille en 2173 au cœur d’une société orwellienne. Pour Allen l’anticipation n’est que prétexte à tester sa maladresse ironique face à l’excentricité charmante de Diane Keaton et aligner gags et dispositifs ubuesques à la Marx brothers – combat acharné contre un pudding géant, découverte de l’Orgasmaton, imitation délirante et inversée du couple Brando/Leigh chez Kazan, reconstruction génétique d’un dictateur à partir de… son nez. Il y a de quoi rire, même si l’ensemble paraît assez décousu et dilettante en regard de l’œuvre à venir. 4/6

Brewster McCloud (Robert Altman, 1970)
On se croit d’abord dans une enquête policière nonchalamment développée, puis on vire à la peinture poético-sarcastique d’une bande de cinglés tour à tour étranges, odieux ou attendrissants, avant que le tout ne s’achève en carnaval fellinien au beau milieu du stade où, d’emblée, une cantatrice irascible massacrait The Star-Spangled Banner. On y croise un détective à la rigueur professionnelle trop suspecte pour ne pas amuser, des politicards obsédés par leur image et leurs relations, un conférencier qui se prend pour un piaf, un archange blond administrant la mort à coups de fientes d’oiseau, et un doux dingue ne rêvant, comme Icare, que de caresser les nuages : l’Amérique selon Altman. 4/6

Shokuzai : celles qui voulaient se souvenir (Kiyoshi Kurosawa, 2012)
Comme dans son précédent film, Kurosawa tente de capter les angoisses et les hantises du Japon contemporain en injectant des touches d’inquiétante étrangeté à une intrigue qui ne recourt jamais au fantastique. L’ambition est louable et se transforme ponctuellement à la faveur d’une lumière blafarde, d’un surgissement de cruauté, d’un visage fermé réprimant tantôt la colère, tantôt la détresse, tantôt la folie. Mais pour l’essentiel, Kurosawa manque assez largement son sujet et ne s’en tient, le long d’une structure épisodique vite lassante, qu’à une petite explication de texte au cas par cas sur le thème "Le traumatisme pour les nuls". Et si l’on ne peut lui reprocher du tuer le suspense dès le début, la lourdeur illustrative de ses intentions est plus difficilement pardonnable. 3/6


Et aussi :

Mud (Jeff Nichols, 2012) - 5/6 (tendance 5.5...)
La montagne sacrée (Alejandro Jodorowsky, 1973) - 5/6
Frankenstein Junior (Mel Brooks, 1974) - 3/6
Le démon des armes (Joseph H. Lewis, 1950) - 5/6
Le pigeon (Mario Monicelli, 1958) - 4/6
Noblesse oblige (Robert Hamer, 1949) - 5/6
Monty Python : La vie de Brian (Terry Jones, 1979) - 5/6
Conan le barbare (John Milius, 1981) - 5/6
Du silence et des ombres (Robert Mulligan, 1962) - 5/6
Films des mois précédents :
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Avril 2013 - Les espions (Fritz Lang, 1928)
Mars 2013 - Chronique d'un été (Jean Rouch & Edgar Morin, 1961)
Février 2013 - Le salon de musique (Satyajit Ray, 1958)
Janvier 2013 - L'heure suprême (Frank Borzage, 1927) Top 100
Décembre 2012 - Tabou (Miguel Gomes, 2012)
Novembre 2012 - Mark Dixon, détective (Otto Preminger, 1950)
Octobre 2012 - Point limite (Sidney Lumet, 1964)
Septembre 2012 - Scènes de la vie conjugale (Ingmar Bergman, 1973)
Août 2012 - Barberousse (Akira Kurosawa, 1965) Top 100
Juillet 2012 - Que le spectacle commence ! (Bob Fosse, 1979)
Juin 2012 - Pique-nique à Hanging Rock (Peter Weir, 1975)
Mai 2012 - Moonrise kingdom (Wes Anderson, 2012)
Avril 2012 - Seuls les anges ont des ailes (Howard Hawks, 1939) Top 100
Mars 2012 - L'intendant Sansho (Kenji Mizoguchi, 1954)
Février 2012 - L'ombre d'un doute (Alfred Hitchcock, 1943)
Janvier 2012 - Brève rencontre (David Lean, 1945)
Décembre 2011 - Je t'aime, je t'aime (Alain Resnais, 1968)
Novembre 2011 - L'homme à la caméra (Dziga Vertov, 1929) Top 100 & L'incompris (Luigi Comencini, 1966) Top 100
Octobre 2011 - Georgia (Arthur Penn, 1981)
Septembre 2011 - Voyage à Tokyo (Yasujiro Ozu, 1953)
Août 2011 - Super 8 (J.J. Abrams, 2011)
Juillet 2011 - L'ami de mon amie (Éric Rohmer, 1987)
Juin 2011 - Ten (Abbas Kiarostami, 2002)
Anorya
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Re: Commentaires à propos de votre film du mois

Message par Anorya »

Après réflexion face à un choix de candidats assez sérieux, The plague dogs devient mon film du mois de mai.

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MJ
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Re: Commentaires à propos de votre film du mois

Message par MJ »

Pour ce mois, je crois que c'est plié aussi. Puis même face à des concurrents sérieux, ça fait plusieurs fois déjà que la "récompense" passe sous le nez de Sirk, comme Agnès Varda qui l'aura enfin eu en mai avec Sans Toit Ni Loi.

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Pat Wheeler
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Re: Commentaires à propos de votre film du mois

Message par Pat Wheeler »

Demi-Lune a écrit :The swimmer (Frank Perry, 1968) Image
T'es pas bien dans ta tête ?
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