Christian-Jaque (1904-1994)

Rubrique consacrée au cinéma et aux films tournés avant 1980.

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Kevin95
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Re: Christian-Jaque (1904-1994)

Message par Kevin95 »

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DOCTEUR JUSTICE - Christian-Jaque (1975) découverte

Tel un grabataire qui sort pour la première fois en boite de nuit, Christian-Jaque (qui aurait pu rester à la maison faire un rami) dandine comme un dingue pour plaire au djeunz. Adaptation d'une BD labellisée Pif, Docteur Justice prouve par A+B que décidément, l'univers des comics ce n'est pas trop notre truc. Le réalisateur en charentaises bouge dans tous les sens sa caméra, aligne des punch-lines foireuses et des poses iconiques pour que le môme en redemande. Notre médecin super tip top sauve la planète d'un scénario incompréhensible, John Phillip Law suit une cure, Nathalie Delon ressemble à Nicoletta et Gert Fröbe joue les méchants comme on va chercher le pain, par habitude et sans panache. Reste donc la carte de la curiosité, la musique pop est ultra soignée (ou juste bien mais dans le naufrage, on a tendance à se rattacher à ce qu'on peut), deux trois séquences sont étonnement barrées et l'hystérie de la mise en scène finit par devenir rigolote. Me reste à voir Les Pétroleuses et La Vie parisienne pour savoir si oui ou non, Christian-Jaque sucrait bien ses fraises en fin de carrière.
Les deux fléaux qui menacent l'humanité sont le désordre et l'ordre. La corruption me dégoûte, la vertu me donne le frisson. (Michel Audiard)
bruce randylan
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Re: Christian-Jaque (1904-1994)

Message par bruce randylan »

Carmen (1944)

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Opus méconnu et désormais quasi-invisible de Christian-Jaque, cette curieuse co-production (pour l'époque) franco-italienne, tournée en 42-43, ne manque pourtant pas d'atouts. Davantage adaptée de la nouvelle de Mérimée que de l'opéra de Bizet (même si quelques thèmes sont présents sans forcément être mis en avant), on retrouve notamment au scénario et aux dialogues Christian-Jaque, Charles Spaak et Henri Jeanson avec dans les rôles principaux Viviane Romance et Jean Marais, secondé entre autres par Lucien Coëdel ou Bernard Blier.
Il s'agit de la période faste du cinéaste et il semble inspiré par son matériel avec un budget confortable qui lui permet de vastes décors que sa caméra parcourt dans quelques longs travellings virtuoses. Séville est ainsi une ville marchande débordant d'animation et de vie, grouillant de figurants. Il y a plusieurs moments brillants, tirant un excellent parti de sa Carmen, la farouche et indépendante Viviane Romance qui va jusqu'à regarder directement la caméra comme pour mieux provoquer le spectateur, entre sensualité langoureuse et arrogance. Son personnage n'a pas pris une ride et parait toujours d'actualité avec son désir d'être un femme pleine et entière, sans être tributaire des hommes, de la bienséance, ou de la moralité. En face d'elle, si Coëdel est savoureux en brigand sadique et sardonique, Jean Marais a un peu plus de mal à trouver ses marques et se montre assez maladroit dans le premier tiers où il n'est pas toujours satisfaisant en jeune officier timide et candide. Ca s'améliore quand la fièvre amoureuse s'empare de son rôle. Le comédien s'y épanoui d'autant plus qu'il y tourne ses premières scènes d'action où il se révèle doué, pour le plus grand bonheur de Christian-Jaque qui rajoutera quelques péripéties physiques. Et il se fait plaisir le bougre : attaque de diligence aux caméras embarquées, fusillades en montagne, combat aux couteaux et surtout un sensationnel duel à l'épée tourné dans un plan-séquence étourdissant que Spielberg n'aurait pas renié. La caméra passe des combattants à leurs ombres au visage extasié de Carmen dans une succession de mouvements circulaires et panoramiques nerveux, parcourant plusieurs pièces du décor.
La mise en scène semble presque obsédé par la quête du mouvement et multiplie les travellings, les gros plans de visages passionnés ou des éclairages appuyés. A part 2-3 transparences qui jurent, c'est vraiment fluide, y compris la longue séquence de corrida du dernier acte qui joue la carte du réalisme, sans rajout de musique et presque en temps réel.
En revanche, le film manque un peu d'unité formelle entre des moments presque expressionnistes et des extérieurs en montagnes ou au cœur des rues bondées aussi réalistes que possible. La fin par exemple bascule sans crier gare dans un décor très graphique et artificiel sous influence de Gustave Doré. C'est très beau visuellement mais on a l'impression de changer de film bien que cette conclusion ne perde pas en lyrisme tragique.
Quelques ruptures rendent cette œuvre un brin bancal - et inégale - sans forcément créer des longueurs.

Le film sortir une première fois en 1944 puis une seconde fois en 1945 sans que je sache si cette Carmen fut remaniée entre temps. C'est possible car Jeanson avait demandé à ce que son nom ne figure pas au générique. C'est pourtant le cas dans la copie que possède la Cinémathèque Française et le film dure un peu moins de 2h au lieux des 125 minutes avancées. Quelques minutes en plus au début ne serait pas superflues d'ailleurs car le changement dans la personnalité de Jean Marais est assez précipitées.
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Boubakar
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Message par Boubakar »

Jeremy Fox a écrit : 9 mai 03, 14:03 Je suis d'accord avec toi sur les films avec Fernandel qui sont à peu près irregardables pour moi et faisant partie de ces plus mauvais même si ce sont les plus réputés.
Je crois que c'est le seul avis que j'ai pu lire de manière indirecte sur Raphaël le tatoué, qui a été une bonne petite surprise, avec Fernandel dans un double rôle qui m'a bien amusé (la scène où il s'étrangle en étant les deux frères à la fois m'a fait sourire). Mais c'est quelque chose d'enfantin, où la suspension de crédulité est réduite à peu près à zéro, mais qui a bien fonctionné pour moi.
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Re: Christian-Jaque (1904-1994)

Message par Ikebukuro »

Je viens de voir Boule-de-suif.
La copie DVD n'est pas terrible mais les acteurs sont très bons et l'atmosphère de la nouvelle de Maupassant très bien respectée.
A noter qu'il s'agit de deux nouvelles différentes de Maupassant condensées en un seul film.


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Re: Christian-Jaque (1904-1994)

Message par villag »

dans la distribution de ce film,à noter : Louis Salou....quelle voix ....!
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John Holden
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Re: Christian-Jaque (1904-1994)

Message par John Holden »

Quand le savoir faire tout terrain de Christian-Jaque s'associe avec talent à la virtuosité de Charles Spaak, celà donne le délicieux Premier bal.
Ce film transpire la générosité, à tel point que les auteurs en on réalisé deux en un. A une première partie légère et enlevée succède une seconde partie douce amère. Cette liaison entre les deux s'opère avec subtilité. Aucune roublardise, aucun cynisme ici, le film, coule au contraire avec tranquillité dans le lit d'une sourde mélancolie, celle de l'enfance perdue, et avec elle, sa fantaisie, son insouciance.
On n'est pas loin par instants des americana d'henry King, voire de la délicatesse d'une fable d'Ozu.
Interprétation de premier ordre. Aux côtés de Raymond Rouleau, Gabrielle Fontan, François Périer et Marie Déa, Fernand Ledoux trouve là un de ses rôles les plus attachants.
Question à 1Kult, existe t'il une chance de voir ce film, un jour, restauré ?

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bruce randylan
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Re: Christian-Jaque (1904-1994)

Message par bruce randylan »

John Holden a écrit : 13 mars 21, 14:23 Quand le savoir faire tout terrain de Christian-Jaque s'associe avec talent à la virtuosité de Charles Spaak, celà donne le délicieux Premier bal.
Question à 1Kult, existe t'il une chance de voir ce film, un jour, restauré ?

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Il sort dans un mois chez Coin de Mire. :wink:
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Re: Christian-Jaque (1904-1994)

Message par John Holden »

bruce randylan a écrit : 13 mars 21, 18:54
John Holden a écrit : 13 mars 21, 14:23 Quand le savoir faire tout terrain de Christian-Jaque s'associe avec talent à la virtuosité de Charles Spaak, celà donne le délicieux Premier bal.
Question à 1Kult, existe t'il une chance de voir ce film, un jour, restauré ?

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Il sort dans un mois chez Coin de Mire. :wink:
https://coindemirecinema.com/nos-films/ ... -perdus-55
C'est de Souvenirs perdus dont tu parles ?
Malheureusement pour Premier bal, excepté une belle surprise, je crois qu'il faut se faire une raison.
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bruce randylan
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Re: Christian-Jaque (1904-1994)

Message par bruce randylan »

Ah oui, mince, désolé. Je sais pas pourquoi, je confonds toujours les deux titre.
Du coup, va falloir que je trouve le René Chateau. La qualité de celui-ci n'est pas top, c'est ça ?
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Re: Christian-Jaque (1904-1994)

Message par Jack Carter »

bruce randylan a écrit : 13 mars 21, 19:47 Ah oui, mince, désolé. Je sais pas pourquoi, je confonds toujours les deux titre.
Du coup, va falloir que je trouve le René Chateau. La qualité de celui-ci n'est pas top, c'est ça ?
Premier bal n'est jamais sorti en dvd, apparemment.
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Re: Christian-Jaque (1904-1994)

Message par John Holden »

bruce randylan a écrit : 13 mars 21, 19:47 Ah oui, mince, désolé. Je sais pas pourquoi, je confonds toujours les deux titre.
Du coup, va falloir que je trouve le René Chateau. La qualité de celui-ci n'est pas top, c'est ça ?
Non et la copie existante, en l'occurrence, provient d'un vieil enregistrement de Ciné Classic.
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Re: Christian-Jaque (1904-1994)

Message par 35-70 »

Cinéaste inégal, coupable du pire (glissons sur les titres) et du meilleur. Pour moi son meilleur film est moins connu que bien d'autres titres, c'est "Sortilèges".
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Re: Christian-Jaque (1904-1994)

Message par John Holden »

35-70 a écrit : 13 mars 21, 20:30 Cinéaste inégal, coupable du pire (glissons sur les titres) et du meilleur. Pour moi son meilleur film est moins connu que bien d'autres titres, c'est "Sortilèges".
Comme tous les réalisateurs prolifiques j'imagine.
On peut même dire ça de réalisateurs très bien considérés.
N'empêche que sur l'ensemble de sa filmo il y a pour moi de quoi passer d'excellents moments pendant un certain temps avant de se lasser. Il n'y a pas tant de réalisateurs qui pourraient en dire autant.
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Re: Christian-Jaque (1904-1994)

Message par Watkinssien »

Il y a même de très grands moments dans sa filmographie, suffisamment pour dire que Christian-Jaque était un grand cinéaste, certes qui a commis des œuvres mineures, des fois ratées. Mais les réussites vont de l'efficace au chef-d'œuvre.

Un cinéaste à l'aise dans des registres différents. Je trouve qu'il y a de très beaux moments de cinéma dans ces grands films que sont Les Disparus de St-Agil, L'Assassinat du Père Noël ou encore Boule de Suif.

Je considère toujours aujourd'hui Fanfan la Tulipe comme un chef-d'œuvre du film d'aventures et de cape et d'épée.

Beaucoup de réalisateurs n'ont pas ce panache.
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Re: Christian-Jaque (1904-1994)

Message par John Holden »

Watkinssien a écrit : 13 mars 21, 20:49 Il y a même de très grands moments dans sa filmographie, suffisamment pour dire que Christian-Jaque était un grand cinéaste, certes qui a commis des œuvres mineures, des fois ratées. Mais les réussites vont de l'efficace au chef-d'œuvre.

Un cinéaste à l'aise dans des registres différents. Je trouve qu'il y a de très beaux moments de cinéma dans ces grands films que sont Les Disparus de St-Agil, L'Assassinat du Père Noël ou encore Boule de Suif.

Je considère toujours aujourd'hui Fanfan la Tulipe comme un chef-d'œuvre du film d'aventures et de cape et d'épée.

Beaucoup de réalisateurs n'ont pas ce panache.
Absolument d'accord. :wink:
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