Les Cheyennes (John Ford - 1964)
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Les Cheyennes (John Ford - 1964)
J'ai découvert le dernier western de John Ford hier soir.
C'est une sorte de "grand film malade".
Plein de bons éléments mais un ensemble un peu raté.
On retrouve plus que jamais dans ce film, l'intelligence humaniste de John Ford (qui me rappelle Jean Renoir). Les personnages (à part les cow-boys qui tuent un Indien pour le plaisir) ont tous leurs motivations, leur passé...Que ce soit les Indiens, les soldats ou les politiciens, ils ne sont ni noirs ni blancs. Juste profondément humains et filmés avec beaucoup de tendresse par le réalisateur. C'est un beau film, sincère et optimiste. Tellement optimiste que la vision est parfois un peu gênante. Ainsi, pour un sujet aussi tragique que celui des Cheyennes déracinés, on peut regretter une fin un peu trop "happy".
On retrouve aussi, le sens pictural aigü de John Ford. Sans atteindre les cimes esthétiques de La prisonnière du désert, le maître nous offre une fois de plus de superbes images. Le bleu marine des tuniques se marie parfaitement au rouge mordoré de Monument Valley dans des plans très composés.
Malheureusement, le film pèche par son scénario peu travaillé. Je me demande encore à quoi servent les scènes avec James Stewart qui n'apportent strictement rien à une intrigue déja très mince. Le film est l'un des plus longs de John Ford, il dure deux heures et quart. Or, le ryhtme n'est toujours très bien géré. De plus, la voix-off, souvent présente chez Ford, se fait parfois envahissante, tant elle apparaît come une facilité narrative.
Malgré tout ces défauts évidents, c'est un film qui vaut le coup d'être vu car on y retrouve deux des plus grandes qualités du maître exacerbées comme rarement: l'humanisme et le sens pictural. A noter que, sûrement compte tenu de la gravité du sujet, il n'y a pas cet humour soi-disant truculent mais souvent agaçant et lourdingue que l'on retrouve dans d'autres de ses films à travers des seconds rôles comme Victor McLaglen.
Et vous, qu'en avez vous pensé ?
C'est une sorte de "grand film malade".
Plein de bons éléments mais un ensemble un peu raté.
On retrouve plus que jamais dans ce film, l'intelligence humaniste de John Ford (qui me rappelle Jean Renoir). Les personnages (à part les cow-boys qui tuent un Indien pour le plaisir) ont tous leurs motivations, leur passé...Que ce soit les Indiens, les soldats ou les politiciens, ils ne sont ni noirs ni blancs. Juste profondément humains et filmés avec beaucoup de tendresse par le réalisateur. C'est un beau film, sincère et optimiste. Tellement optimiste que la vision est parfois un peu gênante. Ainsi, pour un sujet aussi tragique que celui des Cheyennes déracinés, on peut regretter une fin un peu trop "happy".
On retrouve aussi, le sens pictural aigü de John Ford. Sans atteindre les cimes esthétiques de La prisonnière du désert, le maître nous offre une fois de plus de superbes images. Le bleu marine des tuniques se marie parfaitement au rouge mordoré de Monument Valley dans des plans très composés.
Malheureusement, le film pèche par son scénario peu travaillé. Je me demande encore à quoi servent les scènes avec James Stewart qui n'apportent strictement rien à une intrigue déja très mince. Le film est l'un des plus longs de John Ford, il dure deux heures et quart. Or, le ryhtme n'est toujours très bien géré. De plus, la voix-off, souvent présente chez Ford, se fait parfois envahissante, tant elle apparaît come une facilité narrative.
Malgré tout ces défauts évidents, c'est un film qui vaut le coup d'être vu car on y retrouve deux des plus grandes qualités du maître exacerbées comme rarement: l'humanisme et le sens pictural. A noter que, sûrement compte tenu de la gravité du sujet, il n'y a pas cet humour soi-disant truculent mais souvent agaçant et lourdingue que l'on retrouve dans d'autres de ses films à travers des seconds rôles comme Victor McLaglen.
Et vous, qu'en avez vous pensé ?
- Vic Vega
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Re: Les Cheyennes: le grand film malade de John Ford ?
A mes yeux l'expression de grand film malade lui sied parfaitement mais pour des raisons différentes des tiennes: les scènes avec James Stewart relèvent à mes yeux d'un art fordien de la digression, elles apportent de la légèreté, une certaine respiration après une première partie beaucoup trop longue, montrant de façon acerbe la façon dont l'Ouest américain est peu attentif au sort des Cheyennes; elles permettent de reprendre son souffle afin de pouvoir etre pleinement disponible pour la seconde partie d'une grande intensité. Quant à la voix off, elle ne m'a pas géné plus que ça, on est loin de ce point de vue du trop plein de voix off d'un Dogville. Un Ford inégal où la sincérité des intentions du cinéaste finit par emporter le morceau niveau émotion. Quant à l'optimisme, j'y vois plutot un certain idéalisme, mais un idéalisme qui ne sombre pas dans le "tout le monde il est beau..." parce que contrebalancé par la tristesse globale du ton du reste du film mettant l'accent sur la souffrance d'un peuple.Kurtz a écrit : Malheureusement, le film pèche par son scénario peu travaillé. Je me demande encore à quoi servent les scènes avec James Stewart qui n'apportent strictement rien à une intrigue déja très mince. Le film est l'un des plus longs de John Ford, il dure deux heures et quart. Or, le ryhtme n'est toujours très bien géré. De plus, la voix-off, souvent présente chez Ford, se fait parfois envahissante, tant elle apparaît come une facilité narrative.
- Jeremy Fox
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Les Cheyennes (Cheyenne Autumn - 1964) de John Ford
WARNER BROS
Avec Richard Widmark, Carroll Baker, Karl Malden, Sal Mineo
Scénario : James R. Webb
Musique : Alex North
Photographie : William H. Clothier (Technicolor 2.20)
Un film produit par Bernard Smith pour la Warner
Sortie USA : 03 octobre 1964
Captive dans une réserve de l'Oklahoma depuis quelques années, une tribu Cheyenne s'enfuit espérant retrouver la terre de ses ancêtres dans le Wyoming. Un périple de plusieurs milliers de kilomètres les attend, poursuivie par la Cavalerie des USA.
Dernier western de la longue et magnifique carrière de John Ford, Cheyenne Autumn n'est malheureusement pas selon moi une réussite ; il s'agirait même d'un 'beau sabordage' alors qu'évidement les intentions étaient plus que louables, rendre la fierté à la nation indienne au travers la description de l'enfer vécu par la la tribu des Cheyennes pour retrouver sa dignité. Hollywood, les grands auteurs et plus petits artisans du western, avaient néanmoins déjà et à de nombreuses reprises pris la défense des Natives, très souvent avec beaucoup plus de puissance que John Ford dans son film, Raoul Walsh, quelques semaines plus tôt, ayant frappé même plus fort en à peine un quart d'heure dans son excellent testament cinématographique (A Distant Trumpet). L'on sait également à quel point John Ford avait lui aussi payé son tribut aux Indiens et avec quel talent, et ce dès 1948 avec le sublime Fort Apache.
Hormis la beauté plastique de ses images et de ses cadrages (si l'on veut bien baisser les yeux devant les hideuses transparences des dernières séquencess avec Edward G. Robinson, qui achèvent de rendre le film plus que bancal), Les Cheyennes m'a semblé être privé de vie faute avant tout à un scénario de James R. Webb patinant plus que de coutume, partant vers des digressions pas toujours très heureuses, ainsi qu'à un John Ford semblant ne plus avoir la foi ou alors être extrêmement fatigué. J'ai beau avoir lu quelques textes argumentés en sa faveur, l'épisode de Dodge City (avec James Stewart en Wyatt Earp) est même selon moi totalement indéfendable (et même pas drôle), venant définitivement casser un rythme déjà bien faiblard, un ton déjà bien sentencieux. Ce qui suivra ne sera guère plus captivant, devant supporter le cabotinage éhonté de Karl Malden et s'attrister de voir un Richard Widmark aussi transparent... Il faut bien avouer qu'aucun des comédiens, aussi célèbres et talentueux soient-ils, n'arrive à sortir du lot. L'interprétation est donc à l'image du film, assez terne et sans grande puissance ; je sauverais cependant Carroll Baker.
On arrive au final à suivre le film sans trop d'ennuis en s'amusant à repérer à quels précédents films de Ford ressemble telle ou telle séquence (c'est d'ailleurs étonnant à quel point on reconnait la patte fordienne dans le choix de chacun des lieux, dans la manière de les filmer...) mais sans presque jamais vraiment être convaincu par ce qui se déroule sous nos yeux ; et pire encore... sans ressentir d'empathie pour les Cheyennes ! Mais j'arrête là ; à quelques exceptions, la filmographie de John Ford dans années 60 n'aura de toute manière pas du tout répondu à mes attentes, ne retrouvant plus rien de ce que j'aimais tant les années précédentes. Pour les amateurs du film, je les invite plutôt à aller relire la chronique signée Franck Viale sur le site
- Joshua Baskin
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Si, au début cela voulait dire quelque chose - un film miné de l'intérieur : l'univers d'un auteur est comme sujet à une forme de décomposition lente et réapparaît alors en filigrane, tout ce qui était ordinairement contenu voire refoulé. C'est très lié à la notion controversée d'auteur, avec cette idée de système esthétique propre à un cinéaste, qui viendrait à saturer ou qui deviendrait perméable à ses forces les plus sombres. Depuis, c'est vrai que c'est devenu une formule tarte à la crême et une facilité critique. Mais est-elle à rejeter pour autant ?Joshua Baskin a écrit :Je deteste l'expression film malade. Ca ne veut rien dire du tout.
I would prefer not to
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J'en aime le rythme ample et majestueusement lent, loin de la fresque au lyrisme emphatique, qui fait corps avec le propos humaniste et magnifie l'empathie sincère pour la douleur de la nation cheyenne. Je regrette en conséquence que les rôles des Indiens aient été distribués à des comédiens mexicains trop connus et typés (Roland, Montalban, Del Rio et Mineo), ce qui affadit la portée documentaire et historique de cette épopée.
Dommage aussi, effectivement, que le schématisme psychologique et le manichéisme qui caractérisent bon nombre des derniers westerns de Ford déservent quelque peu la richesse du film et dans une certaine mesure, la crédibilité du témoignage: ainsi de Widmark et Baker qui sont trop réduits à l'état de simples silhouettes impavides, ou du portrait de l'officier du fort qu'incarne Karl Malden, stéréotype de la ganache ambitieuse, raciste et obtue, qui ne brille pas par sa subtilité. Que la séquence de génocide la plus intense et émotionnellement insupportable du film soir réduite aux exactions inconsidérées d'un simple individu me paraît témoigner d'une petite lacheté scénaristique assez préjudiciable à sa thématique.
Malgré ces facilités il reste selon moi un très beau testament westernien, sorte d'acomplissement visuel et de profession de foi, d'une très grande pudeur, qui permet aussi au vieux lion de se dédouaner avec à-propos des attaques proférées à son encontre durant toute sa carrière de faiseur de westerns. Ca en fait aussi le prix.
Quant aux digressions picaresques qui sont comme la signature de Ford, s'il est vrai qu'elles sont plus éparses que dans la trilogie consacrée à la cavalerie, The Searchers ou à fortiori Two rode together, elles me semblent tout de même bien présentes. Et c'est heureux, Ford n'ayant rien d'un poète épique. L'intermède jubilatoire de Wichita participe de cet esprit, et j'en partage tout à fait la lecture avec Vic Vega. Il permet de ménager une pause respiratoire bienvenue après le crime odieux perpétrés par les cowboys, alors que le climax dramatique n'est pas encore amorcé, et donne au cinéaste l'occasion de ménager sa petite leçon de morale personnelle en vengeant avec malice -et en mineur- les malheureuses victimes. En outre l'épisode tourné à la farce permet aussi de faire resortir l'isolement de la nation indienne et de stigmatiser l'indifférence totale qui entoure sa dramatique extinction.
Sans compter que les rapports de Widmark à ses éclaireurs (les fidèles Ben Johnson et bien sûr Harry Carey Jr. qu'il s'évertue à nommer chaque fois d'un patronyme erroné) ou à son segent chef polack aux portes de la retraite (Mazurki reprenant l'emploi du bon vieux McLaglen) sont tout de même très caractéristiques de l'humour Fordien, entre slapstick et tendresse.
Dommage aussi, effectivement, que le schématisme psychologique et le manichéisme qui caractérisent bon nombre des derniers westerns de Ford déservent quelque peu la richesse du film et dans une certaine mesure, la crédibilité du témoignage: ainsi de Widmark et Baker qui sont trop réduits à l'état de simples silhouettes impavides, ou du portrait de l'officier du fort qu'incarne Karl Malden, stéréotype de la ganache ambitieuse, raciste et obtue, qui ne brille pas par sa subtilité. Que la séquence de génocide la plus intense et émotionnellement insupportable du film soir réduite aux exactions inconsidérées d'un simple individu me paraît témoigner d'une petite lacheté scénaristique assez préjudiciable à sa thématique.
Malgré ces facilités il reste selon moi un très beau testament westernien, sorte d'acomplissement visuel et de profession de foi, d'une très grande pudeur, qui permet aussi au vieux lion de se dédouaner avec à-propos des attaques proférées à son encontre durant toute sa carrière de faiseur de westerns. Ca en fait aussi le prix.
Quant aux digressions picaresques qui sont comme la signature de Ford, s'il est vrai qu'elles sont plus éparses que dans la trilogie consacrée à la cavalerie, The Searchers ou à fortiori Two rode together, elles me semblent tout de même bien présentes. Et c'est heureux, Ford n'ayant rien d'un poète épique. L'intermède jubilatoire de Wichita participe de cet esprit, et j'en partage tout à fait la lecture avec Vic Vega. Il permet de ménager une pause respiratoire bienvenue après le crime odieux perpétrés par les cowboys, alors que le climax dramatique n'est pas encore amorcé, et donne au cinéaste l'occasion de ménager sa petite leçon de morale personnelle en vengeant avec malice -et en mineur- les malheureuses victimes. En outre l'épisode tourné à la farce permet aussi de faire resortir l'isolement de la nation indienne et de stigmatiser l'indifférence totale qui entoure sa dramatique extinction.
Sans compter que les rapports de Widmark à ses éclaireurs (les fidèles Ben Johnson et bien sûr Harry Carey Jr. qu'il s'évertue à nommer chaque fois d'un patronyme erroné) ou à son segent chef polack aux portes de la retraite (Mazurki reprenant l'emploi du bon vieux McLaglen) sont tout de même très caractéristiques de l'humour Fordien, entre slapstick et tendresse.
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j'ai fait une rapide recherche sur google "Truffaut + grand film malade".Roy Neary a écrit :Je suis tout à fait d'accord avec la "définition" que tu rappelles du film malade, Solal. Et c'est bien pourquoi je considère que Les Cheyennes n'en est pas un du tout.
je maintiens ce que je pense des Cheyennes donc.
ça, je m'en souviens pas. je me souviens du dialogue sinistre sur le passé du Polonais mais pas de scènes comiques.Beule a écrit : Sans compter que les rapports de Widmark à ses éclaireurs (les fidèles Ben Johnson et bien sûr Harry Carey Jr. qu'il s'évertue à nommer chaque fois d'un patronyme erroné) ou à son segent chef polack aux portes de la retraite (Mazurki reprenant l'emploi du bon vieux McLaglen) sont tout de même très caractéristiques de l'humour Fordien, entre slapstick et tendresse.
Quant à la disgression, le film ne m'a pas paru assez "pesant"pour justifier un tel "répit".
C'est bien dommage.Bob Harris a écrit :J'avoue avoir été déçu par ce film, j'ai l'impression que le cinéma de John Ford ne me touchera jamais malgré ses qualités. Je me sens plus hawskien.
Essaie un truc et après j'arrête de t'embêter, promis. Je te propose plusieurs thématiques comportant des films majeurs de chaque décennie, de quoi t'offrir plusieurs après-midi de visionnages. Il faut regarder chaque série à la suite. Tu auras l'occasion de voir à quels points les films se répondent, comment se développent les thèmes avec les années et apprécier l'évolution morale de la carrière de John Ford. Si ça ne marche toujours pas, je ne peux plus rien faire poour toi.
Mon choix de programme :
Décennie 1930 / Visions d'Amérique :
Judge Priest (1934)
Je n'ai pas tué Lincoln (1936)
Vers sa destinée (1939)
Décennie 1930 / Westerns
La chevauchée fantastique (1939)
Sur la piste des Mohawks (1939)
Décennie 1940 / Visions d'Amérique :
Les raisins de la colère (1940)
Les Sacrifiés (1945)
Décennie 1940 / Westerns
La poursuite infernale (1946)
Le massacre de Fort Apache (1948)
La charge héroïque (1949)
Thématique irlando-américaine :
Qu'elle était verte ma vallée (1941)
L'Homme tranquille (1952)
Décennie 1950 / Visions d'Amérique
Le soleil brille pour tout le monde (1953)
La dernière fanfare (1958)
Décennie 1950 / Westerns
Le convoi des braves (1950)
La prisonnière du désert (1956)
Les cavaliers (1959)
Décennie 1960 / Westerns
Les deux cavaliers (1960)
L'homme qui tua Liberty Valance (1961)
Les Cheyennes (1964)
PS : je conseille aussi son dernier film, Frontière chinoise (1966), splendide oeuvre crépusculaire selon moi, et dont les héros sont des femmes. (Je te le conseille, toi qui te définis comme hawksien )
- Jeremy Fox
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