Le Cinéma muet

Rubrique consacrée au cinéma et aux films tournés avant 1980.

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feb
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Re: Le cinéma muet

Message par feb »

Gosta Berling et HE who gets slapped sur grand écran :shock:
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Frances
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Re: Le cinéma muet

Message par Frances »

J'enrage d'habiter en province :evil: :?
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Abdul Alhazred
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Re: Le cinéma muet

Message par Abdul Alhazred »

Ann Harding a écrit :Un cycle de films muets suédois et danois au Musée d'Orsay du 27 avril au 19 mai:
http://www.musee-orsay.fr/fr/evenements ... 8061706681
Une belle occasion de découvrir certains titres de Sjöström, Stiller et Christensen qui ne sont pas en DVD.
Sais-tu s'il y aura accompagnement musical et si oui, qui en sera chargé ?
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Ann Harding
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Message par Ann Harding »

Abdul Alhazred a écrit :
Ann Harding a écrit :Un cycle de films muets suédois et danois au Musée d'Orsay du 27 avril au 19 mai:
http://www.musee-orsay.fr/fr/evenements ... 8061706681
Une belle occasion de découvrir certains titres de Sjöström, Stiller et Christensen qui ne sont pas en DVD.
Sais-tu s'il y aura accompagnement musical et si oui, qui en sera chargé ?
Je n'en sais rien. Il n'y a aucune info sur le site. Peut-être que ce sera sans musique :?:
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Supfiction
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Re: Le cinéma muet

Message par Supfiction »

Je ne sais pas si vous en avez parlé déjà mais je viens de découvrir cette page du CNC servant à aider les archives du film à identifier des films tirés de bobines marquées "Indéterminé".


http://www.cnc-aff.fr/internet_cnc/Inte ... MNU_AIDEID

Ce travail d'identification a notamment permis d'identifier un John Ford de 1917, À l'assaut du boulevard (Bucking Broadway) il y a quelques temps.
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Ann Harding
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Re: Le cinéma muet

Message par Ann Harding »

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Der Student von Prag (L'étudiant de Prague, 1913) de H. H. Ewers et Stellan Rye avec Paul Wegener, John Gottowt, Grete Berger et Lyda Salmonova

Prague, 1820. L'étudiant pauvre Balduin (P. Wegener) signe un pacte avec l'étrange et diabolique Scapinelli (J. Gottowt) qui lui donne la richesse. Il peut ainsi poursuivre la comtesse Margit (G. Berger) dont il est amoureux. Mais, il a perdu son ombre et celle-ci le poursuit...

Cette production Deutsche Bioscop de 1913 suscite toujours des controverses pour savoir qui de Stellan Rye, H.H. Ewers et/ou Paul Wegener a réalisé le film. Cela n'a rien d'étonnant pour une époque où le réalisateur n'avait pas encore atteint le statut de créateur que nous connaissons de nos jours. Mais, en fait, qu'importe ! Ce film est un pur produit de la littérature allemande et le scénariste Ewers a puisé dans les contes d'E.T.A. Hoffmann autant que chez Adalbert von Chamisso (La merveilleuse histoire de Peter Schlemihl) des idées pour la construction de son intrigue (bien qu'il cite Alfred de Musset et Edgard Allan Poe). Le cinéma allemand veut refaire son retard par rapport au film d'art français qui avait commencé dès l'année 1908. Et pour ce faire, Ewers produit cette histoire de pacte avec le diable suivie d'un dédoublement de personnalité qui fleure bon la littérature romantique allemande. Le cinéma de 1913 n'a jamais été meilleur que lorsqu'il regarde la littérature ou la civilisation dont il est issu. Cette année-là voit l'éclosion de films remarquables comme Sumerki zhenskoi dushi du russe Evgeny Bauer, Ingeborg Holm du suédois Victor Sjöström et le superbe Germinal d'Albert Capellani. Le cinéma allemand a toujours très bien su se vendre à l'étranger en mettant l'accent sur ses points forts: l'introspection, le fantastique et plus tard l'expressionnisme. De nos jours, on considère toujours le cinéma muet allemand plus digne d'intérêt que le cinéma muet français. Il faut dire que les restaurateurs allemands ont toujours un temps d'avance sur les français. Ils diffusent leur travail régulièrement sur Arte et sur DVD avec le German Filmmuseum de Munich. Et en plus, ils réalisent un travail méticuleux et scientifique sur chaque film grâce à des archives bien plus fournies que les nôtres (comme par exemple les fiches de la censure). En outre, ils restaurent aussi les partitions musicales originales de leurs films grâce à de nombreux musiciens spécialistes en la matière - comme c'est le cas ici pour la partition (excellente) de Josef Weiss. Si on ajoute que leurs films ont fait l'objet de multiples publications universitaires et de commentaires, leur statut gagne immensément par rapport à tout autre film de la même époque qui n'a pas droit à un pareil traitement. Tout ce préliminaire n'est ici que pour remettre à sa juste place Der Student von Prag. Il a une place importante, certes. Mais, peut-être pas aussi importante qu'on voudrait bien nous le faire croire. Le Doppelgänger, ce double si cher aux romantiques allemands est ici amené par des double expositions certainement très bien réalisées, mais qui ne sont en aucun cas nouvelles en 1913. Jean Durand ou Albert Capellani les avaient utilisées bien avant ce film, et avec tout autant de virtuosité. L'utilisation des décors naturels, en particulier de la vieille ville de Prague, est une très belle réussite. Paul Wegener, encore jeune et mince, est un Balduin halluciné qui tente d'échapper à son double à travers la ville ou les forêts. Le rôle de l'étudiant a ensuite été tenu par des acteurs de la stature de Conrad Veidt en 1926 et d'Adolf Wohlbrück (c-a-d Anton Walbrook) en 1935, ce qui montre l'intérêt qu'il a suscité. Si les éclairages naturels sont superbes, ceux des intérieurs sont souvent uniformes et plats. Dans l'ensemble, ce film est un bel exemple du cinéma allemand des années 10 en termes de qualité d'interprétation et de cadrage.
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Ann Harding
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Message par Ann Harding »

Abdul Alhazred a écrit :
Ann Harding a écrit :Un cycle de films muets suédois et danois au Musée d'Orsay du 27 avril au 19 mai:
http://www.musee-orsay.fr/fr/evenements ... 8061706681
Une belle occasion de découvrir certains titres de Sjöström, Stiller et Christensen qui ne sont pas en DVD.
Sais-tu s'il y aura accompagnement musical et si oui, qui en sera chargé ?
Je suis allée voir Ingmarssörnena hier soir. Il y a effectivement un accompagnement musical. Il diffère pour tous les films. Hier soir, il y avait une jeune pianiste qui a fait un boulot correct. Pour les autres films, il y a des instruments différents: flûte, saxophone, trombone, contrebasse, sitar, etc...
Dernière modification par Ann Harding le 29 avr. 13, 13:49, modifié 1 fois.
Abdul Alhazred
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Re: Le cinéma muet

Message par Abdul Alhazred »

Ann Harding a écrit :
Abdul Alhazred a écrit : Sais-tu s'il y aura accompagnement musical et si oui, qui en sera chargé ?
Je suis allée voir Ingmarssörnena hier soir. Il y a effectivement un accompagnement musical. Il diffère pour tous les films. Hier soir, il y avait une jeune pianiste qui a fait un boulot correct. Pour les autres films, il y a des instrutements différents: flûte, saxophone, trombone, contrebasse, sitar, etc...
OK merci.
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Ann Harding
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Der Rosenkavalier (Le Chevalier à la rose, 1926) de Robert Wiene avec Huguette Duflos, Jaque Catelain et Michael Bohnen

Octavian (J. Catelain), l'amant de la Maréchale (H. Duflos), est sélectionné pour apporter une rose d'argent à la jeune Sophie (E.F. Berger) qui est promise au baron Ochs (M. Bohnen)...

Le chef d'oeuvre de Richard Strauss semblait un sujet parfait pour le cinéma muet. D'autant plus que pour la création de ce film, on avait commandé au compositeur une partition inspirée de son opéra dont il reprenait les principaux leitmotives. Malheureusement, l'intrigue originale qui est l'oeuvre du génial Hugo von Hofmannstahl a été réécrite en voulant certainement ajouter des épisodes pour la rendre moins théâtrale. Hélas, bien loin d'améliorer l'original, cette modification rend les personnages falots et l'intrigue devient celle d'une médiocre pièce de boulevard. Ce qui faisait la valeur de l'oeuvre commune de Strauss et d'Hofmannstahl, c'était la subtilité psychologique des personnages, le rythme et l'humour des situations. Avec Wiene, nous avons droit à une illustration plate au rythme fort relaché, à des personnages dépourvus de profondeur et à une direction d'acteur sans saveur. Il faut dire que la distribution est dominée - s'il on peut dire ! - par le couple Huguette Duflos-Jaque Catelain. Ces deux acteurs français étaient déjà apparus ensemble dans le Koenigsmark (1923) de Léonce Perret et ils sont tout aussi inintéressants dans ce film. Duflos ne fait presque rien à part prendre l'air ennuyée et Jaque Catelain est un Octavian catastrophique. Si on le compare à une myriade de grandes mezzo-sopranos qui ont interprété le rôle, elles apportent à Octavian plus de virilité et d'entrain que ce malheureux acteur qui papillonne des yeux. D'ailleurs, ce rôle travesti est certainement bien plus intéressant lorsqu'il est interprété par une femme. Lors du dernier acte, Octavian doit se traverstir en soubrette pour confondre ce vieux libidineux d'Ochs. Pour cette scène, l'interprète d'Octavian doit suggérer qu'elle est un jeune homme travesti en fille (et non pas l'inverse). Le résultat est souvent renversant d'intelligence scénique. Alors que reste-t-il de l'opéra de Strauss dans ce film platement mis en scène ? Eh bien, à part la partition géniale du compositeur qui suggère des couleurs, des raffinements et un rythme absent du film, par grand chose. Si vous voulez découvrir Le Chevalier à la rose, achetez plutôt un DVD de l'opéra, de préférence dirigé par Carlos Kleiber.
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Ann Harding
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Re: Le cinéma muet

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Anna Christie (1923, John Griffith Wray) avec Blanche Sweet, George F. Marion, William Russell et Eugenie Besserer

Anna Christie (B. Sweet) se rend à New York pour retrouver son vieux père Chris Christopherson (G. F. Marion) qu'elle n'a pas revu depuis quinze ans...

La pièce d'Eugene O'Neill, créée en 1921 à Broadway, a intéressé le cinéma immédiatement avec cette première version produite par Thomas H. Ince. Au centre du film brille la superbe Blanche Sweet, une des actrices fétiches de D.W. Griffith. Comme Lillian Gish, son physique fragile cache une volonté de fer et des nerfs d'acier. Contrairement à la version parlante (ou plutôt aux versions parlantes) réalisée en 1930, le film muet est plus fluide, n'ayant aucune des contraintes liées aux micros vissés au sol et aux caméras enfermées dans des caissons insonorisés. Le film débute donc en Suède où la petite Anna vit avec sa mère dans l'espoir du retour de son père marin toujours parti au bout du monde. Son émigration aux Etats-Unis avec sa mère ne sera pas le rêve de bonheur escompté, bien au contraire. Le film se permet plusieurs excursions en extérieurs qui donnent au film une respiration qui manque à la version de 1930. Parmi les acteurs, on reconnaît George F. Marion qui avait créé le rôle de Chris Christopherson au théâtre et qui le reprendra encore avec Greta Garbo. D'ailleurs, il est étonnant de voir à quel point les décors et les angles de prise de vue sont similaires, particulièrement dans la scène du bar au début du film comme si le cinéma n'arrivait à pas s'affranchir de l'oeuvre originale. Le film est dominé par la caractérisation de Blanche Sweet qui donne tout son relief à l'héroïne d'O'Neill. Fille abandonnée à une famille de cousin fermier qui l'exploite, elle se retrouve seule, sans un sou et devient prostituée. Le retour vers son père va la ramener à la vie avec en même temps la découverte de l'amour avec le grand Matt Burke (William Russell). Le film est viril et violent, bien plus que la version de Clarence Brown. Certes, John Griffith Wray est sans surprise dans sa direction, mais l'oeuvre est bien rythmée et bien jouée. Un des meilleurs films de Blanche Sweet qui mériterait d'être mieux connu.
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Ann Harding
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Re: Le cinéma muet

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A Throw of Dice/Parapancha Pash (Une partie de dés, 1929) de Franz Osten avec Seeta Devi, Himansu Rai et Charu Roy

Le roi Sohat (H. Rai) a décidé d'éliminer par tous les moyens son cousin le roi Ranjit (C. Roy). Mais, la tentative d'empoisenement échoue ; il est soigné par un vieil hermite. Ranjit tombe amoureux de Sunita (S. Devi), la fille de ce dernier...

Cette co-production anglo-germano-indienne est une adaptation d'un épisode de la saga du Mahabarata tournée en Inde avec des acteurs indiens. Le réalisateur allemand Franz Osten réussit à capturer brillamment les beautés de l'Inde tout en évitant de sombrer dans la couleur locale. L'histoire est un conte universel : la rivalité entre deux rois pour la possession d'un royaume et celle d'une femme. Ils sont tous deux des joueurs passionnés et une partie de dés va décider de la destinée de Ranjit car le malheureux ignore que ceux-ci sont truqués. Le film m'a fait pensé pour sa splendeur visuelle au Thief of Bagdad (Le Voleur de Bagdad, 1924) ; mais, ce film-là offre une réalité et une véracité que n'a pas la production américaine. Ne reculant devant rien, A Throw of Dice a été réalisé avec plus de 10 000 figurants, 1 000 chevaux et 50 éléphants. Et le résultat à la hauteur, une mise en images de toute beauté d'un conte indien avec trois acteurs principaux excellents dans leurs rôles respectifs. La restauration effectuée par le BFI en 2006 est magnifique et le film est accompagné par une partition symphonique moderne de qualité. Un film à découvrir.
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Alphonse Tram
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Re: Le cinéma muet

Message par Alphonse Tram »

J'ai eu la chance de voir projeté L'assassinat du duc de Guise, 1908, avec un accompagnement musical d'une trentaine de musiciens de l'orchestre du conservatoire régional du Grand-Nancy, salle Poirel (bonne accoustique donc).

C'était la première fois que je voyais un film en accompagnement musical direct, et cela change tout, car c'est alors un vrai spectacle vivant et immersif.

Je vous laisse consulter la fiche wiki du film, film qui est disponible sur Youtube. Edit : le film n'est pas complet sur yt.

Quelques compléments de mémoire issus de la présentation du chef d'orchestre :
Premier film de la société Le Film d'Art, avec des comédiens "prrofessionnels" issus de la Comédie Française. premier film dont la musique a été créée spécialement. Habituellement la musique est piochée dans des catalogues en fonction de la nature de la scène et de sa durée. Un élève de Camille Saint-Saëns était sur le projet : le maitre accepte d'en écrire la musique après tournage.

Il se fait projeter le film une dizaine de fois, et commence à improviser au piano devant l'écran. Puis, il rentre chez lui et écrit la partition de mémoire en 3 semaines.
Le film fait 17 minutes et la musique 18 en comptant le prélude et le postlude.

Le chef d'orchestre a mis 6 mois pour recaler la partition sur les images en fonction des maigres indications laissées par Saint-Saëns.
Beau moment d'émotion. Un travail à saluer.
http://www.grand-nancy.org/detail-dune- ... 1605e0f592
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Ann Harding
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Re: Le cinéma muet

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The Silent Enemy (L'Ennemi silencieux, 1930) de H. P. Carver avec Chief Yellow Robe, Chief Buffalo Child Long Lance et Chief Akawanush

Dans le grand nord américain, au sein de la tribu Ojibwé, le chasseur Baluk est en conflit avec le chamane Dagwan. Alors que l'hiver approche, Baluk part à la recherche de gibier vers le sud. Dagwan souhaite ardemment qu'il échoue pour obtenir la fille du chef, Neewa...

Ce film hors normes a été produit par un certain W. Douglas Burden. Ayant vécu longtemps au Canada, il souhaitait réprésenter la vie des tribus indiennes locales. C'est la vision du magnifique film Chang (1927) de Merian C. Cooper et Ernest B. Schoedsack qui le décide à sauter le pas. Il s'associe avec William Chanler et embauche le réalisateur H.P. Carver pour la direction et le scénario. Le sujet du film sera la lutte pour la vie de la tribu des Ojibwés dans le Grand Nord canadien dans une période antérieure à l'arrivée des Européens en Amérique. Le producteur traverse toute l'Amérique à la recherche d'Indiens de différentes tribus pour interpréter les rôles principaux. C'est ainsi que Yellow Robe, le neveu du chef Sioux Sitting Bull est choisi pour jouer le rôle du chef. Chaque acteur a été choisi avec minutie pour correspondre au personnage. Le tournage est extrêmement difficile par des températures de - 35 degrés et toute l'équipe vit sous des tentes. Le résultat à l'écran est magique. Le film reconstitue avec précision la vie de ce peuple du Grand Nord qui doit lutter âprement pour survivre aux longs hivers glaciaires. Il faut impérativement être un bon chasseur ou pêcheur pour pouvoir accumuler des réserves pour le long hiver qui s'annonce. Comme le carton du début du film nous l'annonce, cet ennemi silencieux, c'est la faim. En moyenne tous les sept ans, la tribu en souffre. Il faut donc se déplacer, rouler l'écorce des tipis, et partir à pieds vers des contrés plus giboyeuses. Mais, les grandes étendues du nord recèlent des prédateurs qui peuvent être des concurrents de l'homme: le puma et le carcajou, qui n'hésitent pas voler ou souiller la nourriture de la tribu. Alors que l'hiver s'installe, il ne reste plus comme solution aux Indiens que de partir vers le territoire des caribous tout au nord. Les troupeaux sont immenses, mais très loin de leur campement. Le voyage sera dur et meurtrier couronné par une chasse épique alors qu'une vague de caribous envahit la plaine telle une coulée de lave. La beauté des images et la puissance de l'évocation de ces hommes courageux et téméraires produisent un effet électrisant sur le spectateur comme si nous avions été autorisés à remonter le temps et à découvrir le continent Américain avant l'arrivée de Christophe Colomb. Mais, le film ne se limite pas à l'aspect documentaire. Son scénario est extrêmement bien construit et montre l'opposition entre deux hommes au sein de la tribu : d'un côté le courageux Baluk et de l'autre le traître Dagwan qui ne recule devant aucune combine pour vaincre son rival. Le personnage du grand chef est également magnifique alors qu'il part seul sous la neige pour jeûner et tenter d'aider sa tribu en se mettant en relation avec le Grand Esprit. Ce film muet est sorti en salles en 1930, distribué par Paramount. Et ce fut un échec. Grâce à plusieurs historiens du cinéma, en premier lieu Kevin Brownlow et David Shepard, il est ressorti de l'oubli. Une superbe restauration a été diffusée l'année dernière sur Arte avec une excellente partition orchestrale. Il est également disponible en DVD aux USA. L'un des plus beaux films sur les Indiens d'Amérique.
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Re: Le cinéma muet

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Richard Wagner - Eine Film-Biographie (1913, Carl Froelich) avec Giuseppe Becce, Olga Engl, Manny Ziener et Ernst Reicher

La vie et l'oeuvre du compositeur Richard Wagner.

Ce film biographique du compositeur allemand a été produit en 1913 pour célébrer le centième anniversaire de sa naissance. En 2013, il reparaît dans une nouvelle restauration pour la célébration de ses 200 ans. La vision de ce film permet de mesurer combien la vision de ce compositeur s'est modifiée en un siècle. En 1913, sa veuve Cosima Wagner était toujours vivante et en impitoyable gardienne du temple qu'elle était, on peut imaginer qu'elle surveillait toute oeuvre ayant trait à son époux. Le film de Carl Froelich est donc une hagiographie sur Richard Wagner où tous les aspects les plus antipathiques du personnage sont (sciemment) ignorés. En effet, il n'est fait nulle mention de son antisémitisme, de ses aventures extra-conjugales ou du ménage à trois avec les von Bülow. Wagner n'apparaît ici que comme un artiste incompris en proie aux cabales et aux complots des Jésuites (habillés bizarrement comme le Don Basilio du Barbier de Séville) et des ministres de Louis II de Bavière. Ceci posé, le film en lui-même est intéressant si on le replace dans le contexte de l'époque. C'est sans aucun doute une oeuvre ambitieuse visuellement qui tente de rendre palpable les visions de ce compositeur de génie ainsi que sa vie mouvementées de jeune révolutionnaire, ami de Bakounine. C'est le compositeur d'origine italienne Giuseppe Becce qui interprète Wagner tout en étant responsable de la composition de la partition orchestrale du film. Evitant un tournage entièrement en studio, le film nous montre de nombreux lieux importants dans sa vie, tel le Festspielhaus de Bayreuth. Quant à la partition de Becce, elle étonne en ce qu'elle ne veut pas un simple pot-pourri des oeuvres de Wagner. Au contraire, il cite Mozart, Beethoven et Rossini. La restauration et la réorchestration de celle-ci sont un travail d'orfèvre avec en plus au pupitre l'excellent Frank Strobel. Le film gagne immensément en ampleur grâce à ce travail. Becce est un Wagner crédible qui évite tout excès interprétatif. Certes, les libertés prises avec la vérité font sourire le spectateur averti comme lorsqu'on nous assure que Minna Wagner n'avait aucun raison de suspecter une quelconque relation entre son époux et Mathilde Wesendonck. Pire encore, il y a la soudaine apparition de Hans et Cosima von Bülow sans qu'on les mentionnent. Il faut dire que Richard a fait porter de belles cornes au malheureux Hans. Ses rapports complexes avec Meyerbeer sont éludés. On n'aperçoit que lors d'une courte scène son aîné (narquois) qui lui remet une lettre d'introduction qui va se révéler inefficace. Malgré ses défauts, le film est une oeuvre intéressante des années 10.
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Re: Le cinéma muet

Message par A serious man »

En ce moment je me replonge dans cette période merveilleuse qu'a été le cinéma muet, et je me rend compte que finalement en dehors des grands classique qu'on étudie a la fac et des films de Chaplin et Keaton je ne connais que trop peu a mon gout.
Voici quelques un de mes préférés sans classement.
Napoléon d'Abel Gance
est-il besoin de présenter ce chef d’œuvre. Napoléon c'est une épopée gigantesque d'une ampleur inégalée, les travelling, le montage et les cadrages de Gance en font un véritable condensé de tout ce que le cinéma peut offrir d'invention, de lyrisme, de beauté et de poésie.
L'aurore de Murnau
Encore une fois doit on vraiment présenter ce film, un chef d’œuvre d'une pureté et d'une puissance esthétique et émotionnelle sans véritable équivalent, un poème sublime et métaphysique.
L'opinion public de Chaplin
Chaplin signe ici un mélodrame bouleversant dont la mise en scène limpide touche a l'épure tout comme le jeu intériorisé des acteurs. Un film finalement moderne, qui bouleverse de par sa simplicité.
La ruée vers l'or de Chaplin
La quintessence de l'art de Chaplin, toujours a mis chemin entre le rire et les larmes, encore une fois une mise en scène finalement très simple mais mise au service d'une véritable invention comique qui peut aussi laissé place a des sommet d'émotion.
Les Nibelungen de Fritz Lang
Le chef d’œuvre de Fritz Lang toute catégorie confondu, la première partie est trés réussit comme épopée légendaire et fait succéder les morceaux de bravoure entre le combat contre le dragon et l'affrontement entre Siegfried et Brunehilde, mais le grand chef d’œuvre c'est la deuxième partie, la vengeance de Kriemhilde , une tragédie totalement langienne. Kriemhilde en déesse de la vengeance implacable est un personnage inoubliable et fascinant.
Le cuirassé Potemkine d'Eisenstein
Mon film préféré d'Eisenstein a toujours été Ivan le terrible, mais le cuirassé est tout de même un film puissant, un travail radical sur le montage qui a mon transcende trés largement la fonction propagandiste première du film.
Nosferatu de Murnau
La meilleure adaptation du Dracula de Bram Stoker, un film a l’atmosphère envoutante et fascinant, qui mêle un certains expressionnisme (les ombres, le maquillage de Max Schreck) a un décors tout ce qu'il a de plus naturel. tout les plan du voyage de Nosferatu en bateau nous hante longtemps après le visionnage du film.
Metropolis de Frtiz Lang
Le scénario est assez contestable mais la mise en scène de Lang constamment inventive, le charge de symbole, crée des images inoubliable, puissante et volontiers morbide, les scènes de déchainement de foule dans la dernière partie du film sont absolument fascinant, Lang est vraiment le cinéaste qui a su le mieux montrer l'hystérie collective avec ce film, Furie et d'une certaine façon M le maudit
Le cameraman de Buster Keaton
film magnifique, drôle et émouvant. D'une inventivité a toute épreuve, a mes yeux c'est le chef d’œuvre de Buster Keaton le film par lequel je l'ai découvert et celui que je revois le plus souvent et en plus il parle de cinéma!

Et j'aimerais beaucoup découvrir le cinéma de Sjostrom (d'ailleurs je compte bientôt voir Le vent et La lettre écarlate), de Mauritz Stiller, J'accuse et La roue d'Abel Gance, et d'une manière général j'ai très envie de mieux connaitre le cinéma muet français notamment Raymond Bernard, Jacques Feyder ou Marcel L'herbier.
"Il ne faut pas être timide avec la caméra. Il faut lui faire violence, la pousser jusque dans ses derniers retranchements, parce qu'elle est une vile mécanique. Ce qui compte, c'est la poésie."

Orson Welles
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