Jean-Pierre Melville (1917-1973)

Rubrique consacrée au cinéma et aux films tournés avant 1980.

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martinbrady
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Re: Jean-Pierre Melville (1917-1973)

Message par martinbrady »

Shin Cyberlapinou a écrit :
martinbrady a écrit : je l'ai rapprochée de la gifle de Delon au travesti-indic dans UN FLIC. Delon gifle celle-ci avec une force incroyable parce que son tuyau était pourri!
Cette scène rappelle effectivement et à première vue les embardées homophobes de certains Delon/Bébel plus commerciaux des années 70/80, pourtant plusieurs éléments viennent ce sentiment:

- Déjà le travesti est très féminin, j'ai même eu un doute jusqu'au moment où Delon commence à le malmener en lui ordonnant de s'habiller comme un homme. C'aurait pu être une caricature évidente façon Cage aux folles mais là c'est un individu parfaitement apprêté, frêle et incapable de se défendre.

- Ensuite et surtout, la scène de tabassage est suivie par une scène réduite à un très long travelling suivant le travesti marchant seul dans la nuit, en larmes. Narrativement ça n'apporte pas grand chose (le travesti est un personnage secondaire qui a rempli sa fonction), mais l'empathie de la mise en scène est pour le coup totalement du côté de cette "tapette" aux antipodes des hommes d'action virils et taiseux sur lesquels Melville concentre le reste de son récit. Je crois me souvenir qu'il est sous-entendu (c'est en tout cas comme ça que je l'ai perçu) que le travesti a un faible pour le personnage de Delon et je ne peux m'empêcher de penser que ce dernier est au fond le méchant du film, utilisant des méthodes indignes pour capturer l'honorable voyou campé par Richard Crenna. Ensuite est-ce que tout ça était volontaire? Pas sûr que Delon se voyait comme autre chose que le héros, reste que le plan dont je parle (facilement 30 secondes, ce n'est pas juste en passant non plus) ouvre la porte à pas mal de réflexions...
oui, mais ce plan de "rattrapage"' est encore un hommage à la femme sacrifiée, (même si c'est un homme ça ne change rien puisqu'il veut être pris pour une femme) une façon de macho de rendre hommage à la femme seulement quand elle souffre, raison pour laquelle j'avais trouvé le final de LA VIE REVEE DES ANGES de Zoncka absolument dégueu, c'est le mythe douteux de Jeanne d'Arc qui doit souffrir pour être admirable (mythe qui a inspiré un cinéaste aussi léger et sans intérêt que Besson, on comprend pourquoi: une idéalisation de la femme qui est misogyne), ceci dit, le personnage de Delon lui, peut être vu comme négatif comme tu le dis c'est peut-être que je l'ai trop vu en héros et donc le plan dont tu parles se justifie avec qqch que je n'ai pas ressenti.
C'est marrant parce que malgré ça j'adore UN FLIC dans sa totalité (ce qui voudrait dire que tu as raison finalement face à moi) et que je vois peu d'avis qui me rejoignent.
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Alexandre Angel
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Re: Jean-Pierre Melville (1917-1973)

Message par Alexandre Angel »

martinbrady a écrit : LA VIE REVEE DES ANGES de Zoncka
Typiquement le genre de films que je trouvais bien sur le moment et que je n'ai absolument pas envie de revoir. Ça pourrait presque faire un topic.
Comme "le Temps de l'innonce" et "A tombeau ouvert", "Killers of the Flower Moon" , très identifiable martinien, est un film divisiblement indélébile et insoluble, une roulade avant au niveau du sol, une romance dramatique éternuante et hilarante.

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martinbrady
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Re: Jean-Pierre Melville (1917-1973)

Message par martinbrady »

Alexandre Angel a écrit :
martinbrady a écrit : LA VIE REVEE DES ANGES de Zoncka
Typiquement le genre de films que je trouvais bien sur le moment et que je n'ai absolument pas envie de revoir. Ça pourrait presque faire un topic.
c'est un mystère: pourquoi y a til des films qu'on trouve bien à la vision, et qu on ne veut pas revoir? parce qu on se doute que c'était pas si bien que ça?
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Jeremy Fox
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Re: Jean-Pierre Melville (1917-1973)

Message par Jeremy Fox »

Chronique d'une petite ville sous l'Occupation, récit initiatique,comédie de mœurs, drame.... l'adaptation par Melville du roman de Béatrix Beck est tout celà à la fois. Léon Morin, film passionnant et d'une grande richesse est loin d'être un accident de parcours comme on a pu le lire ça et là, mais fait pleinement partie d'une œuvre d'une rare cohérence. Pour s'en convaincre, rendez-vous dans les salles obscures à partir de ce mercredi, Tamasa ayant la bonne idée de rééditer le film quelques mois après la sortie d'une nouvelle adaptation de ce Prix Goncourt par Nicolas Boukhrief.
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la_vie_en_blueray
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Re: Jean-Pierre Melville (1917-1973)

Message par la_vie_en_blueray »

Je viens de recevoir La samourai d'amazon en BR, la cover ne mentionne pas "Edition restaurée", pourtant ce n'est pas le digipack, suis je sur l'ancienne version ou pas ?
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tenia
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Re: Jean-Pierre Melville (1917-1973)

Message par tenia »

Il me semble qu'il est impossible de savoir juste avec le packaging extérieur. Depuis le temps, la théorie voudrait que le nouveau disque ait totalement remplacé l'ancien, mais va savoir.
Perso, je ferais un Scan Disc avec BD Info, parce que le comparo dispo sur Caps-a-holic donne ces infos, mais sinon, je pense qu'il faudra regarder le film pour savoir (parce que la différence se voit quand même à l'écran).
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la_vie_en_blueray
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Re: Jean-Pierre Melville (1917-1973)

Message par la_vie_en_blueray »

J'ai checké, pas moyen de me faire une opinion, c'est cracra, mais bon, je sais pas :oops:
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Re: Jean-Pierre Melville (1917-1973)

Message par G.T.O »

Découverte de Léon Morin prêtre.
Comme d'autres sont tueurs, Léon Morin est prêtre. Intègre, intransigeant. Dans sa vie paroissiale, il y rencontre une femme sceptique, en crise, qui, passant l'occupation, redécouvre la foi, et un amour pas si religieux. Melville, connu pour sa stylisation et sa mise en scène épurée, trouve dans cette histoire le sujet d'une belle contrariété et par là la perpétuation d'une certaine tradition romanesque: l'histoire d'un amour physique et spirituel renvoyée à la sphère interdite portant atteinte à la formulation d'une éthique professionnelle et exigence du voeu de chasteté. Ce qui se traduit, dans le film, par un refus d'y entrer, une sorte de papillonnage multipliant les fausses pistes. Une frivolité auquel s'oppose une spiritualité liée aux nombreuses discussions théologiques entre Barny et le prêtre, et qui mettent à l'épreuve le vide de Barny ( Emmanuelle Riva impressionnante) en le remplissant d'amour. D'où vient que le film suscite l'insatisfaction, comme si Melville ne trouvait pas le rythme adéquat, l'élan nécessaire ou qu'il trouvait trop tardivement le coeur du projet ? Sans doute parce que l'indécision du film, cette périphérie" détaillée qu'il sous exploite largement (contexte politique, milieu professionnel, amitiés de Barny) trouve son origine dans un volonté de différer à montrer les différentes facettes de la contrariété amoureuse, ne voulant pas donner à ressentir toutes ces stratégies et autres justifications parfois délirantes. A cet arraisonnement convertissant l'amour de Barny. Personnage fascinant en cale sèche, qui se voit remplir d'un amour qu'elle ne peut identifier, et qui, par impossibilité, le modifie pour ne pas le perdre. Plus que la conversion, il y avait là le promesse d'un film à faire sur le repli amoureux comme conciliation amour, foi. Dommage que Melville n'ait saisi de cet amour que le panorama, la vision exhaustive.
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Re: Jean-Pierre Melville (1917-1973)

Message par Zelda Zonk »

Grand plaisir de revoir hier soir Le deuxième souffle sur Arte, suivi d'un documentaire assez intéressant sur Melville, avec des images d'archive que je ne connaissais pas.

Le film a d'ailleurs confirmé un ressenti personnel assez récent : Paul Meurisse est un immense acteur, peut-être un des plus grands acteurs français.
Ca me donne envie de découvrir toute sa filmo, si vous avez des conseils (hormis, bien sûr, Les diaboliques, vu et revu)
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Re: Jean-Pierre Melville (1917-1973)

Message par Thesix »

La série des Monocle de Lautner pour retrouver les monologues du genre de son entrée en scène hier mais en plus absurdes.
L'armée des ombres évidemment. Il est bien comme tous les acteurs de Marie-Octobre.
Je l'ai loupé dans la Vérité la semaine dernière mais il me semble me souvenir qu'il y était dans son élément.
Je n'ai jamais réussi à regarder le déjeuner sur l'herbe :?
J'aimerais bien découvrir sa période d'immédiat après-guerre où il a beaucoup tourné apparemment. (peut-être que j'en connais ?)
Si on passe AC/DC, je quitte la pièce (J. Jarmusch)
Et Amazon, c'est toujours le mal (et l'internet haut débit, et Google...)
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Re: Jean-Pierre Melville (1917-1973)

Message par Rick Blaine »

J'adore cet acteur.
Si tu veux voir des films où il s'exprime pleinement, il faut effectivement voir les Monocle, films très réussis et terrain de jeu parfait pour Meurisse.
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Re: Jean-Pierre Melville (1917-1973)

Message par cinéfile »

Revu aussi Le Deuxième Souffle hier. Mes souvenirs étaient bien vagues. Subsistait justement le personnage du commissaire joué par Meurisse...

Et il y est en effet absolument fabuleux. Sa première scène est anthologique ! Le flegme du personnage apporte indéniablement une touche plutôt "chaleureuse" au film, un qualificatif qui ne vient en général pas spontanément quand on parle de Melville. L'interprétation et les dialogues sont dans l'ensemble de très haute tenue. Sans doute mon préféré du réalisateur en attendant de découvrir Le Doulos (sur lequel je fonde quelque espoir).

En revenant sur Meurisse, j'aurais cité peu ou prou les mêmes films que Thesix. Tout en me disant que j'en ai encore beaucoup à découvrir...
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Zelda Zonk
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Re: Jean-Pierre Melville (1917-1973)

Message par Zelda Zonk »

Merci à tous les trois. :)
Je vais en effet donner la priorité à Les monocles et Marie-Octobre (je connais déjà L'armée des ombres et La vérité)
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Re: Jean-Pierre Melville (1917-1973)

Message par majorsenta »

Mais quand....quand....quand.....quand est ce que le Deuxième Souffle va sortir en Blu-ray ??
Personne ne connait René Château ???
Il est toujours en vie ?
Je le demande comme cela tombe un peu comme des mouches en ce moment...
Monsieur Château...si vous lisez ces lignes
...un geste....un beau geste...un geste bel et bon...
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Re: Jean-Pierre Melville (1917-1973)

Message par Invité1 »

Découverte de Bob Le Flambeur, 4ème long-métrage de Jean-Pierre Melville.

Paris, 1955, Pigalle, ses tripots enfumés, ses clubs à hôtesses, ses petits bistrots et sa parade de petits voyous et autres flambeurs noctambules. Dans cet univers singulier, les journées se terminent à 6h du matin, lorsque Paris s'éveille. Bob y est connu comme le loup blanc, joueur invétéré, protecteur des femmes du quartier et des jeunes paumées en quête d'initiation à la vie. Et quand un coup juteux se prépare au casino de Deauville, Bob joue son va-tout en indécrottable flambeur…

Grandiose film qui m'a immédiatement happée et emportée dans ce monde très particulier où Melville magnifie Montmartre au détriment du quartier de Pigalle, lieu malsain où la pègre sévit malgré l'étroite surveillance de la police. Dans le rôle de Bob, un acteur sur le retour nommé Roger Duchesne qui n'avait pas tourné de films depuis 13 ans. Flambeur et malfrat peu recommandable (il aurait été membre de la Gestapo durant la Seconde Guerre mondiale), Duchesne était tricard à Pigalle depuis quelques années et c'est Melville lui-même qui a demandé l'autorisation à la pègre d'accepter son retour le temps du tournage. À l'écran, Duchesne ne joue pas Bob, il est littéralement Bob. Fascinant et attachant.
Transcendé par une sublime direction photo et une superbe partition de Jo Boyer et Eddie Barclay qui préfigure parfois certaines mélodies à la trompette d'Ennio Morricone, Bob Le Flambeur est un polar influencé par les films noirs américains mais reste indubitablement français de par son ton très Nouvelle Vague et sa délicatesse qualitative.
Un grand film à mes yeux.

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