Monte Hellman (1929-2021)

Rubrique consacrée au cinéma et aux films tournés avant 1980.

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Thaddeus
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Re: Monte Hellman

Message par Thaddeus »

L'Ouragan de la vengeance est à ce jour le seul film de Boetticher que j'aie vu. Pour ce que cela vaut comme base de comparaison, il est vrai qu'il y a une dimension minimaliste et élémentaire dans ce western qui a pu inspirer Monte Hellman. Je trouve néanmoins que les enjeux psychologiques et dramatiques y sont plus clairement définis, là où le cinéma d'Hellman procède d'une flou, d'une indétermination qui me semblent tout à fait singuliers.
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Alexandre Angel
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Re: Monte Hellman

Message par Alexandre Angel »

Thaddeus a écrit :L'Ouragan de la vengeance est à ce jour le seul film de Boetticher que j'aie vu.
Tu parles duquel? De The Tall T (en français, L'Homme de l'Arizona)? Parce que L'Ouragan de la vengeance, c'est Hellman :) :wink:
Sinon la comparaison s'arrête là, oui, mais en citant la juste remarque de Kevin95 ("son approche mélancolique le rattache à la tradition du "sur-western" bazinien"), c'est à Boetticher que je pense, plus sûrement qu'à Fuller, Aldrich ou Anthony Mann.

Edit : peut-être parles-tu de La Chevauchée de la vengeance (Ride lonesome, Budd Boetticher, 1959)
Comme "le Temps de l'innonce" et "A tombeau ouvert", "Killers of the Flower Moon" , très identifiable martinien, est un film divisiblement indélébile et insoluble, une roulade avant au niveau du sol, une romance dramatique éternuante et hilarante.

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Thaddeus
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Re: Monte Hellman

Message par Thaddeus »

Pardon : je parlais de La Chevauchée de la vengeance (Ride Lonesome), qui est bien le seul Boetticher que j'ai vu. :wink:
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Kevin95
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Re: Monte Hellman

Message par Kevin95 »

Boetticher bien sur, quel boulet je fais, il m'est complétement sorti de l’esprit. Vous avez raison de le rattacher aux westerns d'Hellman, il y a bien un même soucis de pureté, de sobriété et (dans quelques Boetticher dont The Tall T effectivement) une certaine langueur.

Mais comme le dit Thaddeus, Boetticher donne bien plus d'humanité à ses personnages que Hellman, des hommes blessés, opaques jusqu'au bout.
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Rick Blaine
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Re: Monte Hellman

Message par Rick Blaine »

Back door to hell (1964)

Je ne connaissais pas le cinéma de Hellman et c'est une heureuse découverte que ce film semble-t-il méconnu (je n'en ai pas trouvé trace sur ce topic). Hellman filme l'aventure de 3 soldats américains débarquant au Philippines pour prendre contact avec la guerilla locale et obtenir les renseignements nécessaires au débarquement su gros des troupes. Le traitement est original, car si les soldats américains sont bien les personnages principaux du film, il n'en sont pas forcément les protagonistes, tant ils sont dépendant des forces rebelles. Un renversement de situation qui me semble audacieux pour l'époque, et qui permet de faire ressortir la peur et l'impuissance du soldat comme rarement dans un film de guerre. Très court (un peu plus d'une heure), le film est efficace tout en oubliant jamais de se faire contemplatif, mettant en valeur de beaux décors. Un film très sobre et très pur qui n'est pas sans évoquer le cinéma de Boetticher comme évoqué ci-dessus pour ses westerns que je n'ai pas vu. La conclusion, brutale, est très réussie. Elle vient souligner un propos d'ensemble très moderne qui présente l'Amérique comme un libérateur qui a du mal à comprendre ce qu'il libère. Très intéressant. Je vais passer à ses deux westerns.
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Alexandre Angel
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Re: Monte Hellman

Message par Alexandre Angel »

Image Avec Monte Hellman, ce n'est pas bien compliqué : il y a quatre films remarquables, à connaître absolument, le reste apparaissant comme plus oubliable. The Shooting, L'Ouragan de la Vengeance, Macadam à deux voies et Cockfighter constituent, donc, les quatre piliers de la sagesse hellmanienne telle que nous la lègue la postérité. C'est dommage mais c'est ainsi et c'est cela qui les rend d'autant plus irradiants.
Sans le succès fracassant d' Easy Rider, Macadam à deux voies (Two lane Blacktop, en VO), n'aurait jamais vu le jour. Nous, spectateurs, pouvons en être reconnaissants à Dennis Hopper et Peter Fonda, pas le producteur Universal, Lew Wasserman, qui, horrifié par les résultats en termes formels autant que de box-office, ne sera pas sans contribuer à l'atomisation de la carrière ultérieure de Monte Hellman.

Lorsque je découvris Macadam à deux voies, il y a quelques 22 ans, je n'avais pas été emballé outre mesure alors même que les trois autres films m'enthousiasmaient. Sa redécouverte pas plus tard que cette semaine, fut pour moi celle qu'il fallait. Mais à la vision , on comprend la réaction de l'infortuné producteur. En d'autres occasions, on aura vu des producteurs horrifiés par la présence de sexe, de violence et de langage ordurier au sein d'un film. Là, on peut imaginer que Wasserman fut épouvanté d'en trouver Macadam totalement dénué. Vous voulez du sexe, de la drogue, de la violence? Macache wallou, vous n'en aurez pas! semble nous lancer le cinéaste à chaque plan d'un film que j'ai revu sous l'emprise d'un charme narquois dont je n'avais aucunement décelé, à la première vision, des effluves presque trop subtiles pour leur temps (1971). Ce n'est pas à un certain état d'esprit post-Zabriskie Point que l'on doit à Macadam à deux voies de ne pas vieillir du tout, mais à l'invention d'une postmodernité avant l'heure que ne manqueront pas de se partager des hérauts futurs nommés Jarmusch (auquel la photo ci-dessus fait irrésistiblement penser), Kaurismaki ou Tarantino.

Cinéaste de l'imprévisibilité, chantre du mélange d'ADN entre intellectualisme européen et ressenti organique purement américain, Monte Hellman invente, avec Macadam à deux voies, un dandysme inédit, hors norme, félinement provocateur, qui ne fait jamais de lèche au spectateur, ne lui prodigue aucun appel du pied, ne cherche pas à le séduire. La postérité n'en finit plus de donner raison à de telles œuvres qui nous accueillent sans impatience, sollicitant la nôtre, sans forcer, avec l'assurance de tout ce qui ne se laisse conduire que par la sensibilité la plus secrète.

Pardon d'avoir à employer un terme qui pourrait passer pour snob, mais parce qu'il trompe nos attentes de manière aussi radicale que raffinée, Macadam à deux voies pourrait bien constituer le plus grand film déceptif jamais réalisé.
Comme "le Temps de l'innonce" et "A tombeau ouvert", "Killers of the Flower Moon" , très identifiable martinien, est un film divisiblement indélébile et insoluble, une roulade avant au niveau du sol, une romance dramatique éternuante et hilarante.

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Re: Monte Hellman (1929 - 2021)

Message par Karras »

Monte Hellman, dont les films d’action laconiques, incarnés par le road movie de 1971 «Two-Lane Blacktop», ont fait de lui un héros culte du mouvement cinématographique indépendant américain, est décédé mardi en Californie. Il avait 91 ans.
Sa mort a été confirmée par sa fille, Melissa, qui a déclaré avoir été admis une semaine auparavant à l’hôpital de santé Eisenhower de Palm Desert, en Californie, après une chute à son domicile.
https://www.nytimes.com/2021/04/21/movi ... -dead.html
traduction (https://news-24.fr/monte-hellman-direct ... -a-91-ans/)
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Re: Monte Hellman (1929-2021)

Message par Jack Carter »

Redecouverte emerveillé, l'an dernier, de son tres beau Cockfighter, peut-etre son chef d'oeuvre (oui, oui, devant les trois titres les plus connus).
R.I.P Monte Hellman :cry:
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The Life and Death of Colonel Blimp (Michael Powell & Emeric Pressburger, 1943)
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Re: Monte Hellman (1929-2021)

Message par Roy Neary »

Ah oui, un cinéaste exigeant qui en demandait beaucoup aux spectateurs. Mais si on arrivait à entrer dans son univers contemplatif au sein de grands espaces, on pouvait faire un sacré voyage mystique. RIP à cette personnalité hors du commun.
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Re: Monte Hellman (1929-2021)

Message par innaperfekt_ »

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The Shooting (1966)

Sous l'épure et le minimalisme, un film complexe et déroutant. Les critiques mettant en avant l'ennui me surprennent tout de même un peu, tant la durée courte du film et la classe suprême de Warren Oates le rendent si beau et génial. Pourquoi aller chercher plus loin ? Probablement un western qui gagne à être vu et revu pour en comprendre mieux les détails et la vision de l'auteur. L'analogie avec Boetticher est en tout cas, effectivement évidente, sans les concepts philosophiques et la distorsion paroxystique du genre néanmoins. Mention à Nicholson, déjà installée dans une folie inconfortable et unique au début de sa carrière. Je trouve ça beau qu'il ait tant voulu défendre le film à l'époque.
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