John Sturges (1910-1992)

Rubrique consacrée au cinéma et aux films tournés avant 1980.

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Profondo Rosso
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Re: John Sturges (1910-1992)

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Jeopardy (1953)

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Une famille américaine part passer des vacances sur une plage déserte de la Californie Mexicaine. Le père se retrouve coincé par une poutre alors que la marée monte. La mère (B. Stanwyck) part chercher du secours.

Un thriller astucieux et rondement mené par John Sturges. L'atmosphère du film l'inscrit un peu dans la lignée des série B routière façon Ca commence à Vera Cruz tout en annonçant des futurs thrillers en grand espaces comme Breakdown (1997) de Jonathan Mostow. Sturges brille ici par sa capacité à faire monter la tension. La petite famille Stilwin décide d'aller passer ses vacances sur une plage mexicaine et la voix off de la mère (Barbara Stanwyck) déroule la première partie du périple comme un charmant dépliant touristique accompagné des quelques images pittoresques locales. Plus le cadre s'épure, plus le suspense monte insidieusement sans qu'aucun danger ne se manifeste réellement l'angoisse naissant progressivement de l'isolation de la famille sur les routes désertes puis sur cette plage abandonnée. Ainsi amené le suspense naît de manière inattendue en jonglant entre les éléments naturels et une menace extérieure bien humaine. Une berge en bois brinquebalante va ainsi constituer un piège fatal pour le père (Barry Sullivan), obligeant la mère à courir seule les routes sinueuses du Mexique et ses mauvaises rencontres potentielles. Cela se fera avec un évadé (Ralph Meeker) qui va prendre Stanwyck en otage tandis que la marée menace de submerger son mari.

Entre poursuites en voiture énergiques et tension sexuelle palpable entre kidnappeur et kidnappée bien aidé par la prestation menaçante de Ralph Meeker. Barbara Stanwyck est excellente également, passant de la femme apeurée et paniquée à la séductrice froide pour parvenir à ses fin, prête à tout pour sauver les siens. Code Hays oblige, toute l'ambiguïté potentielle de la relation entre un Meeker à la présence animale et Stanwyck est atténuée, ce qui reste tout de même une qualité au vu de la concision d'un récit allant droit au but (à peine plus d'une heure). Le scénario ne se détourne jamais de son objectif de sauvetage familial et finalement l'ambiguïté naît quand même habilement avec la dimension ange/démon de Meeker présenté comme néfaste et individualiste quasiment jusqu'au bout mais qui aura pourtant été le seul recours possible. Un bref moment d'humanité qui provoque un étonnant intérêt quant à son sort final bien exprimé par la tirade finale teintée de regret de Barbara Stanwyck. Bon petit suspense. 4/6
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Les Aventuriers du désert (The Walking Hills, 1948)

Message par pak »

Les Aventuriers du désert (The Walking Hills) de John Sturges, 1948. Avec Randolph Scott, Ella Raines, William Bishop, Edgar Buchanan, Arthur Kennedy, John Ireland, Josh White... Scénario d'Alan Le May et Virginia Roddick - Musique d'Arthur Morton - Production : Harry Joe Brown et Randolph Scott / Columbia Pictures - Sortie USA : 05/06/1949 - Sortie France : 03/06/1949.

Frontière américano-mexicaine... Poursuivi par un détective privé, un fugitif se réfugie dans un établissement où se déroule une partie de poker. C'est à cette occasion que des participants évoquent l'existence d'un convoi perdu dans le désert de la Vallée de la Mort, contenant une importante quantité d'or. Motivés par la découverte d'un indice par l'un des joueurs, tous décident de tenter l'aventure afin de retrouver le magot. Mais le passé de certains d'entre eux va compliquer les choses...
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Les Aventuriers du désert est l'une des premières réalisations de John Sturges, et quasiment le premier western de celui-ci. Quasiment car l'histoire est en fait contemporaine au tournage, donc sensée se passer dans les années 1940, bien qu'ayant rapidement pour cadre le désert de la fameuse Vallée de la Mort, notamment sur sa partie surface de sel marquant l'emplacement d'un ancien lac, ou sur ses fameuses dunes de mesquite, ou encore dans les Alabam Hills, lieu de tournage de nombreux westerns et films d'aventures. L'environnement se prête donc bien au western, même si pour Sturges, sa première vraie tentative dans le genre, qui plus est sa première réussite dans le genre aussi, ce sera l'excellent Fort Bravo, quatre ans plus tard (ou onze films plus tard, le réalisateur tournant alors à un rythme soutenu des petits budgets), avec lequel il connaitra l'un de ses premiers succès publics. Avec ce film, il reste donc encore ancré dans l'univers du film noir de ses débuts et il y retournera encore après pour un temps. Pour la petite histoire, c'est seulement le second film de Sturges à trouver le chemin des salles françaises, le 3 juin 1949, après Le Signe du Bélier (The Sign of the Ram, 1948) sorti moins de deux mois auparavant, le 27 avril 1949, alors que l'homme en était à sa huitième réalisation. Nombre de ses premiers films restent inédits en salles et à la télévision en France, et ce n'est qu'après la réussite du déjà nommé Fort Bravo que ses œuvres auront ensuite systématiquement droit à une distribution chez nous, avec des fortunes diverses, Le Vieil homme et la mer n'engrangeant qu'à peine plus de 250 000 entrées alors que La Grande évasion, son plus gros carton, en enregistrera plus de 8,5 millions.

Mais avec Les Aventuriers du désert, on est nettement dans un registre plus modeste. Bien qu’estampillé Columbia, ce film est en grande partie produit par son acteur principal, Randolph Scott, qui débute là dans la production et son association avec le producteur Harry Joe Brown. Ce premier partenariat pose en fait les bases de la Ranown Pictures (d'abord nommée Scott-Brown Productions) qui aboutira au fameux cycle Ranown, une prolifique collaboration entre l'acteur et le réalisateur Budd Boetticher qui donnera des films comme La Chevauchée de la vengeance ou Comanche Station...

Première production avec réalisateur quasi débutant bien qu'habile, n'ayant pas encore donné de succès au box-office, Randolph Scott, pas réputé pour gaspiller l'argent, bien au contraire (il stoppera sa carrière d'acteur avec un beau pécule), joue la prudence et offre un budget serré, le tournage dans le désert permettant d'économiser des locations de studios et des constructions de décors.

Pourtant l'introduction est typique du film noir, dans une ville frontalière avec le Mexique, où un flic file un homme suspecté de meurtre et semble sur le point d'arrêter ce dernier. Filature qui conduit poursuivi et poursuivant à une partie de poker durant laquelle l'aventure va s'inviter. Cette idée de départ est d'ailleurs excellente car permettant à plusieurs personnages très différents les uns des autres, dont certains peu taillés pour une ballade dans le désert, d'être mêlés, parfois bien malgré eux, à une chasse au trésor. Chaque participant étant lié aux autres par la suspicion, la présence de tous garantissant le secret de l'entreprise, c'est ainsi que barman, musicien itinérant et détective côtoieront cowboys et aventuriers. C'est donc pour beaucoup d'entre eux l'appât du gain qui les met à dos de cheval, les affinités personnelles étant de second ordre, mais pour d'autres, ce sera par la force des choses même si l'assurance d'une richesse rapide balaie rapidement les réticences.
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Le film étant assez court, à peine 1h20 de métrage, Sturges emballe rapidement et efficacement ce début, posant directement les enjeux principaux, afin de plonger son petit groupe dans les étendues désertiques. C'est à ce moment-là que le récit prend des allures de western, que seules les tenues vestimentaires ancrent dans les années 1940. Bien que l'action soit finalement assez chiche, même si elle fait mouche quand la violence éclate, notamment lors d'une méchante bagarre à coups de pelles, le récit se déroule sans temps morts, avec un suspense assez bien huilé puisque de la dizaine de protagonistes qui cherchent fortune, bien malin celui qui saura combien d'entre eux rentreront chez eux à l'issue de l'aventure, même si l'on sait parfaitement que Randolph Scott, la seule star du casting, ne peut disparaître, et que le bad guy de service, lui, restera dans le désert. Toutefois, à mesure que les personnalités se dévoilent, l'auteur brouille les pistes avec leurs passés troubles, et l'on se rend vite compte que beaucoup trainent mauvaise conscience et autres boulets de culpabilité, ce qui génère méfiance, défiance et qui-propos dramatiques. Ainsi, le personnage de Scott lui-même est relativement antipathique, remâchant une rancœur qu'il parvient difficilement à ravaler, préférant la compagnie de son cheval à celle de ses congénères. En soit une bonne idée d'écriture là aussi, sauf que les atermoiements psychologiques sont trop simplistes et on ne s'attache pas vraiment ni au rôle central, ni à ceux qui gravitent autour. Il y a aussi une inversion pas très adroite des héros de polar, le flic devenant de plus en plus violent, le suspect meurtrier de plus en plus sympathique : là encore, une bonne idée, mais exploitée de manière pas très subtile. C'est la limite imposée par le budget modeste de cette production. Trop de personnages à développer en peu de temps, il était donc difficile d'approfondir les mentalités de tous, et sur un sujet proche, ce film est bien en-deçà d'un Trésor de la Sierra Madre de John Huston, qui lui recentrait son attention autour de trois personnages principaux, et auquel on ne fait que penser à la vision du film de Sturges.

Pourtant ce dernier a assez d'atouts pour séduire les amateurs d'aventures. Déjà, parce que le réalisateur fait preuve d'une belle maitrise du casting, puisqu'il doit gérer une dizaine de personnages, même si certains sont fatalement sacrifiés et moins développés, là encore du fait d'un montage serré imposé par les moyens mis à sa disposition. Mais ils existent bel et bien, grâce à une petite phrase qui sonne juste, ou un geste essentiel, d'autant que Sturges ne monopolise pas la caméra sur sa star. Cette capacité à gérer les castings multiples sera une constante chez lui, ce qui est particulièrement visible dans des films comme Fort Bravo, Les Sept mercenaires, La Grande évasion, et jusqu'à son dernier film, L'Aigle s'est envolé.

Autre point positif, le réalisateur a un indéniable sens du cadre. Loin du Cinémascope de ses futurs grosses réalisations, il n'en est pas moins à l'aise avec son format 1.37, et compose de beaux plans, comme ceux d'ensemble montrant le groupe creusant le sable à la recherche d'un indice de la présence du magot tant convoité, sur lesquels se penchent, vu le sujet, et toutes proportions gardées, les fantômes des Rapaces d'Erich von Stroheim (1924), puisque c'est essentiellement la cupidité qui va amener ces hommes dans le désert et s'y affronter. La photo noire et blanche, du chef opérateur Charles Lawton, un habitué du cinéma d'aventure et du western (L'Homme du Nevada, Le Cavalier de la mort, Le Relais de l'or maudit, Trois heures pour tuer, Comanche Station... ), est très belle et nuls doutes que si l'homme avait un peu moins œuvré pour le genre au détriment d'un cinéma plus « oscarisable », il aurait eu droit dans sa carrière au moins à une nomination pour une statuette dorée...

Enfin, John Sturges n'est pas maladroit à filmer la tension montante dans le groupe, installant une sorte d'ambiance de huis-clos à ciel ouvert. Il sait aussi filmer l'action, comme en témoigne le règlement de compte final durant une tempête de sable qui dispute sa violence à celles des hommes.

Dernier atout, un chouette casting de « belles » gueules. Randolph Scott reste minéral, on connait son jeu figé à la mâchoire serrée. Mais il est très bien entouré avec le solide Edgar Buchanan, le mauvais (dans le sens pas gentil) John Ireland, et l'énigmatique Arthur Kennedy. Le casting offre d'autres curiosités, par la présence de l'oublié William Bishop, au jeu tranquille pas loin d'un Robert Mitchum, mais au physique à la Rock Hudson, acteur prématurément disparu à 41 ans des suites d'un cancer, qui ne sera jamais vraiment une star au cinéma, mais qui eut une certaine notoriété à la télévision américaine. Plus étonnante est la participation du guitariste chanteur Josh White, bien connu des amateurs de blues, puisqu'il est l'un de ses pionniers historiques, et une de ses vedettes dès les années 1930 : il fit très peu d'apparitions au cinéma et ce fut là son ultime rôle, mais cela a son importance car c'est l'un des premiers noirs américains à avoir autant de temps de présence dans un film américain (rappelons que le tournage a débuté en 1948), même si, époque oblige, son importance dans le récit est hélas bien moindre que les autres et même dispensable, ceci dit il y chante, et fort bien. La touche féminine et fruit de discorde autre que l'argent, est apporté par la jolie et assez rare Ella Raines qui fait mieux que de la figuration face à ce casting entièrement mâle, et si elle n'a pas de pistolets, elle a des yeux revolvers aptes à attendrir un bourru comme Randolph Scott...
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Rhâââââ...
Si ce film a les limites d'une production fauchée sur laquelle un producteur débutant et prudent (qui a dit radin ? ) se fait les dents, bridant un film choral et son potentiel psychologique amorcé au début (avec tous ces passés cachés et leurs éventuelles futures conséquences trop facilement balayées par une tempête bienvenue, on reste fortement frustré du dénouement un peu facile), il y a suffisamment de quoi éveiller la curiosité des amateurs du cinéma américain des années 1940-50, et même du western, ne serait-ce que pour voir les premiers pas timides d'un réalisateur dans un genre où il va s'illustrer quelques années plus tard, en lui donnant quelques uns de ses titres les plus célèbres.

Évidemment, on préfèrera les prochains films de Randolph Scott, ici à l'aube de sa meilleure période à mon sens, les années 1950 et ses futures collaborations avec Bud Boetticher. Voilà, comme j'en avais marre de lire sur le forum les remarques négatives de Jeremy Fox ( :wink: ) sur ce petit film pas du tout ennuyeux, j'y suis allé de mon petit avis qui vaut ce qu'il vaut, même si une seule vision suffit il est vrai...


Étoiles : * * . Note : 12/20

Image Image Image Image
Pas trouvé de bande annonce, alors place à Josh White :
Le cinéma : "Il est probable que cette marotte disparaîtra dans les prochaines années."

Extrait d'un article paru dans The Independent (1910)

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Re: Les Aventuriers du désert (The Walking Hills, 1948)

Message par Federico »

pak a écrit :la jolie et assez rare Ella Raines qui fait mieux que de la figuration face à ce casting entièrement mâle, et si elle n'a pas de pistolets, elle a des yeux revolvers aptes à attendrir un bourru comme Randolph Scott...
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Rhâââââ...
Pas encore vu ce Sturges mais au concours des plus belles mirettes de l'Age d'or hollywoodien, Ella Raines rentre facilement dans le Top 10. Je ne la trouve pas très à son avantage sur cette photo (comme sur pas mal d'autres d'ailleurs où ses traits sont durcis) alors qu'à l'écran, elle dégage un charme magnétique renversant.
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Re: John Sturges (1910-1992)

Message par pak »

Oui, j'ai aussi remarqué cet étrange décalage entre ses photos posées et ses prestations à l'écran, comme si figer son regard clair la rendait moins vivante, plus froide...
Le cinéma : "Il est probable que cette marotte disparaîtra dans les prochaines années."

Extrait d'un article paru dans The Independent (1910)

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Re: John Sturges (1910-1992)

Message par Jeremy Fox »

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Re: John Sturges (1910-1992)

Message par Karras »

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Les naufragés de l'espace (Marooned) - 1969
Après avoir passé plusieurs mois en orbite dans l'espace, trois astronautes se préparent à retourner sur Terre. Mais, ils s'aperçoivent que leur propulseur ne marche plus. La NASA envoie alors une navette de sauvetage mais les problèmes s'accumulent.

Bien que prémonitoire dans son scénario ( la mésaventure d'Apollo XIII ), le film peine à passionner. Les stars sont là ( Peck, Crénna, Hackman ) mais le film arrive rarement à émouvoir ( mise à part quelques moments d'intimité avec les épouses des astronautes ). Bien trop technique le film prend le rythme lent des déplacements dans l'espace et finalement tue dans l’œuf tout le suspens qu'aurait pu générer le scénario. (5/10)
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Re: John Sturges (1910-1992)

Message par Federico »

Karras a écrit :
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Les naufragés de l'espace (Marooned) - 1969
Après avoir passé plusieurs mois en orbite dans l'espace, trois astronautes se préparent à retourner sur Terre. Mais, ils s'aperçoivent que leur propulseur ne marche plus. La NASA envoie alors une navette de sauvetage mais les problèmes s'accumulent.

Bien que prémonitoire dans son scénario ( la mésaventure d'Apollo XIII ), le film peine à passionner. Les stars sont là ( Peck, Crenna, Hackman ) mais le film arrive rarement à émouvoir ( mise à part quelques moments d'intimité avec les épouses des astronautes ). Bien trop technique le film prend le rythme lent des déplacements dans l'espace et finalement tue dans l’œuf tout le suspens qu'aurait pu générer le scénario. (5/10)
Un petit film sympa que je reverrai bien. Il m'avait beaucoup impressionné quand je l'avais découvert à la télé, tout gamin (je me demande si il n'était pas passé aux Dossiers de l'écran au moment du drame d'Apollo XIII ?)
L'autre coïncidence étonnante, c'est le prénom de l'astronaute joué par Hackman : Buzz, tout comme le surnom d'Edwin Aldrin. Mais c'était peut-être voulu puisque le film sorti plusieurs mois après Apollo XI (et au moment d'Apollo XII).
Au final, un scénario moins original* que celui d'un autre film d'aventures lunaires sorti l'année précédente : Countdown de Robert Altman, qui n'est pas non plus un chef-d'oeuvre mais où la NASA lançait en catastrophe une mission Apollo après avoir découvert que les Soviétiques s’apprêtaient à lui damner le pion. Une mission "plan B" avec juste un seul astronaute qui attendrait sur place l'arrivée de renforts. Scénario assez foutraque mais là où ils avaient vu juste, c'est sur le fait qu'il faudrait que le premier homme à marcher sur la Lune soit un civil et non un militaire, pour des raisons de communication Est-Ouest. Et c'est ce qui se passera un an plus tard avec Armstrong (un civil).

(*) Je veux dire par là qu'avec le recul, le fait qu'Apollo XIII fut le seul échec des missions lunaires américaines tint du miracle. Il était hélas assez aisé d'imaginer qu'une au moins de ces ultra-périlleuses expéditions "got a problem"... :roll:
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Re: John Sturges (1910-1992)

Message par Profondo Rosso »

Le Dernier Train de Gun Hill (1959)

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La femme indienne du shérif Matt Morgan est violée et tuée par deux hommes. Se rendant à Gun Hill, Morgan découvre que l’un des criminels est le fils de son vieil ami Craig Belden, devenu un très riche éleveur. Bien qu’il doive la vie à Belden, Morgan est déterminé à arrêter les coupables et à repartir avec eux par le dernier train de Gun Hill. Mais avant cela, il devra affronter Belden et ses hommes, dans une ville indifférente ou hostile, où il ne peut compter que sur l’aide de Linda, l’ancienne maîtresse de son ami.

La figure si populaire du western américain des années 50 de l'homme de loi seul contre une vie apeurée et corrompue, célébrée dans Le Train sifflera trois fois (1952) et magnifiée par Rio Bravo (1959) trouve une belle variation avec ce Last Train From Gun Hill. Kirk Douglas (qui retrouve Sturges après le fameux Règlement de compte à OK Corral (1957)) est donc Matt Morgan, shérif parti traquer les meurtriers de sa femme indienne dans la ville de Gun Hill. Problème l'un des assassins est le fils de Craig Belden (Anthony Quinn), riche éleveur maître de la ville et compagnon de route de Matt lui ayant même sauvé la vie. Toute la force émotionnelle du film repose sur ce dilemme qui va opposer deux hommes qui s'apprécient mais que les déchirements familiaux amèneront à s'opposer. La terrible agression d'ouverture par sa cruauté et sa violence sèche pose d'emblée cet antagonisme irréversible et la détermination qui guidera Kirk Douglas tandis que les rapports filiaux tendus entre Belden père trop imposant et son fils faible de caractère.

On retrouve ainsi le brio et la concision narrative qui pose brutalement la situation initiale, peindre de manière limpide le rapport entre Douglas et Quinn puis l'affrontement inéluctable lorsque les masques tombent. Après cette efficace mise en place, Sturges ralentit le tempo pour instaurer un véritable film de siège où un Douglas assailli vendra chèrement sa peau. Les quelques escarmouches sont remarquablement exécutées (dont une fusillade dans un saloon montrant toute la dextérité de Douglas) mais c'est surtout sur l'interprétation intense que repose la force du film. Kirk Douglas meurtri incarne pourtant un personnage glacial et déterminé (voir la réaction sobre et désespérée lorsqu'il découvre le cadavre de sa femme ou description froide du sort qui l'attend aux provocation du fils Belden) dont le chagrin ne s'exprimera que dans sa quête de justice inébranlable. A l'inverse Anthony Quinn est un être bien plus exubérant dont les sentiments se dévoilent de manière excessive et discutable, laissant entendre que ce caractère explosif est la raison des égarements de son fils. Entre eux, le très touchant personnage de Carolyn Jones blasé et revenu de tout qui sera réveillée par le courage de Douglas, symbole d'un changement possible des choses par son courage.

Ce parti pris finalement peu spectaculaire ne gêne pas au vu de la brièveté du film et lorsque l'action se manifeste, elle n'en est que plus intense. La longue marche vers le train en conclusion est assez splendide et filmée au cordeau par Sturges qui achève l'ensemble par un superbe et concis duel final. Beau western finalement assez noir et désespéré où tous seront perdant. 4,5/6
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Re: John Sturges (1910-1992)

Message par Hitchcock »

La Vénus des mers chaudes - 1955 : Ce film est incroyablement mauvais. L'ensemble est vraiment insipide, il n'y a quasiment rien à récupérer. Le scénario est inepte et inconsistant, sans originalité, les interprètes sont médiocres (même la très belle Jane Russell), en particulier Gilbert Roland, cabotin à outrance. Les dialogues sont, encore une fois, mal écrits et le film très bavard. Bref, on s'ennuie ferme, je crois même que j'ai failli m'endormir. Un navet, à oublier immédiatement dans la carrière d'un metteur en scène par ailleurs excellent (Règlements de compte à O.K. Corral, La Grande Évasion).
03/20
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Frances
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Re: John Sturges (1910-1992)

Message par Frances »

Règlement de compte à OK Corral.
de John Sturges - 1957 - Avec Burt Lancaster, Kirk Douglas, Rhonda Fleming, Jo Van Fleet, John Ireland, Lyle Bettger
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Il me restait un souvenir dilué d'une vision adolescente privée alors d'une interprétation "plus mature". Aujourd'hui à la revision, je mesure toute la noirceur véhiculée par le film de Sturges.
la mort balise le récit de bout en bout ; Un récit qui s'articule sur la thématique du comportement sacrificiel (Wyatt Earp / Burt Lancaster) et suicidaire (Doc Holliday / Kirt Douglas).
La mort est omniprésente, en suspend ou annoncée, inexorable (cf les plans récurrents du cimetière).
Earp et Holliday incarnent, chacun à leur façon un certain sens du devoir et de l'honneur envers la fratrie, la communauté, au nom de l'amitié.
L'avenir apparait sans issue marqué par la destruction individuelle ou collective et ici l'amour n'est pas salvateur. Il incarne soit le miroir de sa propre déchéance, soit le refus de renoncer à ses propres désirs pour "épouser" la cause de l'être aimé.

Au final, une relecture plutôt enthousiaste de ce Sturges avec un duo Lancaster/Douglas qui fonctionne à merveille.
L'image du BR est vraiment très belle ce qui ne gâche rien.
"Il faut vouloir saisir plus qu'on ne peut étreindre." Robert Browning.
" - De mon temps, on pouvait cracher où on voulait. On n'avait pas encore inventé les microbes." Goupi
Mains Rouges.

Mes films du mois :
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Jan 21 : Cousin Jules
Fev 21 : Midnight special
Mar 21 : Nanouk l'esquimau
Avr 21 : Garden of stones
Mai 21 : Fellini Roma
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Re: John Sturges (1910-1992)

Message par Jeremy Fox »

8)
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Re: John Sturges (1910-1992)

Message par bogart »

Frances a écrit :
Règlement de compte à OK Corral.
de John Sturges - 1957 - Avec Burt Lancaster, Kirk Douglas, Rhonda Fleming, Jo Van Fleet, John Ireland, Lyle Bettger
Image
Il me restait un souvenir dilué d'une vision adolescente privée alors d'une interprétation "plus mature". Aujourd'hui à la revision, je mesure toute la noirceur véhiculée par le film de Sturges.
la mort balise le récit de bout en bout ; Un récit qui s'articule sur la thématique du comportement sacrificiel (Wyatt Earp / Burt Lancaster) et suicidaire (Doc Holliday / Kirt Douglas).
La mort est omniprésente, en suspend ou annoncée, inexorable (cf les plans récurrents du cimetière).
Earp et Holliday incarnent, chacun à leur façon un certain sens du devoir et de l'honneur envers la fratrie, la communauté, au nom de l'amitié.
L'avenir apparait sans issue marqué par la destruction individuelle ou collective et ici l'amour n'est pas salvateur. Il incarne soit le miroir de sa propre déchéance, soit le refus de renoncer à ses propres désirs pour "épouser" la cause de l'être aimé.

Au final, une relecture plutôt enthousiaste de ce Sturges avec un duo Lancaster/Douglas qui fonctionne à merveille.
L'image du BR est vraiment très belle ce qui ne gâche rien.
Ayant acheté le Blu-ray zone 1 mais toute zone pour les lecteurs, l'image proposée est nette sans accro de pellicule ou autres patouilles. C'est bien simple, j'ai eu l’impression de redécouvrir ce western ! 8) :wink:
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Re: John Sturges (1911-1992)

Message par Jeremy Fox »

Alphonse Tram a écrit :
Sergeants 3 / Les trois sergents (J. Sturges, 1962)

3 sergents de l'armée des Etats-Unis sont envoyés pour enqueter sur une étrange attaque d'indiens...

100% action dans ce western tragi-comique, où l'on retrouve une bonne partie du rat pack d'Ocean eleven.
Au menu : bagarres, fusillades, poursuites. Aucune réfléxion profonde, mais j'ai passé un excellent moment :mrgreen:
d'autant que l'image est excellente. J'ai été bluffé par la manière dont Sturges utilise le scope, c'est assez étonnant. On dirait vraiment que chaque plan, qu'il soit rapproché ou large, est pensé pour le format large. Je n'y pense pas habituellement, mais ici c'est imparable, par exemple lors de l'arrivée dans la ville attaquée. Très fort le gars.
Rappelles toi ; j'avais émis quelques doutes en lisant ça mais comme tu avais raison ! Après le calamiteux Sept mercenaires, John Sturges retrouve la grande forme. Formellement et rythmiquement, c'est formidable ; j'avais rarement vu des scènes d'action aussi réussies et la musique de l'inconnu Billy May est remarquable. Excellente surprise !
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Re: John Sturges (1910-1992)

Message par Hitchcock »

Ah oui et le trio d'acteurs est vraiment parfait.
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Jeremy Fox
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Re: John Sturges (1910-1992)

Message par Jeremy Fox »

Hitchcock a écrit :Ah oui et le trio d'acteurs est vraiment parfait.

Ce n'est pas un des grands Sturges mais c'est un excellent divertissement qui plus est parfaitement bien réalisé. Mon avis en fin de semaine prochaine au sein du parcours :wink:
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