Kihachi Okamoto (1923–2005)

Rubrique consacrée au cinéma et aux films tournés avant 1980.

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bruce randylan
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Kihachi Okamoto (1923–2005)

Message par bruce randylan »

Le grand enlèvement / Rainbow kids (Kihachi Okamoto – 1991)

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Trois jeunes garçons qui ont fait chacun de la prison pour des petits délits planifient le kidnapping d'une riche propriétaire de plus de 80 ans. Malgré leur amateurisme et leur maladresse, ils parviennent à leur fin mais immédiatement leur victime leur prodigue des conseils pertinents et les pousse à réclamer davantage d'argent pour sa rançon.

Une chaleureuse comédie policière où transpire une tendresse et une envie d'aller à rebours des films du genre.
Le résultat est drôle, plein de malice, ne cherche pas à se prendre au sérieux, sans pour autant négliger ses personnages, le tout mené avec l'assurance tranquille d'un réalisateur qui n'a rien à prouver mais ne veut pas céder à la facilité. Ni frénétique, ni précipité, il avance d'un pas sûr tel la grand-mère qui part randonner dans les montagnes. L'air de rien, Okamoto fait preuve d'un vrai talent dans une efficacité aussi sereine qu'indéniable (cadrage, montage, les ruptures de tons, la gestion d'une dizaine de personnages).
La narration est sans temps mort avec des accélérations maîtrisées du récit, des effets comiques percutant sans être hystérique, et une décontraction qui cache un discours anti-conformiste, pour ne pas dire punk avec sa manière de se payer la tête des médias, de la police.... et du fisc :mrgreen:
Et mine de rien, le scénario propose plein de bonnes idées astucieuses et originales pour mener à bien ce kidnapping inhabituel et trouver des solutions crédibles aux différents péripéties qui paraissaient insolvables.

J'avais un peu peur des films de fin de carrière du cinéaste et c'est au contraire une excellente surprise. Quelle tristesse que la MCJP a laissé tomber l'idée d'une rétrospective.
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Rick Blaine
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Re: Kihachi Okamoto (1923–2005)

Message par Rick Blaine »

Découverte hier du Sabre du mal, après avoir vu avec grand plaisir Kiru il y a fort longtemps, et c'est une belle claque. Okamoto joue avec son scénario en l’abandonnant finalement en cours de route - au risque de créer un sentiment déceptif mais au profit d'un final sublime - pour nous offrir une plongée vertigineuse dans l'âme tourmentée d'un samuraï animé par le mal. Dans le rôle principal, Nakadai aura rarement été aussi fiévreux, aussi intense. Okamoto trace un parallèle subtil dans son récit entre les tourments de son personnage et ceux du Japon de la fin du shogunat, déjà cristallisé dans la séquence d'ouverture saisissante qui voit Nakadai venu de nul part pour abattre un vieillard qui implorait Bouddha de le tuer.
Le final est mémorable, le personnage de Nakadai rattrapé par ses démons sombrant dans une impressionnante folie. Au delà de ces séquences marquantes, le film vaut aussi par sa narration étrange, déstabilisante sur le coup mais au combien stimulante, multipliant les fausses pistes et les personnages mystérieux.
Un film troublant, qui pourrait être hermétique au premier abord mais qui exerce un étonnant pouvoir de fascination.
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Beule
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Re: Kihachi Okamoto (1923–2005)

Message par Beule »

TALE OF THE UNDERWORLD : THE LAST GUNFIGHT (Ankokugai no taiketsu – 1960)

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avec Toshirô Mifune, Kôji Tsuruta, Yôko Tsukasa
Mis en cause dans une sale affaire, un flic tokyoïte est muté en province à titre de sanction. Il ne tarde pas à se poser en électron libre pour arbitrer une guerre des gangs autour du contrôle de la juteuse carrière locale.

S’il n’en est pas une suite directe, ce polar relax mâtiné de yakuza eiga semble surfer sur le succès de Ankokugai no kaoyaku, qui quelques mois plus tôt réunissait déjà Mifune et Tsuruta devant la caméra d’Okamoto. Claironnant à l’envi sa nature profondément corrompue, le flic incarné par Mifune préfigure aussi, à bien des égards, l’iconique Sanjûrô des chanbara à venir de Kurosawa. Il va sans dire qu’il est absolument délectable dans cet emploi.

Collusion des sphères criminelles et politiques/administratives ou baroud d’honneur du aniki pourtant rangé des voitures comptent parmi les nombreuses conventions de l’intrigue. Mais comme la mise en scène fourmille d’épatantes trouvailles formelles, parfois aussi rigolotes (la prestation scénique des hommes de main) que plastiquement stimulantes (l'attaque du bar de Kôji Tsuruta, la confrontation finale entre Mifune et Tsuruta), que le montage est à la fois dynamique et inspiré, ces conventions sont tempérées par la vivacité et la malice de bon aloi de l’entreprise. Sans conteste mineure, elle n’en constitue pas moins, dans son harmonieux mélange des genres et des humeurs, un galop d’essai prometteur avant l’éclatante réussite Kill, plus tard dans la décennie.
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Re: Kihachi Okamoto (1923–2005)

Message par Rick Blaine »

Beule a écrit :TALE OF THE UNDERWORLD : THE LAST GUNFIGHT (Ankokugai no taiketsu – 1960)
Tu l'as vu comment ?
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Re: Kihachi Okamoto (1923–2005)

Message par Beule »

Rick Blaine a écrit :
Beule a écrit :TALE OF THE UNDERWORLD : THE LAST GUNFIGHT (Ankokugai no taiketsu – 1960)
Tu l'as vu comment ?
...
Un topic que j'avais créé en DVDnaphta l'hiver dernier pourra te donner un indice. :oops:
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Re: Kihachi Okamoto (1923–2005)

Message par Rick Blaine »

J'ai eu cette idée, mais je voulais avoir confirmation. :fiou:
Côté capture ca a l'air pas mal en plus, je vais y faire un tour. :oops:
Merci. :wink:
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Re: Kihachi Okamoto (1923–2005)

Message par Beule »

Par expérience, limitée à ce jour à 4 titres annoncés remastérisés, c'est très honorable effectivement. Le master en question est probablement le moins fringant des quatre. Au pire, c'est du niveau d'une édition Fukasaku chez Wild Side. Et le SAV, testé, est fiable et ultra réactif 8)
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Re: Kihachi Okamoto (1923–2005)

Message par Rick Blaine »

Parfait. 8) Je vais tenter les 2 Okamoto et trouver 1 ou 2 trucs pour accompagner.
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Re: Kihachi Okamoto (1923–2005)

Message par bruce randylan »

Big shots die at dawn (1961)

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Un homme revient dans sa ville natale après être parti en Alaska des années, sans donner de nouvelles. Il découvre que son père vient d'être assassiné durant la campagne municipale où il se re-présentait. L'affaire possédant de nombreuses zones d'ombre, il décide d'enquêter lui-même.

Pur commande pour Okamoto qui n'a pas eu son mot à dire dans le projet - du moins avant le début du tournage - cette petite série B s'avère rafraîchissante par le style du cinéaste, toujours aussi alerte. Le scénario, qui reprend quelques éléments d'Hamlet, est assez incompréhensible avec sa douzaine de suspects, sous-fifres, flics ripoux, gangsters, femmes fatales & cie qui sont autant de fausses pistes ou de trahisons/associations possibles. Okamoto et ses acteurs en sont bien conscients et en profitent pour tirer vers le pastiche avec pas mal de décontraction, d'auto-dérision et de touches décalées comme un final au milieu de manèges qui se mettent en marche durant la fusillade.
Sans avoir grand chose à raconter, Okamoto se concentre à dynamiser sa mise en scène avec un montage nerveux débordant de coupes saugrenues et d'accélération tout en jouant sur l'entrée dans le champ des comédiens ou l’interaction entre les visages des comédiens. C'est extrêmement stimulant dans son premier tiers mais il faut reconnaître que l'absence d'intrigue et que les personnages aussi vides que cools occasionnent une petite lassitude dans les procédés qui tournent un brin en rond, sans doute à cause du manque de préparation avant le lancement de la production. Même si Okamoto prend à réel plaisir à diriger ce film, il manque clairement une vision personnelle ou une adéquation entre la forme et le discours sarcastique (ici inexistant) qu'on peut trouver dans ses autres réalisations. Peut-être aussi que le comédien principal Yûzô Kayama n'a pas tout à fait les épaules et le charisme nécessaire pour tenir entièrement le film.
Celà dit, le film reste très plaisant, avec de nombreux moments réjouissants et une belle vitalité générale.
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