Teresa Wright (1918-2005)

Rubrique consacrée au cinéma et aux films tournés avant 1980.

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Watkinssien
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Re: Teresa Wright (1918-2005)

Message par Watkinssien »

Thaddeus a écrit : lumineuse et déterminée chez Walsh (La Vallée de la Peur), frémissante et troublée chez Hitchcock, dans ce qui reste probablement son plus grand rôle (L'Ombre d'un Doute).
Je la trouve formidable dans le Hitchcock, mais quand j'ai revu le Walsh, je me suis dit qu'elle y tenait sa plus belle performance au final. Mais c'est comparer des pommes et des oranges, à ce niveau-là, car j'aime beaucoup cette actrice également.
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Supfiction
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Re: Teresa Wright (1918-2005)

Message par Supfiction »

Alexandre Angel a écrit :
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On en revient encore à Raoul Walsh, et ça risque de ne pas être la dernière fois.

Le plus grand réalisateur américain faisait des films qui ressemblaient à son nom : rugissant comme Raoul et claquant comme Walsh, cette quasi-onomatopée.

A l'époque où l'intrusion de la psychanalyse dans le cinéma US était à la mode (Spellbound, The Locket, etc...), Raoul Walsh, ce baroudeur, ce flibustier, qui cachait pudiquement sa passion pour la grande littérature, réalise en 1947 rien moins que le premier western psychanalytique, aussi fiévreux qu'un songe obsessionnel dans un film d'Hitchcock, à l'image de ces surimpressions (magnifiques) d'éperons rutilants qui scintillent et cliquètent aussi sûrement que si nous-mêmes les rêvions.

La menue présentation qui précède pourrait inspirer quelque réticence. En effet, le cinéma populaire imprégné de freudisme tel qu'on le concevait à la fin des années 40 tend à proposer des dramaturgies qui peuvent paraître poussiéreuses, en espérant ne pas être trop injuste.

Pursued (La Vallée de la Peur), qui n'est pas à proprement parler, il faut dire, un film psychanalytique mais plutôt un western sombre, lancinant et gothique, imprégné de film noir (comme Ciel Rouge, de Robert Wise, aussi avec Robert Mitchum), ne prenait pas pour cette raison le chemin de l'écueil formulé.
Mais, tout de même, on pourrait craindre, non sans raison, que Walsh, cinéaste tellurique, trépidant, ne s'égare dans un scénario intellectuel et ne laisse à la postérité qu'une œuvre bancale. Intéressante dans le meilleur des cas mais négligeable.

Or Pursued est un chef d'œuvre absolument stratosphérique, une des plus belles choses qui puissent survenir dans une vie de passionné.

J'ai montré le film (dans sa belle copie restaurée et éditée par Sidonis) à une personne de ma famille qui ne connaissait pas et qui m'a confié, le lendemain, avoir été "impressionnée" .
L'expression m'a frappé : elle n'a pas dit "c'était bien" , "c'était beau" , "ça m'a beaucoup plu" ou encore "c'était magnifique".
Non... elle a été "impressionnée" .

C'est ça l'effet Pursued : on se dit en le visionnant qu'on a affaire à quelque chose d'important, qui nous surplombe aussi sûrement que ces pitons rocheux sous lesquels cavalent de dérisoires silhouettes .

Comme lorsqu'il avait été diffusé au Ciné-Club de Claude-Jean Philippe sur Antenne 2 en 88 ou 89.
On l'avait regardé, on l'avait même enregistré et on s'était retrouvé le lundi suivant comme des gosses dans la cour de récré : "Ouahh, t'as regardé le Walsh vendredi soir ??!" "Ouais, j'ai trouvé ça dément...".

Et l'ardeur du coup de foudre n'a jamais été infirmée mais toujours tenue en respect par l'attente usante d'une édition de référence, que nous avons enfin, toute perfectible qu'elle puisse être.

Enfin, nous pouvons admirer à loisir les textures à la fois laiteuses et mercuriales du génial James Wong Howe, légendaire chef opérateur d'origine chinoise, dont il faudrait des cycles qui lui soient entièrement consacrés.
Le plan montrant la mère et la fille (Judith Anderson et Teresa Wright), côte à côte et envoilées, aux obsèques d'Harry Carey Jr, est le plus beau du cinéma américain parce qu'il pourrait se trouver dans un film de Mizoguchi.

Enfin, l'on peut s'attarder sur les arcanes d'un récit hanté et funeste, transposition partielle du Maître de Ballantrae, de Robert Louis Stevenson, et se régénérer du souffle vital qui circule entre les plans.

Car la manière qu'a Raoul Walsh de s'approprier le matériau gothique qu'il a en mains pour mieux le réverbérer sur son décor westernien est aussi désarmante que prodigieuse.
Désarmante parce qu'organiquement distillée et fondue dans ce qu'il convient de classer dans les dix plus beaux westerns de tous les temps et prodigieuse par son évidence digne des plus grands conteurs anglo-saxons (et au delà puisque Dumas n'est jamais loin).

Sans doute parce que son enfantement est quelque peu décentré (c'est une production indépendante au sein même de la Warner), Pursued jouit d'une réalisation dont on sent qu'elle échappe au joug des producteurs. Ce qui, en termes formels, se traduit par une liberté d'agencement qui confère à l'écoulement du récit la dimension d'un classicisme minéral et méandreux.

Raoul Walsh, maître du tempo, crée l'illusion du remous narratif, qui se forme en bordure d'un tourbillon d'où surgissent les images du trauma inaugural.

Il conviendra, puisqu'il est question de tourbillon, de se pâmer devant cette science merveilleuse des fondus enchainés, dont bon nombre de réalisateurs classiques américains étaient coutumiers, et que Walsh maîtrise à la perfection et dont le film est un festival. Ils y sont couloirs de fluidité autant que vecteurs de transitions mentales.

Un ami, bien plus âgé, à l'occasion de cette diffusion sur Antenne 2, s'était esbaudi devant le fondu qui nous fait passer de Mitchum, que Teresa Wright accepte d'épouser, à l'image du couple convolant en carriole alors que l'attaque du plan se fait sur la crinière des montures. Ce fondu lui avait fait songé au Caravage.

Dans ce film, dont il faut bien convenir qu'il est génial, la matière formelle et iconographique est comme en fusion, galvanisant tout ce qui bouge en son sein et autour d'elle : direction de la photographie (on en a parlé), musique (Max Steiner, en pleine forme!), seconds (Dean Jagger, fantastique; Alan Hale, remarquable; Judith Anderson, idéalement funeste) et premiers rôles (Mitchum, marmoréen et somnambulique; Teresa Wright, entre rigidité et tension sexuelle).

Tout est ici, on le confirmera, impressionnant et nous amène à y revenir. Encore et encore...

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Thaddeus
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Re: Teresa Wright (1918-2005)

Message par Thaddeus »

Je l'aime. Comme le dit justement Alexandre "entre rigidité et tension sexuelle"), elle explore ici un registre moins doux, moins pétillant que celui dans lequel on a l'habitude la voir. Elle y est encore formidable.

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Re: Teresa Wright (1918-2005)

Message par Supfiction »

La Dernière Minute / Count the Hours réalisé par Don Siegel en 1953.

A partir d'une idée de départ très classique (un homme accusé à tort de meurtre), Don Siegel nous offre un film plein de suspense et de mini-rebondissements toujours crédibles. Le titre original (Count the Hours) est parfaitement approprié puisque ce sera une course poursuite de l'avocat Doug Madison (MacDonald Carey) jusqu'à la dernière minute avant l'exécution du condamné pour prouver son innocence. Son principal adversaire étant le district attorney convaincu lui de la culpabilité de l'accusé et prêt pour cela à rejeter les preuves apportées pour la révision du procès.
Sur sa route également, Adele Mara (en ersatz de Gloria Grahame) ou Jack Elam et sa sacrée gueule en biais.
Teresa Wright n'a pas un rôle très développé mais le film est captivant du début à la fin. Surtout, tous les personnages secondaires existent individuellement et restent humains y compris le tueur. Les deux personnages principaux sont de petites gens désarmés face à la machine policière et juridique qui les condamne inéluctablement et la populace qui réclame du sang. C'est pratiquement du Clint Eastwood avant l'heure.

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Re: Teresa Wright (1918-2005)

Message par Supfiction »

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kiemavel a écrit : 20 déc. 16, 23:45
Californie en flammes - California Conquest de Lew landers (1952)
Réalisation : Lew Landers / Production : Sam Katzman pour Columbia / Scénario : Robert E. Kent / Photographie : Ellis W. Carter / Musique : Mischa Bakaleinikoff (Stock musics)
avec Cornel Wilde ( Don Arturo Bordega), Teresa Wright (Julia Lawrence), Alfonso Bedoya (Jose Martinez ), John Dehner (Fredo Brios), Eugene Iglesias (Ernesto Brios), Lisa Ferraday (Helena de Gagarine)

L'action se passe en Californie dans les années 1830-1840. Don Arturo Bordega, issu de la noblesse espagnole et partisan du rattachement de la Californie aux États-Unis, se rend à Los Angeles à une rencontre secrète où les partisans de l'émancipation vis à vis du Mexique doivent se retrouver lorsqu'il est attaqué par des bandits mexicains mais il parvient à leur échapper. Peu après son arrivée en ville, il apprend que l'invité d'honneur de la réunion, le Capitaine de l'Armée américaine John Charles Fremont, attaqué lui aussi par des bandits, vient à son tour d'échapper de peu à la mort. A l'évidence, il y a des traitres parmi les conjurés. Avec l'aide de Julia Lawrence, une américaine dont le père commerçant en armes est lui même assassiné par les mêmes brigands, Arturo tente d'infiltrer la bande …



Un film d'aventure - que d'aucuns pourraient classer comme western - dont l'action se déroule en Californie encore sous domination mexicaine. Les propos liminaires nous informe qu'entre 1825 et 1841 le territoire subit des troubles permanents dus en partie à la guerre qui s'y livraient les grandes puissances se disputant encore ce territoire neuf : Le royaume uni, la France et la Russie. La Russie établit même quelques comptoirs et un fort jusque dans le nord de la Californie et envoya sur place une princesse russe, soeur de la tsarine, pour affirmer ses droits sur le pays. D'ailleurs, étant donné que par la suite on ne voit jamais les autres ennemis des californiens et que la cible est évidente, on pourrait qualifier ce film de "Cold War western". The Russians are Coming ? Non, le territoire n'est tout de même pas envahi - ni près de l'être - puisqu'on ne voit pas de russes en dehors d'un comte et de la princesse mais ils intriguent pour corrompre quelques nobles mexicains.



C'est dans ce contexte que Don Arturo Bordega (Cornel Wilde), noble de vieille souche espagnole, lassé de la domination mexicaine et partisan du rattachement avec les usa, conspire secrètement avec quelques amis choisis car même si le préambule annonçait qu'un vaste mouvement populaire oeuvre dans l'ombre pour conquérir sa liberté, c'est surtout quelques nobles espagnols qui manoeuvrent en secret pour - le titre annonçait la couleur - la "conquête" de la Californie … Et pourquoi ? Ben, parce que les USA, c'est le pays de la liberté, bien sûr. Et c'est à peu près tout ce qu'on saura des motivations des "bons" donc inutile d'espérer y retrouver ne serait-ce qu'à minima une évocation des événements qui secouèrent le Mexique après son indépendance car il n'en reste rien et, même si c'est secondaire, dans cette histoire qui nous est contée, rien ou presque n'est vrai en dehors du Fort Ross, réellement fondé par des russes au début du 19ème siècle et du personnage de John Charles Fremont qui a tenu un rôle important dans la guerre americano-mexicaine (mais pas celui qu'on lui voit tenir dans le film, c'est à dire presque rien) Bref, c'est Hollywood. On s'en balance de la grande histoire ! Ce qui compte c'est l'histoire. Ben justement, il en aurait fallu une qui tienne un peu plus debout …



Cette conquête de la Californie, elle vient pourtant - et assez vivement - dans une histoire très mouvementée mais où rien ne retient vraiment l'attention en dehors du couple vedette, notamment en raison du rôle joué par la jeune femme interprétée par la toujours impeccable Teresa Wright. Pour commencer, Arturo est un peu seul et emploie d'abord la fuite et la ruse (belle séquence d'ouverture dans un décor naturel superbe) ; puis très vite il se trouve donc un 1er allié inattendu : une jeune femme américaine, Julia Lawrence (Teresa Wright) qui travaille auprès de son père, armurier à Los Angeles. Lorsque ce dernier est abattu par la bande de brigands dirigés par Jose Martinez (Alfonso Bedoya) venue piller le stock d'armes de son magasin, elle décide de rejoindre Arturo et de prendre une part active dans la lutte. Une aide ou un boulet ? Non ; pasque les femmes dans la bataille … à part pour faire la popote ! ouiiiiii mais pas celle là.



Car pour une fille de commerçant Yankee mesurant 1m12 et au physique semblant peu fait pour être transportable dans des films "historiques", la petite et charmante Teresa (je l'adore) se défend très bien et tient un rôle actif dans la révolución, y compris les armes à la main. En dehors d'une séquence de bal, on ne la voit jamais autrement qu'en jean et en habit de travail (le maquilleur avait même pris soin de lui mettre une tache de saleté sur le front pour sa première apparition :wink: ) et par la suite, on ne la voit presque jamais autrement qu'un colt à la ceinture. Elle ne martyrise pas que la vaisselle en fer blanc (cf. sa démonstration de tir au pistolet quand Arturo n'est pas convaincu que son soutien lui sera très utile) car elle intervient à point nommé à plusieurs reprises et défouraille avec vivacité et détermination. On pourra s'étonner de retrouver Teresa Wright dans ce registre là mais c'est selon moi l'une des rares petites singularités de ce film. Cela dit, on pourrait discuter de crédibilité … mais on ne discute pas de son engagement en tant qu'actrice dans chacun de ses rôles, y compris dans celui ci aussi atypique soit il.


Elle est presque aussi impliquée dans les scènes d'action que ce bon Cornel Wilde mais lui, dans ses gênes, il a aussi l'escrime à sa palette (On ne va quand même pas tirer au pistolet sur un noble espagnol). Il a donc un assez moyen combat à l'épée contre Ernesto Brios (Eugene Iglesias, qui disparait très vite malgré sa position au générique). Mais même ces nobles espagnols n'ont aucune classe. Une partie de cette noblesse (l'autre leader étant son frère Fredo interprété par John Dehner) s'est ralliée aux soviéts et ils attisent le chaos qui règne dans le pays en se servant d'une bande de brigands ; tous ces aventuriers complotant pour livrer la Californie aux russes même ceux qui ne semblent pas bien comprendre les enjeux politiques de leurs actes (surtout Jose Martinez, le chef des brigands interprété par Alfonso Bedoya, le mexicain rigolard en provenance directe du Trésor de la sierra Madre mais qui est ici nettement moins dangereux et futé que dans le film de Huston)

Bref, le bandit est un peu trop crétin (facile à embobiner le pistolero ! ). Les frères Brios sont des conspirateurs assez mous, tout comme les deux russes dont un comte qu'on entend parler une fois et une princesse qui ment comme elle respire. Alors que l'on avait vu au début du récit des troupes russes hisser le drapeau national sur le territoire, elle déclare à Fredo Brios que la Russie n'a absolument aucune "Territorial Ambition" sur la Californie … Une ancêtre de Vladimir ? Autre grief, peut-être que Cornel Wilde est un peu trop souriant et cool pour un révolutionnaire (Mais on peut préférer le genre Zorro au genre Fidel :wink: ). Bien sûr, du bon coté de la balance, on peut mettre les nombreuses séquences mouvementées (duels à l'épée ; gunfight ; poursuites à cheval ; attaque de diligence ; la mini bataille finale …) mais filmées sans une once d'imagination sauf en ce qui concerne l'utilisation des décors naturels superbes et assez bien mis en valeur. Scénario crétin mais assez distrayant. 4/10
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