Chien Enragé (Akira Kurosawa - 1949)

[The Eye Of Doom]

Revu hier ce chef d'oeuvre.
Relisant les commentaires precedents, rien de bien extraordinaire a ajouter.
Le debut "film noir" est remarquable. La voix off m'a fait penser à Pépé le Moko. Je ne sais si Kurosawa à vu des films de Duvivier avant guerre mais on retrouve une meme approche de la mise en scène, physique, agile, au plus pres des corps.
La longue sequence d'errance, 8 à 9 min tout de meme, est le morceau de bravoure de la 1ere partie du film. Elle fait suite à cette belle sequence où Mifune colle à la femme pickpocket. Il y a bien deux partie dans le film: la perte et l'errance dans la 1ere, le passage à l'action dans la seconde avec l'apparition de Sato (Shimura). Le film bascule alors et s'humanise d'une certaine facon. Superbe sequence d’interrogatoire autour d'une glace et d'un cigarette.
Incroyable sequence ensuite au Cabaret avec ces danseuses écroulées au sol. Entre le nom du cabaret l'Oiseau Bleu, la présence récurrente de filets et la photo des corps érotisés, je ne peut que voir un clin d'oeil à Sternberg.
Changement de style et retour au film noir avec les scènes sur le lieu du crime, sous la douce musique au piano.
Toute la fin est fabuleuse, de la gare de banlieue jusqu'au deux personnages ecroulés dans l'herbe et la boue, jumeaux enfin reunis rejouant le gros plan du chien haletant du generique , regardant les fleurs et le ciel sous la comptine d'un groupe d'enfant. Quelle énergie incroyable. Un sommet de l'oeuvre de Kurosawa.

Comme toujours chez Kurosawa, il y a une attention particulière à la condition féminine. Les portraits des trois personnages feminins, la pickpocket, la vendeuse d'arme, la danceuse, sont tres sensibles et essentiels au film. Ce trypique structure le film, le déroulement de l'action et le discours moral. autant sinon plus que l'intrigue policière. C'est en fait un faux films d'hommes. Ceux-ci sont trop monolytiques, portées par leur convictions ou le role que leur assigne la société. Les femmes sont victimes mais vivantes.

Les "progres" de Kurosawa entre L'ange ivre et Chien enragé sont incroyables. Dans le premier, on le sens encore un peu "contraint", il en fait un peu trop, surligne, ne semble pas encore avoir pleinement confiance dans son talent. Ici plus de questions, tout coule, fluide, libre, génial.

Si le bluray se laisse voir, on rêve tout de meme d'une meilleure copie. Verra t'elle jamais le jour?

[k-chan]

Avant la création de ce topic en 2016 par Strum, j'avais créé en 2006 un topic pour Chien Enragé, et puis je m'étais ravisé en l'élargissant aux films contemporains de Kurosawa.

http://www.dvdclassik.com/forum/viewtop ... t=kurosawa

Strum en était d'ailleurs le premier intervenant, et Chien Enragé était donc par défaut le premier film abordé sur le sujet. Une bonne partie des films de Kurosawa mérite effectivement leur propre fil de discussion, et Chien enragé est un film totalement sublime.

[krolock]

Chien enragé est un film formidable, très curieux, diablement prenant.
La canicule y est bien rendue : il fait chaud et l'on transpire pour mifune.
Sa musique fut très entendue à la radio dans les années cinquante, elle me hante encore.
Ce film est, avec celui de l'américain Allen Baron ( Baby boy Frankie, Blast of silence ), un des plus baroques thrillers que j'aie jamais vu.