A vrai dire, je suis même un peu surpris qu'on en parle pas plus, d'Alice n'est plus ici.
Bien sûr, le père Marty a fait encore mieux. Mais déjà là, c'est quand même très très bon et ça a la particularité de ne ressembler à aucun autre de ses films tout en étant dans le même temps habité par ses névroses (l'impossibilité de s'épanouir, les relations orageuses, l'inadaptation, etc).
On n'a pas l'impression que Scorsese les plaque artificiellement pour se "couvrir" et traiter un sujet de commande qui serait éloigné de son univers (road-movie, Amérique des motels et des bars, portrait de femme, relation mère/fils qui évoque le ton du jeune Spielberg...). Non, quand on voit ce film, on se dit : mais pourquoi n'a-t-il jamais réitéré cette veine féminine ? Parce que pour moi c'est franchement réussi et aussi authentique que lorsqu'il nous parle de rédemption. C'est comme avec un autre film a priori atypique comme After hours : c'est du one-shot frustrant parce qu'on devine que, portrait de femme dans l'un ou humour décapant dans l'autre, ça peut être des facettes à part entière de sa personnalité, bien enfouies sous une tonne d'obsessions dans lesquelles le cinéaste se sent peut-être plus immédiatement dans son élément. Comme l'écrivait Thomas Sotinel au moment de la reprise du film en salles, ce sont de fausses anomalies de parcours qui complètent et éclairent l’œuvre du cinéaste sous un autre jour : la tendresse du trait ne change rien au fait qu'Alice est elle aussi une God's lonely woman. Pas d'auto-destruction ici mais une disposition à se laisser submerger qui la conduit à ne pouvoir s'imposer ni devant son gosse (effronté mais impayable) ni dans sa vie en général. Plein d'allant, d'humanisme et d'humour (la serveuse dépressive ), le film parvient à maintenir le grand écart avec une forme de dureté et de désenchantement qui en font pour moi plus qu'un Scorsese mineur.
Ellen Burstyn comme la mise en scène sont formidables.
D'autres amateurs ?