Liu Chia-liang (1936-2013)

Rubrique consacrée au cinéma et aux films tournés avant 1980.

Modérateurs : cinephage, Karras, Rockatansky

Chrislynch
Doublure lumière
Messages : 705
Inscription : 17 déc. 05, 09:05
Localisation : Inland Empire
Contact :

Liu Chia-liang (1936-2013)

Message par Chrislynch »

Les arts martiaux de Shaolin

Image

Synopsis

Le film raconte l'histoire de deux orphelins dont les parents ont été tués par le même assassin, l'un est envoyé à l'école de shaolin du nord et l'autre à celle du sud. Une fois la date de l'anniversaire du meurtrier arrivée ils essaient de se venger ...

Avis

D’abord le plaisir de voir Jet li dans ses débuts au moment où il endossait son premier grand rôle. Et de constater chez lui un charisme évident et puis de grandes possibilités de variations dans son jeu. La séquence où il se déguise en jeune fille hystérique est absolument grandiose !

Le scénario est assez simpliste, tournant autour d’une histoire de vengeance. L’intérêt n’est pas là, mais sur la forme adoptée de grande légèreté. Le cinéaste associe la comédie à la spiritualité. Et ça fonctionne. Liu Chia Liang joue remarquablement de ses dadas préférés : kung-fu et Bouddhisme. Là-dessus, rien à dire, il n’y a personne pour le dépasser. Egalement une volonté de jouer sur les décors, avec des paysages grandioses, qui rajoutent encore à la qualité de l’entreprise.

Mais on pouvait malgré tout espérer une plus grande profondeur, tout en gardant ce ton de légèreté. Le cinéaste ne passe pas très loin de la montre en or mais il y a comme un goût de trop peu. On regrettera aussi quelques séquences trop étirées qui méritaient une plus grande rigueur de montage.
Avatar de l’utilisateur
nobody smith
Directeur photo
Messages : 5165
Inscription : 13 déc. 07, 19:24
Contact :

Re: Liu Chia-liang

Message par nobody smith »

Le moins que l’on puisse dire c’est que ce topic a été ouvert au moment opportun. Chris évite quand même d’ouvrir des sujets sur John Woo, Tsui Hark ou Yuen Woo-Ping dans un avenir proche, juste au cas où :fiou:

Suite au décès du cinéaste, je me devais bien de lui rendre hommage en piochant dans plusieurs œuvres acquises récemment lors de promos fnac. J’ai commencé cette rétrospective avec deux de ses long-métrages consacrés à Wong Fei-Hung. D’un côté, j’étais un peu craintif à la découverte. Pour une personne de ma génération, Wong Fei-Hung est et restera Jet Li dans les Il Etait Une Fois En Chine. Ce qui est assez ironique puisque d’après ce que j’ai cru comprendre, Hark avait prit un acteur jeune comme Li pour aller à contre-courant des précédentes représentations cinématographiques du personnage. Pas trop de dépaysement toutefois avec Le Combat Des Maîtres, le film se concentrant sur la jeunesse et l’apprentissage de Fei-Hung. Le fait que l’excellent Gordon Liu est une prestance proche de Li a également facilité la transition. Pour le reste, je retrouve ce que j’avais apprécié dans le trilogie Shaolin avec une approche des arts martiaux en tant qu’exploration physique et spirituel. Le film dépeint ainsi tout un lot de personnage finissant par pervertir la pratique de cet art (impolitesse, techniques déloyales ou plus simplement tricherie) avant que Fei-Hung ne vienne apporter l’équilibre dans la force. Ma seule déception tiendrait d’ailleurs à ce que son entraînement ne constitue qu’une part congrue du récit. Celui-ci reste joliment orchestré mais c’est assez décevant, surtout lorsqu’on essaie de faire croire que cet apprentissage succinct à l’écran dura 2 ans. Le film se concentre donc avant tout sur la peinture du milieu et elle est suffisamment intéressante pour ne pas laisser apparaître la déception.

Quelques années plus tard, Liu Chia-Liang retrouve Liu pour une nouvelle aventure de Wong Fei-Hong avec Martial Club. Une fausse suite mais un film se montrant plus abouti que son prédécesseur. Le long-métrage reprend la même optique de montrer un environnement où la pratique des arts martiaux peut tourner à la catastrophe lorsqu’on n’honore pas ses fondements. Fei-Hung se pavanant dans la rue et exhibant son kung-fu fièrement acquit est ainsi une des multiples représentations d’un milieu pouvant facilement se pervertir. La qualité de Martial Club par rapport au Combat Des Maîtres tient ainsi à cette construction en forme d’escalade. L’absence d’éthique conduit d’abord à de petites impolitesses mais elles créent des situations s’envenimant au fur et à mesure jusqu’au point de non-retour. Cela nous vaut ainsi une kyrielle de combats homériques plus incroyables les uns que les autres. Comme précédemment, Fei-Hung apportera la solution par sa compréhension des arts martiaux. Aux précédents combats de groupe gigantesques, le climax oppose un combat discret et subtile dans une étroite ruelle (idée que réutilisera des années plus tard le réalisateur sur Seven Swords) face à un adversaire digne de ce nom. Une conclusion brillante pour ce fort réjouissant spectacle.
"Les contes et les rêves sont les vérités fantômes qui dureront, quand les simples faits, poussière et cendre, seront oubliés" Neil Gaiman
Image
Chrislynch
Doublure lumière
Messages : 705
Inscription : 17 déc. 05, 09:05
Localisation : Inland Empire
Contact :

Re: Liu Chia-liang

Message par Chrislynch »

nobody smith a écrit :Le moins que l’on puisse dire c’est que ce topic a été ouvert au moment opportun. Chris évite quand même d’ouvrir des sujets sur John Woo, Tsui Hark ou Yuen Woo-Ping dans un avenir proche, juste au cas où :fiou:
Ok, je vais faire attention :mrgreen:

Image
pak
Electro
Messages : 990
Inscription : 23 mars 08, 00:25
Localisation : Dans une salle, ou sur mon canapé, à mater un film.
Contact :

Re: Liu Chia-liang

Message par pak »

Ben pourquoi ?

En même temps, il y en a au moins deux qui ont leur topic.

John Woo : http://www.dvdclassik.com/forum/viewtop ... 6#p2039758

Tsui Hark : http://www.dvdclassik.com/forum/viewtop ... 94#p223139
Le cinéma : "Il est probable que cette marotte disparaîtra dans les prochaines années."

Extrait d'un article paru dans The Independent (1910)

http://www.notrecinema.com/
Avatar de l’utilisateur
nobody smith
Directeur photo
Messages : 5165
Inscription : 13 déc. 07, 19:24
Contact :

Re: Liu Chia-liang

Message par nobody smith »

pak a écrit :Ben pourquoi ?
Lorsque quelqu’un ouvre un topic sur un cinéaste et que celui-ci meurt trois jours après, la plupart y voit une coïncidence… moi pas :mrgreen:

Sinon vu Combats De Maître 2. Donc, bien qu’il soit réalisé par Liu Chia-Liang et met encore en scène Wong Fei-Hung, ce film n’a aucun rapport avec Le Combat Des Maîtres évoqué plus haut. D’ailleurs, la mention 2 n’est pas incluse sur le titre de l’édition DVD que je possède (avec sa jaquette au résumé bizarre :lol: ). Il s’agit pourtant bien d’une suite, celle du Maître Chinois de Yuen Woo-Ping avec Jackie Chan en Fei-Hung. Messieurs les traducteurs, je ne vous félicite pas :x

Pour parler du film en lui-même, j’avais encore plus de crainte que pour le duo Le Combat Des Maîtres / Martial Club. Pour la raison exposée ci-dessus, Jackie Chan en Fei-Hung ça ne passe pas chez moi. Logiquement, j’ai quelques difficultés à voir le personnage transformé en fifils à sa maman qui passe pas mal de temps à faire l’idiot. Je ne suis pas trop étonné en ce sens que le torchon ait brûlé entre Chan et Chia-Liang au cours du tournage, le premier finissant par virer le second. Reste qu’abstraction faite du patronyme du héros, c’est franchement sympathique. Le long-métrage demeure limité par une histoire assez succinct. L’intrigue est péniblement rafistolée entre différentes sous-intrigues et idées qui ne semblent pas faire partie du même film. Au-delà de mécanisme de complots et autres quiproquos usés, le spectacle demeure agréable surtout pour les séquences qu’il propose que ce soit en matière de comédie ou de combats. Sur ces derniers, il y a d’ailleurs du lourd entre le combat de l’ivrogne, la baston de l’auberge et le final dans la fonderie qui contiennent chacune leurs lots de chorégraphies ingénieuses. Ça n’est pas très original au final mais tout à fait réjouissant à suivre.
"Les contes et les rêves sont les vérités fantômes qui dureront, quand les simples faits, poussière et cendre, seront oubliés" Neil Gaiman
Image
pak
Electro
Messages : 990
Inscription : 23 mars 08, 00:25
Localisation : Dans une salle, ou sur mon canapé, à mater un film.
Contact :

Re: Liu Chia-liang

Message par pak »

nobody smith a écrit :
pak a écrit :Ben pourquoi ?
Lorsque quelqu’un ouvre un topic sur un cinéaste et que celui-ci meurt trois jours après, la plupart y voit une coïncidence… moi pas :mrgreen:
Hou là là... ça sent la fin de semaine, je n'avais même pas fait le rapprochement... Fatigué moi... :fiou:
Le cinéma : "Il est probable que cette marotte disparaîtra dans les prochaines années."

Extrait d'un article paru dans The Independent (1910)

http://www.notrecinema.com/
pak
Electro
Messages : 990
Inscription : 23 mars 08, 00:25
Localisation : Dans une salle, ou sur mon canapé, à mater un film.
Contact :

Shaolin contre Wu Tong (1983)

Message par pak »

Il me semblait bien que j'avais rédigé une bafouille sur un de ses films :


Shaolin contre Wu Tong (Shao Lin yu Wu Dang / Shaolin Vs Wu Tang) de LIU Chia-Liang (1983) :
Image
Sujet : un prince mandchou piège des maîtres Shaolin et Wu Tang afin qu’ils s’affrontent ensemble. Deux anciens amis doivent alors se combattre, mais préfèrent demander conseil à leurs supérieurs.


On pouvait attendre beaucoup de ce film des frères Liu, l'ainé, Chia-Liang, à la caméra, auteur entre autres de la fameuse trilogie de la 36ème chambre de Shaolin, et le cadet, Gordon, devant la caméra (quoi qu'il semblerait qu'il ait co-réalisé ce film), l'un des meilleurs artistes d'arts martiaux de l'histoire du cinéma de Hong-Kong, admiré par un certain Quentin Tarantino qui lui rendra hommage en lui confiant le rôle du chef masqué des 88 tueurs dans Kill Bill 1 et celui du sage Pai Mei dans Kill Bill 2.

Hélas, dès les premières images, la déception s'installe et s'incrustera jusqu'au générique de fin... Le début du film est un mélange d'humour pataud et de bagarres tragi-comiques. Puis le ton monte rapidement et les morts violentes se succèdent, mais toujours dans un mixage d'ultra violence (on tue par exemple un adversaire en lui arrachant l'entre-jambe en plein vol, si, si... rien que ça) et d'humour de cour de primaire. Un cocktail improbable qui malheureusement enlève toute crédibilité au récit et désamorce la moindre tentative d'émotion. D'autant que l'humour est vraiment de bas étage et ne fait pas du tout rire.

Un film de kung fu se doit d'avoir des scènes de combat carrées, ou du moins correctement chorégraphiées. Là encore, le nom des auteurs devait garantir un spectacle à la hauteur. Et pourtant non, le résultat étant assez moyen. En fait elles oscillent entre l'application laborieuse et, plus rare, le spectaculaire, comme si elles avaient été chorégraphiées par deux personnes différentes, ce qui tendrait à confirmer que les deux frères sont co-auteurs du film. Les dialogues empirent les choses, car eux par contre, ils font rire, mais bien involontairement...

La réalisation aurait pu en partie rattraper l'ensemble, mais le réalisateur use et abuse de zooms rapides, comme dans certains mauvais westerns spaghettis des années 1970. L'auteur peine en plus à cacher le tournage studio, qui fait souvent le charme de ces films, notamment ceux de la Shaw Brothers, mais qui ici achève plutôt de donner à l'ensemble un côté bâclé, artificiel et à l'économie.

Reste le scénario ? Celui-ci, très basique pourtant, est desservi par un montage abrupt, le récit devenant rapidement confus et les enjeux obscurs, l'histoire finissant par être une succession de petites vengeances au nom d'un idéal pas bien clair, où l'on comprend vaguement que des shaolins s'opposent à un seigneur dont ils ne reconnaissent pas l'autorité (l'histoire se déroule sous l'ère Jin, dynastie mandchoue qui a envahi le nord de la Chine, sur laquelle elle va régner de 1115 à 1234, année de l'invasion mongole menée par Gengis Kahn), shaolins qui s'attaquent à leurs semblables qui ont choisi la voie de la collaboration. On se demande bien pourquoi puisque pas un instant on ne perçoit la moindre trace de despotisme ou de persécution d'un peuple oppressé qui expliquerait ces révoltes et autres combines. On a plutôt l'impression que tout ce petit monde se massacre pour le plaisir de s'affronter ou pour assouvir leurs soifs de vengeances du genre « je venge mon frère en tuant ton frère que son fils vengera, etc... ».

Pur produit consommable d'une époque où le genre était encore un peu à la mode, mais sans guère d'ambition artistique ou narrative...

Bref, pas fan...

Étoiles : *

Le dvd : Image
Le cinéma : "Il est probable que cette marotte disparaîtra dans les prochaines années."

Extrait d'un article paru dans The Independent (1910)

http://www.notrecinema.com/
Chrislynch
Doublure lumière
Messages : 705
Inscription : 17 déc. 05, 09:05
Localisation : Inland Empire
Contact :

Re: Liu Chia-liang

Message par Chrislynch »

nobody smith a écrit :
pak a écrit :Ben pourquoi ?
Lorsque quelqu’un ouvre un topic sur un cinéaste et que celui-ci meurt trois jours après, la plupart y voit une coïncidence… moi pas :mrgreen:
Perso, j'appelle ça de la synchronicité :mrgreen:

Image
Strum
n'est pas Flaubert
Messages : 8464
Inscription : 19 nov. 05, 15:35
Contact :

Re: Liu Chia-liang

Message par Strum »

Les 8 diagrammes de Wu-Lang est pour moi son meilleur film. Le plus poignant en tout cas.
Avatar de l’utilisateur
nobody smith
Directeur photo
Messages : 5165
Inscription : 13 déc. 07, 19:24
Contact :

Re: Liu Chia-liang

Message par nobody smith »

Fallait bien que ça arrive : première déception dans mon exploration de la filmo de Liu Chia-Liang avec Mad Monkey Kung Fu. En même temps, je le sentais un peu mal dès le départ. Le film approche en effet des deux heures pour une histoire qui n’en demandait probablement pas tant. Le récit verse dans un schéma fort classique. L’honneur est bafoué et un maître d’arts martiaux est réduit à l’état de mendiant. Mais grâce à l’aide d’un disciple qu’il a formé, il obtiendra vengeance. Ça ne cherche pas bien loin donc et la longueur s’explique par certaines séquences étirées à l’extrême (c’est le cas par exemple de la démonstration conduisant à la machination du premier acte). Du coup, le résultat est assez épuisant et pas très intéressant à suivre. Le talent du réalisateur reste heureusement présent entre une mise en scène sachant géré l’espace et bien sûr le travail sur les chorégraphies. En ce sens, le seul aspect retenant l’attention reste les déploiements de la boxe du singe et ses techniques pour les moins particulières. C’est quand même trop léger à mon goût.

Je trouve nettement plus mon compte avec Les Arts Martiaux De Shaolin. Pourtant, je rejoins assez Chris sur l’aspect pas totalement abouti de la chose et son côté quelque peu standardisé. Là encore, c’est un schéma assez classique qui se met en place. Après avoir dépeint le quotidien d’un monastère, on a droit un film d’aventure où des membres de l’école du nord et du sud doivent s’unir contre un tyran au rire satanique. Toutefois, par rapport à Mad Monkey Kung Fu, ce long-métrage s’en sort bien mieux. Il évite déjà de jouer sur une durée excessive, ce qui lui donne un meilleur rythme. Quant aux touches de bouddhisme si elles restent effectivement succinct et peu poussé, elles arrivent à faire mouche (la scène de la caverne). L’autre bon point, c’est que là où Mad Monkey Kung Fu était tourné à l’intérieur des studios, Les Arts Martiaux De Shaolin opte pour des extérieurs. Cela permet ainsi à la réalisation d’être plus aérée et surtout plus grandiose avec de sublimes paysages et décors. Cela donne un peu plus d’ampleur aux combats toujours si brillamment réglés. Pas exceptionnel en somme mais suffisamment sympathique pour me redonner espoir dans la suite de ma rétro.
"Les contes et les rêves sont les vérités fantômes qui dureront, quand les simples faits, poussière et cendre, seront oubliés" Neil Gaiman
Image
Avatar de l’utilisateur
hellrick
David O. Selznick
Messages : 13823
Inscription : 14 mai 08, 16:24
Liste DVD
Localisation : Sweet Transylvania, Galaxie Transexuelle
Contact :

Re: Liu Chia-liang

Message par hellrick »

J'ai vu presque toute sa filmo et je pense aimer presque tous ses films excepté le piteux Mad Mission 5 (mais c'est une série qui a très mal vieilli selon moi, j'adorais ado aujourd'hui je trouve ça pénible). Mes favoris sont Shaolin contre Ninja, la trilogie de la 36ème chambre (j'adore le 1 qui est dans mon top 100 et sans doute le plus grand film martial de tous les temps amha), la mante religieuse, les arts martiaux de Shaolin, Le combat des maitres, etc. J'aime aussi Drunken Master 2 (pas vu le peu réputé troisième tourné pour se venger d'avoir été viré par Jackie Chan), Mad Monkey Kung Fu, 8 diagrams pole fighter, les exécuteurs de shaolin, Martial Club...
Un peu moins Spiritual Boxer et les 18 armes légendaires du kung fu mais ça reste sympa.
Le seul que je n'aime pas du tout c'est Cat Vs Rat qui m'avait semblé une kung fu comedy complètement ratée.

Avec Chu Yuan c'est sans doute le meilleur et le plus constant des cinéastes martiaux de la Shaw :wink:
Critiques ciné bis http://bis.cinemaland.net et asiatiques http://asia.cinemaland.net

Image
Avatar de l’utilisateur
nobody smith
Directeur photo
Messages : 5165
Inscription : 13 déc. 07, 19:24
Contact :

Re: Liu Chia-liang

Message par nobody smith »

Vu les quelques difficultés que j’ai eu pour aller au bout des deux films suivants de ma rétro, je crois que je commence un peu à saturer. Dommage puisque l'ensemble reste d’un bon niveau. Je ne m’étais ainsi pas de grand espoir dans le visionnage de La Mante Religieuse. J’imaginais quelque chose dans la lignée de Mad Monkey Kung Fu où la technique martiale héritée du règne animale constituait le seul argument de la production. Ça n’est donc pas le cas, les combats inspirés de l’insecte ne faisant leur apparition que dans le dernier quart d’heure. Auparavant, le long-métrage se construira une histoire pour le moins attrayante où le personnage principal doit infiltrer un clan familiale fomentant une rébellion. Mensonge et faux semblant se multiplient entre les deux camps avec un certain soin d’écriture et un goût de la tragédie qui sera scellée par la révélation finale. Pour autant, l’intrigue manque un peu de rythme et patine passé le premier tiers. L’intérêt reprend avec l’épreuve des cinq ancêtres où le héros et sa compagne doivent affronter chaque membre de la famille pour quitter la demeure. On retrouve là toute la compréhension de Liu Chia-Liang sur les combats martiaux, les affrontements se jouant à la fois à un niveau physique et émotionnel.

Enchaîné avec Les 18 Armes Légendaires du Kung-Fu. Le film fait très bonne impression dès ses prémisses. La photographie est plus travaillée que d’ordinaire et Chia-Liang compose des plans iconographiques en diable. Il faut bien ça pour faire passer le caractère hautement fantaisiste de nombreuses idées. La séquence la plus étonnante du film restera probablement celle où un adversaire manipule à distance un combattant grâce à une sorte de poupée vaudou (idée assez similaire au climax du Stardust de Matthew Vaughn). L’histoire sinon ? Un maître des arts martiaux a disparu et plein de types lui courent après pour lui faire la peau. Très chiche mais la qualité de la réalisation et des combats fait son office (l'affrontement final où on passe en revu les 18 armes du titre), même si les qualités visuelles du début du film ont tendance à s’estomper sur la durée.
"Les contes et les rêves sont les vérités fantômes qui dureront, quand les simples faits, poussière et cendre, seront oubliés" Neil Gaiman
Image
Avatar de l’utilisateur
nobody smith
Directeur photo
Messages : 5165
Inscription : 13 déc. 07, 19:24
Contact :

Re: Liu Chia-liang

Message par nobody smith »

Fin de ma rétro sur Liu Chia-Liang avec le retour d’œuvres de haute qualité. Tout d’abord Le Prince Et L’Arnaqueur qui se positionne facilement parmi les meilleurs films que j’ai vu du réalisateur avec La 36ème Chambre De Shaolin et Martial Club. L’histoire est celle d’un prince anonymement en escapade afin de rechercher quelques antiquités et savourer des vins locaux. Il prend sous son aile un voleur auquel il cache son statut et sa connaissance des arts martiaux. Il faut être franc : l’histoire du complot visant à tuer le prince pour l’empêcher d’accéder au trône n’est pas trop creusée. C’est plus à prétexte aux rebondissements qu'autre chose. L’intérêt du long-métrage se situe intégralement sur la relation hautement jubilatoire entre les deux personnages titres. La dynamique comique fonctionne à plein régime et les quiproquos donnent naissance à quelques combats d’anthologie. Celles-ci prennent à contrepied le principe de l’affrontement titanesque et joue sur un côté intimiste complètement sidérant. En effet, le prince se bat en dissimulant constamment ses capacités. Cela donne des passages ahurissants comme lorsqu’il manipule une joueuse de sitar pour faire croire qu’elle est son garde du corps ou une dégustation de vin où la discussion tout en politesse se déroule en échangeant de subtils mouvements d’arts martiaux. Il est un peu regrettable que le dernier acte revienne à une formule d’élève et de disciple plus traditionnelle. Cela n’empêche pas le film d’offrir toujours des moments brillants comme l’embuscade dans une vallée venteuse. Que du bonheur en somme !

Un petit grand en dessous se trouve Lady Kung Fu. Là encore, il y a le même principe d’une mécanique comique brillamment orchestré sur les 2/3 avant que le dernier acte devienne plus plan-plan. C’est le côté un peu longuet de celui-ci qui me fait considérer le film un poil inférieur au Prince Et L’Arnaqueur. C’est assez regrettable puisque tout le film qui précède est euphorique au possible. Pour préserver un héritage, une demoiselle se marie à un homme mourant et doit apporter des titres de propriétés à son neveu. Toute la mécanique humoristique entourant le fait que cette doyenne est plus ou aussi jeune que les descendants est exploité avec énergie et ingéniosité. Le film ne cesse d’alimenter ce moteur par des situations jouant sur le protocole, les classes sociales, l’opposition ville/campagne et l’occidentalisation de la génération émergente. C’est tout à fait hilarant et les combats sont également enthousiasmant (le bal masqué, le fight en robe et talons aiguilles). Si le final était un peu plus convaincant, ça aurait été vraiment parfait. En l’état, ça demeure une belle conclusion à cette rétro.
"Les contes et les rêves sont les vérités fantômes qui dureront, quand les simples faits, poussière et cendre, seront oubliés" Neil Gaiman
Image
pak
Electro
Messages : 990
Inscription : 23 mars 08, 00:25
Localisation : Dans une salle, ou sur mon canapé, à mater un film.
Contact :

Re: Liu Chia-liang

Message par pak »

Très sympa ce Lady Kung Fu, j'ai beaucoup aimé dans ce qu'il disait (et semblait ne pas dire). En tous cas suffisamment positivement surpris pour que j'y aille de ma petite prose...


Lady Kung Fu (Cheung booi / My Young Auntie) de LIU Chia-Liang (1980) :
Image Image
Sujet : pour éviter que sa fortune ne tombe entre es mains de son mauvais neveu Yung-sheng, le patriarche de la famille Yu épouse sa jeune employée Tai-nan, peu avant sa mort. Cette dernière décide ensuite de transmettre le testament de feu-son mari à Ching-Chuen, le bon neveu de la famille beaucoup plus âgé que la veuve de son oncle. Ching-Chuen doit néanmoins montrer un respect irréprochable envers sa "jeune tante", qu'il compte protéger. Mais dès son arrivée en ville, la jeune femme lui dévoile un talent exceptionnel pour les arts martiaux...


Un film de kung fu au postulat de départ assez rigolo. Un vieillard va mourir et épouse une jeune femme pour qu'elle hérite à la place du frère cadet et cupide du mourant qui n'a pas de descendance, le frère ainé qui aurait dû selon la tradition hériter étant décédé. La jeune héritière par alliance étant chargée de transmettre cet héritage au fils de ce dernier (donc le neveu du mourant), qui a déjà un certain âge. Ce neveu se retrouve donc avec une tante bien plus jeune que lui, à qui il doit respect et obéissance. Un méli-mélo familial typiquement asiatique où famille, tradition et préservation du patrimoine sont des obligations ancestrales.

En fait le film est bien plus une comédie qu'un film de baston, même si celle-ci est bien présente. Les conflits, qu'ils soient générationnels ou sociaux, sont surtout sources de gags et de bonne humeur, dont le summum est une incroyable scène de bal masqué délirante, l'un des moments forts du film, assez surprenant.

Surprenante aussi est l'esthétique du film qui semble situer son récit dans une Chine ancienne, tant les costumes et les décors rappellent le XIXème, voire le XVIIIème siècle, du moins pour un occidental, avant qu'on se rende compte au cours du film, que l'histoire est en fait contemporaine, ou pas loin, à sa réalisation. Un moyen pour le réalisateur d'opposer la tradition et une aspiration d'une jeunesse à une certaine modernité, notamment à travers le personnage du fils du neveu (interprété par un Hsiao Ho monté sur piles) qui revient de ses études à Hong Kong, encore sous protectorat britannique et fortement occidentalisé.

En fait, l'air de rien, le réalisateur Chia-Liang Liu aborde, sous l'aspect du rire, des problématiques modernes comme la place de la femme dans la société chinoise (et par extension sa place dans le cinéma made in Hong Kong, récurrence chez lui où les personnages féminins sont rarement des potiches ou des victimes, mais régulièrement au centre du récit : Lady is the boss, La mante religieuse, Martial club... ), le poids de la tradition qui peut conduire à des injustices, le degré d'ouverture de la Chine à l'extérieur (que le réalisateur ne voit pas spécialement d'un bon œil, il sera plus virulent à ce sujet par ailleurs)...
Le plus surprenant, donc, c'est le discours sous-jacent du scénario qui, respectant apparemment les us et coutumes, remet en cause l'autorité familiale et celle des traditions, ce qui est relativement assez rare dans le cinéma chinois, même de Hong Kong. Évidemment, les choses rentreront subtilement dans l'ordre avec l'alliance finale des principaux protagonistes, jeune, vieux, homme, femme, pour combattre les bad guys, instaurant ainsi sans l'asséner une morale plus traditionaliste que le cœur du récit, où les liens de la famille doivent être resserrés pour préserver son unité, quelles que soient les aspirations de chacun.

On reste toutefois assez agréablement surpris par le propos quasi féministe et inhabituel dans ce genre de film qui fait de sa jeune héroïne (campée par la délicieuse Kara Hui) la chef d'une famille traditionaliste, recevant ce nouveau pouvoir qu'elle va utiliser elle qui avait appris à obéir, découvrant en même temps son ascendant sexuel sur les hommes notamment via une scène de voyeurisme durant laquelle l'héroïne s'habille sans se rendre compte de suite qu'elle est observée par son petit neveu (qui a en fait le même âge qu'elle). Et il faut la voir avec sa robe échancrée sur toute la longueur de la jambe rosser des vilains qui ne savent plus où poser leurs yeux. Presqu'un film de kung fu sur l'émancipation de la femme, anticipant les flingueuses des films d'action hongkongais qui fleuriront à partir des années 1980, avec des films comme Le sens du devoir.

J'ai parlé de Kara Hui, qui a justement reçu un Hong Kong Film Award (l'équivalent des César local) pour son interprétation, mais Hsiao Ho avec son sabir qui injecte de l'anglais dans son cantonais et dans la plupart de ses répliques est vraiment marrant et ses bouffonneries, athlétiques en plus, ne sont pas sans rappeler un Jackie Chan dans sa meilleure forme.

Il n'y aura aucun mort dans ce film, ni gerbes de sang, ce qui change des excès vus plus que quelques fois dans des films de kung fu.

Alors bien-sûr, ça ne vole pas toujours très haut, et on a le droit d'estimer que la fin traine en longueur dans un combat interminable, mais c'est frais et dynamique, jamais négatif.

Exceptée sa durée excessive (près de 2 heures), on passe un très bon moment à regarder cette comédie pas si innocente.

Étoiles : * * *

Le dvd : Image
Le cinéma : "Il est probable que cette marotte disparaîtra dans les prochaines années."

Extrait d'un article paru dans The Independent (1910)

http://www.notrecinema.com/
Chrislynch
Doublure lumière
Messages : 705
Inscription : 17 déc. 05, 09:05
Localisation : Inland Empire
Contact :

Re: Liu Chia-liang

Message par Chrislynch »

Image

Initiation au kung-fu, rapport du maître à l’élève, « Le combat des maîtres » se veut surtout didactique. L’intérêt par rapport au célébrissime personnage de Huang Fei Hong se situe dans le fait qu’on le montre à ses débuts, immature, faible. Un peu comme si l’on faisait un film avec Yoda enfant. On démontre par là que la sagesse et la force peuvent s’obtenir à force de travail et que chacun en est capable. C’est bon pour le moral du spectateur. « Le combat des maîtres » se veut donc plus un film de sagesse que de violence et le Kung-fu comme instrument de construction morale de l’individu. Un film à montrer dans les cours d’arts martiaux pour jeunes. D’un point de vue cinéphile, faut bien admettre que le récit est plutôt simpliste. Faut vraiment aimer la pensée orientale et le kung-fu pour entrer dedans.


Image
Répondre