Les films noirs à petits budgets et/ou de cinéastes méconnus

Rubrique consacrée au cinéma et aux films tournés avant 1980.

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kiemavel
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Re: To the Ends of the Earth

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Opium - To the Ends of the Earth (1948)
Réalisation : Robert Stevenson / Production : Sidney Buchman (Columbia) / Scénario : Sidney Buchman et Jay Richard Kennedy / Photographie : Burnett Guffey / Musique : George Duning

Avec : Dick Powell Michael Barrows), Signe Hasso (Ann Grant), Maylia (Shu Pan Wu), Ludwig Donath (Sokim), Vladimir Sokoloff (le commissaire Lum Chi Chow), Edgar Barrier (Grieg), John Hoyt (George Shannon)

Alors qu'il s'apprête à partir en vacances, Mike Barrows, un commissaire du bureau des narcotiques américains est appelé en urgence car au large de San Francisco, un bateau suspecté de se livrer au trafic de drogues entre la Chine et les USA a été repéré. À bord d'un bateau des gardes côtes, il tente d'intercepter le navire mais celui ci se débarrasse de sa cargaison, y compris les 100 esclaves chinois employés par les trafiquants qui sont jetés à la mer encore enchainés par le capitaine japonais du Kira Maru avant que le navire ne gagne les eaux internationales. Le Kira Maru étant enregistré à Shanghai, Barrows y est envoyé pour tenter de remonter la filière. Il travaille en collaboration avec un policier chinois et sous une fausse identité enquête dans le milieu des expatriés occidentaux de Shanghai, surveillant notamment les agissements d'Ann Grant, une américaine étrange accompagnée d'une jeune réfugiée chinoise dont elle est la tutrice. Plusieurs suspects disparaissent mais Barrows parvient tout de même à découvrir d'où viendrait la pâte d'opium partiellement raffinée à Shanghai. Il s'envole pour l'Égypte…
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Ce film policier à la gloire du Bureau Fédéral des Narcotiques, en tant que film enquête sur les réseaux d'importation de drogue aux USA peut être vu comme un ancêtre de French Connection. C'est probablement le film du genre au cours duquel on voyage le plus car Barrows va effectivement traquer les trafiquants de drogue : Jusqu'aux extrémités de la terre, comme l'annonce le titre américain. Partant de San Francisco, les pérégrinations du flic globe trotteur vont l'entrainer d'abord à Shanghai puis ce sera l'Égypte : Le Caire puis le Sinaï, Beyrouth, La havane et enfin New-York puisqu'il va progressivement remonter un réseau jusqu'aux plantations de pavot et à l'autre bout, traquer les passeurs dans leurs tentatives de faire rentrer la drogue aux USA. Dans cette guerre contre la drogue, la 2ème guerre mondiale et ses séquelles sont encore très présentes. Bien que tourné juste après la guerre, le film relate des évènements qui s'étaient produit au milieu des années 30, à une époque ou le Japon venait d'envahir la Chine et on y apprenait que si les japonais étaient les instigateurs du trafic d'opium vers les USA, c'était au fond pour des raisons politiques, leur intention étant d'affaiblir le pays et de le rendre plus vulnérable en cas de conflit contre le Japon. Cette accusation se retrouve jusque dans un final dans lequel certains voient -parait-il- de l'ironie. J'y vois pour ma part surtout de vieux relents de racisme (excusable dans le contexte de l'époque en raison des exactions japonaises). D'autre part, si ce final est cinématographiquement irréprochable, il est aussi assez fantaisiste et même carrément invraisemblable…et donc pour voir le bon coté des choses, impensable (moins maintenant)
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Le film s'était ouvert pourtant sur un bandeau promettant l'authenticité des faits racontés et nous informant qu'il avait reçu l'approbation du Bureau Fédéral des Narcotiques (et pour être autorisé à montrer ce qu'il montre, il du aussi obtenir un assouplissement exceptionnel du code de production). Puis, on suit brièvement les travaux d'une conférence internationale sur le commerce des stupéfiants accueillie par les Nations-Unis, des séquences au cours desquelles on voit le vrai Harry J. Anslinger, surnommé le "McCarty de la drogue" qui fut à la tête du BFN pendant plus de 30 ans. Tout ceci laissait augurer un film sérieux, traitant dans un style semi-documentaire cette enquête ayant pour ambition de montrer l'ampleur du trafic de drogue à destination des USA et la complexité des réseaux internationaux y participant. Il ne tient qu'en partie cette promesse car même si l'enquête est traité sérieusement, la fantaisie perce parfois. Je la vois surtout dans la fausseté -sans doute involontaire mais dont on peut s'amuser- des lieux et des personnages exotiques ; dans le traitement de ces personnages (ou en raison des comédiens qui les incarnent) ou bien dans ce qui est montré des méthodes policières.
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A son arrivée en Chine, Barrows utilise une bonne couverture (il se fait passer pour un importateur de tapis orientaux). La personnalité de ses homologues étrangers, notamment le commissaire Lum Chi Chow de Shanghai (interprété par Vladimir Sokoloff :D ) tout comme sa couverture (il est gérant d'un magasin de souvenirs) sont aussi traités avec légèreté et on croise un grand nombre de curieux personnages ; chez les policiers, pour certains assez couleurs locales d'ailleurs plus par l'allure que dans la réalité puisque aucun comédien n'était de la nationalité du personnage qu'il incarnait ; mais c'est le cas aussi chez les suspects, la plupart étant des expatriés occidentaux : George C. Shannon, un guide touristique (John Hoyt) ; Nicholas Sokim, le propriétaire d'une société de pousse-pousse (Ludwig Donath) et plus tard Naftalie Vrandstadter (Ivan Triesault)…Mais celle que va être amené à soupçonner et surveiller prioritairement Barrows, c'est Ann Grant, une mystérieuse américaine qu'il croise d'abord à Shanghai et qu'on va retrouver à diverses reprises au cours du récit toujours accompagné de Shu Pan, une jeune réfugiée chinoise dont elle est la gouvernante. Entre séduction et méfiance, la relation entre les deux personnages est très intéressante , la présence de la jeune Shu Pan (Maylia) étant l'atout "charme exotique". Ann Grant devient même le suspect numéro un quand Barrows découvre qu'elle est la veuve d'un ingénieur qui avait conçu et construit le système d'irrigation des champs de pavot dissimulés dans le désert égyptien puis quand il la retrouve, comme par hasard, à Cuba lorsque la piste l'y amènera.
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Je passe sur les nombreuses péripéties qui se déroulent sur 3 continents : les boulettes d'opium dissimulées dans l'estomac des….(censuré) ; les témoins empoisonnés, etc…et les plus classiques méthodes policières habituelles. C'était un gros budget (2 millions de $) ; cela se voit à l'écran mais au final tout ceci fait un assez bon film policier mais selon moi pas un grand. Je dois néanmoins préciser que des critiques sérieux, Leonard Maltin en tête, y ont vu un film captivant là ou je l'ai seulement vu distrayant…et encore, pas toujours, car ce film est aussi extrêmement bavard. On discute beaucoup entre policiers, surement en raison de leurs cultures différentes mais je ne veux pas le savoir :wink: …En revanche, Dick Powell est comme d'habitude impeccable et la photographie signée Burnett Gufey est superbe. Ce film est tout de même celui que je préfère des films criminels de Robert Stevenson qui est plus connu pour ses films réalisés pour Disney après 1956. Avant cela, il avait réalisé des films criminels. Les honnêtes Dishonored Lady (1947) et L'étranger dans la cité (Walk Softly, Stranger), 1950. L'ennuyeux : Scandale à Las Vegas (The Las Vegas Story), 1952 ; et l'abominable The Woman on Pier 13/I Married a Communist que Losey, Ray et Cromwell refusèrent mais que Stevenson fut contraint d'accepter sous les pressions de Howard Hugues.

A suivre : les Dan Duryea restés en rade ou un petit Dick Powell.
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Re: Les films noirs à petits budgets et/ou de cinéastes méco

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Chip a écrit :Je vois que Tuesday Weld, n'est pas si méconnue que ça. C'est vrai, elle est diabolique dans PRETTY POISON, diamant noir où Anthony Perkins est presque aussi mémorable que chez Hitchcock. Weld était tout aussi géniale dans le très bizarre LORD LOVE A DUCK (1966) où elle jouait la fille de Lola Albright, les deux actrices eurent un prix d'interprétation au festival de Berlin. Tuesday débuta à l'âge de quatorze ans dans " la brune brûlante" (1958) de Leo Mac Carey film , avant ça, deux minuscules participations pour " Rock, rock, rock ! "(1956) et "the wrong man" (1956), pour le petit écran, elle sera au générique de "the many loves of Dobie Gillis" (Dobie Gillis) (1959-1963). Steve Mc Queen qui l'appréciait beaucoup l'imposa pour " the Cincinnati kid" et le mélancolique " soldier in the rain", mais ne put l'avoir pour " the Thomas Crown affair", on lui préféra Faye Dunaway. Weld fut aussi la partenaire d' Orson Welles et Jack Nicholson dans " a safe place "(1971), film assez difficile à voir aujourd'hui.
J'en compte 6 à voir dans cette liste :oops: mais finalement ce serait plutôt :D Bonne nouvelle, quoi, d'avoir tout ceci à voir.
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Re: Les films noirs à petits budgets et/ou de cinéastes méco

Message par Chip »

Je viens de revoir " Les pervertis"( Pretty poison), cette actrice (Tuesday Weld) donne l'impression de ne pas jouer, mais d'être le personnage, c'est terrifiant, la scène du meurtre de Beverly Garland( très bien aussi) est glaçante, impressionnante aussi la façon dont elle prend petit à petit l'ascendant sur Perkins. Etrange que ce film ne soit pas plus connu, il le mériterait.
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Re: Rogue's Regiment

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Légion étrangère - Rogue's Regiment (1948)
Réalisation : Robert Florey / Production : Robert Buckner (Universal) / Scénario : Robert Buckner d'après une histoire co-écrite avec R. Florey / Photographie : Maury Gertsman / Musique : Daniele Amfitheatrof

Avec : Dick Powell (Whit Corbett), Märta Toren (Lili Maubert), Vincent Price (Mark Van Ratten), Stephen McNally (Carl Reicher), Edgar Barrier (Le colonel Mauclaire), Henry Rowland (Erich Heindorf)

À la fin de la seconde guerre mondiale, Whit Corbett, un agent des services de renseignement américain est envoyé en Indochine pour tenter de retrouver un criminel de guerre nazi dont il n'existe aucun portrait. L'homme est suspecté de s'être engagé dans la Légion étrangère ou de désirer le faire profitant des besoins de l'armée française qui doit faire face à une montée de l'insurrection indochinoise...
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Malgré ce que l'affiche pourrait laisser supposer, je considère que ce film est surtout un film noir. On y voit certes plus qu'en arrière plan les prémisses du conflit qui conduira au départ d'Indochine des français puisque pour les besoins de son enquête, l'agent américain interprété par Dick Powell va finir par s'engager dans un régiment de la légion étrangère pour tenter de débusquer les anciens nazis qui s'y seraient engagé pour se refaire une virginité, dans un contexte ou pour faire face à la montée du climat insurrectionnel contre l'occupant français, la légion étrangère a recruté de nombreux vétérans de la seconde guerre mondiale. Corbett est même engagé dans des opérations militaires mais on ne voit véritablement qu'une séquence correspondant à cette affiche et au minimum pour ses deux tiers, ce film, par son intrigue, pour son atmosphère, ses personnages et les lieux qu'ils traversent, est essentiellement un film noir mais dans un sous-genre que l'on a vu à plusieurs reprises après guerre : la traque au criminel de guerre nazi. Les plus marquants étant : Pris au piège (Cornered), 1945, également avec Dick Powell ; Le criminel (The Stranger), 1946 et bien sûr, hors film noir : Les enchainés (Notorious), également de 1946.
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Le film commence par une image choc. Le 30 avril 1945 à Berlin, des dignitaires du régime nazi (parmi lesquelles nous voyons un officier moustachu interprété par Stephen McNally) mettent le feu à deux corps gisant au sol au milieu de la boue et de la neige. Il s'agit bien évidemment d'Adolf Hitler et Eva Braun. Florey enchaine avec des images d'actualité qui nous montrent brièvement les audiences du procès de Nuremberg sur une voix-off décrivant le procès, les verdicts et les peines prononcées contre les dignitaires du régime. Tout ceci pour nous éveiller au problème de ces grands criminels de guerre disparus après la guerre et qui ont pu ainsi échapper aux poursuites. Les services de renseignement alliés s'intéressent plus particulièrement au cas d'un officier SS de haut rang, ancien responsable du camp de Dachau, Martin Brunner. On peut penser que les deux scénaristes -qui étaient aussi le producteur et le réalisateur du film- ont du penser au cas d'Alois Brunner ou à Martin Bormann, ce dernier ayant disparu à Berlin dans les derniers jours du conflit, tout comme le criminel du film.
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Dès la première séquence en indochine, Robert Florey ne perd pas de temps, certains pourraient dire qu'il va même trop vite ou bien que les coïncidences sont énormes mais ce parti pris à le mérite de nous présenter immédiatement la plupart des principaux protagonistes et de nous montrer le contexte politique sans bavardage ni tergiversation. Dans le train à destination de Saïgon dans lequel a pris place Corbett, après un 1er travelling latéral montrant d'abord un compartiment occupé par quelques indochinois et des religieuses, puis un second qui l'est uniquement par des militaires français, la caméra s'arrête au niveau du 3ème occupé par 4 européens. L'un d'eux, un général français semble poursuivre une conversation avec l'homme qui lui fait face. Il évoque la situation politique du pays, s'inquiète de la montée de la volonté d'indépendance des indochinois puis se lève pour aller fumer. Quelques minutes plus tard, Corbett retrouve son corps dans le recoin d'un couloir, comprenant au passage, aux regards des autochtones qui l'observent du coin de l'oeil, qu'ils ont vu ce qui s'est produit et n'ont pas réagit. En quelques plans sur les compartiments, Florey a saisit la division sociale du pays (la plupart des indochinois sont assis par terre dans les couloirs). Les propos du général avaient exposé brièvement la situation politique du moment...et son assassinat nous indique que l'on en est pour l'heure aux attentats ciblés, aux actions individuelles (c'est une jeune femme seule qui tue le général). Plus tard, lorsque Corbett poursuivra son travail d'infiltration en s'engageant à son tour dans la légion, cela permettra à Florey de nous montrer l'étape suivante : les petits groupes de combattants Viêt-minh utilisant des tactiques de guérilla et d'embuscade et leurs premiers camps dans la jungle mais comme je l'ai dit d'emblée, une seule séquence nous montre véritablement les combats car le début de la guerre d'indépendance n'est jamais qu'un contexte, le combat qui intéresse vraiment Florey, c'est Corbett v/s les nazis.
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Et il le prouve car, encore une fois, le réalisateur va très vite en nous montrant d'emblée la plupart des personnages importants que l'on suivra jusqu'au bout du récit. Ils se trouvent presque tous dans le même compartiment ! Dès que le général en sort, Florey prend du recul et nous montre les échanges entre Corbett et deux expatriés. L'interlocuteur du général s'appelle Mark Van Ratten (Vincent Price). C'est un antiquaire hollandais qui a une boutique à Saïgon. Je livre une information qui pourrait rester confidentielle, d'ou le spoiler
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Le curieux accent de Vincent Price est plutôt germanique et on peut penser que le prétendu hollandais n'a jamais vu la pays des tulipes et des moulins. Sa sympathie pour les nazis ne l'empêche pourtant pas de trafiquer avec les insurgés communistes. Aucune moralité ses fachos ! Et il ne s'arrêtera pas là…car il trahie à peu près tout le monde. Une fripouille.
Le second s'appelle Carl Reicher (Stephen McNally) et il se présente comme un ancien soldat de la Wehrmacht. En réalité, si Corbett ne sait pas à quoi ressemble le criminel de guerre qu'il recherche, nous qui l'avons vu dans la séquence d'ouverture à Berlin, reconnaissons immédiatement en Reicher…Martin Brunner ! Une bonne chose de faite ! Bah, c'est un vieux procédé : nous montrer le coupable ou donner au public une information capitale qui reste inconnus, dans le cas présent, d'un enquêteur mais parfois des scénaristes y ont mis les formes. Ici, c'est posé assez brutalement.

Puisque Corbett a sans le savoir son coupable sous la main, on va essayer de nous intéresser au comment…Et Florey y parvient car les batons dans les roues de Corbett sont assez nombreux. L'ancien nazi a des amis, notamment Erich Heindorf, son ancien supérieur chez les SS mais l'amitié chez ces gens là, c'est très aléatoire. Les relations entre Reicher/Brunner et Van Ratten sont assez complexes et je préfère laisser cet aspect là dans le noir complet. Le passage avec les Viet-Minh, infiltrés à Saïgon ou que le régiment de Corbett va affronter, amène quelques péripéties bienvenues : captivité, torture (c'est quand même pas du niveau de : Mâo ! Te dégonfles pas Nicky ! ) et évasion (sans compter un meurtre qui ne doit rien aux vietnamiens). La mise en scène de Robert Florey est plutôt à la hauteur (même si là encore il ne faut pas être obsédé par la vraisemblance).

Corbett a aussi des alliés. En dehors de l'administration et des militaires français -aussi incompétents hier qu'aujourd'hui (ça, c'est une basse vengeance personnelle, c'est tout chaud :evil:) - Corbett va surtout pouvoir compter sur Lili Maubert (Marta Toren). Évidemment, la suédoise, aussi chaude qu'une française (ou l'inverse), trouve notre américain à son gout mais si elle se lie facilement, c'est aussi son métier qui le veut car en tant que chanteuse d'un night-club de Saïgon très fréquenté par les soldats de la légion, elle est bien placée pour obtenir des renseignements ce qui n'a pas échappé aux services de renseignement français qui en ont fait un agent et elle collabore donc avec l'agent américain. Évidemment, son métier permettait aussi de caser quelques chansons, ici on en a deux.

Bilan : Pas le meilleur film du genre qu'aura donné Robert Florey (Le passé se venge) mais à voir néanmoins pour le trio d'acteurs : Powell/Price/McNally. Ce dernier est souvent sous estimé. Il était certes plus limité que les deux autres mais dans ce registre là : lisse et froid, ses interprétations sont très efficaces. Pour la suite, toujours les mêmes têtes d'affiche plus ou moins prévues : Dan Duryea ou Dick Powell.

Pendant le tournage :
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Stephen McNally - Vincent Price - Dick Powell - Robert Florey

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? - Florey - McNally - ? - Dick Powell
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Kevin95
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Re: Les films noirs à petits budgets et/ou de cinéastes méco

Message par Kevin95 »

Chip a écrit :Je viens de revoir " Les pervertis"( Pretty poison), cette actrice (Tuesday Weld) donne l'impression de ne pas jouer, mais d'être le personnage, c'est terrifiant, la scène du meurtre de Beverly Garland( très bien aussi) est glaçante, impressionnante aussi la façon dont elle prend petit à petit l'ascendant sur Perkins. Etrange que ce film ne soit pas plus connu, il le mériterait.
Il faut dire que Noel Black (décédé l'année dernière) a une filmographie plutôt obscure. Hormis PRETTY POISON, ses autres longs métrages sont (apparemment) des films oubliés ne bénéficiant pas d'une très bonne réputation. L’essentiel de sa carrière se fera à la télévision avec la mise en scène de téléfilms et de certains épisodes de HAWAII FIVE-O ou de KOJAK

Mais vu l'engouement ces derniers temps envers le cinéma américain des années 60-70, je ne serai pas étonné de voir PRETTY POISON gagner sa réputation de film culte. :wink:
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Re: Les films noirs à petits budgets et/ou de cinéastes méco

Message par Chip »

Oui! à l'heure où tant de titres ressortent en Blu-ray, ce film mériterait une nouvelle édition, il gagne à être connu, comptons sur Kiemavel pour une analyse approfondie. Pour en revenir à Tuesday Weld, j'attends toujours le dvd zone français.
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Re: Les films noirs à petits budgets et/ou de cinéastes méco

Message par Chip »

DDVD zone 2 de " le pays de la violence " ( i walk the line), j'oubliais le titre :oops:
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Re: Rogue's Regiment

Message par Supfiction »

kiemavel a écrit : un film noir mais dans un sous-genre que l'on a vu à plusieurs reprises après guerre : la traque au criminel de guerre nazi. Les plus marquants étant : Pris au piège (Cornered), 1945, également avec Dick Powell ; Le criminel (The Stranger), 1946 et bien sûr, hors film noir : Les enchainés (Notorious), également de 1946.

Le film commence par une image choc. Le 30 avril 1945 à Berlin, des dignitaires du régime nazi (parmi lesquelles nous voyons un officier moustachu interprété par Stephen McNally) mettent le feu à deux corps gisant au sol au milieu de la boue et de la neige. Il s'agit bien évidemment d'Adolf Hitler et Eva Braun. Florey enchaine avec des images d'actualité qui nous montrent brièvement les audiences du procès de Nuremberg sur une voix-off décrivant le procès, les verdicts et les peines prononcées contre les dignitaires du régime. Tout ceci pour nous éveiller au problème de ces grands criminels de guerre disparus après la guerre et qui ont pu ainsi échapper aux poursuites.
Double contexte historique passionnant : l'impunité pour les anciens nazis (sujet toujours passionnant et "thrilling" dans ou hors du film noir, de Marathon Man à la sortie en salle du Labyrinthe du silence) et l'Indochine française à l'aube de la décolonisation (peu traité à ma connaissance, je n'ai qu'Indochine de Wargnier en tête).
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Re: Les films noirs à petits budgets et/ou de cinéastes méco

Message par Chip »

Aussi " Un américain bien tranquille " de Mankiewicz avec Audie Murphy.
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Re: Les films noirs à petits budgets et/ou de cinéastes méco

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Kevin95 a écrit :
Chip a écrit :Je viens de revoir " Les pervertis"( Pretty poison), cette actrice (Tuesday Weld) donne l'impression de ne pas jouer, mais d'être le personnage, c'est terrifiant, la scène du meurtre de Beverly Garland( très bien aussi) est glaçante, impressionnante aussi la façon dont elle prend petit à petit l'ascendant sur Perkins. Etrange que ce film ne soit pas plus connu, il le mériterait.
Il faut dire que Noel Black (décédé l'année dernière) a une filmographie plutôt obscure. Hormis PRETTY POISON, ses autres longs métrages sont (apparemment) des films oubliés ne bénéficiant pas d'une très bonne réputation. L’essentiel de sa carrière se fera à la télévision avec la mise en scène de téléfilms et de certains épisodes de HAWAII FIVE-O ou de KOJAK

Mais vu l'engouement ces derniers temps envers le cinéma américain des années 60-70, je ne serai pas étonné de voir PRETTY POISON gagner sa réputation de film culte. :wink:
Il ne m'a pas encore atteint mais je fais des efforts. J'ai reçu ce matin ce Pretty Poison que toi et Chip recommandiez (avec en + Little Odessa).
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Re: Rogue's Regiment

Message par kiemavel »

Chip a écrit :Aussi "Un américain bien tranquille" de Mankiewicz avec Audie Murphy.
Un américain bien tranquille. Oui, sur cette période du début de la guerre d'Indochine il y a ce film de Mankiewicz qui m'avait semblé moyen (pour lui) mais je ne l'ai pas vu depuis longtemps. Logiquement, Il aurait du y avoir des films français sauf que l'on est tellement frileux sur ce genre de sujet qu'à priori il n'y a pas...On va dire que le français -beaucoup plus réfléchi que l'américain :D - a besoin de beaucoup de temps pour témoigner dans son cinéma de son histoire récente…Mais on pense trop. On a quand même attendu 2000 ans le film sur Vercingétorix :twisted: (Quoi les frères Lumière ?) …tout ça pour avoir Christophe :shock: . Mais merde, on a quand même le droit de dire que des tribus gauloises ont collaboré avec les Romains !
Supfiction a écrit :
kiemavel a écrit : un film noir mais dans un sous-genre que l'on a vu à plusieurs reprises après guerre : la traque au criminel de guerre nazi. Les plus marquants étant : Pris au piège (Cornered), 1945, également avec Dick Powell ; Le criminel (The Stranger), 1946 et bien sûr, hors film noir : Les enchainés (Notorious), également de 1946.

Le film commence par une image choc. Le 30 avril 1945 à Berlin, des dignitaires du régime nazi (parmi lesquelles nous voyons un officier moustachu interprété par Stephen McNally) mettent le feu à deux corps gisant au sol au milieu de la boue et de la neige. Il s'agit bien évidemment d'Adolf Hitler et Eva Braun. Florey enchaine avec des images d'actualité qui nous montrent brièvement les audiences du procès de Nuremberg sur une voix-off décrivant le procès, les verdicts et les peines prononcées contre les dignitaires du régime. Tout ceci pour nous éveiller au problème de ces grands criminels de guerre disparus après la guerre et qui ont pu ainsi échapper aux poursuites.
Double contexte historique passionnant : l'impunité pour les anciens nazis (sujet toujours passionnant et "thrilling" dans ou hors du film noir, de Marathon Man à la sortie en salle du Labyrinthe du silence) et l'Indochine française à l'aube de la décolonisation (peu traité à ma connaissance, je n'ai qu'Indochine de Wargnier en tête).
La reprise d'une partie de mon texte par L'ange Blanc me fait réaliser que j'ai été trop précis en citant d'autres films sur ce thème de la "Chasse au criminel de guerre nazi" car le seul qui soit véritablement dans ce cas, c'est le bien nommé Criminel d'Orson. Pour les autres, on est seulement dans ce voisinage mais Claude Rains n'est pas véritablement lui même un criminel de guerre. Tu cites des films marquants mais il y a quelques autres. Dans ce voisinage là, j'avais été très troublé par le dérangeant Portier de nuit dans lequel il était notamment question des réseaux d'entraide en faveur des ex nazis. Il y a aussi Music Box de Costa-Gavras. Ces film là, relativement tardifs par rapport à la guerre, montraient ces fameux vieux salopards pour lesquels 20 ou 25 ans plus tard il n'était toujours pas questionne de payer l'additionne; quand bien même y'aurait des couillonnes, qui parlent d'extraditionne. Tu cites de ton coté Marathon Man mais l'immense Laurence Olivier a été des deux cotés. Dans le film de Schlesinger, il était Szell "za ne vais bas mal !" et quelques années plus tard, il a campé une sorte de Simon Wiesenthal dans Ces garçons qui venaient du Brésil , un autre film qui m'avait bien secoué.
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Profondo Rosso
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Re: Les films noirs à petits budgets et/ou de cinéastes méco

Message par Profondo Rosso »

Highway 301 de Andrew L. Stone (1950)

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S'appuyant sur des faits authentiques, le film décrit les derniers méfaits du Tri-State Gang (en) (Gang des trois États) et les circonstances conduisant à l'exécution violente de leurs chefs, George Legenza (dans la réalité, Walter Legenza) et Robert Mais, à Richmond (Virginie), en février 1935. Au cours des années 1930, la célèbre bande dévalisait de nombreuses banques, terrorisant au passage la population et profitant de l'absence de coordination entre les polices des trois États jouxtant ce périmètre.

Réalisateur surtout célébré jusque-là pour ses comédies musicales des années 40 (notamment Stormy Weather (1943) première comédie musicale où se produisent des musiciens afro-américains dans leurs propres rôles) Andrew L. Stone signe un spectaculaire changement de registre avec ce polar brutal. Le film transpose les méfaits du "Gang des trois états" qui durant les années 30 sema la terreur à travers de violents braquages dans une zone jouxtant les Etats de Caroline du Nord, Virginie et du Maryland. Ce n'est que lorsque les trois états coordonnèrent leurs efforts et échangèrent leurs information qu'ils purent mettre fin aux exactions du gang. Le pré générique auto glorificateur nous ramène d'ailleurs au temps du Scarface de Howard Hawks avec les gouverneurs des trois états concernés célébrant le travail de la police pour stopper ces "criminels congénitaux". Une assertion contredite lorsque l'on découvre le visage des malfrats et notamment les traits de séducteur ténébreux de leur chef Legenza (Steve Cochran).

Le film se déleste assez vite de sa veine documentaire (dans l'esprit des premiers films noirs d'Antony Mann) pour s'attarder sur le quotidien du gang. Celui-ci est rythmé par des braquages violents et méticuleux entre lesquels ils prennent du bon temps avec leurs petites amies qui les suivent dans leurs parcours. Cette même brutalité pourra déborder justement en dehors du "métier" révélant plus particulièrement la nature sadique de Legenza. Steve Cochran délivre une performance mémorable et offrant un pendant plus glacial et inquiétant de celles d'un James Cagney qu'il côtoya sur le légendaire L'Enfer est à lui. C'est ce détachement goguenard qui le rend si terrifiant, brutalisant les femmes et tirant dans le dos sans états d'âmes. On n'est pas près d'oublier cette incroyable séquence où il traque sa petite amie trop bavarde, l'attend à l'entrée de l'ascenseur de son hôtel la tue d'un coup de feu dans un geste nonchalant et remonte dans l'ascenseur sous les yeux médusés du liftier. Dès lors plane la menace de la prochaine exaction de Legenza, en particulier en direction de la vulnérable Mary Simms éveillant le désir comme les instincts meurtrier du bad guy dans un suspense rondement mené. Stone délivre un spectacle d'une efficacité redoutable avec une ouverture tonitruante qui laisse ensuite se dérouler un climat oppressant par une mise en scène mettant superbement en valeur les environnements urbain nocturnes où se fond si bien la silhouette intimidante de Steve Cochran. Le reste du casting constitue d'ailleurs un bon ensemble de trognes de série B comme Richard Egan et Robert Webber. Une belle réussite qui en annonce d'autre pour Stone qui récidivera dans le genre avec The Night holds terror (1955) et Cry terror (1958). 4,5/6
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Plunder of the Sun

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Les pillards de Mexico - Plunder of the Sun (1953)
Réalisation : John Farrow / Production : Robert Fellows et John Wayne / Distribution : Warner Bros. / Scénario : Jonathan Latimer d'après un roman de David Dodge / Photographie : Jack Draper / Musique : Antonio Diaz Conde

Avec : Glenn Ford (Al Colby), Dian Lynn (Julie Barnes), Patricia Medina (Anna Luz), Francis L. Sullivan (Thomas Berrien), Sean McClory (Jefferson), Eduardo Noriega (Raul), Julio Villareal (Ulbaldo Navarro), Charles Rooner (le capitaine Bergman)

Coincé à La Havane sans même assez d'argent pour régler sa note d'hôtel, Al Colby un agent d'assurance américain attend désespérément le chèque qui lui permettra d'éponger ses dettes et de repartir. Un après midi, dans un bar il est abordé et séduit par une jeune et belle inconnue, Anna Luz, mais alors qu'il pense qu'elle va l'emmener chez elle, elle l'introduit chez Thomas Berrien, un vieil homme en fauteuil roulant qui se présente comme un antiquaire. Lui même étant fiché comme trafiquant d'oeuvres d'art, il a besoin d'un homme inconnu des douanes et de de la police pour faire passer au Mexique, par bateau, un petit paquet dont il refuse de révéler le contenu. Bien que méfiant, Colby accepta la proposition assortie d'une récompense de 1000 $. Sur le bateau, il retrouve Anna Luz, toujours accompagnée de Berrien qui souhaite garder un oeil sur son paquet mais il est très vite abordé par d'étranges inconnus ; d'abord Jefferson, un homme qui ouvertement se présente comme un concurrent de Berrien puis par Julie Barnes, une héritière américaine accompagnée de Raul, son compagnon mexicain. Cette jeune femme assez perturbée passe son temps à s'enivrer et elle se jète littéralement à son cou mais il la repousse. Au cours du voyage, Colby se sent de plus en plus menacé et sa cabine est fouillée si bien que lorsqu'avec Anna, il retrouve Berrien mort dans sa cabine, bien celui ci était gravement malade du coeur, Colby suspecte un assassinat. Arrivé à Oaxaca, Colby ouvre le paquet et y découvre une petite sculpture de jade et des manuscrits Zapotèques qui s'avèrent être 3 pages d'une carte au trésor…
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2ème film produit par la maison de production Wayne-Fellows qui a précédé la Batjac, Plunder of the Sun, plus qu'un film d'aventure avec des éléments noirs, est selon moi un film noir à localisation exotique. La chasse au trésor, sa découverte et la lutte pour se l'approprier, relèvent de l'anecdotique dans un film à l'évidence très influencé par Le Faucon maltais. On est tout à fait dans cette ambiance dont j'ai déjà dit ici être assez moyennement amateur mais d'autres que moi vont beaucoup aimer ce film de John Farrow. L'histoire est racontée en flash-backs par Colby (Glenn Ford) qui est Interrogé par la police mexicaine qui le soupçonne de plusieurs meurtres. Contraint de s'expliquer, il raconte les évènements qui ont commencé 8 jours plus tôt à La Havane par sa rencontre avec Anna Luz dans un bar de la ville. Ce n'est que la première des multiples rencontres de Colby avec des personnages assez étranges et intrigants qui vont se révéler tous plus ou moins ouvertement intéressés par le paquet qui lui a été confié et qui sont tous plus ou moins impliqués dans la chasse au trésor.
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Je commence avec Berrien (Francis L. Sullivan). C'est un collectionneur d'objets d'art et surtout un trafiquant. Le modèle de ce personnage corpulant, mielleux et enjôleur est à l'évidence Sydney Greenstreet. Malheureusement, il disparait trop vite, première victime de la chasse au trésor. Ensuite on découvre Jefferson (Sean McClory), le vieux rival du précédent. C'est un ancien archéologue (radié pour une raison inconnu mais on devine qu'il devait être trop honnête). Le modèle du personnage est à l'évidence Peter Lorre mais dans ce film, McClory ressemble un peu à Peter van Eyck avec ses cheveux blonds et sa coupe en brosse même si la même année on verra le grand Peter Lorre teint en blond dans Beat The Devil. Malgré ses sourires et son air moqueur, il est prêt à tout pour s'approprier le manuscrit. La violence physique fonctionnant moyennement -il se retrouve à terre lorsqu'il essaie à plusieurs reprises de cogner Colby, y compris quand il va essayer de le faire par surprise- il va essayer la ruse et les armes à feu…sans plus de succès. Croyant avoir emporté avec lui le précieux paquet, il va s'apercevoir qu'il a été berné. Il est souvent accompagné par Bergman, un corpulant policier mexicain encore plus moqueur que lui et que l'on voit presque toujours attablé et en train de se bâfrer. Je décrits brièvement une rencontre typique entre Colby et Jefferson. Elle commence par une discussion entre gentlemen qui tentent de s'entendre. Colby ne voulant rien céder, Jefferson tente de l'attaquer mais il se fait tabasser et se relève à grand peine. Beau joueur, il se relève en se forçant à rire, admettant sa défaite et révisant à la baisse ses exigences.
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Du coté des filles maintenant. Colby a le même genre de relation avec Anna Luz (Patricia Medina), la violence en moins…Ce personnage, dont le modèle est la aussi à l'évidence Mary Astor, se fait passer tour à tour pour une célibataire en quête d'une aventure ; pour la secrétaire et infirmière de Berrien, puis pour sa fille, sa femme…Elle prétend plus tard être finalement honnête, filleule d'un conservateur du musée d'Oaxaca …mais on est comme Colby, on se méfie un peu de la menteuse professionnelle même si la séduction s'installe évidemment aussi entre eux. La seconde est Julie Barnes (Diana Lynn). C'est l'héritière d'une riche famille de Pittsburgh. Alcoolique et se comportant comme une nymphomane, elle se jète au pied de Colby et lui donne du “Kiss me, mystery man”. Son entourage est aussi curieux qu'elle. Lorsque sur le bateau Colby la repousse une première fois, cette attitude conduit à une épreuve de force avec celui qui est censé être son «compagnon», Raoul, qui semble curieusement furieux de l'offense faire à Julie…Cette jeune épave aurait pu être interprétée par Gloria Grahame et on a même le droit de trouver que Diana Lynn ne convenait pas pour un tel rôle. Tout ce beau monde se manipule, se "double ou triple cross" au grand dam de Colby qui regrette très vite d'avoir mis le nez dans cette affaire qui ressemblait pourtant au départ à une "bonne" affaire, pas très légale certes mais Colby, dans le besoin, ne semblait pas préoccupé par cette question. Sentant que c'est le seul moyen de s'en sortir vivant, il va être tenté de nouer des alliances alors que dans un premier temps, si Colby semblait perdu au milieu de ce panier de crabes, il se montrait immédiatement aussi parfaitement capable de se défendre. Car on retrouve le très bon, très noir et assez violent Glenn Ford que l'on reverra juste après dans Règlement de comptes (The Big heat). Lorsqu'il va sentir que les évènements lui échappe, il va devenir de plus en plus brutal…avec une bonne dose de machisme dans son attitude vis à vis de Julie Barnes. Il est violent sans délectation car c'est l'accablement qui domine dans l'impression dégagée par l'acteur. Je n'ai pas encore parlé du dernier personnage important, Ulbaldo Navarro, le conservateur du musée d'Oaxaca, un des rares expert capables de traduire le manuscrit détenu par Colby.
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Ce personnage nous ouvre à une des préoccupations que les initiateurs du film voulaient visiblement mettre en avant : le pillage des biens culturels du Mexique (et au delà…). Farrow montre déjà "l'éveil culturel" de Colby qui va consacrer du temps à en apprendre davantage sur les Zapotèques, en vu de s'approprier le trésor dont le mystérieux manuscrit détient potentiellement la clé…mais ce n'est qu'une étape. L'éveil se fait aussi discrètement au grée de ses visites sur les sites zapotèques de Monte Albán et Mitla magnifiquement filmés par Farrow et son chef opérateur et surtout très intelligemment intégrés à l'intrigue. Toutefois, la quête du trésor, sa découverte et ses conséquences sont -je l'ai déjà dit- selon moi secondaires tant l'intérêt de ce film réside dans ses personnages mystérieux et pour l'atmosphère qui en découle. D'autres vont adorer un film que j'ai seulement bien aimé. Adapté d'un roman de David Dodge, l'auteur de La main au collet (To Catch a Thief), le film a été tourné sur place au cours de l'hiver 1952. La compagnie Wayne/Fellows avait un accord de distribution avec Warner Bros. Ces derniers voulaient Wayne pour jouer le rôle principal mais très intelligemment il a refusé le rôle et recommandé Glenn Ford, ce qui était une excellente suggestion. Vu en vost (Le DVD édité en Espagne comporte une version sous titré en français).
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Dernière modification par kiemavel le 24 mai 15, 12:35, modifié 1 fois.
aelita
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Re: Les films noirs à petits budgets et/ou de cinéastes méco

Message par aelita »

je reviens sur ce qui a été dit un peu avant désolée pour le hors sujet). Sur la guerre d'Indochine et la fin de la période coloniale dans cette partie de l'Empire français, on peut citer La 317ème section. le thème a été peu traité, pas seulement à cause de la faible réactivité ou du peu de volonté des Français à traiter ce thème au cinéma. La France a enchaîné (si j'ose dire) sur la guerre d'Algérie. Quand on pense que Les sentiers de la gloire (qui date de 1957) n'est pas sorti à l'époque par un réflexe d'auto-censure des distributeurs, on imagine que parler d'une guerre de décolonisation au moment où s'en déroulait une autre était compliqué. D'autant plus qu'après, on a surtout pensé (cinématographiquement parlant) au versant américain, la guerre au Vietnam.
Pour les films de chasse au criminel de guerre nazi, je suis d'accord : le Hitchcock ne traite pas vraiment le thème. Le thème est assez riche pour inspirer encore les cinéastes et la liste est longue, qu'il s'agisse de reconstitutions (le labyrinthe du silence ) ou de films à l'action plus ou moins contemporaine de l'époque du tournage (Tu marcheras sur l'eau, par exemple).
Pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué ? (pensée shadok)
kiemavel
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Re: Les films noirs à petits budgets et/ou de cinéastes méco

Message par kiemavel »

Profondo Rosso a écrit :Highway 301 de Andrew L. Stone (1950)
Il est quand même temps que je salue l'arrivée d'un nouveau contributeur dans ce sujet. J'ai déjà fait le coup avec brucerandylan alors je ne vais pas pousser un second soupir de satisfaction mais ça fait quand même plaisir de voir dans ces parages des gens qui s'expriment aussi bien en français 8) (et je ne dis pas ça pour dire du mal de mon copain Supfiction).

Ce film était le premier film criminel de Andrew L. Stone et c'est surement celui que je préfère. Entièrement d'accord avec toi pour l'interprétation de Cochran qui dans le genre était aussi très bien dans Storm Warning (en mari de Doris Day...membre du Klan) ou bien dans le rôle du compagnon de Ruth Roman partiellement amnésique et manipulée par sa petite amie dans Tomorrow is Another Day. Il tenait de la place sur un écran où sa présence physique est souvent étonnante. Dans ce type de série B, l'un des rares dont la présence a pu être aussi forte que la sienne dans des rôles de tueurs psychopathes fut occasionnellement Charles McGraw ou bien Lawrence Tierney mais ce dernier était tout de même souvent mono-expression (c'est d'ailleurs en quelque sorte l'absence de vie en dehors de son regard qui le rendait effrayant).

Vince Edwards ressemblait un peu à Cochran et avait une présence physique comparable mais pas tout à fait son talent. On le retrouvait dans un autre thriller (plus que film noir) de Stone que tu cites : The Night Holds Terror dans lequel il formait un trop bon duo de psychopathes avec John Cassavettes. Trop bon, c'est parce qu'ils composent…surtout le second qui en fait beaucoup, sans doute pour se défaire de son allure d'étudiant. Cassavettes a bien fait de se consacrer à ses propres oeuvres car dans ce registre là il ne m'a jamais tout à fait convaincu. Dans ce sujet, j'ai dit du mal d'un autre film noir de ce metteur en scène : The Steel Trap avec Joseph Cotten et Teresa Wright.

Pour Stormy Weather, première comédie musicale interprété par des musiciens noirs ? Même si ce n'est pas une comédie musicale (je parlerais davantage à son sujet de "film musical") mais Hallelujah de King Vidor est bien antérieur (1929) et était entièrement joué par des acteurs et musiciens noirs (DVD zone 1 avec vost)…Je garde un lointain mais excellent souvenir de ce film même s'il faut se remettre dans le contexte de l'époque pour bien mesurer l'importance de ce film qui a d'ailleurs pu avoir des prédécesseurs (mais date de production oblige, pas dans le film musical :mrgreen:, à moins qu'il n'y ai eu des comédies musicales muettes :x .
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