Les films noirs à petits budgets et/ou de cinéastes méconnus

Rubrique consacrée au cinéma et aux films tournés avant 1980.

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Supfiction
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Message par Supfiction »

kiemavel a écrit :Quelques autres titres ardemment souhaités : quelques films noirs (dont Traqué dans Chicago)
Ah oui celui-là vaut le détour avec l'excellent Edward Arnold (Le bourgeois/capitaliste des films de Capra) et l'une des reines du film noir, Marie Windsor. En prime Mala Powers.

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Re: Les films noirs à petits budgets et/ou de cinéastes méconnus

Message par kiemavel »

Supfiction a écrit :
kiemavel a écrit :Quelques autres titres ardemment souhaités : quelques films noirs (dont Traqué dans Chicago)
Ah oui celui-là vaut le détour avec l'excellent Edward Arnold (Le bourgeois/capitaliste des films de Capra) et l'une des reines du film noir, Marie Windsor. En prime Mala Powers.
Edward Arnold pouvait occasionnellement faire un très bon méchant en col blanc. Dans ce film c'est un avocat véreux (C'est lui qui embauche et débauche William Talman, autre grand second rôle du film noir ; mais lui, il fait systématiquement le sale boulot). Celui qui aura été le plus souvent un avocat crapuleux dans le film noir, c'est surement Barry Kelley.

Traqué dans Chicago était l'un des derniers films d'un obscur metteur en scène, John H. Auer, qui a fait toute sa carrière à la Republic et presque jusqu'au bout avec des budgets princiers :) et des castings de superstars :D. Mais sur sa fin de carrière il a quand même tourné 2 films de guerre pas dégueu et avec des castings royaux (l'un avec Sterling Hayden en vedette) ; et surtout 2 films noirs. Le second s'appelle : Les bas-fonds d'hawaï et il est tout de même moins original que celui qui figure déjà dans ce sujet. On peut voir encore un autre film criminel : L'homme que j'ai choisi (The Flame) et un autre film a déjà été diffusé dans un cycle "Robert Ryan". C'est un film de ses débuts qui s'appelle : Gangway for Tomorrow
Chip a écrit :Oui ! " celui qu'on n'attendait plus" (come next Spring), vague souvenir d'ado, je me souviens avoir aimé ce film, jamais revu depuis. Ann Sheridan ayant déclaré que dans ce film elle avait trouvé son meilleur rôle, doit-on la croire ? Ce petit mélo de Republic pictures en Trucolor bénéficie à ce qu'on dit, d'une petite réputation, un film rare.
J'avais oublié de te répondre (mais j'ai ouvert le sujet entre temps). C'est toi qui avait attiré mon attention sur ce film. Pas déçu car c'est un très bon Americana. Des interprètes magnifiques, surtout Ann Sheridan et Steve Cochran, bien entourés par de très bons seconds rôles (Walter Brennan, Edgar Buchanan, Harry Shannon, James Best, Sonny Tuft)
Jullien Robert
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Re: Les films noirs à petits budgets et/ou de cinéastes méconnus

Message par Jullien Robert »

Pour" celui qu'on attendais plus" je tiens à remercier "Jk "
qui a traduit les dialogues de ce film et que j'ai pu sous-titrer
grâce à lui ! Amitiés Robert.
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Supfiction
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Message par Supfiction »

kiemavel a écrit :
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La vengeance de Scarface (Cry Vengeance) 1954
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Réalisation : Mark Stevens
Production : Lindsley Parsons - Allied Artists Pictures
Scénario : Warren Douglas et George Bricker
Photographie : William Sickner
Musique : Paul Dunlap

Avec :

Mark Stevens (Vic Barron)
Martha Hyer (Peggy)
Skip Homeier (Roxey)
Douglas Kennedy (Tino Morelli/Al Corey)
Joan Vohs (Lily)
Cheryl Callaway (Marie)

Vic Barron, un ancien officier de police de San Francisco est libéré après avoir injustement purgé une peine de 3 ans de prison pour corruption. Malgré les conseils et pressions de ses anciens collègues qui l'exhortent d'oublier, il est déterminé à se venger de l'homme qui avait commandité l'attentat à la bombe qui l'avait défiguré et qui avait causé la mort de sa femme et de sa petite fille. Il est persuadé qu'il s'agit de Tino Morelli, un chef de gang sur lequel il enquêtait. Barron replonge dans les bas-fonds de San Francisco, retrouve Nick Buda, un patron de boite de nuit en affaires avec Morelli mais l'homme refuse de parler tout comme une vieille connaissance, Roxey, son homme de main. Mais grâce à un renseignement fourni par Lily, la petite amie du tueur, Barron retrouve la trace de Morelli qui se cache dans une petite ville portuaire de l'Alaska ou il a refait sa vie, changeant de nom, fondant une famille et vivant paisiblement avec sa petite fille sous la protection de son ancien lieutenant. Vic Barron y arrive, suivit très vite par Roxey et Lily qui arrivent à leur tour sur place….
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J'évacue tout de suite les doutes qu'auraient les connaisseurs du genre quant à l'intérêt de celui ci qui doit leur rappeler quelque chose ou sur lequel ils auraient pu lire des commentaires laissant entendre que ce film aurait subit la pesante influence de Règlement de comptes (The Big Heat) sorti l'année précédente…Les ressemblances ne sont que superficielles. Un policier dont la famille a été tuée dans l'explosion d'une voiture piégée. Un personnage clé défiguré. Un autre, un tueur albinos, peut faire penser au personnage incarné par Lee Marvin dans le film de Fritz Lang et celui de la petite amie du dit tueur ressemble à celui incarné par Gloria Grahame…Certes mais ça s'arrête là. D'abord les deux personnages principaux sont très différents. Dave Bannion (Salut Dave ! Kestud'viens ?) était lui aussi revanchard mais s'il souffrait, il n'était pas habité par les pulsions autodestructrices et par la folie qui guette Vic Barron. Son énergie était toute entière canalisée dans son enquête, sa détermination froide explosant en de brefs éclairs de violence…mais la noirceur du film de Lang ne fléchissait pas. Or, si dans sa première partie, Cry Vengeance est au moins aussi violent et sombre que son prédécesseur, cette violence sauvage finira par nettement s'atténuer par la suite sans que l'on puisse parler de reniement, le film prend simplement une orientation différente. Ici, assez vite on quitte le cadre habituel d'un film noir car après un préambule nocturne et urbain assez court, l'action se poursuit dans un petit port de l'Alaska dont l'atmosphère saine pourrait permettre à l'homme habité par la haine de retrouver son humanité perdue. Et ceci on le perçoit très vite. Même si la violence extrême initiale connaitra bien sûr quelques prolongements, l'influence de quelques personnages positifs rencontrés sur les lieux ou se déroule la majeure partie de l'action et l'évolution des autres personnages impliqués dans sa vengeance, lui offriront une possibilité de rédemption que la noirceur initiale du personnage ne laissait pas supposer. On pourrait parler de noir "allégé". C'est l'une des originalité de ce film…et aussi peut-être sa limite.

C'est loin d'être un cas unique mais l'aspect le plus noir de ce film réside dans son personnage principal. On découvre un Vic Barron glaçant et saisissant, une impression première qui n'est même pas principalement causé par son visage partiellement défiguré. Il promène un regard perdu et vide qui ne se pose réellement sur rien, avançant le dos vouté, la démarche mécanique et raide. Sur son visage de marbre, on ne peut guère discerner que quelques rictus incontrôlables et ses mâchoires crispées ne s'ouvrent que pour laisser sortir d'une voix monocorde quelques phrases saccadées et sèches. De temps à autre, il laisse échapper une émotion. Il se prend à plusieurs reprises la tête dans les mains, une posture qui n'est pas dans un premier temps le signe d'un quelconque renoncement mais l'expression d'un homme malade ou plutôt épuisé, consumé par la haine qui l'habite. Cette haine se traduit par une violence rarement vue au cours du cycle noir. Barron cogne et il ne se bât pas "proprement". Les coups de poings de ce film ne sont pas "édulcorés", déliés ou élégants. Il frappe aux corps des séries de coups de massue qui portent tout le poids de sa haine. Même ses alliés ne sont pas épargnés. Ainsi on le voit tabasser successivement ses deux anciens collègues, étouffer jusqu'à ce qu'il perde connaissance puis plus tard, assommer à lui fendre le crâne, Johnny Blue-Eyes ( interprété par Mort Mills) le fidèle lieutenant de Corey/Morelli, tabasser encore le shérif local Mike Walters (interprété par Warren Douglas), pourtant plutôt bienveillant à son égard.
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Bien évidemment, la violence des premières séquences urbaines ne sera pas seulement de son fait. Barron débute son enquête dans les nuits de San Francisco, cherche à soutirer des informations auprès de Nick Buda (interprété par Lewis Martin), un patron de boite de nuit lié au gang qui aurait commandité l'attentat contre lui et sa famille. Il fait déjà face à l'homme de main de Buda, Roxey ( campé par un excellent Skip Homeier), un tueur psychopathe aux cheveux blond platine et à l'allure aussi élégante qu'étrange portant lunette d'écaille et noeud papillon dont on découvre aussi la petite amie Lily, une fille paumée et martyrisée par son sadique petit ami. De tous les personnages, c'est celui qui manifestement est le plus calqué sur l'un de ceux du film de Fritz Lang, en l'occurence sur celui que tenait Gloria Grahame. Ce sont les seuls véritables personnages de film noir en dehors de Barron mais il devra "compter" sur eux jusqu'au bout. Mais pour le reste, on est assez loin de l'atmosphère uniformément glauque à laquelle on pouvait s'attendre après les séquences d'ouverture. Les archétypes du genre : localisation, situations et personnages vont être perpétuellement décalées à mesure que le film va avancer dans un film dont seul le premier quart d'heure est un pur film noir. L'univers corrompu de la ville n'a même pas gagné la police. Ici, point de flics pourris et même un ancien flic tombé en disgrâce, à tous points de vue, peut toujours compter sur ses anciens collègues (interprétés par Don Haggerty et John Doucette) qui seront mal payés en retour car ils seront loin de parvenir à le convaincre de renoncer à sa vengeance. Trop tôt…

Cette possible renaissance aura pour cadre l'Alaska car dans ce film noir "délocalisé", ce sont seulement les 15 premières minutes qui sont urbaines. On quitte assez vite San Francisco pour le grand air : frais, l'air. La totalité du récit va se poursuivre à Ketchikan, un petit port de pêche et ce n'est pas anodin car ce cadre semble avoir eu des effets apaisants sur tout le monde. Lorsque Vic Barron débarque, il découvre que les anciens gangsters Tino Morelli et son adjoint Johnny Blue-Eyes ont tout l'air d'avoir pris leur retraite de salopards. Le second est devenu depuis la mise au vert - voir la retraite- de son patron plus une nounou qu'autre chose…pour un ancien parrain qui n'a d'yeux que pour Marie (Cheryl Callaway, encore une actrice en herbe qui réconcilierait n'importe qui avec les enfants acteurs…), sa petite fille de 6 ans. On a déjà vu des truands qui se mettent au vert pour échapper à leur passé mais ceux là semblent avoir sincèrement pris gout à cette vie honnête. Ils se sont intégrés à cette petite communauté paisible et ce voisinnage semble avoir eu un effet bénéfique sur les anciennes crapules au point qu'ils ne pensent pas à éliminer celui qui menace la tranquillité conquise. Au centre du village, dans le bar de Ketchikan tenu par Peggy Harding, on accueille aussi avec une curieuse bienveillance cet étranger défiguré qui révèle très vite ses noirs desseins sans susciter la moindre répulsion mais simplement l'inquiétude et la méfiance. Plus tard, le shérif, un jeune homme tranquille qui est loin d'avoir la gâchette facile, se montrera lui aussi plutôt compréhensif envers l'étranger (même s'il aura à le regretter).
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Si l'on s'éloigne donc parfois un peu du programme que l'on avait pu anticiper en raison de la complaisance un peu grande des acteurs et témoins de la vengeance de Barron, c'est en revanche très bien illustré par Mark Stevens derrière la caméra car il tire parfaitement partie de ce lieu insolite de tournage et met magnifiquement en scène cette quiétude des lieux. Ici, point de ruelles sombres, de lampadaires et d'ombres sur les murs, Stevens filme des endroits ouverts sur un ciel gris mais lumineux et cette clarté est quasiment permanente. Il est bien secondé par William Sickner (qui avait déjà photographié Jack Slade le damné quelques années plus tôt) et tire parfaitement partie de l'ouverture de la petite ville sur la nature. Il souligne sa verticalité et les possibilités de circulations en multipliant les plans sur les longs escaliers de bois qui permettent d'accéder aux villas perchées, sur les ponts, les passerelles, les jetées et bien sûr sur le port et la mer. Pour souligner l'état de tranquillité dans laquelle se trouve Morelli/Corey, on l'avait d'ailleurs découvert revenant d'une partie de pèche. Alors forcément, à force de délaisser les flingues au profit des cannes à pêche, on mollit…C'est d'ailleurs une des seules réserves qu'on peut poser sur ce film. La vie au grand air a tellement ramolli tout le monde que personne ne semble prendre conscience de la dangerosité de l'ex flic. Le plus dommageable étant le début d'une romance (inévitable) qui vient bien trop vite. On continue de croire au désir de vengeance de Barron mais la tension redescend tout de même un peu trop tôt en raison de ce début d'idylle. Surtout que le "malade" commence à parler davantage…et à moins cogner. Il manifeste ses intentions criminelles, les justifient par avance, soutient à qui veut l'entendre qu'il veut prendre son temps pour assouvir sa vengeance mais en réalité il commence déjà à s'interroger car cette façon de remettre sa vengeance à plus tard cache sans doute une amorce de remise en question et offre en tout cas la possibilité d'un renoncement.

La violence perdure toutefois, surtout que Roxey et sa petite amie ne tardent pas à débarquer à leur tour à Ketchikan…C'est le jeune tueur qui va prendre le relai de Barron et qui sera impliqué dans les scènes les plus violentes, celle de Barron n'explosant plus que par éclairs -mais quels éclairs…- mais ce sera de plus en plus une violence psychologique. A la petite fille de Morelli/Corey, il fera un cadeau singulier. Il va ôter une balle de son révolver et lui donner, faisant d'elle sa messagère pour ce cadeau destiné à son père…On l'avait certes anticipé en découvrant que Morelli avait fondé une famille et qu'il avait eu une petite fille d'un âge à peu près similaire à celui qu'avait la fille de Barron au moment de l'attentat mais les scènes les plus fortes impliquent Barron et la petite Marie. Je ne veux pas rentrer dans le détail mais ce sont probablement les meilleures scènes du film et en tout cas les plus singulières. Si Mark Stevens est excellent dans un registre certes limité mais semblant fait sur mesure pour lui, Skip Homeier est lui aussi parfait en tueur sadique et sans âme. Il faut le voir faire des ricochets sur l'eau du lac …ou git la dernière victime qu'il vient tout juste d'abattre. Il traumatise sa petite amie Lily (excellemment campé par la quasi inconnue Joan Vohs) qui noie dans l'alcool la terreur que lui inspire Roxey. Elle a les meilleures lignes de dialogue dont une scène anthologique se déroulant dans le bar de Peggy.
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Pour moi un film indispensable. Certes pas parfait mais très original. Mark Stevens avait fait ses débuts très réussis dans la mise en scène avec ce film. Il récidivera deux ans plus tard avec un autre film noir presque aussi bon, Timetable (dont le titre est parfois orthographié en deux mots). Puis il donnera encore un western original mais moins maitrisé, Gun Fever terminant sa carrière de réalisateur dans les années 60 par deux films que je n'ai jamais vu. Entre temps, il avait aussi réalisé de nombreux épisodes de série TV, dont une quarantaine de la série Big Town dont il était également la vedette. Il avait fait ses débuts d'acteur en 1943. On le retrouvait dans de petits rôles au générique de grands films de guerre (God Is My Co-Pilot, La route des ténèbres, Aventures en Birmanie, etc..) puis il enchaina très vite en 1946 avec le premier rôle d'un des premiers films réalisés par John Berry, le très sympathique From This Day Forward, un film lui aussi de circonstance sur la difficile réadaptation à la vie civile d'un ancien soldat qui se retrouve chômeur après guerre ce qui met en péril le couple qu'il forme avec Joan Fontaine.

Par la suite, il joua les premiers rôles dans de grands films noirs ( L'impasse tragique, La dernière rafale, De minuit à l'aube) avant de tenter une reconversion comme metteur en scène lorsque les bons rôles se firent rares. Sans grands succès et on peut le regretter amèrement tant ses débuts dans la réalisation étaient prometteurs. Une source enregistrée à L'American Film Institute affirme que le début du tournage avait été retardé pour attendre la fin de celui de Association criminelle (The Big Combo) car il semble bien que Richard Conte était initialement prévu pour tenir le rôle de Vic Barron.
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Tiens j'ai eu l'occasion de le voir justement ce Cry Vengeance. Et figure toi que non seulement le film est très sympa mais en plus ta critique est très juste !
Il y a effectivement un petit défaut dans ce film noir, c'est la rapidité avec laquelle la jolie Peggy Harding s'attache au désagréable et peu séduisant (c'est pas une petite balafre à la Scarface qu'ils lui ont fait!) Vic Barron. Mais contrairement à toi, j'apprécie un peu de romance au milieu d'un film noir bien dur. J'aurai juste aimé que cela soit amené avec un peu plus de justesse ou de temps, mais le format ne le permettait probablement pas. Si j'ai regretté au départ que le personnage de Vic Barron ne soit pas joué par une plus grosse tête d'affiche, force est de constaté que Mark Stevens joue très bien (un air de Tyrone Power vieillissant avec la brutalité d'un John Payne, en moins animal). En fait merci, j'ai réalisé que Mark Stevens avait une belle carrière à son actif et que j'aimerais bien me pencher dessus. Pour revenir à Cry Vengeance, comme tu l'as dit, il incarne admirablement le déchirement de cet homme qui doute, tiraillé par la haine et les bons sentiments qui renaissent. C'est donc un vrai film noir comme on les aime.
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Message par kiemavel »

Supfiction a écrit :Tiens j'ai eu l'occasion de le voir justement ce Cry Vengeance. Et figure toi que non seulement le film est très sympa mais en plus ta critique est très juste !
Il y a effectivement un petit défaut dans ce film noir, c'est la rapidité avec laquelle la jolie Peggy Harding s'attache au désagréable et peu séduisant (c'est pas une petite balafre à la Scarface qu'ils lui ont fait!) Vic Barron. Mais contrairement à toi, j'apprécie un peu de romance au milieu d'un film noir bien dur. J'aurai juste aimé que cela soit amené avec un peu plus de justesse ou de temps, mais le format ne le permettait probablement pas. Si j'ai regretté au départ que le personnage de Vic Barron ne soit pas joué par une plus grosse tête d'affiche, force est de constaté que Mark Stevens joue très bien (rappelant la brutalité d'un John Payne, en moins animal). Et comme tu l'as dit, il incarne parfaitement le déchirement de cet homme qui doute, tiraillé par la haine et les bons sentiments. C'est donc un vrai film noir comme on les aime.
Pfff ; c'est quand même pas la première fois :D

Content qu'il t'ai plu. Le titre français est idiot puisque ce n'est pas une balafre mais une brulure qui lui mange tout un coté du visage. D'ailleurs, je crois que je n'en avais pas parlé mais on peut s'amuser à observer que Stevens joue de ce visage à deux faces car au tout début on ne voit pas ce visage défiguré ; avant par moments de ne voir que ça. Et enfin, dans chaque séquence on finit par voir ses deux faces, le Vic Baron reconstitué et réconcilié avec lui même ; peut-être :fiou:

D'autre part, et ça non plus je n'en avais pas parlé (je devrais attendre dans les 3 ou 4 ans avant d'écrire sur les films finalement), c'est vraiment le film d'un metteur en scène. Il le démontre par le choix de cadres très surs notamment dans ce qu'il montre des déambulations des personnages dans le village de pêcheurs. C'était son premier film en tant que réalisateur mais il avait pris soin d'engager un chef opérateur très expérimenté ; pas un grand mais quelqu'un en qui il devait avoir confiance et en tout cas qu'il connaissait puisque c'était celui de deux films dans lesquels Stevens n'était que comédien.

Après avoir longtemps pensé que celui ci était le meilleur des deux films noirs réalisés par Mark Stevens, aujourd'hui je pense que son second (Time Table) est encore meilleur ou au moins du même niveau.

Accessoirement, en tenant de tel propos sur Mark Stevens, tu viens de te faire un nouveau copain : chip :D (Le président du Fan Club français)
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Message par Chip »

Oui, bon! un fan de plus pour l'acteur. Il n'empêche que ses deux remarquables films noirs restent inédits en dvd en France et à mon avis le resteront , itou pour GUN FEVER au catalogue de Sidonis, mais qui peine à sortir.
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Message par Chip »

Signalons aussi que les deux films noirs de Stevens sont carrément ignorés par le " licencié" es films noirs Eddie Muller, tout au plus peut-on lire ceci dans " l'art du film noir" (Calmann-Lévy):

"....Steve Fisher donna sans doute à l'acteur Mark Stevens la recette de la série B : bientôt ce dernier produisit et réalisa des films comme la vengeance de Scarface et Timetable, des thrillers qui rappelaient le style clinquant des œuvres de bas étages de Fisher".
A vous de juger.
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Message par Supfiction »

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Vu NEW-YORK CONFIDENTIAL hier soir. Une déception. J'ai trouvé l'intrigue confuse, un peu décousue et surtout un peu trop "clinique". Sans être un documentaire, le film est basé sur une série d'articles sur le syndicat du crime et a pour ambition d'expliquer son fonctionnement au public. Cela manque de chair à mon goût et il n'y a bien que les scènes avec une Anne Bancroft taquine et charmeuse qui m'ont sorti de l'ennui. Le toujours excellent Richard Conte sent immédiatement le danger que représente cette femme qui est la fille du parrain local et, contrairement à ce à quoi on a plus l'habitude dans le film noir, se garde bien de trop s'approcher ou de s'attacher à qui que ce soit pour se préserver du danger. Le scénario n'ira donc pas malheureusement dans cette direction. Au lieu de cela, il privilégie une approche didactique en décrivant le fonctionnement du milieu et les trahisons inhérentes à celui-ci. C'est donc davantage un film policier sur la mafia qu'un véritable film noir. Un film qu'il faut regarder avec attention pour ne pas être perdu parmi les différents ressorts de l'intrigue.
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Message par kiemavel »

Pareil ; mais pas vraiment pour les mêmes raisons que toi. Ce n'est pas tant que le film se contenterait d'être un film policier "classique" décrivant le fonctionnement de la mafia … Déjà , je ne me souviens pas d'un film policier et je ne vois même pas de flics la dedans (mais il est possible que j'en ai perdu des bouts …). On voit la mafia de l'intérieur il me semble ; ses différentes strates : les hauts responsables, les parrains locaux ; les tueurs ; etc…la "législation" bien particulière qui règle les rapports entre les individus . Tout ceci est d'ailleurs très intéressant. C'est le reste qui m'a désappointé, cad la vie privée de cette famille, les relations entre les personnages et comment cela empiète sur le film criminel (par la relation entre la fille du parrain et le tueur).

C'est sans doute volontairement que l'on nous montre des individus très froids dans leurs activités "professionnelles" et très passionnés dans leurs vies privés. Tout ce qui n'est pas réglé par les lois de la mafia est montré comme un vrai bordel sur lequel les puissants / impuissants (même Crawford, tout puissant qu'il est ne représente qu'un maillon lui aussi jetable) n'ont que peu de prises. Le mafieux est emmerdée par sa mère (les séquences avec maman frisent le ridicule ; surtout si on se rappelle Cagney et maman dans White Heat ; ou encore ce que fait Hitchcock de séquences similaires, y injectant de l'humour) … par sa fille "honteuse" d'avoir un papa truand (surtout que ça la fout mal vis à vis de la classe sociale qu'elle vise de rejoindre mais à laquelle elle n'appartient que par le train de vie … amené par papa. Ahahhaaahhh :oops: Ce pauvre Broderick Crawford est aussi et surtout emm … par le "gendre" (là, il faudrait développer). A celà s'ajoute toutes les séquences entre ce gendre (Conte) et la fille à papa (Bancroft) …et ça fait beaucoup de relations passionnées. J'avais qualifié le film de Peyton Place chez les mafieux, me voulant à moitié sérieux. Bref, j'ai beaucoup aimé certains aspects absolument passionnants (c'est quand même l'un des plus intéressants pré-Godfather) ; beaucoup moins l'imbrication vie prof/vie privé des personnages. Ça tient aussi peut-être à la présence centrale du Massif Central Broderick Crawford ; un acteur que j'aime bien quand il joue les brutes, moins la dedans où il doit travailler un personnage plus en profondeur. Ou alors, si c'était un choix de montrer un personnage brut de décoffrage et un beauf, je préfère - et de très loin - les mafieux beauf de Mr. Scorsese (Les affranchis). Il aurait fallu Robinson ou Cagney ; peut-être.
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Message par Supfiction »

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Le tueur s'est évadé / Killer Is Loose (1956)
Avec: Joseph Cotten, Rhonda Fleming et Wendell Corey

Suite au cambriolage d'une banque, la police identifie Leon Poole, le modeste caissier impliqué dans l'affaire, et se rend à son domicile pour l'interpeller. Mais lors de l'arrestation, le détective Sam Wagner tue accidentellement la femme de Poole. Ce dernier jure alors de venger la mort de son épouse. Après avoir joué le jeu du prisonnier docile et rangé durant quelques années, il s'évade de prison à la première occasion, pour mettre sa menace à exécution.


Voici un script original dans le film noir mettant en scène un petit suspense bien mené jusqu'au bout. Il y a quelque-chose de Cape fear avant l'heure (rappelons que le film original date de 1962) dans cette histoire de vengeance d'un homme qui s'attaque à un couple qu'il juge responsable de son malheur. L'honnête Wendell Corey est plein de fureur déterminé mais son personnage reste loin du sadique Robert Mitchum des nerfs à vif. Joseph Cotten a un look parfait de fonctionnaire de police en plein dénie de réalité, refusant de croire en la vengeance implaccable dirigée contre lui à travers sa femme.
Rhonda Fleming, elle, crève l'écran et pourtant elle n'a pas grand chose à jouer.

Difficile en revanche de retrouver la patte de Budd Boetticher dans cette réalisation sans grande envergure. Le tout ressemble davantage à un téléfilm rondement mené qu'à un grand film noir.
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Re: Les films noirs à petits budgets et/ou de cinéastes méconnus

Message par kiemavel »

Je ne l'ai pas revu depuis longtemps mais j'avais pour ma part beaucoup aimé sans avoir remarqué la mise en scène minimaliste. J'avais bien aimé notamment la composition de Wendell Corey, un second couteau que j'aime bien. Dans le film noir, Corey a d'ailleurs été occasionnellement tête d'affiche, notamment dans un film que j'aurais pu évoqué ici : Les bas fonds d'Hawaï (pas terrible). Dans le Boetticher, je l'avais trouvé bien flippant et je me souviens de séquences nocturnes assez belles le montrant roder autour de la maison de Cotten. A revoir. ça me fait penser que je n'ai toujours pas vu un des films criminels du début de carrière de Boetticher, réalisés sous le nom de Oscar (son vrai prénom). Il en a tourné beaucoup durant ses années d'apprentissage (et ils étaient sans intérêt d'après lui) puis presque plus ensuite … 2 : celui que tu as vu et La chute d'un caïd qui est sorti en DVD dans la collection Les Trésors Warner (pas mal non plus).
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Message par Chip »

Parmi les premiers films de Budd Boetticher " l'antre de la folie " avec Richard Carlson et Lucille Bremer est sorti chez Bach films en 2009, collection Spécial polar ,bonus de B.Tavernier, copie correcte. Sam Fuller a dû s'en inspirer pour son " Shock corridor".
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Re: Les films noirs à petits budgets et/ou de cinéastes méco

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Mike Lambert, ingénieur des mines, qui se retrouve au chômage, accepte de conduire un camion pour le compte d'une petite compagnie. Mais celui-ci se révèle trafiqué et, sans frein, Mike parvient cependant à stopper l'engin en emboutissant une vieille voiture appartenant à Jeff Cunningham. Après une altercation avec le propriétaire du camion, il réussit à se faire payer et rembourse Cunningham. Errant sans but dans la ville, ayant trop peu d'argent pour une chambre d'hôtel, Mike se retrouve au café "La Paloma", où il fait la connaissance de la serveuse Paula Craig. Complètement ivre, il la suit, et, à l'aube, dégrisé, il s'aperçoit qu'il a maille à partir avec la justice. Paula accepte de payer la caution pour sa libération, car elle veut se servir de Mike pour un piège machiavélique, de concert avec le banquier Steve Price, son amant, qui veut divorcer de sa femme...

Beaucoup aimé ce FRAMED (1947) de Richard Wallace que Kiemavel avait passablement descendu pour sa direction d'acteur et sa mise en scène.
Il est vrai que si l'on compare Janis Carter à Jane Greer dans "La griffe du passé" , elle ne fait pas vraiment le poids, hein. Beauté froide et très classe, Janis Carter est peut-être moins subtile mais on ne peut pas nier qu'elle a le sens du bricolage pour arriver à ses fins!
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Le jeu de l'actrice dans la dernière scène est d'ailleurs appréciable et apporte un peu de nuance par rapport à son attitude durant tout le film. Finalement le doute est instillé concernant ses sentiments vis à vis de Glenn Ford, alors qu'il est vrai, elle était sur le point de l'empoisonner cinq minutes plus tôt avant de se raviser.
En outre, Barry Sullivan est très bien pour ce qu'il a à faire et Glenn Ford, ici particulièrement séduisant, est parfait dans le rôle de cet homme désabusé, fier et méfiant qui se laisse tout de même mener par cette femme un peu trop belle et apprêtée pour sa situation. Il alterne donc entre l'état de suspicion et de désir avec beaucoup de subtilité. Le scénario est de belle facture entre limpidité et suspense. Rien ne se passe comme prévu qui disait..
kiemavel
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Re: Les films noirs à petits budgets et/ou de cinéastes méconnus

Message par kiemavel »

Tant mieux si tu l'as beaucoup aimé mais contrairement à ce que tu sembles dire, moi aussi je l'ai bien aimé même si dans mon très court texte je me penchais surtout sur les : il aurait fallu … D'ailleurs, je terminais en disant qu'on tiendrait un presque chef d'oeuvre si … Même si une ré-vision pourrait évidemment me faire changer d'avis, jusque là je maintiens la platitude la mise en scène de Wallace et surtout le jeu peu subtil de Janis Carter (même si le parallèle avec Jane Greer n'était pas heureux. Je répondais en fait aux propos d''un critique qui comparait les films de Tourneur et de Wallace). Quant à Glenn Ford, la confiance en lui qui se dégage de ses manières, de sa voix posée, de son allure qui lui confère une sorte de virilité sereine qui n'a pas besoin d'être surexposée ne colle pas très bien avec ce personnage. Son jeu est très introspectif. C'est un homme que l'on voit penser et qui pèse ses paroles. Ce n'est pas un sucker :wink: D'ailleurs, la plupart des autres ne s'y sont pas trompés et lui ont donné surtout des rôles de flics dans le film noir : Le maitre du gang, Règlement de comptes, Allô...Brigade spéciale ; Piège au grisbi, etc…Ce sont ses meilleurs. OK il y a Gilda … mais je n'aime pas beaucoup Gilda non plus. Bref, dans ce genre de rôles, à un bout il y a Bob, inégalable dans ce registre là et, à l'autre, pour moi il y aurait Glenn Ford. Comme je le vois - comme il est dans ce film mais il aurait pu être dirigé contre nature - je ne crois pas à la manipulation. Evidemment, il ne faut pas s'arrêter là mais je vois un raté. peut-être inexistant, hein … Si ça se trouve c'est parce que ce n'est pas Jane Greer. Si cela avait été elle, j'aurais peut-être cru à tout :uhuh:
Dernière modification par kiemavel le 6 janv. 17, 14:55, modifié 1 fois.
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Supfiction
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Re: Les films noirs à petits budgets et/ou de cinéastes méconnus

Message par Supfiction »

C'est vrai mais du coup, lorsqu'il est endormi ou à la merci de sa prédatrice, on se dit qu'il joue la comédie et qu'il n'est pas assez con pour se faire avoir..
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D'où le suspense !
Avec Richard Basehart ou Zachary Scott, tu l'aurais pas eu le suspense mon gars. :lol:
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