Les films noirs à petits budgets et/ou de cinéastes méconnus

Rubrique consacrée au cinéma et aux films tournés avant 1980.

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kiemavel
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Re: Les films noirs à petits budgets et/ou de cinéastes méco

Message par kiemavel »

Jack Carter a écrit :merci pour ces precisions :wink:
j'ai commandé le Garfein sur un site français (attica) fin novembre (18 euros et quelques fdp compris), toujours pas de nouvelles, faut que je les relance ! :evil:
Atelier 13, j'avais acheté chez eux le film Five d'Arch Oboler, film d'anticipation de "fin du monde" dans la lignée du Monde, la chair et le diable, belle copie et stf effectivement.
Il faudrait être sûr que l'envoi a été fait de France. La poste espagnole n'avait pas très bonne réputation à l'époque ou je commandais la bas. Je n'ai pour ma part reçu que 2 commandes sur 3 passées (ça date d'il y a au moins 5 ou 6 ans) mais mon expérience n'est peut-être en rien exemplaire.
Arch Oboler a réalisé quelques films noirs (pas trop obsédé le gars :shock: ). J'en ai vu 1 sur les 2 que j'ai chez moi...et c'est un mauvais : Bewitched, une petite chose de 65 min qui a été édité en Warner Archive.
On peut aussi voir Bwana le diable avec Robert Stack et la superbe Barbara Britton. Le premier ou l'un des premiers films tournés en 3D. C'est parait-il très mauvais mais si un éditeur sortait un Blu 3D, je me laisserais faire.
Jack Carter a écrit :Eddie Muller a choisi les titres et les as presentés en personne en compagnie de Philippe Garnier :wink:
j'avais tout vu sauf High Tide (et Gun Crazy que je connaissais deja bien), pour cause d'autre séance à la même heure, et comme certains titres n'étaient programmé qu'une fois....
Quand j'allais à Paris, j'ai vu aussi quelques présentations sympas, à la cinémathèque et à la vidéothèque de Paris notamment. L'institut Lumière c'est comme la cinémathèque, je préfère ne pas regarder le programme sinon ça donne envie de vendre ici et d'acheter quelques arpents dans les côtes du Rhône :wink:
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Jeremy Fox
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Re: Les films noirs à petits budgets et/ou de cinéastes méco

Message par Jeremy Fox »

C'est ici le fan club de Dan Duryea ? Je m'inscris de suite.
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Jack Carter
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Re: Les films noirs à petits budgets et/ou de cinéastes méco

Message par Jack Carter »

kiemavel a écrit : Quand j'allais à Paris, j'ai vu aussi quelques présentations sympas, à la cinémathèque et à la vidéothèque de Paris notamment. L'institut Lumière c'est comme la cinémathèque, je préfère ne pas regarder le programme sinon ça donne envie de vendre ici et d'acheter quelques arpents dans les côtes du Rhône :wink:
perso, je prefererai etre parisien et frequenter la cinematheque....aucun risque de voir debouler un cycle Phil Karlson, par exemple....on fait dans le haut de gamme et dans le sur à l'Institut Lumiere (quoique proposer un cycle Herzog actuellement avec un bon nombre de ses docs, c'est culotté), j'y vais à peine 7-8 fois par an, hors festival (ou là, niveau prog', on se lache... :) ), alors que j'habite à 10 minutes pourtant.
Mais il y a 15-20 ans, c'etait interessant, des retros De Toth avec des films hongrois hyper rares, un gros cycle Riccardo Freda, pleins de trucs que j'ai loupé...

bon, allez, pour faire un peu saliver (au moins Kevin95), une rareté de Jacques Deray sera projeté samedi prochain, Symphonie pour un massacre, invisible en salles depuis 40 ans apparemment :shock:
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kiemavel
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Re: Les films noirs à petits budgets et/ou de cinéastes méco

Message par kiemavel »

Jack Carter a écrit :
kiemavel a écrit : Quand j'allais à Paris, j'ai vu aussi quelques présentations sympas, à la cinémathèque et à la vidéothèque de Paris notamment. L'institut Lumière c'est comme la cinémathèque, je préfère ne pas regarder le programme sinon ça donne envie de vendre ici et d'acheter quelques arpents dans les côtes du Rhône :wink:
perso, je prefererai etre parisien et frequenter la cinematheque....aucun risque de voir debouler un cycle Phil Karlson, par exemple....on fait dans le haut de gamme et dans le sur à l'Institut Lumiere (quoique proposer un cycle Herzog actuellement avec un bon nombre de ses docs, c'est culotté), j'y vais à peine 7-8 fois par an, hors festival (ou là, niveau prog', on se lache... :) ), alors que j'habite à 10 minutes pourtant.
Mais il y a 15-20 ans, c'etait interessant, des retros De Toth avec des films hongrois hyper rares, un gros cycle Riccardo Freda, pleins de trucs que j'ai loupé...

bon, allez, pour faire un peu saliver (au moins Kevin95), une rareté de Jacques Deray sera projeté samedi prochain, Symphonie pour un massacre, invisible en salles depuis 40 ans apparemment :shock:
Oui, j'avais vu un ou des posts ou tu présentais le programme pendant le festival :shock: Pour André De Toth, je crois me souvenir que Tavernier l'avait même invité ?
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Jack Carter
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Re: Les films noirs à petits budgets et/ou de cinéastes méco

Message par Jack Carter »

kiemavel a écrit :
Jack Carter a écrit : perso, je prefererai etre parisien et frequenter la cinematheque....aucun risque de voir debouler un cycle Phil Karlson, par exemple....on fait dans le haut de gamme et dans le sur à l'Institut Lumiere (quoique proposer un cycle Herzog actuellement avec un bon nombre de ses docs, c'est culotté), j'y vais à peine 7-8 fois par an, hors festival (ou là, niveau prog', on se lache... :) ), alors que j'habite à 10 minutes pourtant.
Mais il y a 15-20 ans, c'etait interessant, des retros De Toth avec des films hongrois hyper rares, un gros cycle Riccardo Freda, pleins de trucs que j'ai loupé...

bon, allez, pour faire un peu saliver (au moins Kevin95), une rareté de Jacques Deray sera projeté samedi prochain, Symphonie pour un massacre, invisible en salles depuis 40 ans apparemment :shock:
Oui, j'avais vu un ou des posts ou tu présentais le programme pendant le festival :shock: Pour André De Toth, je crois me souvenir que Tavernier l'avait même invité ?
oui, De Toth etait venu plusieurs fois, il me semble, dont une en 95, pour le centenaire du cinema.
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Re: Les films noirs à petits budgets et/ou de cinéastes méco

Message par Chip »

Pour en revenir à George Montgomery et répondre à Kiemavel, je signale que l'acteur à réalisé ( et interprété) plusieurs petits films d'aventures comme:
-the steel claw (le dernier train de Santa Cruz) (1961)
- Samar (la vallée de la colère) (1962)
- from hell to Borneo (1964)
- guerillas in pink lace (1964)
- Satan's harvest (1970)
et deux autres films qui ne seraient jamais sortis:
-ride the tiger(1969) avec Victoria Shaw
- convict women

Bertrand Tavernier a dit quelques biens des deux premiers titres tournés aux Philippines. Tourné également aux Philippines Montgomery a joué dans un curieux et intéressant film de guerre où il traquait et tuait avec un plaisir sadique des soldat japonais , le film était produit, écrit et réalisé par Ferde Grofe,jr., dont le nom fut plusieurs fois associé à l'acteur. Ce film est sorti en France en Vf sous son titre original " Warkill" en cassette vhs.
Si tu vas à Barcelone, il existe un restaurant appelé "Los caracoles", où l'on mange de somptueuses paellas, de très nombreuses vedettes le fréquentaient et les murs étaient tapissés de photos dédicacées. Je ne sais si ce restaurant existe toujours, j'y suis allé plusieurs fois dans les années 60- 70, c'est dans une petite rue à gauche des ramblas dans le sens place de Catalogne/ le port.
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Re: Les films noirs à petits budgets et/ou de cinéastes méco

Message par Chip »

Quant à mes bouquins CINE auxquels fait allusion Kermaviel, le nombre avoisine les 500 ouvrages, dont plus de la moitié en anglais, souvent achetés à la défunte librairie " Contacts" qui était située au 24 rue du colisée, dans le 8ème arrondissement, on pouvait y croiser aussi des gens du cinéma, comme Tavernier, Jean -Marc Barr, Eddy Mitchell, pour ne citer que ceux que j'ai rencontrés. La librairie déménagea ensuite pour s'installer au 14 rue St Sulpice, mais elle a comme la plupart de ces librairies , cessé toute activité( because internet). La librairie Galignani rue de Rivoli propose pas mal d'ouvrages en anglais sur le cinéma et les " cinglés du cinéma" d' Argenteuil (fin septembre, tous les ans) est un bon endroit pour trouver des bouquins depuis longtemps épuisés.
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Supfiction
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Re: Les films noirs à petits budgets et/ou de cinéastes méco

Message par Supfiction »

Kevin95 a écrit :Dans Scarlet Street il bouffe tout sur son passage (même Edward G. Robinson et Joan Bennett ont du mal à lui tenir tête). 8)
Quoi ? On parle de Joan Bennett et de Dan Duryea sur mon topic préféré pendant que j'ai le dos tourné. Il faut que j'intervienne!

Oui, Dan Duryea écrase tout sur son passage et il fait sans doute partie de la liste des acteurs dont la renommée n'est pas à la hauteur de son talent immense, mais cela n'enlève rien à Joan Bennett et Robinson géniaux et sexy (je parle de “Lazy Legs" bien entendu) dans ce film lui aussi parfait. Je n'ai vu que des extraits de La chienne de Renoir qui doit surement être très bien mais que je n'imagine pas à la hauteur en dépit de Michel Simon qui doit surement faire au moins aussi bien que Robinson mais qui n'a pas la chance d'avoir Joan et Dan comme partenaires..
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En ce qui concerne Chicago Calling (1951,John REINHARDT) que le bourreau de Béthune vient de chroniquer. Je me suis abstenu de lire ce qu'il en a écrit pour ne pas être influencé, je lirai dans la foulée.
Dan Duryea est tout simplement géant dans ce film. Je l'avais découvert il y a quelques mois pour la première fois dans un rôle de good guy (j'en avais parlé dans ce topic, il faut que je recherche de quel titre il s'agit, peut-être bien Black Angel / L'ange noir) et avait déjà été étonné de sa prestation tant je l'avais longtemps cru abonné aux rôles de crapules (dans le film noir mais aussi dans le western).
Et face à lui les acteurs sont tous bons, du gamin jusqu'au chien. Le film est souvent touchant et la mise en scène est très belle, notamment grâce à l'utilisation magistrale des décors. On y découvre un Los Angeles surprenant et rarement vu en suivant Cannon/Dan Duryea errer dans la ville à la recherche de l’argent nécessaire pour payer sa facture de téléphone lui permettant de recevoir un appel crucial de Chicago. Il faut pourtant savoir que ce n'est absolument pas pour moi un film noir, mais on pardonnera facilement à Kiemavel de l'avoir incorporé dans le topic, Dan Duryea oblige ! Ok il y a des thématiques fortes du film noir, ne serait ce que celle du gars faible qui assiste impuissant au départ de sa femme qui ne supporte plus ses promesses non tenues de rentrer dans le droit chemin (sans doute désœuvré car au chômage, il passe ses soirées à boire avec des potes et ne rentre qu'au petit matin) et part pour Chicago, emmenant avec elle sa fille chérie. Ce début de film est extrêmement fort. On découvre toute la détresse de cet homme qui aime désespérément sa femme et sa petite fille mais qui est incapable de changer le cours de choses. On sent qu'il va s'enfoncer petit à petit dans le trou, surtout lorsqu'on le voit vendre (ou mettre en gage) son instrument de travail pour leur payer le trajet pour Chicago. Leur voiture s'éloigne et là son se dit, Dan Durya oblige, que ça va partir en sucettes, qu'il va se mettre dans de sales draps pour gagner de l'argent à tous prix, faire de mauvaises rencontres (on y croit un moment lors de la séquence du "vol" de billets, toucher le fond et finalement trouver la voie de la rédemption pour éventuellement s'en sortir. Mais ici point de gangster, ni de flingues, ni même de magouilles. C'est en cela que même si il y a ici des éléments du film noir, cela n'en est pas un. En cela, le scénario est un peu décevant (enjeu faible et un côté un poil trop "Jean Valjean") alors qu'à côté de ça, on avait tout pour faire un très grand film : un acteur de génie (que dis-je une légende!) qui n'a peut-être jamais été aussi touchant qu'ici, un casting de seconds rôles impeccable, une très belle mise en scène, une photo et des décors superbes..
Jeremy Fox a écrit :C'est ici le fan club de Dan Duryea ?
Oui c'est bien ici !
Spoiler (cliquez pour afficher)
Voilà, maintenant que j'ai écrit quelques lignes sur ce Chicago Calling sans être influencé, je me lance de suite dans la lecture du texte de Kiemavel..

kiemavel a écrit :
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Chicago Calling ( 1951 )
Réalisation : John Reinhardt
Production : Peter Berneis (Arrowhead Pictures) - Distribution : United Artists
Scénario : Peter Berneis et John Reinhardt
Photographie : Robert de Grasse - Musique : Heinz Roemheld

Avec Dan Duryea (William R. Cannon, Mary Anderson (Mary Cannon), Gordon Gebert (Bobby), Melinda Plowman (Nancy)

William Cannon, un photographe au chômage qui a sombré dans l'alcoolisme rentre chez lui au petit matin après une nouvelle nuit de beuverie pour découvrir que sa femme s'apprête à le quitter emmenant avec elle leur petite fille. Le lendemain, il reçoit la visite d'un employé du téléphone venu pour couper la ligne à cause d'un impayé de 53 $. A peine la ligne est-elle coupée que Cannon voit le télégramme qui avait été glissé sous sa porte l'avertissant que sa femme et sa fille ont été victimes d'un accident de la circulation près de Chicago et que sa fille grièvement blessée doit subir une opération chirurgicale. Sa femme lui promettant de l'appeler dans 48 h pour donner des nouvelles de la fillette, il devient impératif pour Cannon de réunir les 53 $ nécessaire à la réouverture de la ligne car c'est son seul lien avec sa famille. Il se lance immédiatement en quête d'un moyen pour réunir cet argent...
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Un petit retour vers Dan Duryea. Chicago Calling était le 2ème film qu'il avait tourné après la fin de son contrat chez Universal. Voici ce que Dan Duryea déclara dans les années 60 au sujet de ce film : Je ne touchais aucun cachet, mais seulement un pourcentage sur les bénéfices. Il n’y en eu aucun mais je n’ai aucun regret. Ce rôle a fait pleurer mon épouse, et ce fut un énorme compliment de la part de cette personne dont je vénère l’avis. Dan Duryea aurait aussi parfois déclaré qu'il s'agissait de son film préféré. Vu d'aujourd'hui, s'il a participé à des films encore supérieurs, ce tout petit film d'un inconnu avait offert effectivement à Duryea un de ses plus grands rôles, qui plus est dans un film qui reposait en grande partie sur sa performance car il est de presque tous les plans. Et il est merveilleux dans un rôle très inhabituel, interprétant un paumé magnifique, très sympathique malgré ses faiblesses. Je ne vois pas grand monde qui aurait été capable de rendre compte des troubles de cet homme, plein de bonne volonté mais faible, courageux mais malchanceux, lucide sur son état mais apathique à force de tristesse, épuisé mais qui va se montrer capable de retrouver des ressources physiques et morales insoupçonnées.

Reinhardt, scénariste et réalisateur de son film, va très vite à l'essentiel, c'est à dire la plongée dans la ville d'un homme qui va chercher par tous les moyens à rétablir le lien avec sa famille mais avant cela, il dresse très vite le portrait d'un homme à la dérive. Les dernières conversations entre Cannon et sa femme permettent de se faire une idée de ce qui a pu arriver à ce type qui fut un combattant courageux durant la 2ème guerre mondiale, qui fut ensuite un brillant étudiant en photographie mais qui s'est par la suite montré incapable de concrétiser ses espoirs. Cannon a tout perdu à cause de son alcoolisme, à commencer par ses différents emplois qu'il a été incapable de conserver très longtemps. La suite : la perte de confiance en soi, la dépression, l'amour propre qui en prend un coup…et on le retrouve quelques années plus tard, chômeur, passant l'essentiel de ses nuits dehors et délaissant sa famille. Cannon ne semble pas avoir pris la mesure de l'immense lassitude de sa femme car à force de promesses non tenues, celle ci songe sans doute depuis longtemps à le quitter. Néanmoins, l'annonce du départ de sa famille est le coup de grâce. Leur dernière sortie dans un jardin public de Los Angeles, après que Cannon, résigné, semblera avoir accepté la situation est magnifique. Si ces séquences avaient été muettes, à voir en arrière plan leur petite fille jouer ou tourner sur un manège, sur les images d'un couple en apparence très proche et qui ne se quitte pas des yeux, on aurait pu croire à la sortie d'une famille très unie...mais les dialogues dressent un bilan amer. Mary n'en peut plus de cette vie misérable après d'un homme qui part à la dérive alors, bien qu'encore amoureuse de son mari, elle préfère, peut-être momentanément, rejoindre sa famille dans l'est, en attendant de voir s'il est capable de se ressaisir.
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Mais comment y parvenir quand on est dans un tel état de fragilité psychologique et après avoir perdu sa famille ? C'est un double choc émotionnel encore plus fort qui va réveiller Cannon : le très grave accident de sa fille et presque simultanément la perte du seul lien qui restait avec sa famille qui était en train de s'éloigner. A partir de cet enjeu minime, tellement minime qu'il pourrait paraitre ridicule (on coupe le téléphone à un pauvre type…) Reinhardt réussit à transcender un sujet de simple mélodrame et à partir d'un scénario aussi mince que la fragilité apparente du postulat de départ, il construit un film passionnant et en rien larmoyant, la quête de Cannon prenant la forme d'un récit très vivant, presque un récit d'aventure avec pour enjeu immédiat la course contre la montre pour réunir la somme d'argent nécessaire pour rétablir le lien cassé avec sa famille, une quête minuscule, certes, mais qui pourrait relancer Cannon et le mettre sur la voie d'une reconstruction (Reinhardt laisse la fin ouverte et ne répond pas mais malgré son désespoir, une renaissance de Cannon reste possible). C'est en plongeant au coeur de la ville, en s'ouvrant de son problème qu'il va rencontrer en condensé tout ce que la vie peut offrir, les belles et les mauvaises rencontres, mais les aides qui vont lui être apportées seront malheureusement contrebalancées par la malchance qui poursuit Cannon ; la fatalité qui s'abat sur notre personnage principal étant le principal élément noir d'un film qui en apparence repose sur le suspense mais qui est surtout un grand drame social esthétiquement très éloigné des standards Hollywoodien. C'est en fait un des rares exemples de films américains ayant semble t'il subit l'influence directe du néoréalisme italien, une influence que l'on sent chez d'autres américains, Losey ou Dmytryk par exemple mais surtout lorsqu'il travaillèrent en dehors d'Hollywood.

Cela commence avec la localisation de l'appartement de Cannon dans un ilot très ancien du quartier populaire de Bunker Hill, extrêmement photogénique avec ses escaliers et ses maisons pour certaines en bois posées à flancs de colline (qui a parait-il beaucoup changé depuis). On l'a entrevu dans de nombreux films noirs des années 50 (The Brasher Doubloon, The Turning Point, M, Cry Danger, Sudden Fear, Criss Cross, etc…) mais il n'a jamais été utilisé ainsi. Puis pour la façon dont sont filmées les déambulations de Cannon que nous voyons descendre de son quartier de déshérités, marchant au coté du seul compagnon qui lui reste, son chien, dans les rues de Los Angeles. Le film a été tourné au milieu de la foule mais c'est surtout pour toutes les rencontres avec le petit peuple de Los Angeles et pour la façon très naturaliste dont ces séquences urbaines ont été filmées que le rapprochement est le plus évident. La fébrilité de Cannon, son angoisse visible et ses efforts désordonnés mais son énergie véritable vont susciter en ville toutes sortes de réactions. S'ouvrant de son besoin d'argent urgent à qui veut bien l'entendre, il va rencontrer la cruauté ou l'indifférence mais il va aussi recevoir des aides parfois inattendues. D'un coté : les huissiers, la compagnie du téléphone, les banques et les sociétés de prêt vont lui refuser toute aide, voir vont l'enfoncer un peu plus. En dehors des réactions parfois désolées des employés, il ne va en effet rencontrer du coté des institutions et du "monde de l'argent" qu'un mur d'incompréhension…mais il va pouvoir compter en revanche sur la solidarité des gens modestes, et sur leurs aides qui l'est parfois tout autant, mais elles vont lui redonner espoir.
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La propriétaire d'une sandwicherie va lui donner 5 dollars alors qu'elle avait d'abord semblé méfiante et froide. L'honnêteté d'une inconnue qui rapportera l'argent perdu lors d'une sortie au stade de base ball permettra d'entretenir l'espoir. Le contremaitre d'une entreprise de démolition va lui offrir un emploi malgré l'inexpérience totale de Cannon. C'est ainsi qu'une nuit on va le retrouver derrière un marteau piqueur au milieu d'une majorité d'employés noirs plutôt moqueurs en raison de son inefficacité (Je ne sais pas si beaucoup de stars américaines ont eu entre les mains un marteau piqueur ?). Plus tard, on reverra, comme il l'avait promis, l'employé du téléphone venu d'abord pour couper la ligne…et enfin, si du coté de la police certains se montreront indifférents, ne mesurant pas la détresse de Cannon (le policier de Chicago joint au téléphone ne va pas comprendre l'urgence de sa situation), d'autres policiers, ceux de Los Angeles, venus pour l'arrêter à la suite d'un vol commis un peu plus tôt vont lui accorder ce "break" demandé par un Cannon au bout du rouleau (Combien de fois les amateurs de films noirs ont-ils entendu : Please, Give me a Break ? )

Mais celui qui tentera sur le long terme de lui venir en aide et qui sera son compagnon d'infortune sur presque toute la durée du film après une rencontre accidentelle, c'est un autre être abandonné et livré à lui même, un enfant de 8 ans. Bobby, l'orphelin impeccablement interprété par le jeune Gordon Gebert (que l'on peut voir dans d'autres films noirs et thrillers : 14 Heures, La maison sur la colline, L'énigme du Chicago Express ou qui était un des orphelins de Saddle Tramp) est un autre personnage qui peut faire peur mais c'est l'autre très beau personnage de ce film. L'orphelin élevé par sa soeur et le petit ami de celle ci, fuit la maison à la moindre occasion et a grandi bien plus vite qu'un enfant protégé. Il est même un peu trop débrouillard, ce qui pourra éventuellement nuire à Cannon. La relation entre ces deux personnages est magnifique. D'autre part, on peut voir en Bobby, un précurseur du petit fugitif de Engel et Orkin voir un tout jeune Antoine Doinel.
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Sans évidemment rentrer dans les détails, je signale le final exceptionnel. La fuite désespérée de Cannon à travers la ville, traversant les rues et carrefours au milieu des voitures, puis les voies d'un centre ferroviaire, est admirablement filmée par Reinhardt avant un final absolument bouleversant (malgré les transparences employées à priori pour l'unique fois de ce film entièrement tourné en extérieur véritable et au milieu de la foule). Les autres talents : la photographie de Robert de Grasse est magnifique, notamment pour ses plans superbes du quartier de Bunker Hill. Un mot sur le metteur en scène qui est un quasi inconnu. John Reinhardt qui était né en Autriche, est décédé en Allemagne à 52 ans après y avoir réalisé ses deux derniers films. Il était arrivé aux États-Unis à la fin du muet et y a poursuivit une carrière d'acteur dans des rôles et pour des productions modestes. Il passa à la réalisation dans les années 30 et signa des films en langue espagnole destinés au continent sud américain ou au public américain hispanophone. Après une interruption de quelques années, il réalisa enfin entre 1947 et 1951, année de Chicago Calling qui restera son dernier film américain, une poignée de films, presque tous des films noirs, que j'avais pour l'instant laissé de coté et que je vais m'empresser de voir : The Guilty, High Tide, For You I Die, tous les 3 réalisés en 1947 et Open Secret en 1948. Chicago Calling est absolument recommandable même s'il est loin d'être un pur film noir. Dan Duryea mérite un monument...
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Re: Les films noirs à petits budgets et/ou de cinéastes méco

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Supfiction a écrit :
Kevin95 a écrit :Dans Scarlet Street il bouffe tout sur son passage (même Edward G. Robinson et Joan Bennett ont du mal à lui tenir tête). 8)

La chienne de Renoir qui doit surement être très bien mais que je n'imagine pas à la hauteur en dépit de Michel Simon qui doit surement faire au moins aussi bien que Robinson mais qui n'a pas la chance d'avoir Joan et Dan comme partenaires..
La chienne est au moins aussi bien que le Lang mais c'est tout à fait un autre film.
Supfiction a écrit :En ce qui concerne Chicago Calling (1951,John REINHARDT)
Content que tu ai aimé ! Tout ce que tu en dis est excellent et juste. Tu évoques d'autres scènes que moi du début. Je pense que tu as du aimer les scènes d'ouverture entre Dan et sa petite fille…moi aussi mais encore plus celles du parc après que le départ de sa famille ai été "intégré" par Cannon.

Pour ce qui est de l'intégration un brin forcé :wink: dans ce topic, je m'en suis un peu expliqué mais à peine. En dehors de ce que tu soulignes à juste titre, il y a tout de même la malchance qui s'abat sur Cannon tout du long. Bertrand Tavernier insistait sur les accidents de parcours jusqu'à l'accident entre Bobby et le chien qui permet la rencontre des deux "paumés" mais ça continu ensuite : les portes qui se ferment, la perte de l'argent, le coup de fil qui s'éternise, etc…La fatalité qui s'abat sur un pauvre type n'est certes pas une exclusivité du film noir, OK. Et puis il y a cette histoire de "vol", qu'il ne faut pas raconter mais qui aurait pu déboucher sur un autre film. Ici, même l'intervention de la police est détournée donnant une scène inhabituelle donc inattendue..Et j'en ai déjà trop dit. Il y avait potentiellement de quoi fabriquer un film noir mais Reinhardt en fait autre chose, une sorte de chronique sociale extrêmement fragile (c'est ce que tu soulignes en parlant de potentiel non tenu semblant un peu déçu par la seconde partie de l'histoire mais même les prémisses de cette histoire ne repose pas sur grand chose "un mec a qui on coupe le tél." :o mais Reinhardt en fait un conte très vivant, là ou il aurait pu faire dans le larmoyant et le cucu (les histoires d'orphelin made in Hollywood pouvaient être très emmerdante)

Edit : Un autre admirateur de Dan Duryea qui vient lui aussi de découvrir le film me dit que j'ai rêvé les "huissiers" que j'avais énuméré parmi les gens qui causent des ennuis à Dan. C'est rien, j'avais du faire un cauchemar la veille :mrgreen:
Dernière modification par kiemavel le 31 janv. 15, 17:55, modifié 2 fois.
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Re: Les films noirs à petits budgets et/ou de cinéastes méco

Message par kiemavel »

Chip a écrit :Pour en revenir à George Montgomery et répondre à Kiemavel, je signale que l'acteur à réalisé ( et interprété) plusieurs petits films d'aventures comme:
-the steel claw (le dernier train de Santa Cruz) (1961)
- Samar (la vallée de la colère) (1962)
- from hell to Borneo (1964)
- guerillas in pink lace (1964)
- Satan's harvest (1970)
et deux autres films qui ne seraient jamais sortis:
-ride the tiger(1969) avec Victoria Shaw
- convict women

Bertrand Tavernier a dit quelques biens des deux premiers titres tournés aux Philippines. Tourné également aux Philippines Montgomery a joué dans un curieux et intéressant film de guerre où il traquait et tuait avec un plaisir sadique des soldat japonais , le film était produit, écrit et réalisé par Ferde Grofe,jr., dont le nom fut plusieurs fois associé à l'acteur. Ce film est sorti en France en Vf sous son titre original " Warkill" en cassette vhs.
Si tu vas à Barcelone, il existe un restaurant appelé "Los caracoles", où l'on mange de somptueuses paellas, de très nombreuses vedettes le fréquentaient et les murs étaient tapissés de photos dédicacées. Je ne sais si ce restaurant existe toujours, j'y suis allé plusieurs fois dans les années 60- 70, c'est dans une petite rue à gauche des ramblas dans le sens place de Catalogne/ le port.
Je n'ai rien vu de tout ça...Je n'ai pas beaucoup dormi et suis donc assez crevé mais le nom de Victoria Shaw m'a fait lever un cil, ce qui est un début. Ce qui n'est pas nouveau, c'est qu'en dehors des cinéma français et italien, je suis une brêle sur le cinéma d'après 1960…

En ce qui concerne Barcelone, je connais un peu le quartier mais pas la cantine. J'irais au moins y faire un tour pour voir si c'est toujours ce que tu le décrits…
Chip a écrit :Quant à mes bouquins CINE auxquels fait allusion Kermaviel, le nombre avoisine les 500 ouvrages, dont plus de la moitié en anglais, souvent achetés à la défunte librairie " Contacts" qui était située au 24 rue du colisée, dans le 8ème arrondissement, on pouvait y croiser aussi des gens du cinéma, comme Tavernier, Jean -Marc Barr, Eddy Mitchell, pour ne citer que ceux que j'ai rencontrés. La librairie déménagea ensuite pour s'installer au 14 rue St Sulpice, mais elle a comme la plupart de ces librairies , cessé toute activité( because internet). La librairie Galignani rue de Rivoli propose pas mal d'ouvrages en anglais sur le cinéma et les " cinglés du cinéma" d' Argenteuil (fin septembre, tous les ans) est un bon endroit pour trouver des bouquins depuis longtemps épuisés.
Je n'ai pas connu ces librairies. Il devait y en avoir une autre assez proche de celle que tu signales rue St Sulpice, de l'autre coté du boulevard St. Germain en direction de la place St André des arts, à coté d'un MK2 si ma mémoire est bonne…et j'en ai connu une autre dans la galerie du musée Grévin…mais puisque tu parles de la disparition de ces librairies, j'avoue que j'ai beaucoup plus acheté sur internet qu'en magasin. Quant à Argenteuil, je n'y ai jamais mis les pieds. Pour ce qui est du nombre, c'est comme pour les DVD, je ne tiens pas de compte et n'en ai aucune idée. En revanche, j'ai assez peu de bouquin en anglais
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Re: Les films noirs à petits budgets et/ou de cinéastes méco

Message par Chip »

La librairie du passage Jouffroy ( musée Grévin) n'existe plus, depuis quelques années, c'était d'ailleurs un foutoir pas possible.
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Supfiction
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Re: Les films noirs à petits budgets et/ou de cinéastes méco

Message par Supfiction »

Chip a écrit :La librairie du passage Jouffroy ( musée Grévin) n'existe plus, depuis quelques années, c'était d'ailleurs un foutoir pas possible.
La dernière fois que j'y étais passé, Carlotta avait repris les locaux.
kiemavel a écrit : Content que tu ai aimé ! Tout ce que tu en dis est excellent et juste. Tu évoques d'autres scènes que moi du début. Je pense que tu as du aimer les scènes d'ouverture entre Dan et sa petite fille…moi aussi mais encore plus celles du parc après que le départ de sa famille ai été "intégré" par Cannon.
Oui, je trouve le début particulièrement excellent (les scènes tant avec sa fille qu'avec sa femme sont parfaites) et je me frottais déjà les mains en m'apprêtant à voir un très grand film noir.
Je pense que si l'on voit le film en sachant qu'on est effectivement plus proche du drame néoréaliste (influence italienne comme tu l'as dit, et je pense particulièrement au voleur de bicyclettes que du film de gangsters qu'il n'est absolument pas, alors on est nullement déçu.
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Re: Les films noirs à petits budgets et/ou de cinéastes méco

Message par kiemavel »

Supfiction a écrit :Oui, je trouve le début particulièrement excellent (les scènes tant avec sa fille qu'avec sa femme sont parfaites) et je me frottais déjà les mains en m'apprêtant à voir un très grand film noir.
Je pense que si l'on voit le film en sachant qu'on est effectivement plus proche du drame néoréaliste (influence italienne comme tu l'as dit, et je pense particulièrement au voleur de bicyclettes que du film de gangsters qu'il n'est absolument pas, alors on est nullement déçu.
Je n'ai été aucunement déçu alors que moi aussi je m'attendais à un film noir. Je ne connaissais que la situation de départ et comme toi je m'attendais à ce que le type se fourvoie pour trouver l'argent…or, il n'en est rien. Dan Duryea fait même la morale au petit pour lui expliquer que c'est mal de voler :P

Maintenant pour le rapprochement avec le néoréalisme, certains pourraient trouver que j'ai fumé la moquette. ça ressemble plus à La cité sans voiles de Dassin qu'au Voleur de Bicyclette puisque tu cites celui là mais cela dit dans un sens l'idée de départ est la même : comment une perte semble t'il minime ou qui le serait pour quelqu'un qui serait moins dans la mouise, prend une importance vitale pour le pauvre type sur lequel ça tombe. La perte du téléphone qui suit la vente de son appareil photo (son gagne pain) ça renvoie au vol du vélo du héros du film de De Sica. On pourrait aussi parler de la relation avec le gamin…Mais évidement toute proportion gardée :mrgreen: (surtout que je viens de voir un second film de Reinhardt et c'est tout de même nettement moins bon).

Et puis, tout de même, on a rarement filmé à hauteur d'hommes un type comme ça en demande, humble, seul au milieu de la foule dans une ville de Los Angeles qu'on a rarement vu ainsi. Le propos généreux est même souvent assez fin. Un exemple. La 1ère aide modeste que Cannon reçoit vient de la vendeuse ou propriétaire de la "baraque à frites" :mrgreen: . Un démago aurait montré la femme écouter Dan raconter ses malheurs et sortir un billet vert. Non, il l'a montre d'abord méfiante…et une fois qu'elle donne 5 $, Reinhardt montre le cireur de chaussures qui travaille à coté d'elle se foutre de sa gueule. (Non, je ne vais pas raconter le film scène par scène) En plus, le gars est noir. Or, un noir dans un film comme ça aurait du être sympa :arrow: …D'ailleurs les ouvriers du bâtiment, eux aussi de couleur, avec lesquels Cannon travaille toute une nuit se foutent aussi de sa gueule. Si ça se trouve Reinhardt était juste raciste :idea:
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D'ici à ce qu'on apprenne que comme Derrick, c'était un ancien nazi

La suite : For You I Die de John Reinhardt (qui ça ?)
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For You I Die

Message par kiemavel »

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For You I Die ( 1947 )
Réalisation : John Reinhardt - Production : Robert Presnell Sr. et John Reinhardt (Arpi Productions) - Distribution : Film Classics - Scénario : Robert Presnell Sr. - Photographie : William Clothier - Musique : Paul Sawtell. Avec : Cathy Downs (Hope Novak), Paul Langton (Johnny Coulter), Misha Auer (Alec Shaw), Roman Bohnen (Smitty), Jane Weeks (Georgie), Marain Kerby (Maggie)

Alors qu'il lui restait une peine d'un an à purger, Johnny Coulter est contraint, sous la menace de Matt Gruber un tueur endurci qui avait besoin d'un complice, de s'évader d'une prison de Californie. Gruber étant dans l'obligation de se rendre à San Francisco, il demande à Johnny de se mettre au vert dans un petit restaurant de bord de route des environs de la ville où sa petite amie Hope est serveuse, promettant de le rejoindre d'ici une semaine. Arrivé sur place, Johnny croyant avoir affaire à Hope, dévoile son identité à Georgie, la nièce de la patronne du lieu mais celle ci garde le silence et il est même bien accueilli par Maggie, la propriétaire de ce qui est en réalité un camp de vacances. A son retour, lorsqu'elle apprend l'identité de Johnny, Hope prend peur, ne voulant plus rien avoir à faire avec Gruber mais dès le lendemain, Maggie, ignorant tout de son identité, offre un emploi de pompiste à Johnny…
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Si le précédent pouvait faire penser à du De Sica (surtout si on a déjà bien attaqué la bouteille), celui là, c'est plutôt au film de vacances tourné en super 8 par son voisin de palier qu'il ferait penser. Coté budget, Chicago Calling à coté, c'était le Ben-Hur de John Reinhardt. Si on est gentil (et je le suis la plupart du temps ) on va pouvoir trouver un certain charme à tous ces personnages qui ont tous des têtes de Boys et Girls next door. Je parle des principaux personnages, y compris la "star" du film, Cathy Downs, dans son premier rôle après son titre de gloire, La poursuite infernale et de Paul Langton, notre héros du jour (qui le connait ? ). Quant aux autres, les personnages secondaires, ils sont aussi très familiers et feront penser à quelques figures pittoresques que l'on aurait pu croiser enfant, surtout si on a grandi près d'une distillerie. Rien à voir avec l'univers du film noir, direz-vous. Exact ! Faut avoir eu des tontons qui, un peu bourrés à la fin des repas de famille, racontaient des blagues à la chaine ou ressortaient la trompette pour emmerder les voisins…ou bien il faut avoir fréquenté des camping 1 étoile, sans eau chaude dans les douches.

C'est ce genre là, la gargotte de Maggie. Je présente la proprio, le personnel et l'entourage. Maggie, la patronne. Un peu méfiante de prime abord mais finalement très bienveillante. Il faut dire qu'elle est très pieuse ! (Je charrie mais le personnage est sympathique et plutôt touchant malgré les prêches). Le cuistot Smitty est un sympathique alcoolo. Il a un secret de famille qui lui pèse. Aime beaucoup Hope et beaucoup moins Georgie, la nièce de sa patronne. Si le lieu ou se situe toute l'action, son atmosphère et même le rôle que va y jouer Johnny peuvent évoquer Le facteur sonne toujours deux fois, alors Georgie (Jane Weeks), c'est notre Lana Turner ! Attention, faut tenir compte du budget ! Smitty, le cuisinier la présente comme a Tramp de retour de la ville (Mathilde est revenue, voyez le genre ?). C'est une vamp blonde qui a déjà bien roulé sa bosse et qui est bien évidemment immédiatement séduite par le mauvais garçon qui pose ses valises chez Maggie.
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Les seuls clients du camp de vacances, qui posent leur caravane le lendemain de l'arrivée de Johnny, c'est un couple assez extravagant qui casserait un peu l'ambiance s'il y en avait une. Alec Shaw (Misha Auer, également producteur associé du film, c'est pourquoi sans doute on le voit autant faire le pitre) nous fait son numéro d'immigrant russe excentrique. Il joue un chauffeur de taxi qui se pique d'être artiste. Il commence par une imitation (je pense que son déguisement doit correspondre à un personnage du folklore Yiddish ; sans garantie). Plus tard, au clair de lune, il va jouer au chef d'orchestre avant que sa femme, sur une musique gitane, ne se mettre à jouer des castagnettes…Tout ceci étant d'une nullité affligeante. Les deux derniers personnages de l'entourage du motel, eux aussi presque toujours involontairement comiques, sont les deux policiers qui patrouillent dans le secteur et qui s'arrêtent souvent chez Maggie. Mac et Jerry, les 2 flics motocyclés sont surement les moins doués du commissariat. A chaque fois qu'ils croisent Johnny dont le portrait fait la une des journaux, ils s'interrogent : You know, you sure do look familiar et plus tard : Don’t I know you from somewhere ? (C'est presque aussi beau que du Henry Fonda : I Sure Like That Name…Clementine).

Le meilleur pour la fin. Sans rire cette fois. Le film possède malgré tout un certain charme. Cathy Downs interprète l'ex petite amie du seul vrai bad boy de notre histoire. Elle a été mêlée aux mauvais coups de Gruber et ne s'est pas remise de ces erreurs de jeunesse. On a certes du mal à croire au passé inavouable de la très sage Cathy Downs mais son malaise face à Johnny est perceptible. Elle éprouve de la méfiance, voir une forme de rejet mais ça se complique quand ces sentiments vont se doubler d'un intérêt de plus en plus voyant pour le mauvais garçon qui veut s'amender. Paul Langton, que je présentais comme un inconnu ne l'est pas du tout mais si on l'a vu dans des films bien connus, ce fut la plupart de temps dans des rôles secondaires et son nom ne dis pas forcément grand chose même si on connait sa tête. Il est plutôt pas mal et fait du chemin. D'emblée, on sait que ce n'est pas un tueur mais il est tout de même dépité de constater que Hope n'est pas du tout la fille escomptée et le fait qu'elle ne veuille plus rien à voir à faire avec Gruber ne l'arrange pas. Ensuite, la naissance de la confiance mutuelle et plus si affinités donne de bonnes scènes…avec toujours dans le coin la présence de la "rivale", notre vamp blonde Georgie qui s'intéresse de très près à notre pompiste…Et Gruber ? (je termine sur cet insupportable point d'interrogation)

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L'un des clous du spectacle. La représentation du couple Shaw au clair de lune !

On est surpris de voir le nom de William Clothier comme directeur de la photographie d'un film aussi luxueux mais alors pour en profiter pleinement, il va falloir patienter…car Cherry on the Cake, la qualité de la copie disponible sur le DVD zone 1 édité chez Alpha Video (une boite qui doit être jumelée avec Bach Films. Si ce n'est pas le cas, faut les marier) est terrible ! Le commissaire Juve, à qui j'ai demandé conseil, me dit : 0,5/20 mais comme on sait il note sévère. Très facultatif. Je ne me décourage pas. A force de chercher à dénicher des perles rares du film noir, j'ai du atteindre le local à poubelles mais je vais rebrousser chemin.
Spoiler (cliquez pour afficher)
On peut s'amuser de constater que pour illustrer la jaquette du DVD zone 1 du film, l'éditeur a repris l'affiche d'origine...mais en glamourisant Cathy Downs qui n'est jamais coiffée ainsi dans le film puisqu'elle garde sa coiffure "Blanche Neige" tout du long

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Dernière modification par kiemavel le 25 mai 15, 22:52, modifié 1 fois.
Chip
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Re: Les films noirs à petits budgets et/ou de cinéastes méco

Message par Chip »

J'ai quelques titres d'Alpha video, c'est pire que Bach films, un éditeur à proscrire. Paul Langton (1913-1980) ? je connais un peu, vu dans :
- murder is my beat (1955)
- to hell and back (l'enfer des hommes) (1955)
-the big knife (le grand couteau)(1955)
- Jack Slade (Jack Slade, le damné ) (1953)
- the incredible shrinking man (l'homme qui rétrécit)(1957)
- four for Texas (4 du Texas) (1963)
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