Le Western américain : Parcours chronologique III 1955-1959

Rubrique consacrée au cinéma et aux films tournés avant 1980.

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xave44
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Re: Le Western américain : Parcours chronologique Part 3 (55

Message par xave44 »

Jeremy Fox a écrit :Puisque c'est dur de s'y remettre après avoir cassé le rythme durant la période estivale, et que je fonctionne surtout à "tenir mes délais et ma parole", 40 tueurs au plus tard en ligne le 01 septembre ; si ce n'est pas fait, vous pourrez me passer au goudron et aux plumes.
J'attends avec impatience car je ne connais pas les westerns de Fuller et j'ai hâte de les découvrir.
Sur la dernière capture de 3:10, Felicia Farr ressemble beaucoup à Janet Leigh...
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Jeremy Fox
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Re: 3.10 to Yuma

Message par Jeremy Fox »

Supfiction a écrit :
As-tu un avis sur le remake au fait, Jeremy ?

Pas aimé du tout
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Re: 3.10 to Yuma

Message par Supfiction »

Jeremy Fox a écrit :
Supfiction a écrit :
As-tu un avis sur le remake au fait, Jeremy ?

Pas aimé du tout
Je ne me rappelle plus bien mais j'ai le souvenir d'un Russell Crowe très joueur et charismatique. Je me refais l'original pour comparer. Glenn Ford assure aussi, il faut voir comment il emballe Felicia Farr dans le saloon, j'adore!
C'est vrai que le dvd est superbe avec ce noir et blanc.
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Re: 3.10 to Yuma

Message par Supfiction »

Jeremy Fox a écrit : [Spoiler dévoilant le final] Le final symbolique et bouleversant, qui a un peu étonné à l’époque, est à la fois profondément optimiste et assez amoral mais reflète assez bien les idées sincères d’un des réalisateurs hollywoodiens les plus profondément humains qui soient. Après avoir été ennemi durant toute la durée de leur périple commun, le bandit sauve la vie du fermier en acceptant de se laisser emprisonner. "De toute façon, il me sera facile de m’évader de la prison de Yuma" finira t’il par conclure. Sur quoi le fermier lui rétorque que ça ne lui ferait rien et qu’alors, ce ne sera plus son problème une fois sa mission menée à bien.[Fin du spoiler]
Alors, je viens de revoir le film, poussé par l'exégèse de Jeremy Fox. Ayant vu le remake au cinéma il y a quelques années, je suis surpris de découvrir que la fin est assez différente !
Spoiler (cliquez pour afficher)
Si ma mémoire ne me trompe pas, Russell Crowe meurt à la fin, ce qui n'est pas le cas de Glenn Ford.
Cette fin différente dit-elle quelque-chose des deux époques auxquelles ont été fait les deux films ? :? Peut-être, mais je laisse le soin à d'autres de trouver une explication.

Au sujet du film, j'ai été surtout frappé par la beauté de la photographie et des mouvements de caméra magnifiques. La scène où Glenn Ford emballe Felicia Farr est pour moi la plus belle du film, les deux acteurs filmés de très près dégagent un magnétisme total :oops: .

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Le remake n'est assurément pas aussi beau. Néanmoins, je ne serai pas aussi définitif que Jeremy Fox. Pour bien faire il faudrait que je le revoit mais j'ai le souvenir d'un Russell Crowe extrêmement séduisant, joueur et diabolique, davantage peut-être que Glenn Ford dont l'humanité transparait même quand il joue les méchants (en ce sens, il me fait beaucoup penser à James Stewart, deux grands acteurs dont l'héritier moderne est un certain Tom Hanks). Avec Crowe plutôt que Hanks dans le rôle de Wade, le remake devient un film plus violent, surtout avec le rôle du second de Wade, qui frôle le fou sanguinaire..
Dernière modification par Supfiction le 10 août 13, 23:49, modifié 2 fois.
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Re: Le Western américain : Parcours chronologique Part 3 (55

Message par Supfiction »

Je ne crois pas que Jeremy l'ai mentionné mais Felicia Farr et Glenn Ford étaient déjà ensemble à l'écran un an plus tôt dans L'homme de nulle part/Jubal.
Elle fut cette même année 1956 dans un autre grand western, La dernière caravane avec Richard Widmark.

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Forty Guns

Message par Jeremy Fox »

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40 Tueurs (Forty Guns - 1957) de Samuel Fuller
20TH CENTURY FOX


Avec Barbara Stanwyck, Barry Sullivan, Dean Jagger, John Ericson, Gene Barry, Robert Dix
Scénario : Samuel Fuller
Musique : Harry Sukman
Photographie : Joseph F. Biroc (Noir et blanc 2.35)
Un film produit par Samuel Fuller pour la 20th Century Fox


Sortie USA : Septembre 1957


Dans les années 1880, Griff Bonnell (Barry Sullivan), accompagné de ses deux frères Wes (Gene Barry) et Chico (Robert Dix), se rend à Tombstone, Arizona. Sur les ordres du gouvernement pour lequel il travaille, il vient appréhender un homme pour le conduire en prison. A son arrivée, le vieux Marshall John Chisolm lui demande de l’aide pour empêcher le violent Brockie (John Ericson), complètement éméché, de saccager sa ville. Quelques minutes plus tard, Brockie tire d’ailleurs de sang froid et à bout portant sur l’homme de loi. Rendu furieux par la mort de son vieil ami, Griff fonce bille en tête et met Brockie hors d’état de nuire avant de l’emprisonner. Seulement, Brockie est le jeune frère de Jessica Drummond (Barbara Stanwyck), une femme de tête au caractère bien trempé qui à la mainmise sur la ville, aidée en cela par sa bande de 40 hommes prêts à tout pour la protéger. Dès l’arrivée en ville de cette furie suivie de sa ‘horde sauvage’, Brockie est immédiatement libéré en toute impunité ; ce qui déplait fortement aux trois frères Bonnell qui décident de rester sur place pour essayer de remettre bon ordre dans la cité. Ils se rendent sans tarder au Dragoons Ranch de Jessica pour arrêter un de ses hommes accusé de vol postal ; ils découvrent, assis à la table de Jessica, le shérif Logan (Dean Jagger) ; l’homme de loi est en fait secrètement amoureux de Jessica et Griff comprend immédiatement qu’il est à sa botte. Attirée par Griff, Jessica lui propose de travailler pour elle en sous-main, en lui offrant de remplacer Logan au poste de shérif. Droit et intraitable, Griff refuse ; peu de temps après, on lui tend une embuscade dans le but de le tuer. L’auteur de ce traquenard n’est autre que Logan, jaloux de l’attention que porte à Griff la femme qu’il aime plus que tout au monde…

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L’iconoclaste Samuel Fuller aura réalisé seulement quatre westerns au cours de sa passionnante carrière : tout d’abord, à ses tout débuts derrière la caméra, deux se suivant de très près en toute fin des années 40 avec les intéressants J’ai tué Jesse James (I Shot Jesse James) et Le Baron de l’Arizona (The Baron of Arizona) ; puis deux autres qui sortiront eux aussi quasiment en même temps plus de sept ans plus tard, Le Jugement des flèches (Run of the Arrow) ainsi que le film qui nous intéresse ici, son plus célèbre dans le genre, 40 Tueurs. Très mal reçu aux USA, il est en revanche très vite devenu un film culte en France, soutenu en premier lieu par des cinéphiles comme Jean-Luc Godard, celui-ci rendant d’ailleurs hommage à ce western dans son premier long-métrage, A bout de souffle. Dans ce célèbre film ouvrant royalement la voie à la Nouvelle Vague, l’influence de 40 tueurs est évidente : même liberté de ton, même énergie, même inventivité au vu d’un budget restreint, reprises de certaines idées comme par exemple le plan subjectif sur Jean Seberg regardée à travers le journal que Jean-Paul Belmondo plie en forme de longue-vue suivi soudainement d’un autre plan dévoilant le couple enlacé, reprenant presque à l’identique ceux dans Forty Guns de la femme vue à travers la lunette du fusil et la scène du baiser qui s’ensuit ; on retrouve aussi chez Godard quelques autres partis pris de mise en scène déjà présents dans le western de Fuller comme ce surprenant montage elliptique faisant que beaucoup de séquences semblent être coupées en plein milieu avant même d’être terminées, l’enchainement des scènes paraissant parfois incohérent, déstabilisant ainsi expressément le spectateur qui en perd ses repères habituels.

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Cependant, à ce propos, certes plus discrètement et moins brouillons, on trouvait déjà ce même genre de construction et de montage un peu abrupts dans le superbe 3.10 pour Yuma de Delmer Daves, sorti très peu de temps avant. Une chose est certaine, que ce soit Fuller ou Daves qui en soit à l’origine, les deux films démontrent un radical changement stylistique au sein du genre, un regain certain de modernité. Quant au plan en caméra subjective au travers du canon d’une arme à feu, n’oublions pas que William Wellman en avait eu l’idée presque dix ans plus tôt pour son splendide Yellow Sky (La Ville abandonnée) dans lequel on découvrait au détour d’une scène Gregory Peck vu de l’intérieur du fusil tenu par Anne Baxter. Quoiqu’il en soit une fois encore, peu importe qui en soit à l’origine : je tenais juste à rendre à César…! Les deux cinéastes possèdent en tout cas en commun une grande rudesse de ton, une nervosité réjouissante et une grande efficacité d’exécution. A postériori, on note également l’influence de Forty Guns sur des cinéastes tels Sergio Leone (le gros plan sur les yeux prenant toute la largeur du scope) ou Clint Eastwood. Des personnalités aussi fortes et influentes que Martin Scorsese et John Carpenter ne tarissant pas d’éloges à son égard, la mauvaise réception américaine du film à l’époque de sa sortie est aujourd’hui totalement oubliée. Et pourtant on (je) peut encore de nos jours la comprendre. Essayons d’expliquer pourquoi, avouant n’avoir pas été franchement convaincu par l’originalité et la qualité de ce western notamment au niveau scénaristique, car formellement -et malgré quelques effets trop appuyées, partis-pris assez discutables et pour certains ayant bien vieillis- il faut bien se rendre à l’évidence : c’est du grand art, d’autant qu’aidé par la superbe photographie en scope/noir et blanc de Joseph F. Biroc, un chef-opérateur très apprécié également par l’autre franc-tireur ‘couillu’ du cinéma hollywoodien, Robert Aldrich !

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Que ce soit la fulgurante ouverture avec l’apparition de Barbara Stanwyck à la tête de sa ‘horde sauvage’ puis, dès le générique lancé, ce travelling de droite à gauche d’un lyrisme échevelé sur cette même folle cavalcade, les deux duels qui encadrent le film avec cette idée géniale lors du second du shérif tirant sans hésiter sur l’otage (qui n’est autre que la femme qu’il aime) pour ensuite être certain d’abattre le bandit, la tornade presque ‘lynchienne’ dans son esthétisme, ces ahurissants plans-séquences faisant traverser toute la ville par les protagonistes en un seul et épuisant mouvement, etc. : il est clair que du point de la réalisation, le film de Fuller a dû déranger et en étonner plus d’un. C’est à n’en pas douter formellement une belle réussite même si je ne peux pas m’empêcher de trouver la mise en scène parfois bien trop maniérée -voire agaçante- à mon goût ! Mais l’originalité du traitement et la vigueur de la réalisation n’auront cependant pas suffit à me faire apprécier plus que de raison (au vu de son statut) ce classique du western que je suis cependant loin de trouver mauvais et qui se suit sans aucun ennui. Déjà le casting m’a paru assez faible ; hormis le charismatique Barry Sullivan et bien évidemment Barbara Stanwyck (qui cependant, à y regarder de plus près, est loin d’avoir un temps de présence considérable à l’écran, même si son ombre plane durant toute la durée du film), aucun des autres comédiens n’accomplit de prouesses ou bien, au contraire, d’autres ne peuvent s’empêcher de cabotiner à outrance tel l’insupportable John Ericson dans le rôle du jeune chien fou, le frère du personnage joué par Barbara Stanwyck. Quant à Dean Jagger, superbe comédien au demeurant, il ne m’a pas semblé convaincant en amoureux transi, capable des pires forfaits par amour. La partition d’Harry Sukman n’est pas bien fameuse non plus si ce n’est l’entêtante chanson ‘High Ridin' Woman’ qu'interprète merveilleusement bien Jidge Carroll qui sera à nouveau de la très belle séquence de l’enterrement de Wes Bonnell, entonnant jusqu’au bout la très émouvante ‘God Has His Arms Around Me’.

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Mais c’est surtout dans l’écriture et le scénario que le bât blesse à mon avis. On a souvent parlé de concision et de rigueur à son propos alors que je n’y vois principalement que confusion et approximations. Et surtout aucune innovation si ce ne sont quelques idées ici et là ou quelques notations réalistes bienvenues comme celle des bains publics. Car sinon, l’intrigue n’est à vrai dire guère capitvante. Il est évident que Samuel Fuller s’est inspiré de Wyatt Earp pour brosser le portrait de Griff Bonnell ; et d’ailleurs de nombreux détails historiques (dont le parcours du célèbre Marshall) viennent le confirmer. Il s’agit d’ailleurs du personnage le plus fouillé et attachant du film, grâce évidemment aussi à Barry Sullivan qui a vraiment la gueule de l’emploi et qui trouve ici l’un de ses rôles les plus marquants, stoïque en toutes circonstances. En revanche rien d’original lorsqu’il se met à parler de la fin d’une époque, de l’écroulement de ses valeurs et de la disparition prochaine des hommes comme lui, les ‘Gunslingers’. Des dizaines de westerns avant lui avaient déjà tenu ce même discours avec au moins autant d’intelligence et de lucidité à commencer par La Charge des Tuniques Bleues (The Last Frontier) d’Anthony Mann (pour ne citer qu’un seul exemple, le premier qui me vienne à l’esprit). Si la description du caractère de Griff est relativement fouillée, il n'en va pas de même pour ses frères, écrits sans aucune rigueur, sans aucune richesse psychologique. Et puis, pour en venir au personnage que tout le monde a en tête, celui de Jessica Drummond (‘une femme que tous les hommes désirent mais qu'aucun ne peut dompter’ dit la chanson du film), l’un des rôles phares de l’excellente Barbara Stanwyck, il est certes beau mais pas non plus si inédit qu’on a bien voulu le dire. Rappelez vous Ruth Roman dans Je suis un aventurier (The Far Country) d’Anthony Mann, Jeanne Crain dans L’homme qui n’avait pas d’étoiles ( The Man without a Star), …, ou bien évidemment et au-dessus de toutes, Joan Crawford dans Johnny Guitar : comme on peut le constater (et la liste aurait pu s'allonger encore), il y en avait déjà eu quelques-unes des femmes fortes à la tête de grandes propriétés, de bandes ou de villes sur lesquelles elles régnaient d’une main de fer. D’ailleurs, le chef-d’œuvre de Nicholas Ray est, me concernant, autrement plus fou et lyrique, passionné et tumultueux, halluciné et romantique, pour reprendre des adjectifs souvent attribués au film de Fuller.

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Toutes ces comparaisons n’ont pas pour but de dénigrer ou rabaisser le film de Samuel Fuller mais de remettre quelques pendules à l’heure, car on lui attribue désormais trop souvent des innovations stylistiques ou dramatiques qui n’ont finalement pas lieu d’être. Enfin, pour en terminer à l’écriture, l'élément du film qui me pose le plus de problèmes, on trouve également une romance entre les deux protagonistes principaux trop vite expédiée, des dialogues pas spécialement inoubliables (hormis quelques ‘punchlines’ bien senties), un manque de richesse psychologique et de rigueur dans la description des personnages qui font que rares sont ceux qui nous sont attachants, et un rythme totalement chaotique, maintes fulgurances succédant à des séquences étirées un peu gratuitement et péniblement comme celle de la préparation du guet-apens par Logan destiné à tuer celui qu’il pense devoir devenir son successeur en tant que shérif ainsi que dans le cœur de Jessica. On remarque également beaucoup trop de coups de théâtres dont certains assez risibles comme le fait que Chico, alors qu’il était en partance pour la Californie, se trouve au bon endroit au bon moment (à la seconde près) pour sauver son frère aîné : dans un 'serial', ça aurait pu passer mais en l'occurence ça ne fait pas très sérieux. Quant au happy-end final, même si pas voulu par le cinéaste mais imposé par le studio, il s’avère néanmoins très malvenu et a beaucoup de mal à être digeste surtout au vu de tout ce qui a précédé. Ceux qui se gaussent du "Shane, Come Back" du film de George Stevens devraient revoir les dernières images du film de Fuller avec cette maîtresse-femme s’étant transformée d’un coup d’un seul en une midinette courant éperdument après son amoureux qu’elle appelle à l’aide de grotesques petits cris. Quant aux 40 tueurs du titre, si certains se seraient attendus à quelques réjouissantes trognes patibulaires, il n'en est rien ; ils ne représentent en fait qu’un groupe totalement anonyme, surtout là pour exprimer la puissance de leur patronne : une très belle idée par contre que celle-ci !

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Un western âpre et baroque, tour à tour génial et irritant, extrêmement inventif mais aussi un peu stérile, constamment sur la corde raide entre sublime et ridicule par ses partis pris scénaristiques ou de mises en scène, ses ruptures de ton et ses rebondissements inattendus ; un film extrêmement original dans son traitement et son style (un peu lourd parfois) et qui ne peut laisser indifférent d’autant qu’il est visuellement assez impressionnant. Même si on peut ne pas être en phase avec toutes les idées de forme, un film foisonnant et assez délirant manquant cependant par trop à mon goût d’intensité dramatique et de personnages attachants : de Fuller je préfère de très loin Pickup on South Street (Le Port de la drogue) que je trouve bien plus équilibré tout en étant tout aussi fulgurant. Mais Fuller recherche t'il l'équilibre, rien n'est moins sur ! Quoiqu’il en soit, malgré toutes ses évidentes qualités, il n’est pas interdit de trouver ce Forty Guns assez désincarné. Son importance historique dans le processus de modernisation formelle du western demeure néanmoins intacte.
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Re: Le Western américain : Parcours chronologique Part 3 (55

Message par Commissaire Juve »

Miam ! du scope ! :P Mais la distribution n'est pas folichonne.
La vie de l'Homme oscille comme un pendule entre la douleur et l'ennui...
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Re: Le Western américain : Parcours chronologique Part 3 (55

Message par bogart »

Commissaire Juve a écrit :Miam ! du scope ! :P Mais la distribution n'est pas folichonne.

Possible mais ce western est agréable à voir.
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Run of the Arrow

Message par Jeremy Fox »

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Le Jugement des flèches (Run of the Arrow - 1957) de Samuel Fuller
RKO


Avec Rod Steiger, Brian Keith, Sarita Montiel, Ralph Meeker, Charles Bronson, Jay C. Flippen
Scénario : Samuel Fuller
Musique : Victor Young
Photographie : Joseph F. Biroc (Technicolor 2.00)
Un film produit par Samuel Fuller pour la RKO


Sortie USA : 05 Septembre 1957


Quasiment au même moment sortaient en 1957 sur les écrans américains les deux derniers westerns de Samuel Fuller, le précédent n’étant autre que le célèbre Forty Guns (40 tueurs) avec Barbara Stanwyck à la tête de sa ‘horde sauvage’. Formellement, Le Jugement des flèches est un western plus sage, moins ‘maniéré’, mais cependant tout aussi rude, sec et violent. Il nous conte l’histoire assez audacieuse d’un homme déchiré entre deux appartenances, un Sudiste n’ayant pas accepté la défaite de son camp à la fin de la guerre civile et qui, ne supportant pas la résignation de ses compatriotes, décide de partir au Far-West se faire naturaliser indien pour pouvoir continuer à se battre contre les soldats américains. Un postulat de départ inédit et passionnant sur le papier mais qui ne tient malheureusement pas toutes ses promesses, la faute en incombant surtout à l’écriture de Fuller, trop brouillonne et trop arythmique à mon goût pour arriver à me tenir en haleine et à me rendre attachants les personnages. Mais avant de vous faire une fausse opinion de ce classique, je vous livre d’emblée un autre son de cloche qui devrait en rassurer plus d’un ; en effet Jacques Lourcelles écrivait dans son dictionnaire du cinéma (paru aux éditions Bouquins, tout comme celui chapeauté par Jean Tulard) : "Run of the Arrow, dès ses premières images, est si débordant d'expressivité et de sincérité qu'il est difficile quand on le découvre de ne pas éprouver le sentiment qu'on voit le plus beau film du monde". Au moins, vous saurez qu’il est possible de hisser ce western de Samuel Fuller (tout comme le précédent) tout au sommet de la hiérarchie du genre malgré le fait qu’à nouveau il ne m’a que moyennement convaincu. Attention, loin de moi l’idée d’affirmer qu’il soit mauvais ou même ennuyeux ; c’est loin d’être le cas. Juste que pour ma part les westerns de Fuller passent moyennement, probablement peu réceptif à cette âpreté de ton et à cette écriture syncopée !

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Appomattox, 09 avril 1865. Le soldat confédéré O'Meara (Rod Steiger) tire la dernière balle de la guerre de Sécession en atteignant le lieutenant Nordiste Driscoll (Ralph Meeker). Constatant qu’il est toujours en vie, le fantassin l’emmène jusqu'à un hôpital de campagne d'où il assiste à la reddition du général Lee. Ne supportant pas la défaite de son camp, sa haine envers les vainqueurs est telle qu'il ne peut plus cohabiter avec sa famille ni ses compatriotes qu’il critique avec virulence pour leur ‘résignation’. Il décide alors de partir pour le Far West en direction des territoires indiens. Son idée est de se faire accepter par une tribu et devenir un de leurs membres pour oublier sa race et pouvoir continuer à se battre contre les soldats américains. En chemin il rencontre un vieil éclaireur Sioux, Walking Coyotte (Jay C. Flippen), qui lui apprend les rudiments de langage et coutumes de son peuple. Un peu plus tard, les deux hommes sont capturés par le Sioux Crazy Wolf (H.M. Wynant). Considéré comme un renégat pour avoir fait la guerre aux côtés des Tuniques Bleues, Walking Coyotte est condamné à être pendu tandis que O'Meara est sur le point d’être torturé. Mais avant que les sentences ne soient exécutées, Walking invoque et réclame ‘le jugement des flèches’. On ne peut pas faire autrement que de leur accorder de participer à ce cruel rituel indien, une course à mort dont personne jusqu’à présent n’a réchappé. Alors que Walking Coyotte succombe, O'Meara ne doit son salut qu’à la squaw Yellow Mocassin (Sara Montiel) qui le cache et l'emmène dans son village. Premier homme à avoir survécu à la course de la flèche, aucun sioux n'a plus le droit de porter la main sur lui. Il sollicite alors de faire partie de la tribu en épousant celle à qui il doit la vie. Le chef Blue Buffalo (Charles Bronson), convaincu par son courage et ses arguments, accepte sa requête. Mais le jour où un régiment de soldats vient dans la région pour y construire un fort, l’appartenance d’O’Meara à la Nation Sioux est remise en cause…

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Un confédéré tire sur un Nordiste ; il le fouille, trouve sur lui de la nourriture et se met à la dévorer à même le cadavre. Générique. Le ‘trépassé’ s’avère respirer encore ; le Sudiste l’emmène se faire soigner. Là, il assiste à la reddition de Lee ; il est sur le point de tuer le général Grant qui se trouve à portée de son fusil. On l’en empêche en argumentant que ça ne ferait que rendre la défaite de Lee encore plus déprimante. On lui rend sa balle retirée du soldat blessé en lui disant de la garder précieusement puisqu’il s’agit de la dernière tirée lors du conflit. Rentré chez lui, alors qu’on le fête, il se chamaille avec tous ses compatriotes y compris sa mère lors d’un échange d’une rare dureté :
"Je me pendrais si je devais saluer le drapeau de l'union !"
"C'est peut-être la solution à tes problème" lui rétorque sa mère !
Décidant d’abandonner tous ces ‘résignés’, le voilà parti à la recherche de la nation indienne, toujours en guerre contre les Tuniques Bleues : il espère se faire accepter en son sein et se faire même ‘naturaliser’. Ici au moins, il côtoiera des hommes courageux avec qui il pourra poursuivre son combat… A la lecture de ces lignes, on ne peut pas dire que l’intrigue soit conventionnelle ou déjà-vu ! Quelles idées novatrice et passionnantes au contraire ! Des propositions scénaristiques encore plus culottées et captivantes que celles qui prévalaient dans d’autres westerns ‘avec indiens’ tels La Porte du diable (Devil’s Doorway) d'Anthony Mann ou La Dernière chasse (The Last Hunt) de Richard Brooks. Puis on assiste à un cruel rituel (encore jamais vu non plus au cinéma), celui que reprend le titre du film, qui consiste à laisser une chance de survivre à des prisonniers s’ils arrivent à échapper à des guerriers les poursuivant au cours d’une chasse à l’homme perdue d’avance, les pourchassés devant se déplacer pieds nus contrairement aux ‘chasseurs’. Après en avoir réchappé, O’Meara vit une période de paix et de sérénité auprès de sa nouvelle épouse indienne. Mais cet impulsif apatride revanchard, toujours plein de rage et de frustration, se verra à nouveau tiraillé par de cruels dilemmes le jour où un détachement de soldats viendra négocier avec la tribu pour construire un fort aux abords de leur territoire. Si un conflit redémarre par la suite, O'Meara sera-t-il capable de prendre les armes pour massacrer les soldats dont feront désormais partie à coup sûr certains de ses ex-camarades de combat ?

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C’est une des innombrables questions que le personnage joué par Rod Steiger aura à se poser durant le courant du film. Le western de Fuller sondera également les problèmes de différence entre blancs et indiens à propos de religion, de valeurs et de coutumes, abordera les thèmes de l’union nationale, de la cassure qu’a amené la Guerre Civile, des contraditctions de la société américaine, mais se concentrera surtout sur la crise d’identité de son antihéros, "un bloc de haine" comme le décrira lui-même le cinéaste. En effet, O’Meara est un être frustre, haineux, cabochard et pas forcément sympathique. Mais tout ceci ne sera malheureusement qu’effleuré, le film ne durant qu’à peine 85 minutes. Ceux qui penseront trouver un document sociologique sur les Sioux devront également déchanter car contrairement à ce qui a souvent été écrit, hormis la romance entre Rod Steiger et Sarita Montiel (comédienne guère inoubliable et ici doublée en anglais par Angie Dickinson), on n’assiste pas à grand-chose de la vie au sein du campement indien ; beaucoup moins en tout cas que dans de nombreux autres westerns se déroulant en grande partie chez les Natives et notamment Au-delà du Missouri (Across the Wide Missouri) de William Wellman, La Flèche brisée (Broken Arrow) de Delmer Daves, La Rivière de nos amours (The Indian Fighter) de André de Toth ou encore les nombreux films pro-indiens de George Sherman. Et c’est d’autant plus dommage que Samuel Fuller avait trouvé un lieu idyllique pour y filmer le campement : les quelques plans d’ensemble sur ce paysage sont admirables et superbement photographiés par Joseph F. Biroc. Mais contrairement aux grands chantres de la nature, Fuller semble ne pas s’en être soucié plus que ça, n’exploitant pas les sites traversés avec le lyrisme attendu, n’en faisant pas des ‘personnages’ à part entière. Le cinéaste a tout à fait le droit d’avoir une vision aussi peu poétique de la nature, mais il est ensuite forcément compréhensible que les admirateurs de Delmer Daves ou d'Anthony Mann se sentent un peu frustrés. Si le film en désappointera certains de ce point de vue, c’est donc surtout en fonction de leurs attentes et non de la mauvaise qualité de la mise en scène de Fuller.

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Produit par une RKO à bout de souffle, juste avant qu’elle ne mette fin à ses activités quelques semaines après (le film fut donc finalement distribué par la Universal), le faible budget de ce western n’est pas là pour aider cette décevante appréhension 'plastique' et l’on regrette donc amèrement les répétitifs plans de jambes ‘galopantes’ pour pallier aux cascadeurs lors des deux fameuses séquences du ‘jugement des flèches’ (l’excuse comme quoi Rod Steiger, légèrement blessé, ne pouvait pas courir et que l’on en est venu à ce subterfuge pour pallier à ce problème n’est guère crédible, ou alors l’idée était mauvaise), la perruque ridicule de Jay C. Flippen, quelques vilaines transparences et certains effets spéciaux totalement ratés comme ceux des oiseaux ou de la course des flèches dans le ciel... La majeure partie des moyens financiers octroyés au film semble être passée dans l’attaque finale des indiens contre le fort en construction. Alors que jusqu’à présent, le budget avait semblé un peu étriqué, quelques centaines de figurants font leur apparition pour une séquence d’une sécheresse et d’une violence rare, le montage cut de plans de soldats transpercés de flèches faisant son effet avec une redoutable efficacité : du très grand Fuller, hargneux et sans compromis, à la fois spectaculaire et abstrait, la violence se déchainant avec absurdité, les hommes tombant comme des mouches sans qu’on ait eu le temps de voir d’où venaient les balles et les flèches, au milieu d’un chaos indescriptible, cernés par la poussière soulevée par les combats ! Une séquence de bataille à l’aspect fantomatique qui est le clou du film. D’autres images ou scènes de violence demeureront également difficilement oubliables telles celle des sables mouvants (aussi impressionnante que rapide) ou encore celle de la torture de Ralph Meeker par les indiens. Tout se déroule en hors champ mais le cri strident et lancinant poussé par l’homme déchiqueté vif est presque insoutenable : il le sera aussi pour O’Meara qui ne pourra faire autrement que d’achever ses souffrances, geste qui lui fera ouvrir les yeux et prendre conscience de son humanité (ce qui revient à dire que les indiens ne le sont pas, humains ; toujours cette même ambigüité, assez désagréable).

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Là où le bat blesse également, comme déjà dans Forty Guns, c’est le casting ; il faut dire que l’écriture des personnages ne nous rend pas ces derniers très ‘vivants’ ni franchement attachants et que nous avons du mal à éprouver de l'empathie pour qui que ce soit. Les premiers comme les seconds rôles ne sont guères mémorables, pas même Rod Steiger dont la méthode de l’Actors Studio mal digérée s’avère parfois pénible. Quant à l’idée de faire jouer un indien par Jay C. Flippen, elle n’est pas vraiment finaude. Les amateurs de cinéma hollywoodien sont tellement habitués à voir cette trogne très connue dans la peau de shérifs ou soldats américains, voire de flics ‘bien blancs’, que du coup il n’est absolument plus crédible ici (sa perruque n'arrangeant pas ses affaires). Ce qui n’est pas le cas de Charles Bronson qui n’en était plus à son premier indien et qui lui, en revanche, est totalement convaincant dans un rôle malheureusement assez chiche. Brian Keith interprète le protagoniste le plus sensé du film, quasiment le seul à promouvoir des valeurs et des idées pacifiques, unique symbole d’une force positive : il sera tué rapidement après néanmoins avoir partagé une séquence dialoguée assez enthousiasmante avec Rod Steiger, expliquant à ce dernier pourquoi il n’avait pas à éprouver de la haine pour les vainqueurs, pourquoi il ne devait pas cracher sur le drapeau, terminant sa leçon de principes en lui faisant un parallèle avec la fable de Philip Knowland, le protagoniste malheureux du roman ‘the Man without a Country’ de Edward Everett Hale. Un superbe moment de respect, d’écoute et de compréhension mutuelles. Dommage que l’ensemble n’ait pas été de ce niveau d’intelligence, de culture et de lucidité. Car au final, dans son film qui ne prend partie pour personne (ni pour les indiens dont la sauvagerie n’est pas ‘humaine’, ni pour les révoltés haineux comme O’Meara, ni pour les opportunistes "petits Custer frustrés" comme celui qu’interprète Ralph Meeker), chaque camp ayant ses fauteurs de trouble, Fuller semble ne pas avoir trouvé comment mettre fin au dilemme qui ronge son héros, nous laissant sur notre faim en nous invitant à faire notre propre conclusion : un peu facile ! Et puis j’avoue avoir aussi été gêné par l’argument trouvé par le cinéaste-scénariste pour faire comprendre à Rod Steiger qu’il ne pourrait jamais vraiment être un vrai Sioux : par le fait d’être incapable de supporter la souffrance que l'on inflige à des êtres humains par la torture (sic !) Si on ne connaissait pas bien le réalisateur, on pourrait y voir une pointe de racisme assez déplaisante. Quant au parallèle entre confédérés et indiens d’Amérique, il n’est guère moins léger, guère moins simpliste !

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Par son écriture et sa mise en scène, un western pas spécialement harmonieux et qui pourra de ce fait semer la confusion et faire perdre quelques repères aux amoureux du classicisme. Les amateurs de dissonances et de raccourcis forcenés seront au contraire probablement plus enclins à apprécier ce film expressément peu aimable. Un western de 1955 possède énormément de points communs avec Le Jugement des flèches, de son contexte historique similaire et véridique à son personnage principal d’américain inculte et somme toute assez naïf qui a des difficultés à s’adapter à un monde changeant trop vite pour lui, jusqu’à son final fortement désappointant : il s’agit de La Charge des Tuniques Bleues (The Last Frontier) d’Anthony Mann qui avait également des similitudes avec 40 tueurs dans son discours sur la fin d’une époque et de certains ‘hommes de l’Ouest’. Moins reconnu et moins célébré que les deux westerns de Fuller, je ne peux néanmoins pas m’empêcher à cette occasion de fortement le recommander déjà par le fait de le considérer comme une très belle réussite mais aussi pour essayer de faire comprendre tout ce qui m’a ravi dans ce film et qui m’a un poil rebuté dans les deux Fuller qui, à mon avis, manquent singulièrement de subtilité. Mais ce n'est évidemment pas parce que j'ai été mitigé à son encontre que Run of the Arrow ne mérite pas qu'on s'y arrête.
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Re: Le Western américain : Parcours chronologique Part 3 (55

Message par Jack Carter »

il m semble qu'une sortie chez WS n'est plus d'actualité depuis un moment deja, non ?
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Jeremy Fox
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Re: Le Western américain : Parcours chronologique Part 3 (55

Message par Jeremy Fox »

Jack Carter a écrit :il m semble qu'une sortie chez WS n'est plus d'actualité depuis un moment deja, non ?
Je ne sais plus où ça en est de cette arlésienne.
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Rick Blaine
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Re: Le Western américain : Parcours chronologique Part 3 (55

Message par Rick Blaine »

Jeremy Fox a écrit :
Jack Carter a écrit :il m semble qu'une sortie chez WS n'est plus d'actualité depuis un moment deja, non ?
Je ne sais plus où ça en est de cette arlésienne.
J'avais compris que la tendance était plutôt à l'annulation pure et simple.
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Jeremy Fox
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Re: Le Western américain : Parcours chronologique Part 3 (55

Message par Jeremy Fox »

Rick Blaine a écrit :
Jeremy Fox a écrit :
Je ne sais plus où ça en est de cette arlésienne.
J'avais compris que la tendance était plutôt à l'annulation pure et simple.
Dommage :|
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Quantez

Message par Jeremy Fox »

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Quantez, leur dernier repaire (Quantez - 1957) de Harry Keller
UNIVERSAL


Avec Fred MacMurray, Dorothy Malone, John Gavin, James Barton, Sydney Chaplin
Scénario : R. Wright Campbell
Musique : Herman Stein
Photographie : Carl E. Guthrie (Eastmancolor 2.35)
Un film produit par Gordon Kay pour la Universal


Sortie USA : 06 Septembre 1957


Je me répète et l’ai déjà écrit à maintes reprises, mais ça se confirme au fur et à mesure de mon visionnage d’une majorité de westerns américains par ordre chronologique de leurs sorties en salles aux USA : l’âge d’or de la série B westernienne à l’Universal est désormais bien derrière nous en cette année 1957 ; un âge d’or révolu que je fais s’étendre de 1948 à 1953, période au cours de laquelle les aficionados étaient quasiment certains (tout du moins dans une très large proportion) de prendre énormément de plaisir à la vision d’un western produit par le studio. Ensuite, à vue de nez, le rapport semble être descendu à environ 50% de chances d’arriver à se réjouir devant une de ces séries B en Technicolor ; soit elles s’avéraient de plus en plus bâclées (oubliant qu’avaient été ‘interdits’ durant cette précédente époque bénie, les transparences durant les scènes d’action ainsi que les décors studios étriqués pour les extérieurs-nuits) ou bien alors négligeaient l’essentiel, de nous divertir justement, se prenant parfois trop au sérieux en voulant imiter les ‘sur-westerns’ prestigieux des grandes compagnies comme c’est le cas pour ce film signé Harry Keller. Après avoir été un monteur prolifique durant les années 40 (notamment sur le très beau L'ange et le mauvais garçon avec John Wayne), Harry Keller travailla à de nombreuses reprises pour le genre, mettant en scène une dizaine d’obscurs westerns de série B (voire Z) pour la Républic, qui ne sont d’ailleurs jamais sortis dans notre contrée. Quantez est le premier de sa série de quatre westerns pour la Universal, les deux derniers, les plus connus, ayant tous deux Audie Murphy comme acteur principal. Fred MacMurray jouera en revanche de nouveau dans celui qui se situe entre Quantez et les deux sus-cités, La Journée des violents (Day of the Badman). Tous étant sortis en DVD, nous aurons bientôt l'occasion de revenir sur ce cinéaste méconnu.

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Cinq cavaliers traversent le désert à vive allure ; on apprend qu’il s’agit d’une bande de hors-la-loi fuyant les hommes du shérif après avoir accompli un hold-up qui a mal tourné, causant la mort du caissier de la banque. Les bandits espèrent passer rapidement au Mexique avec leur butin, mais leurs chevaux sont fourbus ; ils décident donc de s’arrêter dans la ville de Quantez, proche de la frontière mexicaine, pour faire se reposer leurs montures. Ils sont très étonnés en y arrivant de constater qu’elle est devenue une ville-fantôme mais comprennent rapidement que ses habitants ont fui à cause des Apaches repartis sur le sentier de la guerre. Les Indiens sont d’ailleurs tout près et attendent le lever du jour pour attaquer le petit groupe. Le fourbe Gato (Sydney Chaplin), l’un des hommes du gang, vient retrouver les Apaches à la nuit tombée pour leur proposer de trahir ses acolytes afin que l’argent dérobé serve à la cause indienne ; il fut en effet élevé par les Indiens et il leur en est depuis toujours reconnaissant. Pendant ce temps, dans le saloon où ils ont décidé de passer la nuit, la tension règne entre les autres membres de la bande. Cette dernière est composée du brutal et vicieux Heller (John Larch), le chef, qui a amené avec lui Chaney (Dorothy Malone), sa maîtresse, de Teach (John Gavin), un jeune fou de la gâchette, ainsi que de Gentry (Fred MacMurray), un homme peu bavard qui semble garder un secret bien enfoui sur sa réelle identité. Heller a du mal à garder son autorité et à maintenir le calme d’autant que la blonde Chaney tente de faire tourner toutes les têtes espérant trouver un homme avec qui s’enfuir loin de son vindicatif amant dont elle n’arrive pas à se défaire…

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Un petit groupe se retrouvant malgré lui cloitré dans un lieu étriqué ; les indiens à l'extérieur, menaçant de les attaquer d’un moment à l'autre ; une femme qui attise la convoitise de tous ses compagnons d'infortune ; la montée de la suspicion, de la jalousie, des traîtrises... Une situation assez connue des amateurs de westerns Universal se souvenant pour le pire de Soulèvement en Arizona (Stand at Apache River) de Lee Sholem, pour le meilleur du cultissime Quand les tambours s’arrêteront (Apache Drums) de Hugo Fregonese, tous deux avec pour acteur principal Stephen McNally. Un postulat de départ destiné à mettre en scène un huis-clos plein de tension au cours duquel les protagonistes vont se déchirer. Pour qu’un tel film avec unité de temps et de lieu soit réussi, il faut selon moi un scénario rigoureux, des dialogues cinglants, une mise en scène imparable et des comédiens chevronnés. Malheureusement, ce n’est pas le cas pour ce Quantez pourtant très apprécié par Bertrand Tavernier qui, paradoxalement, n’est pas très tendre envers les ‘sur-westerns’ psychologiques de John Sturges, alors que selon moi des films comme Le Trésor du pendu (The Law and Jake Wade)ou Le Dernier train de Gun Hill (Last train from Gun Hill, pour ne parler que de ses westerns 'approchants', fort axés sur la psychologie, ne boxent absolument pas dans la même catégorie, très nettement supérieurs, autrement plus captivants, autrement plus stylés et mieux rythmés. Pour en revenir au film d'Harry Keller, après des scènes d’exposition en extérieurs qui attirent l’attention par l’efficacité de la mise en scène et la beauté des paysages traversés assez bien mis en valeur, dès l’arrivée à Quantez d’où les protagonistes ne partiront plus, il devient très rapidement aussi laborieux que sentencieux, statique, intempestivement bavard et pour tout dire péniblement théâtral. Du mauvais théâtre !

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En effet, la psychologie des personnages n’est guère poussée et les dialogues peu enthousiasmant. Dans le même style, l’intéressant scénariste R. Wright Campbell avait bien mieux maitrisé son intrigue pour le premier film de Roger Corman, Cinq fusils à l’Ouest (Five Guns West), et son précédent western écrit pour Fred MacMurray, Une arme pour un lâche (Gun for a Coward) d’Abner Biberman, se révélait bien plus attrayant. De plus, hormis Fred MacMurray très bien en gunfighter fatigué, le reste du casting est loin d’être concluant : d’un côté John Gavin, et plus encore Sydney Chaplin, s’avèrent totalement transparents, alors qu’au contraire Dorothy Malone et John Larch en font des tonnes sans jamais nous convaincre. Les auteurs font toutes les cinq minutes sursauter l’actrice en lui faisant pousser de pénibles cris de frayeurs, alors que John Larch, grimaçant jusqu’à plus soif, se prend pour Dan Duryea sans jamais lui arriver à la cheville ; résultat, au lieu d’être effrayant, il devient très vite risible et du coup la tension n’arrive jamais à s'installer. Ce n’est pas l’arrivée fantomatique de James Barton à la mi-film qui arrange quoique ce soit, son personnage n’apportant rien de spécial à l’intrigue ni même au film, si ce n’est quelques minutes de chansons accompagnées à la guitare, guère plus enthousiasmantes que le ‘True Love’ horriblement interprété par Dorothy Malone et qui écorchera quelques oreilles au passage. Mais à la limite, on préfère encore les séquences se déroulant dans le saloon même si elles sont de plus bizarrement éclairées (comme si nous étions sur une scène de théâtre) à celles au cours desquelles le terne Sydney Chaplin en sort pour aller discuter avec les indiens. Ces scènes sont non seulement strictement inintéressantes mais également filmées dans des décors de studio qui n’auraient pas dépareillés dans une série Z, avec rochers en cartons et fond nocturne totalement factice ; pas très agréable à regarder et nous faisant totalement sortir du film.

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Dommage que le film soit à ce point raté, artificiel, pompeux et enfin pénible par trop de redites, car Harry Keller s’en sort plutôt bien en revanche dans sa mise en scène ; grâce à lui, les dix dernières minutes, qui débutent alors que le jour se lève, nous sortent de notre ennui et de notre torpeur. Elles devraient certainement aussi recevoir l'aval des amateurs d’action car bien filmées, bien montées et correctement réalisées, bref, plutôt efficaces. Les indiens au galop ont de l'allure et l’idée du pont suspendu coupé en deux, les deux parties tombant verticalement le long des falaises, est une belle trouvaille aussi bien scénaristique que visuelle. Un honnête Fred MacMurray, dix premières et dix dernières minutes plutôt plaisantes ne suffiront malheureusement pas à faire oublier la laborieuse majeure partie de ce film dont on a hâte qu'il se termine malgré sa courte durée. Mais je pense sincèrement que certains amateurs de huis-clos devraient pouvoir y trouver matière à réjouissances ; Bertrand Tavernier est là dans les bonus du DVD) pour le confirmer.
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Rick Blaine
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Re: Le Western américain : Parcours chronologique Part 3 (55

Message par Rick Blaine »

Tiens, je l'ai vu il y a quelque jours. Je suis entièrement d'accord avec toi, qu'est-ce que c'est pompeux! Pourtant je suis plutôt client des huis-clos, mais là c'est insupportable.

Il n'y a effectivement que le tout début et la toute fin qui soient intéressants.
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