Le Western américain : Parcours chronologique III 1955-1959

Rubrique consacrée au cinéma et aux films tournés avant 1980.

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kiemavel
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Re: Le Western américain : Parcours chronologique Part 3 (55

Message par kiemavel »

daniel gregg a écrit :
kiemavel a écrit :
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4ème intervention Daniel. çà commence à faire beaucoup. Beaucoup trop. Tu t'accroches mon cochon.

Je dois encore avoir manqué quelque chose (de respect à quelqu'un d'après ce bon Daniel). Une opinion Jeremy ? NON ? Sérieux, Je m'inquiète. Serais-je aussi peu doué pour les relations sociales ?..
.Bon, en réalité, le seul truc qui m'avait échappé c'est que ce retour a vraiment du mal a passer mais je voulais en avoir confirmation.
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Mais que dans ton délire (Je n'ai pas d'autres mots) tu intègres un autre membre sous prétexte qu'il a eu le malheur d'échanger avec moi est INACCEPTABLE. Pris d'un doute (oui je suis un peu naïf) je viens d'aller vérifier ses messages et à aucun moment il n'est entré en conflit avec qui que ce soit. Il a même échangé avec toi mais problème, Il a eu le tord depuis d'échanger avec moi (mais ce délire d'un multi Doc Boone :shock: )... tout comme d'ailleurs Vanning en son temps et c'est pourquoi tu le cites. Ce qui me fait donc un ex partisan et un en cours de l'être...On ne peut même pas jouer à la belote. Celà dit, je dois le confesser, l'un est mon cousin et l'autre mon voisin (çà soulage). Et puis toi mon Daniel t'as plein de copains alors prends la vie du bon coté et détends toi un peu.
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C'est ton maximum çà ? Tu as encore été pris d'une fulgurance ce soir. Tu pètes la forme mon Daniel. Comme d'hab. tu lances ta grenade et tu mets la flèche. Bref, tu sais que moi si çà te rend "silencieux" çà m'arrangerait plutôt mais faut que tu continues comme çà.

Par contre, je persiste au sujet de Doc Boone. Va pas faire pareil avec lui. Il a rien fait à personne le pauvre...Tu sais quoi , tu devrais même t'excuser parce que même en terme de vocabulaire et de style "....forum de merde", c'est pas du tout du Doc Boone.
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Re: Le Western américain : Parcours chronologique Part 3 (55

Message par Doc Boone »

Rentré il y a environ 3/4 d'heure, après une journée de travail et une réunion associative de deux bonnes heures, je viens faire un tour ici pour me détendre, lire quelque(s) article(s) intéressant(s), voire sourire à l'une ou l'autre intervention, pour découvrir qu'en fait, je me suis fait poignarder dans le dos en mon absence, pour une raison qui m'échappe un peu ... Marquer son territoire, rester entre gens de bonne compagnie, qui ont la 'carte', qui ont un esprit fin et la critique juste ... ? En quoi ai-je dérangé ?
Certes, je veux bien reconnaître quelques jeux de mots foireux (1 ou 2), une ou deux phrases sentencieuses, so what ... (Que celui qui n'a jamais ... ; et pour être allé faire un tour dans certains messages, ...)
Lors de cette réunion, il m'est arrivé, pour détendre l'atmosphère, de faire des vannes à trois sous, auxquelles les gens présents ont bien voulu rire. Soit ils sont aussi lourdingues que moi, donc, ou alors, plutôt, c'est qu'ils ont suivi une règle du jeu social, l'hypocrite politesse, car je les connais tous. Ici, cachés derrière des pseudos, les gens peuvent se permettre de juger, préjuger, dénoncer, pointer du doigt ceux qu'ils considèrent comme des beaufs méprisables.
Merci Kiemavel, d'avoir bien compris que 'forum de merde' n'était ni mon vocabulaire, ni surtout, ce que je pensais de ce forum ...
Pour l'heure, je vais dormir.
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Jeremy Fox
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Re: Le Western américain : Parcours chronologique Part 3 (55

Message par Jeremy Fox »

L'heure de passage de La Dernière Caravane sera probablement avancée en tout début de semaine prochaine histoire de faire retomber les tensions. Commencez à faire vos bagages ! Les plus réticents seront attachés à la roue des chariots.

Blague à part, si je devais citer l'image dans un western qui est restée gravée le plus longtemps en moi, ce serait bien celle-ci, celle de Todd le Comanche menotté à la roue.

A suivre...
homerwell
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Re: Le Western américain : Parcours chronologique Part 3 (55

Message par homerwell »

Jeremy Fox a écrit :Blague à part, si je devais citer l'image dans un western qui est restée gravée le plus longtemps en moi, ce serait bien celle-ci, celle de Todd le Comanche menotté à la roue.
Moi ce serait John Wayne faisant des tourniquets avec sa winchester dans Stagecoach.
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Jeremy Fox
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Re: Le Western américain : Parcours chronologique Part 3 (55

Message par Jeremy Fox »

homerwell a écrit :
Jeremy Fox a écrit :Blague à part, si je devais citer l'image dans un western qui est restée gravée le plus longtemps en moi, ce serait bien celle-ci, celle de Todd le Comanche menotté à la roue.
Moi ce serait John Wayne faisant des tourniquets avec sa winchester dans Stagecoach.
Oui, un des zooms-avant les plus marquants.
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Re: Le Western américain : Parcours chronologique Part 3 (55

Message par Jeremy Fox »

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Demi-Lune
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Re: Le Western américain : Parcours chronologique Part 3 (55

Message par Demi-Lune »

Mission Impossible 2 ! :mrgreen:
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Jeremy Fox
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Re: Le Western américain : Parcours chronologique Part 3 (55

Message par Jeremy Fox »

Demi-Lune a écrit :Mission Impossible 2 ! :mrgreen:

:mrgreen:


J'étais en train de faire les captures et je m’émerveillais du talent plastique de Daves j'ai voulu faire profiter

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Message par L'étranger... »

Jeremy Fox a écrit :Image
N'empèche ce plan est superbe, j'adore ! :shock:
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The Last Wagon

Message par Jeremy Fox »

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La Dernière caravane (The Last Wagon - 1956) de Delmer Daves
20TH CENTURY FOX


Avec Richard Widmark, Felicia Farr, Susan Kohner, Tommy Rettig, Stephanie Griffin
Scénario : James Edward Grant, Delmer Daves & Gwen Bagni
Musique : Lionel Newman
Photographie : Wilfred M. Cline (DeLuxe Color 2.35)
Un film produit par William B. Hawks pour la 20th Century Fox


Sortie USA : 21 Septembre 1956


1950 : La Flèche brisée (Broken Arrow) avec James Stewart, aujourd’hui célèbre pour avoir été décrété film qui aurait lancé la vague des westerns pro-indiens (même s’il y en eut quelques-uns avant lui, c’est effectivement le premier à s’être fait autant remarquer et à devenir immédiatement un classique du genre pour son approche frontale du sujet). Une belle réussite, un film sensible et honnête au propos généreux qui se déroulait déjà au milieu des superbes paysages de l’Arizona, ceux du territoire des Apaches. 1954 : L’Aigle solitaire (Drum Beat) avec Alan Ladd, nouveau western historique bien plus sombre ; encore une honorable réussite mais beaucoup plus bancale malgré des intentions de départ tout aussi louables. Début 1956 : L’Homme de nulle part (Jubal) avec Glenn Ford, nouvelle irruption du mélodrame dans le western ; un drame intimiste et humain dans lequel l'action et le mouvement font place à une étude psychologique et comportementale mature et sensible. La Dernière caravane, quelques mois après, avec cette fois en acteur principal à nouveau une star hollywoodienne, Richard Widmark. Il s’agit donc du quatrième western de Delmer Daves, un film tourné quasi intégralement en extérieurs et narrant la tentative de survie en plein territoire Apache d’une petite partie des survivants d’une caravane de pionniers massacrés par les Indiens. Ce groupe de miraculés n’est constitué que de très jeunes gens qui n’auraient pas su comment se sortir de cette mauvais passe s’ils n’avaient pas accepté (à contrecœur pour certains) de faire confiance et de se laisser convoyer par un homme condamné à la pendaison pour meurtre et qui se trouvait dans leur campement suite à son arrestation. Dès lors on constate que Daves s’intéresse à la jeunesse ; il finira d’ailleurs sa carrière par toute une série de superbes mélodrames au lyrisme exacerbé leur étant dévolus.

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Arizona 1873 : le renégat Todd le Comanche (Richard Widmark), coupable de deux meurtres, tue les hommes de loi qui étaient à sa poursuite mais finit par se faire prendre par le brutal shérif Bull Harper (George Mathews). Ce dernier a la ferme intention de ramener le fugitif en ville afin de pouvoir se délecter de le voir se faire prendre haut et court. Les deux hommes croisent un convoi de pionniers et décident de passer la nuit dans leur campement. Les colons ne supportent pas la manière cruelle avec laquelle l’homme de loi traite son prisonnier. Alors qu’ils le lui font remarquer, lors d’un moment d’inattention, le shérif se fait tuer par Todd qui, malgré le fait qu’il soit attaché à une roue de chariot, a réussi de sa main libre à se saisir d’une hache et à lui lancer en pleine figure. Todd reste néanmoins prisonnier, les pionniers étant bien décidés à le livrer à la justice. A la nuit tombée, les plus jeunes décident d’aller se baigner dans un torrent situé à quelques kilomètres de là. A leur retour, ils découvrent horrifiés que tous ceux qui étaient restés au campement se sont fait massacrer par les Apaches. Un seul survivant, Todd, jeté dans un ravin toujours attaché à sa roue et laissé pour mort. Même si certains des six adolescents ne lui font pas confiance par le fait qu’il ait été élevé par les Indiens, ils sont obligés d’admettre que pour arriver à destination sans encombre, ils vont devoir lui confier leur sort afin qu’il les reconduise à bon port, lui seul connaissant parfaitement le terrain et la manière de survivre dans un environnement hostile. Voilà partis nos six jeunes gens accompagnés de leur outlaw/éclaireur pour un périple semé d’embûches…

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Silence et sérénité des grands espaces. Pas une note de musique. Plan en légère plongée sur un tranquille plan d’eau dans lequel se reflètent les majestueuses montagnes typiques de l’Arizona, celles aux sommets presque plats comme on peut en voir aussi à Monument Valley. On aperçoit un cavalier au loin ; la caméra s’élève lentement tout en opérant un discret travelling arrière qui nous dévoile un homme sur le coin gauche de l’écran, un fusil en main pointé sur le cavalier en fond de ce qui s’avère désormais un immense plan d’ensemble. Premier coup de feu ; l’homme est touché et tombe de cheval. Deuxième coup de feu ; l’homme semble avoir reçu la balle fatale : il s’affale dans l’eau. Contrechamp : gros plan sur le tueur, Richard Widmark, un homme blond aux yeux bleus, un rictus déterminé et hargneux sur le visage, effrayant de sang froid. Il contourne le lac pour aller vérifier que le cavalier est bien mort. Générique et lancement de la musique avec le beau thème de Lionel Newman qui apparaît ainsi pour la première fois. La traque continue : deux autres hommes qui semblent être à sa poursuite succombent à leur tour, l’un d’un coup de fusil le faisant tomber du haut d’une falaise, le second de plusieurs coups de poignard dans le ventre. Mais un quatrième larron (le dernier survivant dont on se rend alors compte qu’il s’agit d’un homme de loi) l’appréhende, le ligote et le traîne derrière son cheval. Il lui promet une pendaison prochaine en l'humiliant et le privant d'eau... Le prologue de La Dernière caravane est exemplaire, probablement le plus magistral jamais filmé jusqu’à présent : huit minutes sans quasiment aucun dialogue et au cours duquel Delmer Daves nous démontre son génie de la mise en scène, du cadrage, du rythme, de la gestion de la tension dramatique (rarement séquence aura été aussi efficacement découpée ) et de l’appréhension de l’espace (on a vite l'impression de très bien connaître les lieux). Rarement images auront été plus belles, le cinéaste et son chef-opérateur opérant des miracles, les imposants paysages de Oak Creek Canyon semblant les avoir génialement inspirés ; on trouve des plans d’ensemble parmi les plus impressionnants vus jusqu’ici ! Une pure merveille que le début sauvage et frustre de ce western ! Amateurs d’aventure en plein air, ce film est d’ors et déjà fait pour vous.

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Rencontrant un convoi de pionniers, l’homme de loi et son prisonnier décident de faire une halte dans le campement des colons ; et voici que l’on menotte Richard Widmark à une roue de chariot. L’image ainsi évoquée vous rappelle-t-elle quelque chose ? Si comme moi, vous avez découvert le film, émerveillés, un soir de juin 1982 lors de la première année d’existence de la fameuse émission présentée par Eddy Mitchell, la regrettée Dernière Séance, elle vous aura probablement hantée jusqu’à aujourd’hui. Et ce ne sont pas les multiples visions qui lui auront fait perdre de sa puissance, ayant toujours du mal à supporter cette injustice de voir un personnage qui nous semble d’emblée sympathique (malgré sa rudesse et sa violence) se faire humilier à ce point par un shérif haïssable. Dès lors on se dit qu’il n’est pas possible que Todd soit un assassin et l’empathie ne tarde pas à naître envers ce personnage. Tout ça pour dire que les années passant, The Last Wagon, malgré quelques très petits détails qui m’ont un peu gênés cette fois-ci (mais nous y reviendrons), reste un de mes westerns cultes, l’un de ceux que je conseille le plus volontiers à ceux qui me demandent par quoi commencer pour découvrir le genre, et ce, à tout âge, le film fonctionnant parfaitement chez les plus jeunes (expériences à l’appui). Quarantenaires qui chercheriez à faire partager à votre progéniture votre amour pour le western, n’hésitez plus dans le choix du film à leur faire voir en premier ! Mais cessons ces digressions nostalgico-personnelles pour retourner à notre roue ! Celui qui a placé Richard Widmark dans cette inconfortable posture, c’est le shérif qui, comme tous les autres personnages du film, est très fortement caractérisé. C’est un de ces protagonistes que l’on aime abhorrer tellement il s’avère haineux et brutal ; lorsqu’il reçoit une hache en pleine figure, ça nous ferait presque jubiler d’en être débarrassé car l’acteur George Mathews était fortement convaincant en brute épaisse et nous aurions eu du mal à supporter d’être en sa présence plus longtemps (au cinéma, il nous est heureusement permis -sorte de sain défouloir- de souhaiter la mort d'un personnage). On ne saura jamais le pourquoi de cette animosité mais on la devinera à la toute fin en même temps que l’on apprendra la vérité sur les causes du comportement agressif, violent et meurtrier de Todd le Comanche.

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Todd le Comanche, parlons-en justement. Il s’agit de la cinquième prestation dans un western de l’immense Richard Widmark après, excusez du peu, La Ville abandonnée (Yellow Sky) de William Wellman, Le Jardin du diable (Garden of Evil) de Henry Hathaway, La Lance brisée (Broken Lance) de Edward Dmytryk et Coup de fouet en retour (Backlash) de John Sturges. Les suivants seront presque tous aussi remarquables ; autant dire que le comédien fit quasiment un sans-faute dans ses choix. Et malgré tout, son personnage dans La Dernière caravane pourrait-être l’un de ses plus mémorables. Dans le film, il s’agit non seulement de l’homme pragmatique qui va sauver la vie de ses compagnons de route mais il sera également à l'origine de leurs (positives) évolutions personnelles, leur ayant intentionnellement révélés leur vraie nature, les ayant fait réfléchir sur leurs préjugés. Le western narre donc un parcours tout aussi bien géographique qu’initiatique au bout duquel chacun aura pris conscience de ses défauts ou erreurs de jugements et en aura tiré les leçons. "The Last Wagon, […] c’est aussi un plaidoyer pour la tolérance et la compréhension : tout ce qui parait hostile ne l'est pas, nous pouvons être trop prompts à juger ceux qui nous entourent" disait d’ailleurs Delmer Daves à Bertrand Tavernier dans une lettre qu'il lui écrivait en 1960 (reprise dans Amis américains). Car ce western est effectivement à la fois un ‘survival’ en milieu hostile, un spectaculaire film d’aventure mais aussi une réflexion morale et un récit d’apprentissage (comme souvent chez Daves). Todd le Comanche est l’homme de la nature, celui qui sait comment lutter contre les éléments, qui sait comment trouver ou retrouver son chemin, qui sait se procurer eau et nourriture, qui connaît l’art de la dissimulation pour ne pas se faire remarquer par ses ennemis (ici les Apaches sur le sentier de la guerre). Il va devoir apprendre à ses compagnons d’infortune les rudiments de la survie, pourquoi ne pas crier ou tirer un coup de feu, pourquoi marcher de nuit afin que la poussière soulevée par leurs chevaux n’attirent pas les regards…

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Avec son ‘costume’ frangé d'aventurier à la Davy Crockett et grâce à son formidable charisme (à tel point qu’il n’a pas besoin d’ouvrir la bouche pour happer notre attention ; il ne prononce pas un seul mot avant la 20ème minute), il n’est pas étonnant qu’il impressionne d’emblée le benjamin du groupe, le jeune Billy pour qui il représente le héros qu’il a sûrement toujours rêvé d’être ; les relations entre eux seront à peu près les mêmes qui liaient le jeune garçon à Shane dans le film homonyme de George Stevens, un mélange de fascination et d’adoration. Le fait que Todd soit appréhendé d’emblée comme un meurtrier n’entre pas en ligne de compte pour Billy puisque l’homme de loi qui l’a présenté ainsi était bien plus détestable d’apparence et de comportement ("not to be fooled by the color of his eyes and his skin. He may be white, but inside he's all Comanche"). Billy, avec la naïveté qui est une caractéristique de son âge, fait donc immédiatement confiance à Todd sans jamais se poser la moindre question, sans aucun préjugés, et ce malgré la méfiance d’un grand nombre de pionniers pour qui un prisonnier est forcément un homme de qui on doit se méfier. Sa grande sœur prend également tout de suite fait et cause pour le captif par le fait d’avoir un tempérament à vouloir défendre à tout prix les faibles et les opprimés ; ici, c’est le traitement que le shérif lui inflige qui lui parait inhumain et qui la pousse elle aussi à se mettre du côté du hors-la-loi. Billy, c’est Tommy Rettig, âgé alors de 15 ans, déjà aux génériques d’autres westerns comme The Raid de Hugo Fregonese ou de Rivière sans retour de Otto Preminger, mais surtout connu pour son rôle (le principal) dans Les 5000 doigts du Dr T de Roy Rowland. Comme tous ses partenaires, il reste plutôt discret et n’en fait jamais trop, ne cherchant visiblement pas plus que les autres à se mettre en avant, tout entier au service de la belle histoire écrite par Delmer Daves et James Edward Grant (très bon scénariste et également réalisateur du très beau L’Ange et le mauvais garçon avec John Wayne et Gail Russell).

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Sa sœur aînée, c’est la jolie Felicia Farr, déjà au générique du précédent western de Daves, Jubal. Il s’agit de l’héroïne positive par excellence, belle, douce, aimante, protectrice mais aussi (ce qui n'était pas le cas dans Jubal), déterminée et prête à se battre pour ses convictions et contre toute formes de préjugés et de clivages. Rien à voir avec ces diverses qualités, mais elle sera également à l’origine de la séquence la plus tendre et inoubliable du film, la fameuse ‘dernière nuit d’amour’. Alors que le groupe s’approche de son but, celui de rejoindre l’armée afin d’être à l’abri de toutes attaques indiennes, il se voit obligé de faire une halte nocturne, étant tombés sur plus de 300 guerriers Apaches ayant établis leur bivouacs en plein milieu de leur chemin. Pensant qu’elle ne sera plus de ce monde dès le lever du jour et s’attendant à vivre sa dernière nuit, Felicia Farr va retrouver Richard Widmark sur un promontoire dominant les feux de camps indiens. Ils se racontent leurs secrets et leurs aspirations puis la femme vient à faire tomber les dernières réticences de l’éclaireur, se jetant à son cou pour l’embrasser. C’est probablement leur dernière nuit, ils n’ont plus de pudeur à avoir. Une séquence d’une grande délicatesse et d’une grande sensualité rythmée par le sourd martèlement des tambours Apaches. Le premier plan qui suit le lever du soleil est d’ailleurs sur Felicia Farr en train de réarranger ses cheveux ; il ne fait aucun doute sur ce qui s’est passé entre eux deux. Une séquence splendide qui en annonce une similaire et tout aussi mémorable dans 3.10 pour Yuma. Les autres jeunes gens du convoi sont deux garçons et deux filles. Parmi les hommes, l'acteur Ray Stricklin dans la peau d'un personnage assez transparent (celui à la chemise verte) alors que celui interprété par Nick Adams est un peu plus intéressant, d'abord engoncé dans ses certitudes et partis pris avant de se rendre compte qu'il fait fausse route et d'admettre qu'il a eu tort de prendre Todd de haut par le simple fait qu'il ait été élevé par les Indiens.

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Les deux protagonistes féminins sont demi-sœurs et c'est surtout par leur intermédiaire que Daves aborde également l'un des thèmes qui lui tient le plus à cœur, le racisme. L'une des deux éprouve pour l'autre une haine tenace par le fait qu'elle soit métisse, son père l'ayant conçue avec une indienne. Relations mélodramatiques très bien vues et assez tendues entre les deux actrices ainsi qu'avec le père. A force qu'on lui fasse ressentir son infériorité et sa bâtardise, Jolie (Susan Kohner), la 'sang-mêlée', se sent coupable d'être ce qu'elle est ; elle finira néanmoins par se rebeller contre sa vindicative sœur ("You acts so clean but you thinks so dirty") et à s'accepter telle quelle, retrouvant la fierté et la confiance en soi qu'elle avait perdue. Valinda, c'est Stéphanie Griffin dans le seul rôle au cinéma de sa carrière, ce que l'on peut déplorer au vu des talents dramatiques qu'elle déployait ici. Beaucoup l'auront trouvé agaçante par le fait de se braquer pour un rien ou de faire ressortir sa bigoterie par tous ses pores, mais elle s'avère finalement très juste et très humaine ; qui n'a jamais eu de préjugés ? Qui n'a jamais sorti des méchancetés outrancières alors qu'il était en colère ? Qui n'aurait pas crié à la vue d'un pendu (d'autant plus s'il s'était agi de son père comme ici) ou en découvrant subrepticement devant soi un serpent à sonnettes qui de plus vous aurait mordu ? Un personnage très bien écrit et dont la rédemption est (très logiquement puisque partie de plus loin) la plus touchante. Le racisme est également évoqué moins frontalement et sous un autre angle pas forcément repérable dans l'immédiat, celui de l'abus de pouvoir et de la volonté d'extermination. Si Todd ainsi que les indiens se comportent d'une manière aussi sanguinaires et implacables, c'est de la faute des hommes blancs, qui plus est issus de l'autorité publique : les Apaches se vengent au centuple des massacres perpétrés à leur encontre par l'armée américaine ;
Spoiler (cliquez pour afficher)
quant à Todd, il se venge du sauvage assassinat de sa femme et de ses deux enfants par trois frères dont l'un était un shérif, celui qu'il tue au début du film dans la séquence de la hache évoquée plus haut[fin du spoiler]. Des actes pas excusables mais compréhensibles.

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A signaler aussi la présence du sympathique comédien Carl Benton Reid dans le rôle du général Howard (personnage véridique surnommé 'Howard la bible') lors de la dernière séquence, celle souvent vilipendée du procès fait à Todd. Un peu didactique certes et en totale opposition de ton avec tout ce qui a précédé mais au cours de laquelle on assiste à une belle défense du peuple indien et où apprend d'où proviennent les parts d'ombre de certains personnages (dont Todd surtout) et qui nous fait réfléchir sur les notions de meurtres, de vengeance et de justice ; une scène pas si inutile qu'on a pu le dire et finalement assez émouvante sauf qu'on se serait aisément passé du 'tour de table' final un peu trop appuyé et factice ; comme si nous n'avions pas été témoins des changements opérés chez chacun des participants au cours de ce 'voyage' dans cet univers cruel et hostile sans que chacun se sente obligé de nous les résumer ?! A part ce petit détail, la facilité un peu trop déconcertante qu'eurent les soldats et pionniers à se tirer du guêpier indien, et le plan du vautour qui fait penser deux secondes avoir zappé vers un film mettant en scène des créatures confectionnées par Ray Harryhausen, pas grand chose à reprocher à The Last Wagon si ce n'est sa trop courte durée qui a empêché de pouvoir approfondir encore plus des personnages aux côtés desquels nous aurions bien voulu faire encore un bout de chemin.

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Au final, un splendide western aussi bien sur le fond que sur la forme. D'après Bertrand Tavernier qui tient cette information du fils même de Delmer Daves, le scénario aurait été écrit dans les très grandes largeurs par le cinéaste lui-même, l'écrivain Gwen Bagni et James Edward Grant n'ayant apportés que quelques idées. Au vu des thèmes mis en avant et développés, au vu de la tendresse et du lyrisme déployés, ça ne fait effectivement presque aucun doute, ce qui en fait un véritable film d'auteur. D'ailleurs la maîtrise de l'écriture est tout aussi éclatante que la maîtrise formelle, les dialogues sonnent aussi justes que le travail sur la couleur et l'éclairage (un vrai régal pour les yeux), la solide intrigue linéaire est aussi efficace que l'époustouflant sens du cadre (que ce soient pour les gros plans ou les plans d'ensemble). Un film au rythme constamment soutenu qui n'hésite pas à mélanger brutalité (les meurtres au poignard par Richard Widmark sont sacrément rudes) et douceur, sécheresse et lyrisme, film d'aventure et récit d'apprentissage, action et mélodrame, pour aboutir sur de grandes leçons de sagesse sans que ce ne soit jamais trop moralisateur. Un western magistral qui ne connut pas un grand succès à sa sortie mais qui est devenu un grand classique au fil du temps. Recommandable sans modération aux amateurs ou non de westerns de 7 à 77 ans !
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Jeremy Fox
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Showdown at Abilene

Message par Jeremy Fox »

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Les Dernières heures d’un bandit (Showdown at Abilene - 1956) de Charles F. Haas
UNIVERSAL


Avec Jock Mahoney, Martha Hyer, Lyle Bettger, David Janssen, Ted De Corsia
Scénario : Berne Giler
Musique : sous la direction de Joseph Gershenson
Photographie : Irving Glassberg (Technicolor 1.85)
Un film produit par Howard Christie pour la Universal


Sortie USA : Octobre 1956


Rentrant à Abilene au Kansas une fois la Guerre de Sécession terminée, l’ex soldat confédéré Jim Trask (Jock Mahoney) tombe en chemin sur son ami d’enfance Chip Tomlin (Grant Williams) se rendant au même endroit retrouver femme et enfant. Les deux hommes ont combattu dans les camps adverses mais ils décident d’oublier désormais la couleur de leurs uniformes. Jim était autrefois le shérif d’Abilene mais, par horreur des armes depuis le conflit sanglant auquel il a pris part, il ne souhaite pour rien au monde reprendre du service. Mais beaucoup de choses ont changé depuis ses quatre années d’absence. La rumeur l’ayant laissé pour mort, tous les habitants sont étonnés de son retour, surtout son meilleur ami, Dave Moseby (Lyle Bettger), qui ressent autant de bonheur que de gêne ; en effet, il est sur le point d’épouser Peggy (Martha Hyer), l’ex-fiancée du revenant. De plus, de fermier, Dave s’est transformé en riche éleveur de bétail, ce qui n’est pas du goût de la plupart des citoyens voyant leurs terres ravagées par les bêtes à cornes. Le conflit entre ranchers et fermiers se faisant de plus en plus violent, Jim, à la demande pressante de Dave (qui pense le faire pencher pour son camp), reprend son étoile de shérif, celui qui l’avait remplacé, le brutal Dan Claudius (Ted De Cordia), réintégrant en bougonnant son emploi précédent en tant qu’homme de main de Dave. Chargé d’effrayer les fermiers jusqu’à ce qu’ils acceptent de vendre leurs terres à Dave, Claudius y va un peu fort, fouettant Chip à mort. Il va de soi que le nouveau shérif n’a plus qu’une idée en tête, arrêter les méfaits de son ancien ami, même si pour se faire, il doit reprendre les armes qu’il avait pourtant juré de ne plus toucher à cause d’un traumatisme secret qui continue à le culpabiliser et lui donner des cauchemars…

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Star in the Dust (La Corde est prête), avec John Agar en interprète principal, était la première œuvre du cinéaste Charles Haas dont la filmographie ne sera constituée que de huit films, tous plus ou moins aujourd’hui oubliés, les derniers étant surtout consacrés à la Beat Generation ; le cinéaste travaillera ensuite surtout pour la petite lucarne, signant quelques épisodes westerniens pour Bonanza, Maverick ou Rawhide. Le western qui nous concerne ici, son deuxième film, est sorti la même année que Star in the Dust, toujours produit par la Universal, et possède à peu de choses près les mêmes qualités et défauts. Un western à propos duquel il vaut mieux reporter son attention sur l'intrigue et les personnages plus que sur la forme qui peut de temps en temps prêter à sourire (quelques plans originaux mais un peu gratuits comme celui du trio des personnages principaux autour d’un miroir dans le magasin de vêtements) lorsqu’elle n’est pas d’une immense banalité. Malgré donc quelques afféteries et choix de mise en scène fort discutables (dont également l’utilisation d’une musique exaspérante à force d’excès lors des scènes mouvementées), l’ensemble se révèle finalement assez terne, rendant la jolie intrigue du film bien peu passionnante. Rien de bien neuf à priori dans cette histoire nous proposant notamment la sempiternelle rivalité entre éleveurs et fermiers dans une ambiance d’après Guerre de Sécession, mais des personnages attachants à l’image du shérif traumatisé par un secret qui continue à le faire cauchemarder. Jim, c’est Jock Mahoney, ex-cascadeur, cette même année déjà à l’affiche d’un western assez original, 24 heures de terreur (A Day of Fury) réalisé par Harmon Jones, et dont les meilleurs westerns en tant que comédien sont encore à venir, notamment les deux étonnants et atypiques Joe Dakota et L’héritage de la colère que signera l'excellent Richard Bartlett.

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Mais déjà, et ce sera quasiment une constante au sein de sa filmographie westernienne, l’acteur, toujours aussi juste et sobre jusque dans sa nonchalance, interprète un homme qui n’apprécie guère ni la violence ni les armes. Le personnage de Showdown at Abilene ne s’en servira d’ailleurs qu’une unique fois le temps d’une seule seconde à la toute fin du film lors du fameux Showdown du titre, duel assez original qui utilisera dans le même temps les dons de cascadeur de Mahoney. Auparavant cet acteur (qui ne cesse de me contenter depuis sa récente découverte) nous avait déjà démontré ses étonnantes qualités athlétiques en se jetant littéralement par-dessus une barrière pour aller renverser un adversaire qui le tenait en joue. A l’exception de ces quelques séquences et d’une autre au cours de laquelle Grant Williams (L’homme qui rétrécit du film du même titre) se fait lacérer le dos au fouet par Ted De Corsia, les amateurs d’action ne seront pas à la fête, ce western (au titre français une nouvelle fois fantaisiste et peu en conformité avec l’intrigue) en étant quasiment dépourvue. Ce n’est pas forcément un défaut à condition que le reste soit passionnant, ce qui n’est en l’occurrence pas tout le temps le cas, la faute en incombant donc principalement à la mise en scène sans vigueur ni poésie de Charles F. Haas. Dommage car la description des personnages est tout à fait réussie, les auteurs nous peignant toute une communauté avec noblesse et sans manichéisme, ne jugeant jamais qui ce soit, le ‘Bad Guy’ pouvant être attachant tout comme le héros ambigu.

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Le triangle amoureux composé par Jock Mahoney, Lyle Bettger et la très jolie Martha Hyer est intelligemment dépeint ; assez novateur aussi puisque Jim ne cherchera jamais à séduire à nouveau sa fiancée tout en éprouvant toujours pour elle une forte attirance ; l’alchimie entre le couple qui n’est plus est beaucoup plus puissante qu’entre le couple qui s’est construit et le scénariste nous octroie une séquence pleine de tension amoureuse, Jim et Peggy se parlant de très près, constamment sur le point de tomber dans les bras l’un de l’autre sans que ça n’arrive. Grâce au talent des comédiens, une belle tension amoureuse passe à ces (trop) rares moments. La sympathie que nous arrivons à éprouver pour le personnage du ‘méchant’ Lyle Bettger fait qu’il nous arrive d’être peiné pour lui lorsqu’on le voit se rendre compte n’être plus aimé par sa fiancée. Pour tout dire, l’aspect romantique du film est son élément le plus réussi malgré le personnage féminin un peu sacrifié. Pour en arriver aux autres protagonistess, d’autres seconds rôles très bien croqués comme le père de Peggy qui veille encore sur sa fille avec tendresse, la poussant à ne pas se marier à un homme qu’il sent ne pas être fait pour elle, ou bien l’adjoint du shérif interprété par le futur Dr Kimble de la série Le Fugitif, David Janssen, et encore le jeune fermier, ami d’enfance du shérif, qui dira cette phrase qui va dans le sens d’une volonté non-violente des auteurs et de quasiment tous les westerns avec Jock Mahoney : "C’est étonnant qu’un homme soit obligé de se battre pour pouvoir vivre en paix".

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Pour les anecdotes autour du film, à signaler que la très belle musique du générique est celle, réorchestrée, d’un autre film Universal plus connu (un film de SF ou un film noir) mais sur lequel je n’ai pas réussi à remettre un titre. Le producteur Howard Christie était tellement attaché à l’histoire de ce western qu’il mit un remake en chantier une dizaine d’années plus tard ; ce sera Gunfight at Abilene (Le Shérif aux poings nus) réalisé par William Hale avec Bobby Darin dans le rôle du shérif perturbé. Le western de Charles F. Haas est bien trop bavard, mal rythmé et impersonnel pour arriver à fortement nous captiver. Néanmoins, il n'est pas du tout déshonorant et même fortement attachant par sa belle sensibilité et le traitement psychologique de ses personnages qui plus est solidement interprétés. Un petit western à sortir de l'oubli.
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Re: The Last Wagon

Message par feb »

Jeremy Fox a écrit :La Dernière caravane (The Last Wagon - 1956) de Delmer Daves
Bravo, c'est beau 8) et ça donne sacrément envie glisser le film dans le lecteur :wink:
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Re: The Last Wagon

Message par Jeremy Fox »

feb a écrit :
Jeremy Fox a écrit :La Dernière caravane (The Last Wagon - 1956) de Delmer Daves
Bravo, c'est beau 8) et ça donne sacrément envie glisser le film dans le lecteur :wink:

Peu de chances d'être déçu à mon avis :wink:
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Re: The Last Wagon

Message par Rick Blaine »

Jeremy Fox a écrit :
feb a écrit : Bravo, c'est beau 8) et ça donne sacrément envie glisser le film dans le lecteur :wink:

Peu de chances d'être déçu à mon avis :wink:

Aucune! :D

Un film qui me semble s'imposer comme une évidence, de bout en bout.
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Pillars of the Sky

Message par Jeremy Fox »

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Les Piliers du ciel (Pillars of the Sky - 1956) de George Marshall
UNIVERSAL


Avec Jeff Chandler, Dorothy Malone, Ward Bond, Keith Andes, Lee Marvin
Scénario : Sam Rolfe
Musique : William Lava & Heinz Roemheld sous la direction de Joseph Gershenson
Photographie : Harold Lipstein (Technicolor 2.35)
Un film produit par Robert Arthur pour la Universal


Sortie USA : 12 octobre 1956


Des westerns pro-indiens, il en sortait à la pelle depuis le début de la décennie ; pour continuer à attirer les foules dans les salles, il fallait alors que les scénaristes se creusent les méninges afin de trouver des détails insolites ou des idées nouvelles. Quelques semaines plus tôt, la Universal proposait déjà sur les écrans L’Homme de San Carlos (Walk the Proud Land) de Jesse Hibbs qui narrait l’histoire d’un ‘pied tendre’ venu de l’Est prendre les rênes d’une réserve indienne sans avoir jamais vu un seul ‘native’ et sans avoir porté une seule arme de sa vie. Les faits n'ont pas été inventés et John Philip Clum (interprété par Audie Murphy) était un personnage ayant réellement existé. Au final un western curieux et intéressant sans quasiment d’action. Si son scénario reste dans l’ensemble plus conventionnel, le postulat de départ de Les Piliers du ciel est tout aussi inaccoutumé mais également véridique : le film nous décrit d’emblée des tribus indiennes ayant été évangélisées, ses membres aux noms bibliques se rendant à l’office tous les dimanches y prier le dieu des blancs. Un western ‘chrétien’ qui de plus se déroule dans une région au Nord-Ouest des USA que l’on a peu l’habitude de voir au sein du genre, l’Oregon, avec ses majestueuses montagnes et ses immenses plateaux herbeux. Ces deux élément réunis plus le fait que les tribus indiennes ne soient pas des Apaches, des Comanches ou des Sioux mais des Nez-Percés, des Cœurs d’Alène, des Walla-Wallas, des Umatillas ou des Palouses, apportent du sang neuf et un peu ‘d’exotisme’ au genre même si le film se révèle au final somme toute très moyen sans être déplaisant pour autant.

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1868 en Oregon. La paix entre les tribus indiennes et les blancs est maintenue surtout grâce à l’action du pasteur Joseph Holden (Ward Bond) qui a converti au christianisme la plupart des indiens de la réserve dans laquelle il officie, leur donnant à tous un nom biblique. Mais comme ailleurs, les traités ne sont pas respectés : le gouvernement décide de faire traverser une piste destinée aux pionniers en plein milieu de la réserve alors qu’il avait été stipulé qu’aucun civil blanc ne pourrait y mettre les pieds. L’équilibre précaire qu’Holden et le Sergent Emmett Bell (Jeff Chandler) avaient réussi à maintenir est désormais compromis. Pour savoir ce qu’il en est réellement, le Sergent, chef de la force de police indienne de la cavalerie américaine, accompagné de deux de ses éclaireurs Nez-Percés, se rend au camp de l’officier chargé de mettre en place ce projet, le Colonel Stedlow (Willis Bouchey), commandant d’une troupe de très jeunes soldats. Jeff apprend que le chef des Palouses, Kamiakin (Michael Ansara), a convoqué les chefs des autres tribus, espérant les convaincre de se joindre à lui afin de ne pas laisser de nouvelles troupes armées empiéter leur territoire, appelant à l’extermination si nécessaire. Est également présent lors de cette rencontre au quartier général militaire, le Capitaine Tom Gaxton (Keith Andes), le rival amoureux de Jeff. En effet, s’il sait que Calla (Dorothy Malone), son épouse, s’apprête à arriver en ces lieux, il est persuadé que c’est pour retrouver son amant qui n’est autre que Jeff. En pleine réunion, on vient annoncer que Kamiakin a pris en otage deux femmes : il y a de fortes chances pour que l’une d’elles soit Calla. Avant toute chose, il s’agit d’aller la délivrer, ce que s’apprêtent à faire le sergent insubordonné et son ami le pasteur…

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D’après les connaisseurs en histoire indienne, contrairement à ce que l’on aurait pu penser à la vision du film, le scénario écrit par Sam Rolfe (l’auteur de l’histoire de The Naked Spur – L’Appât d’Anthony Mann) n’a pas grand-chose de fantaisiste, mais au contraire s’avère historiquement assez conforme, costumes, coiffes et tout le reste du background étant également très proches de la réalité. Il faut dire aussi que George Marshall et son équipe sont partis tourner sur les lieux même de l’action et qu’ils ont employés en tant que figurants des membres des différentes tribus évoquées dans le film. Les évènements narrés, ainsi que le fait que les indiens de la région aient été évangélisés avec douceur, sont donc tout à fait justes. De nombreuses missions chrétiennes et églises étaient alors implantées dans les réserves indiennes de l’Oregon et les membres de la tribu des Nez-Percés, ayant commencé à être convertis au christianisme depuis à peu près 40 ans, avaient même accompli des pèlerinage à l’Est afin de mieux appréhender la culture chrétienne. Quant aux noms des chefs indiens des différentes tribus vivant dans ces réserves, ils avaient bien été transformés en Isaac, Abraham ou autres Joseph ! En revanche, ‘les piliers du ciel’ évoqués dans le titre (de majestueuses montagnes aux sommets pointus délimitant le territoire de la réserve), on ne les voit que lors d’un seul plan au cours duquel on les évoque mais ne semblent pas se situer au même endroit que le reste de l’intrigue, les réserves décrites ne permettant pas de distinguer de montagnes à l’horizon. A l’exception de ce fait assez singulier (erreur topographique ?), la seule importante liberté prise par les auteurs vis-à-vis de la réalité se situe lors de la séquence finale péniblement et niaisement saint-sulpicienne au cours de laquelle les chefs des différentes tribus révoltées sont pardonnés lors d’une cérémonie religieuse initiée par Jeff Chandler ! Ils furent en réalité tous pendus par l’armée américaine !

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Pillars of the Sky (on devine aisément le sous-texte religieux au travers de ce titre) est donc un western de série B contant un épisode réel et peu connu des guerres indiennes mais avec une approche plutôt originale, se voulant être un western 'chrétien'. Dommage que George Marshall soit un cinéaste si médiocre, n’arrivant presque jamais à faire décoller son film qui avait au départ été proposé à John Ford, John Wayne ayant été prévu pour interpréter le rôle du Sergent. Tous deux occupés par le tournage de La Prisonnière du désert (The Searchers), ils durent décliner l'offre et furent donc remplacés par George Marshall et Jeff Chandler. Le résultat aurait probablement été tout autre entre les mains du célèbre borgne, mais contentons nous de ce que nous avons puisque le film reste néanmoins tout à fait correct en l’état, plutôt efficace lors des scènes d’action (notamment celle de l’attaque faisant se rencontrer, dans une inextricable mêlée, indiens et soldats, et au cours de laquelle l’aspect fouilli donne un rendu assez réaliste ; dommage que les effets spéciaux des coups de canons s’avèrent ratés), assez bien dialogué et bénéficiant d’un casting plutôt convaincant à l’exception d’une Dorothy Malone qui ne semble pas à sa place et dont le personnage n’avait franchement pas vraiment lieu d’être. Le triangle amoureux est effectivement de trop au sein de cette intrigue, d’autant plus que l’achèvement de cette romance s’avère lui aussi, à l’instar de la dernière séquence, très édifiant, la femme retournant à son époux ; la morale chrétienne est sauve à ce niveau aussi ! Sinon, Jeff Chandler, même si surtout connu pour ses interprétations de Cochise, tout aussi habitué d’être vêtu de l’uniforme des Tuniques Bleues (il la portait déjà dans Au mépris des lois – The Battle at Apache Pass et A l’assaut de Fort Clark – War Arrow, tous deux de George Sherman ou encore dans Les Rebelles de Fort Thorn – Two Flags West de Robert Wise), ne s’en sort pas trop mal, assez à l’aise et charismatique dans le rôle de cet officier insubordonné, soudard et grande gueule. Et puis aviez-vous déjà vu un sergent aussi débraillé, les manches sans arrêt relevées afin de bien faire remarquer la pilosité virile de ses avant-bras ? Pas très réglementaire mais personne ne lui en fait la remarque.

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A ses côtés, si l’on fait l’impasse sur le fadasse Keith Andes, on trouve Ward Bond et Lee Marvin dans des seconds rôles sur mesure et hauts en couleur, les trois acteurs étant d'ailleurs réunis lors de la plus belle séquence du film, celle de la mort en haut de la montagne du personnage joué par Lee Marvin que ses deux copains accompagnent durant ses derniers instants en étant couchés près de lui, chantant et buvant jusqu’à la fin de la nuit. Quant aux indiens, leurs interprètes paraissent crédibles et les auteurs les décrivent avec noblesse que ce soient ceux appartenant au camp des révoltés ou au contraire ceux ayant acceptés de rester sous la tutelle des blancs. Le scénariste nous propose d’ailleurs une intéressante réflexion sur les indiens souhaitant rester dans le giron de l’église et de l’armée : sont-ce des traîtres, des poltrons, des collaborateurs ou des résignés ? Ne seraient-ce pas tout simplement des hommes réalistes et pleins de bons sens ayant compris, comme l’explique l’un des éclaireurs Palouses, que, le ver étant dans le fruit ("Nous n’avons plus l’habileté de nos pères, nous l’avons perdue il y a des lunes et des lunes" ), au lieu de se faire exterminer plus intelligent était vivre en bon terme avec les hommes blancs. Tout aussi intéressante est la description de ces très jeunes recrues inexpérimentées (presque des enfants) parmi les soldats du régiment chargé de construire la piste. Dommage que les auteurs se soient sentis obligés d'inclure de l'humour lourdingue avec cette sentinelle sans cesse en lutte avec son cheval récalcitrant nommé Razorback.

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Le tout se déroulant au sein de beaux paysages photographiés en Technicolor, l’ensemble s’avère plaisant. Dommage une fois encore que la mise en scène soit aussi quelconque, le cinéaste utilisant le cinémascope sans génie, n’ayant pas, loin s’en faut, le sens du cadre d’un George Sherman ou d’un Delmer Daves, et du coup ne mettant pas assez en valeur les magnifiques panoramas qu’il a devant ses yeux. George Marshall ne fait pas d'étincelles mais enveloppe heureusement le tout avec un professionnalisme certain. Au sein de la filmographie en dent de scie de ce réalisateur très inégal (allant dans le genre du très mauvais La vallée du soleil au très bon Femme ou démon'), un western routinier mais pas désagréable se situant dans une honnête moyenne. En tout cas peut-être l'unique western ouvertement chrétien, et à ce titre une véritable curiosité !
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