Le Western américain : Parcours chronologique III 1955-1959

Rubrique consacrée au cinéma et aux films tournés avant 1980.

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Rick Blaine
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Re: Le Western américain : Parcours chronologique Part 3 (55

Message par Rick Blaine »

Jeremy Fox a écrit :
Rick Blaine a écrit :

Tu as raison, mais Fort Bravo est un grand film et la comparaison est forcément dure. Dans l'absolu, je trouve qu'il se tient bien ce petit Backlash pour ma part, j'en ai un bon souvenir.
Ah mais je ne disais pas le contraire :wink:
Oui, en me relisant à l'instant je me suis rendu compte que grosso modo j'avais écrit la même chose que toi en changeant l'ordre des mots... :oops:
Je crois que je suis fatigué :mrgreen:
Pat Wheeler
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Re: Le Western américain : Parcours chronologique Part 3 (55

Message par Pat Wheeler »

Rick Blaine a écrit :
Jeremy Fox a écrit : Dès samedi avec John Sturges pour un western qui se tient bien mais qui malheureusement est loin d'atteindre les hauteurs de Fort Bravo

Tu as raison, mais Fort Bravo est un grand film et la comparaison est forcément dure. Dans l'absolu, je trouve qu'il se tient bien ce petit Backlash pour ma part, j'en ai un bon souvenir.
Pourtant Backlash est plus souvent considéré comme un grand Sturges que Fort Bravo. Pour ma part j'aime beaucoup les deux bien qu'ayant une légère préférence pour ce dernier.
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Jeremy Fox
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Re: Le Western américain : Parcours chronologique Part 3 (55

Message par Jeremy Fox »

Pat Wheeler a écrit :
Rick Blaine a écrit :

Tu as raison, mais Fort Bravo est un grand film et la comparaison est forcément dure. Dans l'absolu, je trouve qu'il se tient bien ce petit Backlash pour ma part, j'en ai un bon souvenir.
Pourtant Backlash est plus souvent considéré comme un grand Sturges.

Pour l'avoir revu ce matin, je trouve cette réputation bien exagérée tout comme son aspect psychologique. A suivre :wink:
Pat Wheeler
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Re: Le Western américain : Parcours chronologique Part 3 (55

Message par Pat Wheeler »

Jeremy Fox a écrit :Pour l'avoir revu ce matin, je trouve cette réputation bien exagérée tout comme son aspect psychologique. A suivre :wink:
Me concernant ça reste un bon cru, mais il est vrai que le film est un peu surestimé. Je préfère Un Homme est Passé, Fort Bravo, Le Trésor du Pendu ou encore le très bon et méconnu Satan Bug dans la filmo de Sturges.
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Jeremy Fox
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Backlash

Message par Jeremy Fox »

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Coup de fouet en retour (Backlash - 1956) de John Struges
UNIVERSAL


Avec Richard Widmard, Donna Reed, John McIntire, William Campbell
Scénario : Borden Chase
Musique : Herman Stein
Photographie : Irving Glassberg (Technicolor 1.37)
Un film produit par Aaron Rosenberg pour la Universal


Sortie USA : 11 avril

Aujourd'hui surtout réputé pour ses westerns, John Sturges avait pourtant déjà plus de 20 films à son compteur lorsqu'il tourna Backlash qui n'est seulement que sa deuxième incursion dans le genre, si l'on ne prend pas en compte ni le médiocre The Walking Hills (Les Aventuriers du désert) ni le superbe Bad Day at Black Rock (Un Homme est passé), l'intrigue des deux films se déroulant à peu près à la date de leur tournage, c'est à dire dans la deuxième moitié du 20ème siècle. On a un peu trop eu tendance à lire à propos de Coup de fouet en retour qu'il s'agirait d'un des premiers 'sur-western', à savoir un western à tendance psychologique et psychanalytique. A posteriori, c'est tout à fait exagéré : d'une part puisqu'il y eut déjà auparavant bien d'autres titres (et non des moindres) à aborder des thématiques identiques, celles de la recherche du père, du problème de conscience qui se pose lorsque la vérité se fait jour et qu'elle va à l'encontre de ce à quoi l'on s'attendait, etc. (je n'en dirais pas plus afin de ne pas trop spoiler l'histoire) ; de l'autre puisque tout simplement Backlash est avant tout un film de série B rempli d'action et de retournements de situations mais dont l'axe psychanalytique ne tient quand même à pas grand chose. A vrai dire la vérité cachée qui est à l'origine de la quête de notre héros révèle plus d'un 'whodunit' à la Hitchcock que du départ d'une réflexion psychologique pointue et passionnante. Bref, il ne faudrait juste pas d'emblée s'attendre à un grand western adulte au risque d'être déçu : rien que pour ce début d'année 1956, des films comme La Prisonnière du désert (The Searchers) de John Ford, La Loi de la prairie (Tribute to a Bad Man) de Robert Wise ou L'Homme de nulle part (Jubal) de Delmer Daves pouvaient se targuer d'aller bien plus loin dans cette voie de la maturité. Quoiqu'il en soit, Backlash (un titre anglais qui claque bien), sorte d'enquête en milieu westernien, est un film qui file à toute vitesse et qui s'avère très agréable à regarder ; seulement pour un western Universal produit par Aaron Rosenberg (on se rappelle surtout de ceux d'Anthony Mann avec James Stewart), on pouvait espérer mieux surtout que, concernant John Sturges, nous en étions restés sur le formidable Fort Bravo, western MGM d'une toute autre envergure.

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1870, Arizona. Jim Slater (Richard Widmark), ancien soldat confédéré, cherche des informations à propos de ce qui s'est passé à Gila-Valley où il a perdu les traces d'un père qu'il n'a d'ailleurs jamais connu. A cet endroit, un groupe de six prospecteurs ayant débusqué un filon de 60,000 dollars s'est retrouvé pris en embuscade par les Apaches, cinq d'entre eux ayant trouvé la mort à cette occasion. Il semblerait que le sixième, au lieu de chercher du renfort comme il avait pour mission de le faire, aurait laissé ses compagnons périr afin de récupérer pour lui seul les dollars. Au moment où débute le film, Slater est en train de déterrer les corps ensevelis afin d'essayer de les identifier et peut-être découvrir la vérité sur ce qui est réellement survenu. Arrive Karyl Orton (Donna Reed) dont l'époux faisait partie du groupe et qui souhaite récupérer sa part du butin. Surgit également un troisième larron qui tente de les abattre mais que Jim réussit à mettre hors d'état de nuire. Il s'agit d'un assistant du shérif de Silver City, le frère d'un des six hommes du groupe de Gila-Valley. Jim et Karyl décident de le ramener en ville où le shérif leur ordonne sans attendre de quitter sa paisible cité non sans leur avoir donné le nom du soldat ayant mis en terre les hommes massacrés. Les voilà partis à sa recherche ; ils le retrouvent dans un relais de diligence assiégés par les Apaches. Avant de mourir d'une flèche indienne, le Sergent Lake (Barton MacLane) aura eu le temps de donner de nouvelles informations à Jim afin qu'il puisse poursuivre sa quête qui le mènera au Texas au milieu d'une guerre fratricide entre gros ranchers. Outre découvrir la vérité, ce que Jim souhaite avant tout c'est se venger du traître qui aurait abandonné son père à une mort certaine. Il n'est pas au bout de ses surprises car l'identité des morts n'est encore pas clairement établie et les 60,000 dollars ont disparu...

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"My father was killed at Gila Valley, and I'm going to find the man who murdered him" dira Jim Slater, le personnage inteprété par le toujours aussi talentueux Richard Widmark. Voilà le départ de l'intrigue de Backlash et son enjeu principal. Au départ, un groupe de six détenteurs de la somme non négligeable de 60,000 dollars : après un raid indien, cinq morts enterrés dans les ruines d'une cabane brûlée et un survivant s'étant échappé avec le butin. Jim Slater n'a plus qu'une idée en tête, retouver et tuer le traitre, celui qui était censé chercher du renfort lors de l'assaut du groupe par les Apaches mais qui a préféré prendre la poudre d'escampette. On connait le nom de trois des cinq hommes morts mais le mystère reste entier concernant les deux autres, trop mutilés et donc impossible à identifier. Cinq morts, trois d'entre eux identifiés ! Qui des trois autres est le survivant entre le fils d'un grand rancher texan, le père de Jim Slater ou le mari de Karyl Orton ? C'est cette quête de la vérité et de l'argent disparu qui va faire voyager nos deux personnages principaux de l'Arizona au Texas. Un western qui débute de la plus belle des manières : le thème musical principal composé par Herman Stein est une pure merveille : intense, dramatique et tourmenté. Dans sa représentation du western, un thème presque aussi définitif que celui écrit par Hans J. Salter pour Les Affameurs. Il nous met immédiatement dans l'ambiance et la première séquence, nous plongeant directement dans l'action, s'avère remarquable. Pourquoi, alors que Jim et Karyl sont réunis à l'endroit où les cadavres sont enterrés, le frère d'une des victimes cherche à les tuer ? Nous ne le saurons jamais mais qu'importe ; ce personnage aura permis d'emblée de nous offrir une scène magistrale, presque aussi réussie que les meilleures de Fort Bravo et qui rappelle fortement la dernière séquence de Winchester 73, l'affrontement dans un duel à mort en un endroit désertique, rocheux et montagneux. Où Sturges nous démontre qu'il n'avait rien perdu de son génie de l'appréhension de l'espace et de la topographie ! Une séquence pleine de suspense, parfaitement découpée et sublimement filmée.

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Le film de Sturges partage d'ailleurs d'autres similitudes avec le premier western de l'association Mann/Stewart. La construction du récit par Borden Chase (scénariste des deux films) est assez similaire même si dans Backlash les personnages principaux resteront les mêmes jusqu'au bout alors que dans Winchester 73, c'était le fusil du titre qui passait de main en main. Mais, dans l'un comme dans l'autre, le film passe d'un endroit à l'autre d'une manière assez théâtrâle, dans le Sturges au fur et à mesure des indices récoltées par les deux personnages. Alors que ça semblait très fluide dans le film de Mann, la structure du récit parait parfois ici un peu artificielle, sorte de jeu de piste un peu schématique et systématique empêchant le spectateur d'y être totalement immergé et le film de prendre l'ampleur qu'il aurait mérité. Mais le défaut est néanmoins minime et ne nous empêche pas de prendre beaucoup de plaisir à la vision de ce western qui peut ainsi se décliner en plusieurs tableaux, plusieurs actes comme au théâtre. Après le prologue prometteur se déroulant à Gila-Valley et qui voit la rencontre entre Jim et Karyl puis qui se solde par la mort du tireur mystérieux, retour à Silver City où Jim apprend le nom du soldat ayant enterré les cinq cadavres. Le tableau suivant prendra place à nouveau au milieu du désert de l'Arizona avec pour commencer une poursuite de diligence par les indiens qui, de par son efficacité et ses cascadeurs chevronnés, n'a pas à rougir de la comparaison avec les meilleurs séquences d'action d'un Raoul Walsh, d'un John Ford ou d'un Michael Curtiz. Et puis, production Universal oblige, aucune transparence, aucun gros plan sur les acteurs en studio ne viennent nous gâcher le plaisir comme c'était souvent le cas à la Warner par exemple. S'ensuit un petit quart d'heure ayant lieu au sein d'un relais de diligence cerné de toutes parts par les indiens ; pas grand chose à en dire pas plus que de la manière dont le petit groupe s'en sortira. Puis nous arrivons à Tucson où les deux frères de l'homme que Jim a tué au départ l'attendent pour se venger. Tendez bien les oreilles ; à un moment donné, un détail cocasse qui a probablement échappé au monteur et au réalisateur, durant deux petites secondes le rire suraigu et totalement surréaliste de l'acteur Harry Morgan ; assez étonnant !

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Ayant réussis à échapper aux inquiétants 'vengeurs' avec une petite blessure à l'épaule pour Jim, nos deux héros se retrouvent à dormir ensemble à la belle étoile ; ce qui donne lieu à une séquence assez émoustillante, celle au cours de laquelle Donna Reed quitte son chemisier pour en faire un bandage à son compagnon de route. Dialogues assez croustillants qui s'ensuit avec pas mal de sous entendus sexuels alors que la charmante actrice n'a pas encore recouvert ses affriolants sous-vêtements. Une scène vraiment réussie que cet interlude romantique en diable à la lueur du feu de camp. Enfin, nos deux voyageurs arrivent au Texas pour l'assez long dernier acte qui se décline en deux tableaux dont la coupure se situe au moment du dévoilement de l'identité de l'homme recherché depuis le début du film. Lors de cette dernière partie, Karyl et Jim se trouvent d'un coup plongés en plein milieu d'une guerre virulente entre gros ranchers dont l'un d'entre eux serait le fugitif de Gila-Valley, puisqu'arrivé récemment dans la région avec 60.000 dollars en poche. Après les deux premiers tiers façon enquête et film noir, le dernier revient à des situations de western bien plus conventionnelles et surtout déjà vues et revues. Après un coup de théâtre qui dévoile sans tarder une quatrième identité, il va de soi désormais que le traitre est soit l'époux de Karyl, soit le père de Jim. Toutes les questions que l'on se posait se trouveront alors résolues, tous les mystère autour de l'affaire Gila-Valleys levés. Et c'est seulement à ce moment là que la fameuse psychanalyse tiendra un petit rôle ; vraiment tout petit car l'un des personnages ne se posera des problèmes de conscience que le temps de quelques minutes très restreintes. La résolution de l'affaire se révèlera on ne peut plus banale surtout que les spectateurs avaient certainement tous plus ou moins devinés où les auteurs allaient les emmener. Mais la présence au bout d'une heure de film du toujours excellent John McIntire (souvenez vous entre autre du 'bad Guy' dans Je suis un aventurier – The Far Country d'Anthony Mann) arrive à nous faire oublier la relative déception que constitue ce dernier acte qui nous prive également d'une épique bataille pourtant attendue entre deux groupes de ranchers ennemis allant se rencontrer au centre ville.

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Dans cette section finale, il nous faut supporter aussi William Campbell, aussi caricatural et pénible en jeune pistolero au sang chaud que dans L'homme qui n'a pas d'étoiles (The Man without a Star) de King Vidor. Il s'agit d'ailleurs du seul point faible de la distribution, à cette exception parfaite. A commencer par un Richard Widmark égal à lui-même dans la peau de cet homme à la recherche de son père et de sa propre identité, vigoureux, entreprenant et déterminé, qui n'a pas froid aux yeux et qui ne passe pas par quatre chemins y compris avec les femmes ; ces dernières ne se laissent d'ailleurs pas faire et notamment le personnage joué par Donna Reed qui nous venge de bien des protagonistes féminins souvent bien ternes au sein du genre. De plus, dans le film de Sturges, à l'inverse de beaucoup avant elle, Karyl semble plus intéressé par l'argent que par le sort et le souvenir de son défunt mari. La comédienne, somptueusement belle qu'elle soit habillée en pantalon ou en robe, montre également beaucoup de talent dramatique. Le western lui sied décidément à merveille puisqu'elle était déjà très bien dans Bataille sans merci (Gun Fury) de Raoul Walsh, mais surtout dans l'excellent Le Relais de l'or maudit (Hangman's Knot) de Roy Huggins. Outre John McIntire (dont nous avons déjà touché deux mots), tous les autres seconds rôles sont parfaitement bien choisis. Tout comme les paysages naturels avec entre autres ces immenses plaines parsemées de cactus ou bien cette colline rocheuse où se déroule le premier affrontement au revolver. Le tout magnifiquement photographié par Irving Glassberg dans un Technicolor chaud, brillant et rutilant. Enfin, même si John Sturges a été et sera plus inspiré dans sa mise en scène, il nous délivre quelques séquences d'action très virtuoses et n'a toujours pas son pareil quant il s'agit de placer ses personnages dans le cadre, de faire prendre à ses comédiens des attitudes et des démarches qui nous resteront longtemps en tête. Un western de série trépidant aux nombreuses péripéties, bien interprété et très correctement mis en scène mais qui pêche un peu par un scénario morcelé, une écriture parfois répétitive et téléphonée. Même si le scénario de Borden Chase est assez malin et souvent palpitant, l'auteur nous a habitué à tellement mieux (avec des enjeux tout autres) que la déception est presque obligatoire. Néanmoins, ne nous y trompons pas, un très bon western.
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Re: Le Western américain : Parcours chronologique Part 3 (55

Message par hellrick »

J'aime beaucoup Sturges et ce film, sans être son meilleur, est en effet un très bon western à déguster avec plaisir.

Avec Carpenter, Sturges est une des têtes de turcs de "50 ans de cinéma américain", il faudrait compter les "médiocres" dans la notice d'autant que tous ses films sont apparemment "surestimé". Et le peu qu'il a fait de bien il le doit à ses scénaristes selon Tatav. Bref :evil:
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Re: Le Western américain : Parcours chronologique Part 3 (55

Message par Jeremy Fox »

Oui dommage car de Sturges j'adore au moins Fort Bravo, et j'aime beaucoup Règlements de comptes à OK Corral, Le trésor du pendu, Le dernier train de Gun Hill et Sept secondes en enfer concernant le western. Peut-être est-il revenu dessus depuis ?
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Re: Le Western américain : Parcours chronologique Part 3 (55

Message par hellrick »

Jeremy Fox a écrit :Peut-être est-il revenu dessus depuis ?
Peut-être pour la prochaine édition ou si il doit faire les bonus sur un dvd :mrgreen:
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Re: Backlash

Message par Pat Wheeler »

Jeremy Fox a écrit :
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La meilleure scène du film c'est quand même la gifle qu'administre Donna Reed à Widmark à un moment donné... quelle violence ! :mrgreen:

Sinon je serai un peu moins dur que toi sur les faiblesses du film qui ne m'ont pas dérangé outre mesure. Un scénario tortueux de Borden Chase, de bons interprètes (surtout Widmark et McIntire) et une assez jolie photographie pour un western peut-être pas aussi marquant qu'on a bien voulu le dire çà et là mais néanmoins tout à fait réussi. Je le place un cran au-dessus de Règlements de Comptes à OK Corral et Le Dernier Train de Gun Hill, le déroulement de ce dernier me rappelant pas mal celui de 3h10 pour Yuma sans que le film soit aussi racé et mémorable.
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Jeremy Fox
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Re: Le Western américain : Parcours chronologique Part 3 (55

Message par Jeremy Fox »

En tout cas, Richard Brooks fait son entrée (ce sera la seule) dans le top 30 : le western le plus sombre et le plu cru vu jusqu'à présent.

La MGM et le western, c'est quelquechose !
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Jeremy Fox
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The Last Hunt

Message par Jeremy Fox »

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La Dernière chasse (The Last Hunt - 1956) de Richard Brooks
MGM


Avec Robert Taylor, Stewart Granger, Lloyd Nolan, Debra Paget, Russ Tamblyn
Scénario : Richard Brooks
Musique : Daniele Amfitheatrof
Photographie : Russell Harlan (Technicolor 2,35)
Un film produit par Dore Schary pour la Metro Goldwin Mayer


Sortie USA : 30 avril 1956


Et une nouvelle fois la soi-disant frileuse et familiale Metro Goldwin Mayer de nous sortir en ce début d'année 1956 l'un des westerns les plus âpres et rudes vus jusqu'à présent sur un écran de cinéma (pour l'époque, cela va sans dire). Et bien, aujourd'hui encore, la vision de ce western reste sacrément dérangeante, preuve que ce remarquable pamphlet signé Richard Brooks (qui réalisait alors son premier western) n'a rien perdu de sa puissance. J'ai déjà eu l'occasion de le dire à maintes reprises, mais si le studio du lion ne s'est pas forcément fait une spécialité du western, les films du genre produits par cette firme ont pour beaucoup d'entre eux été admirables et surtout souvent très progressistes ; ce qui est totalement paradoxal alors que dans le même temps, il s'agissait du studio qui recevait le plus de sarcasme de la part des critiques pour l'académisme et la 'gentillesse' de sa production d'ensemble ! Et Robert Taylor d'être de la partie, pour la troisième fois en tête d'affiche d'un western MGM mémorable après La Porte du diable (Devil's Doorway) d'Anthony Mann et Convoi de femmes (Westward the Women) de Wiliam Wellman. Après La Prisonnière du désert (The Searchers) quelques semaines plus tôt, on peut dire que Hollywood en cette année 1956, dans sa dénonciation du génocide indien, aura franchi un degré supplémentaire en virulence. La Dernière chasse est un nouvel exemple du courage de Dore Schary qui au sein du studio avait précédemment produit les non moins remarquables Bastogne (Battleground) de William Wellman, La Charge victorieuse (The Red Badge of Courage) de John Huston ou encore Un Homme est passé (Bad Day at Black Rock) de John Sturges : un palmarès plus qu'honorable !

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1883 dans les plaines du Dakota. Une charge de bisons a ruiné Sandy McKenzie (Stewart Granger) qui a perdu tout son bétail lors de ce 'stampede'. Charles Gilson (Robert Taylor), qui le rencontre à ce moment là, lui demande de s'associer avec lui pour chasser le bison, activité très lucrative à cette époque même si le gibier se fait de plus en plus rare (plus que 3000 têtes à l'époque). Sans le sou, Sandy se décide à accepter même s'il sent d'emblée que le tempérament de son nouveau partenaire diffère totalement du sien ; en effet Charles avoue sans détour prendre du plaisir à tuer alors qu'au contraire, Sandy, qui fut un temps le chasseur de bisons le plus réputé de la région, avait arrêté par dégoût de tant de tueries, ces dernières portant de plus préjudice aux indiens pour qui cet imposant animal est le principal élément de survie. Raciste jusqu'au bout des ongles, Charles n'en a cure et s'en réjouit au contraire, la destruction des uns entrainant celle des autres. Les nouveaux partenaires se rendent en ville pour préparer leur expédition. Ils embauchent deux aides supplémentaires : Woodfoot (Lloyd Nolan), un vieux chasseur alcoolique et unijambiste, ainsi que Jimmy O'Brien (Russ Tamblyn), un jeune métis ayant décidé de quitter sa réserve pour vivre comme les blancs mais qui a du mal à se faire intégrer. Dès le début de leur périple, leurs mules sont volés par des indiens ; Charles les retrouve et les massacre sans pitié, ramenant au campement une jeune squaw et un bébé qu'il a épargné après hésitation. Dès lors, les relations deviennent de plus en plus tendues au sein du groupe d'autant que malgré sa haine envers les indiens, Charles s'accapare la femme pour en faire sa maîtresse. Le lendemain, Charles et Sandy partent abattre des bisons ; c'est un véritable carnage, Charles tuant même un bison blanc, animal sacré pour les Indiens. Ils entrent néanmoins en possession de centaines de peaux dont celle du fameux 'White Buffalo' qui vaut son pesant d'or. A partir de là, les drames vont se multiplier comme si ce talisman avait le don d'attirer une malédiction sur leurs possesseurs illégitimes...

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Pour cet impitoyable réquisitoire, pour ce miroir peu reluisant de l'Amérique, quel autre choix pouvait-être plus judicieux que celui de Richard Brooks, réputé pour son progressisme et son goût pour les sujets qui fâchent ?! Ancien journaliste, scénariste et romancier, c'est un libéral rempli de bonnes intentions et de concepts généreux. C’est un peu leur Costa-Gavras américain de l'époque ; il va passer une bonne partie de sa carrière à traiter avec talent, force et conviction de sujets à caractères sociaux ou politiques et à dénoncer les abus et idées qu’il ne tolère pas. La Dernière chasse sera son neuvième long métrage après qu’il nous ait déjà gratifiés de merveilleuses réussites dans des genres différents comme Cas de conscience (Crisis), Bas les masques (Deadline USA), Le cirque infernal (Battle Circus) et surtout le toujours aussi fulgurant Graine de violence (Blackboard Jungle) qui était son précédent film. A signaler aussi que Brooks, après avoir écrit les audacieux scénarios des démons de la liberté pour Jules Dassin, de Storm Warning pour Stuart Heisler ou de Key Largo pour John Huston, fut également le scénariste de presque tous ses propres films (les plus importants en tout cas), ce qui était encore extrêmement rare à Hollywood dans les années 50. Un auteur complet qui fut réhabilité en France grâce à Patrick Brion car on peut dire que le reste de la critique fut toujours assez frileuse envers le cinéaste. On appréciait guère dans notre pays les réalisateurs qui se mouillaient politiquement et socialement parlant, les accusant souvent (et pas toujours à bon escient) de manquer de subtilité, de s'avancer avec leurs gros sabots, etc... Richard Brooks aura été un cinéaste certes inégal mais dont la filmographie demeure néanmoins passionnante et qu'il serait temps de redécouvrir à commencer par cette étonnante Dernière Chasse.

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En 1959, lors d'un entretien aux Cahiers du cinéma, Richard Brooks se déclara pourtant insatisfait de son film, n'étant pas arrivé selon lui au niveau de ses ambitieuses intentions : “J'ai travaillé avec beaucoup d'enthousiasme au scénario, mais l'histoire n'a pas donné tout ce que j'en attendais : c'était un film difficile à faire, mais il aurait pu être remarquable. C'était d'une honnêteté si brutale qu'en Amérique, personne n'a été le voir : il y a chez nous des millions de chasseurs qui n'ont pu supporter de voir ce film, parce qu'ils se sont rendu compte que des chasseurs ont massacré les bisons, sauvagement massacré seize millions de bisons, et non pas, comme les Indiens, pour en manger la viande, mais pour les peaux, pour toucher deux dollars par peau. Ce devrait être une histoire géante, à la mesure d'une époque où il y avait des géants en Amérique : alors que le pays était en pleine évolution, en massacrant les bisons, ils massacraient en un sens leur avenir, parce qu'ils gaspillaient les richesses dont ils étaient comblés. Je regrette d'avoir raté ce film.” Ce western fit d'ailleurs un beau flop dans son pays d'origine, les spectateurs n'étant pas prêts à accepter une telle virulence, se sentant un peu coupables de ce qu'ils découvraient à l'écran et ayant du coup du mal à l'accepter sereinement. Les scènes de massacres des bisons furent d'ailleurs ensuite censurées dans plusieurs pays, certains autres refusant même carrément de projeter le film. Et pourtant, "servi par ses acteurs et par un scénario d'une rare subtilité, Richard Brooks signait l'un des plus beaux westerns de la décennie" dira bien plus tard Christian Viviani dans son très bel ouvrage sur le western aux éditions Henri Veyrier. Je lui donne entièrement raison ainsi qu'à Patrick Brion qui ne cesse de tarir d'éloges à son sujet.

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"You take away our food and now you kill our religion" dira aux hommes blancs qui l'accompagnent le personnage de l'indienne (jouée par une Debra Paget, plus belle que jamais, ayant pris la succession d'Anne Bancroft s'étant blessée en cours de tournage) après que les chasseurs aient abattu un bison blanc qui pour les Natives représente une sorte de divinité. Car en effet, si le massacre des bisons fut à l'origine d'un véritable désastre écologique, il fut encore plus dramatique pour la survie de nombreuses tribus indiennes. Cet imposant animal leur était tellement indispensable qu'ils firent du bison blanc l'un de leurs dieux. Pour être plus précis, en 1853, les États-Unis comptaient un 'cheptel' d’une soixantaine de millions de bisons ; ces bêtes s’avérèrent être la source principale de subsistance des Indiens d’Amérique, ces derniers utilisant leurs dépouilles pour se nourrir, se construire des abris et se vêtir entre autres choses. A l’époque de l’histoire du film, soit seulement 30 années plus tard, il n’en restait plus que 3000 ! Premier des trois westerns que réalisera le généreux et courageux Richard Brooks, La Dernière chasse est un film qui parle donc d’un génocide et qui a déplu en son temps, les Américains ayant été fort gênés et embarrassés de voir leurs propres maux étalés sur l’écran avec une telle violence ; aujourd’hui, la force de The Last Hunt reste intacte, et il est toujours aussi dérangeant et malaisé de voir ces séquences de massacres des bisons surtout quand on sait, comme nous l’apprend un carton explicatif lors du générique de début, qu’ils ont été réellement tués lors du tournage, le cinéaste ayant eu l’autorisation de filmer le moment où, annuellement, dans une réserve du Dakota, une partie du plus important troupeau de bisons est abattue (il faut dire que dans les années 1950, le nombre de bêtes avait considérablement ré-augmenté pour atteindre les 200 000).

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En démocrate et homme de gauche convaincu, Richard Brooks en profite pour parler dans le même temps en filigrane d’une autre boucherie encore moins glorieuse, celle des Indiens d’Amérique puisque, comme l’explique Sandy (Stewart Granger), "durant les guerres indiennes, chaque bison tué signifiait un Indien mourant de faim. Ne pouvant les battre, l’armée les éliminait en les affamant." On se souvient aussi du Ethan Edwards de John Wayne dans La Prisonnière du désert abattant les bisons avec une férocité et une jubilation non feintes en criant que ça ferait tout ça en moins pour les indiens. Dans le film de Brooks, le constat du génocide indien est donc tout aussi impitoyable que celui de la décimation des bisons ; les quelques plans nous montrant les réserves indiennes peuplées d’hommes et de femmes proches de la plus extrême pauvreté annoncent ceux, tragiques, des Cheyennes de John Ford. En très peu de séquences et sans en avoir l'air puisqu'au travers de quelques rares allusions ainsi qu'aux personnages en retrait joués par Russ Tamblyn et Debra Paget, Richard Brooks aura réussi à nous livrer un des westerns pro-indiens les plus puissants qui soient sortis à Hollywood. Tout ceci est donc vu à travers l’histoire de deux chasseurs de bisons que tout opposent, l’un chassant pour subsister, l’autre par pure jouissance. Les dialogues sont d’une dureté et d’une noirceur assez incroyables pour l’époque surtout ceux sortant de la bouche du protagoniste incarné par Robert Taylor qui trouve ici l’un de ses rôles les plus antipathiques, celui d’un chasseur fascisant, odieux, répugnant et sans état d’âme, tuant pour le plaisir de tuer et l’avouant sans aucune honte : "Il n’y a rien de mal à ça. Tuer est naturel. La guerre me l’a appris : plus vous tuez, meilleur vous êtes. Tuer, combattre, lutter sont des choses naturelles. La paix n’est qu’un repos intermédiaire."

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Tout comme le cinéaste, l'acteur eut lui aussi pas mal de courage car par le choix qu'il fit de se glisser dans la peau de ce 'monstre', il pouvait risquer le reste de sa carrière. A quelques exceptions (Undercurrent – Lame de fond de Vincente Minnelli), il était surtout réputé pour interpréter des personnages positifs ; ici, il incarne probablement le personnage le plus abject de sa filmographie et même plus globalement, peut-être l'un des protagonistes principaux les plus haïssables rencontrés jusqu'ici dans un western. Sans subtilité diront certains ; c'est évident que nous sommes loin du portrait plutôt nuancé d'un Ethan Edwards mais cependant Robert Taylor s'en sort remarquablement bien et, grâce à son talent, à l'instar de son associé qui voit en lui l'image de ses démons refoulés, on arrive de temps à autre à le prendre en pitié. Il a parfois des regards hallucinés qui nous font penser qu'il ne se rend pas compte du mal qu'il fait ou bien parfois au contraire qu'il s'en rend compte sans pouvoir s'en empêcher, comme s'il était pris d'une folie meurtrière difficile (voire impossible) à maîtriser. Bref, un homme que l'on déteste tout en souhaitant qu'il arrive à se reprendre en main lui-même sans qu'on soit obligé de l'abattre. Car oui, aussi non-violent que nous soyons, c'est pourtant ce que nous pensons qu'il mériterait car il s'agit d'un homme foncièrement inhumain : égoïste, raciste, haineux, caractériel, il tue comme il respire ("Tuer est la seule preuve que tu existes ). Mais à chaque indien tué, il se penche sur son cadavre avec dans le regard une certaine incompréhension, se posant probablement la question de savoir s'il a tué un humain ou un animal. Il en va de même concernant l'indienne qu'il a décidé de prendre pour maîtresse et dont il s'étonne sincèrement du refus de se donner à lui, tellement certain de son bon droit. Son impuissance à se faire 'aimer', il s'en venge en tuant avec une extase qui ressemble à s'y méprendre à un orgasme. La tuerie l'excite : lors du massacre des bisons, il a tellement tiré de coups de feu qu'il a du mal à tenir son fusil tellement celui-ci a chauffé ; il doit alors l'arroser avec sa gourde (un détail réaliste d'ailleurs encore inédit dans le genre). Charles, un raté et un médiocre, un être primaire aux manières frustres, incapable d'aimer, de se faire aimer ou de faire confiance aux autres et qui, de ce fait, grâce au talent de son interprète et de l'auteur du scénario, arrive à nous toucher de temps à autre, ce qui était loin d'être gagné d'avance.

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On aurait pû penser à un traitement manichéen des deux rivaux mais, comme vous l'aurez surement constaté à la lecture de ces lignes, il n'en est rien ; non seulement des hommes comme Charles furent probablement plus nombreux qu'on ne le croit lors de la conquête de l'Ouest mais aussi le personnage du 'bon' se révélera non pas héroïque mais finalement faible et trop timoré, miné par ses scrupules et de forts sentiments de culpabilité, incapable de faire quoique ce soit pour amenuiser les carnages ou protéger ses compagnons de route. C'est Stewart Granger qui retrouvait Robert Taylor après avoir tous deux partagés l'affiche de La Perle noire de Richard Thorpe, film dans lequel les rôles étaient en quelque sorte inversés, Granger étant alors le 'Bad Guy'. Son interprétation est tout aussi parfaite que celle de son partenaire ; il faut l'avoir vu verser des larmes alors qu'il ne peut se décider à arrêter le massacre qu'il est en train de perpétuer malgré son profond respect pour la nature ! "Je suis dégoûté, Il semble que la seule chose que j'ai connue, depuis que je suis gosse, soit de tuer d'une façon ou d'une autre". Ici, c'est donc un homme qui, las de tout et ruiné, accepte de faire équipe avec un homme qui lui est totalement antagoniste mais à qui il n'ose finalement pas dire grand chose, ne se mêlant de rien de ce qu'il entreprend même si ça ne lui semble pas sain. Il ne fera rien pour l'empêcher de 'violer' l'indienne, de tuer le bison blanc, de rosser leur compagnon de route métis, de tuer un pauvre indien dans un duel réglé d'avance... Il ne se rebellera qu’après s'être pris une cuite monumentale dans un moment de déprime au cours duquel il participera à un triste pugilat dans un saloon ; une scène remarquable par le fait de ne justement pas jouer sur le côté jubilatoire dévolu habituellement à ce type d'homériques séquences de combats à poings nus, et au contraire de réussir à nous mettre à nouveau mal à l'aise. Voir Sandy se mettre dans un tel état de délabrement alors qu'il se présentait jusqu'à présent à nous comme l'homme droit et honnête n'est pas très agrébale à accepter mais c'est ce qui nous le rend finalement encore plus humain. Une fois rentré au camp, ayant appris les dernières violentes frasques de son acolyte (la séquence de la mort de Lloyd Nolan est d'une force extraordinaire ; il faut dire que le comédien est étonnant dans ce rôle de Old Timer à cent lieues de ceux interprétés par Walter Brennan ou Arthur Hunnicut), il prend enfin la décision de le quitter, accompagné de la jeune indienne et du bébé qu'il souhaite sauver de sa folie meurtrière.

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Autre motif d'étonnement (positif) de la part du scénariste Richard Brooks, si Sandy souhaite désormais la disparition de Charles auquel cas contraire c'est lui qui sera abattu, on aurait pu s'attendre à un époque duel final mais il n'en sera rien, Sandy n'étant même pour rien dans la mort de son associé sa Némésis), laissant la nature s'en charger. Un final mémorable (même pour Stanley Kubrick ?! Voir Shining) qui tire sur la fable fantastique et écologique puisque c'est la nature qui se vengera d'avoir autant été malmenée par cet homme qu'elle semble pétrifier pour en faire un exemple.Le contraste entre la noirceur qui imprègne le film et la somptueuse et chatoyante photographie en cinémascope de Russel Harlan, qui nous fait penser que les protagonistes évoluent dans une sorte d’Eden, est assez surprenant et rend le film encore plus passionnant. Rarement nous n'avions encore vu au sein d'un western de prairies aussi verdoyantes, de lacs aussi miroitants, de plaines aussi idylliques. Le film est ainsi plastiquement splendide, les innombrables séquences nocturnes en studio ne venant rien gâcher puisque les équipes techniques de la MGM réussisent un aussi beau travail que lors des scènes similaires dans le superbe Fort Bravo de John Sturges. Les magnifiques éclairages de Russel Harlan font que le tout passe comme une lettre à la poste à l'exception de quelques plans tournés en plein soleil alors que la séquence est censée se dérouler dans la nuit noire. Visuellement, le film est donc un mélange de superbes décors naturels du Sud Dakota avec certains de studio dans lesquels évoluent en fin de compte très peu de personnages ; l'occasion aussi pour les auteurs de s'attarder sur des séquences presque documentaires autour du feu de camp, les chasseurs préparant attentivement leurs cartouches, fourbissant leurs armes, discutant de l'évolution du Far-West et de leur mode de vie, évoquant les grandes figures du passé... Outre celui cité déjà plus avant, beaucoup d'autres détails très réalistes dans les costumes, l'aspect des figurants ou les décors de la ville aux rues boueuses.

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Un film courageux, tendu, brutal, exacerbé, oppressant et parfois même fascinant dans son abjection (la vision des plaines verdoyantes devenues de vrais charniers ; les tueries insoutenables que ce soient celles perpétuées sur les indiens ou les animaux), qui met le doigt à trois endroits où ça fait mal : le massacre des bisons, le génocide indien et le goût cruel des américains pour les armes à feu. Un film dérangeant qui fut boudé par les américains et qui fait aujourd'hui, à juste titre, figure de classique du genre. A cette époque, les intellectuels et libéraux utilisaient le film de genre pour faire passer leurs idées et c'en était d'autant plus fort. Un virulent pamphlet de plus dans la filmographie de ce dénonciateur des tares d'une humanité souvent rétrograde. Un sévère procès fait à la civilisation des pionniers au travers ses représentants les plus irresponsables selon Jean-Louis Rieupeyrout (spécialiste et historien du western et de l'histoire de l'Ouest américain), "la pire lie de l'Ouest, artisans inconscients de la dégradation des rapports entre l'homme blanc et l'indien". "Est-il trop tard pour dire une fois encore toute l'importance de ce western très attachant qui nous confirma la sensibilité extrême de son auteur et l'intérêt d'une vision réaliste des visages du vieil Ouest quand ils sont peints avec autant de flamme et de sincérité ?" disait-il en conclusion de son avis sur ce film dans son indispensable ouvrage paru en 1965, 'la grande histoire du western'. Richard brooks n'est ni John Ford ni Anthony Mann et son western manque parfois d'ampleur dans la mise en scène ; mais ce n'était probablement pas non plus le but recherché par le cinéaste et, malgré aussi quelques petites faiblesses de rythme à quelques reprises, on tient là un très grand western.
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Re: Le Western américain : Parcours chronologique Part 3 (55

Message par Rick Blaine »

Une éternité que j'ai ce film en DVD et je ne l'ai jamais regardé. :oops:

J'avais peur d'un truc un peu pénible, ça ne semble pas être le cas. Au contraire, le film fait maintenant envie!! :D
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Jeremy Fox
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Re: Le Western américain : Parcours chronologique Part 3 (55

Message par Jeremy Fox »

Rick Blaine a écrit :Une éternité que j'ai ce film en DVD et je ne l'ai jamais regardé. :oops:

J'avais peur d'un truc un peu pénible, ça ne semble pas être le cas. Au contraire, le film fait maintenant envie!! :D

Faut juste passer outre le petit rectangle au sein de ton grand écran et ensuite ce n'est que du bonheur :wink:
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hellrick
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Re: Le Western américain : Parcours chronologique Part 3 (55

Message par hellrick »

Rick Blaine a écrit :Une éternité que j'ai ce film en DVD et je ne l'ai jamais regardé. :oops:

J'avais peur d'un truc un peu pénible, ça ne semble pas être le cas. Au contraire, le film fait maintenant envie!! :D
Ah ben tout pareil en fait :oops:
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Jeremy Fox
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Re: Le Western américain : Parcours chronologique Part 3 (55

Message par Jeremy Fox »

C'est malin ; maintenant vous m'avez mis la pression ! J'espère que vous apprécierez :oops:
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