Le cinéma naphta chinois

Rubrique consacrée au cinéma et aux films tournés avant 1980.

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Abdul Alhazred
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Le cinéma naphta chinois

Message par Abdul Alhazred »

J'ai cherché un peu partout sur le forum mais je n'ai pas trouvé de sujet sur le cinéma naphta chinois (Chine continentale dans le cas qui va suivre, mais le sujet peut également s'appliquer au cinéma hongkongais naphta). Music Man et bruce randylan ont déjà traités plusieurs films dans cette catégorie mais dans des sujets consacrés à d'autres thèmes.


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SONG OF MANGO (芒果之歌) de Chang Yan – CHINE - 1976

Je me suis récemment pris quelques films chinois un peu au hasard sur YesAsia, des films rares autour desquels peu d’informations circulent sur le net. Parmi ceux ci, je vais consacrer quelques lignes à Song of Mango, pour lequel aucune information n’est disponible en français ou en anglais.

L’histoire se déroule dans une université provinciale pendant la révolution culturelle.
Afin de soutenir la révolution en s’éduquant, un « Groupe de propagande des travailleurs » de province est envoyé dans l’université locale. Cette dernière est en proie à de fortes tensions entre plusieurs organisations étudiantes, qui s’affrontent pour le contrôle de l’université. Les deux groupes principaux, le « Corps de la révolution et de la rébellion orageuse » et le « Quartier général de la révolution et de la rébellion des gardes rouges », sont représentés par deux sœurs ennemies (je ne sais pas combien il y a d’organisations au total, j’ai noté « l’Armée en marche », le « Corps des combattants intrépides » et le « Corps de la révolution et de la rébellion des travailleurs, étudiants et paysans » mais j’en ai peut-être loupé).

Le « Groupe de propagande des travailleurs », dont le commissaire est la mère des deux sœurs, décide de prendre les choses en main pour faire signer une trêve et calmer la situation. La commissaire se rend compte que le « Quartier général de la révolution et de la rébellion des gardes rouges » est manipulé par un vil capitaliste enseignant à l’université (et qui a une tête de fourbe).
Après moult rebondissements, comme le non respect de la trêve par le « Quartier général de la révolution et de la rébellion des gardes rouges » ou la repentance d’un membre du « Quartier général de la révolution et de la rébellion des gardes rouges » devant un drapeau touché par le Grand Mao, tout se résout finalement dans un grand meeting en plein air, où un professeur allié du méchant capitaliste se repend en entendant un récit sur sa pauvre mère campagnarde.


Je m’intéresse beaucoup aux films de propagande et je commence à en avoir vu pas mal, de différentes époques et de différents pays. J’avoue toutefois que celui-ci est un des plus gratinés que j’ai pu visionner jusqu’à présent. Le film est une ode à la gloire du Grand Timonier et de la révolution culturelle, qui permet aux paysans de vivre, aux travailleurs de s’éduquer et à la société d’atteindre l’harmonie, seulement perturbée par la bassesse des capitalistes saboteurs.
Song of Mango reste toutefois un document historique intéressant car il illustre bien certaines tensions au sein même des révolutionnaires. L’université est divisée en de nombreux groupuscules ennemis, qui veulent tous le pouvoir et se prétendent tous détenteur de la légitimité et de l’autorité. Chaque groupuscule capture des prisonniers politiques, et même le « Groupe de propagande des travailleurs », envoyé officiel du pouvoir étatique au sein de l’université, a du mal à asseoir son autorité. Les jeunes ne respectent pas les vieux, les enfants ne respectent pas leurs parents, et tout ceci donne une impression de beau bordel plutôt que d’une formidable société harmonieuse.

Passé ces considérations sur l’intérêt historique, le film est malheureusement assez mauvais, filmé sans imagination et avec une actrice principale franchement catastrophique.
La qualité du DVD que j’ai récupéré n’aide pas (même DVD que sur la jaquette ci-dessus) : l’image et le son sont corrects mais les sous-titres anglais sont abominables, ça sent le traducteur automatique. L’histoire reste compréhensible mais j’ai dû louper des subtilités.

A éviter donc, sauf intérêt particulier pour les films de propagande ou pour la période de la révolution culturelle.
Dernière modification par Abdul Alhazred le 24 mai 12, 19:24, modifié 1 fois.
Music Man
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Re: Le cinéma naphta chinois

Message par Music Man »

Abdul Alhazred a écrit :J'ai cherché un peu partout sur le forum mais je n'ai pas trouvé de sujet sur le cinéma naphta chinois (Chine continentale dans le cas qui va suivre, mais le sujet peut également s'appliquer au cinéma hongkongais naphta)
Bonne initiative!! :D J'en profiterai pour rapatrier ici certains avis sur des films de Hong Kong :wink:

L'étude des films propagande est très intéressante. Si souvent, sur un plan strictement cinématographique et artistique, on est déçu, sociologiquement leur analyse et celle des artifices utilisés pour manipuler le public peut être passionnante. Je suis toujours abasourdi quand je visionne certains films étrangers (je pense notamment au remake turc des Chiens de paille) qui sont de véritables appels à la haine et à la vengeance, en craignant l'impact sur les spectateurs...impact d'autant plus dévastateur quand le film est réussi.
Music Man
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Re: Le cinéma naphta chinois

Message par Music Man »

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TORRENTS DE DESIR de Law CHUN -HONG KONG - 1969
Avec Jenny HU, Chiao CHUANG

Un jeune homme richissime, noceur et alcoolique, se range en épousant une jeune fille dont son meilleur ami est épris en secret. Pensant être stérile, il devient fou quand sa femme lui apprend qu’elle est enceinte et la soupçonne de le tromper avec son ami.

Remake chinois d’Ecrit sur du vent, le chef d’œuvre de Douglas Sirk, émaillé de jolies chansons. Ici, on est en plein mélodrame flamboyant : l’image est incandescente et le début du film, filmé de façon assez originale, comme un tourbillon pour évoquer le débauche du héros, est de bonne augure. Mais très vite, le film s’enlise comme un médiocre soap opéra , interprété de façon ridicule. Angela Yu, futur star chinoise du film érotique (elle a d’ailleurs quelques scènes topless osées pour l’époque) est catastrophique dans le personnage de sœur débauchée si brillamment joué par Dorothy Malone dans la version d’origine.
Ici, les personnages n’ont aucune profondeur et on ne comprend pas bien pourquoi le jeune marié bascule dans la folie et sombre à nouveau dans l’alcool.
L’histoire a été remaniée : à la fin tout s’arrange , la jeune femme garde son bébé et son mari, raisonné par le médecin de famille, comprend son erreur et revient près d’elle. Un happy end qui vient rajouter un coté roman photo à 4 sous.
Coté chansons et musiques, le film est très occidental. Jenny Hu est fort joliment doublé par une soprano qui interprète entre autre un air classique du folklore napolitain en chinois et plusieurs ballades.
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Re: Le cinéma naphta chinois

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THE DANCING MILLIONAIRESS
De Choe Din –HONG KONG - 1964 scope technicolor
Avec Peter Chen Ho (qui fut surnommé le Cary Grant chinois), Betty Loh Ti
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Un jeune danseur sans le sou rencontre une riche femme d’affaires, par une série de quiproquos. Non seulement, ils vont s’aimer, mais elle va produire son show et y tenir le premier rôle féminin.
Autant le dire, l’intrigue n’a rien de terrible ni d’original. C’est une comédie un peu poussive, inspirée par les comédies sophistiquées hollywoodiennes des années 60 avec le couple le plus populaire du cinéma chinois de l’époque (cela dit leur mariage ne durera pas, et Betty Lh Ti se suicidera en 1968). L’essentiel des numéros musicaux est regroupé à la fin du film et louche franchement du coté d’Hollywood. Quasiment rien de chinois dans les twists, mambos, madisons qui s’enchaînent. Les décors sont somptueux, les éclairages splendides, le grand orchestre sonne très « Percy Faith » tout comme dans une grosse production hollywoodienne…mais les danseurs ne semblent pas très expérimentés, et ont du mal à synchroniser leurs mouvements.
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Peter Chen Ho et Betty Loh Ti

Cependant le numéro rythmé très inspiré du ballet porto ricain de West Side Story un peu mieux exécuté que le reste se laisse voir. La chanteuse qui double Betty Loh Ti a une voix ravissante.
Ce n’est certainement pas le meilleur film musical chinois, contrairement à ce qu’indique la bande annonce.
Music Man
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Re: Le cinéma naphta chinois

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MAMBO GIRL de Evan YANG - HONG KONG - 1957
Avec Grace CHANG, Peter CHAN HO

La jolie Kialing, surnommée « mambo girl » par ses camarades de collège apprend qu’elle a été adoptée. Elle part à la recherche de sa vraie maman, devenue dame pipi dans un cabaret.

A la fin des années 50, la vague des rythmes afro cubains et du mambo n’avait pas touché que l’Europe et les USA. Dans cette rafraîchissante comédie musicale de Hong Kong, très occidentalisée (au générique figure même l’ancêtre d’une poupée Barbie) et très fifties dans l’âme, on danse et on chante le mambo, le tcha tcha et même le rock à en perdre haleine. Sur une histoire des plus simplettes, le metteur en scène a bâti un spectacle très attachant d’une grande naïveté et d’une innocence des plus touchantes.
Le personnage du papa adoptif, marchand de jouet est absolument craquant, avec sa bouille rebondie et on est conquis par tant de bons sentiments et de fraîcheur.
La lumineuse Grace Chang est une excellente chanteuse, aussi douée pour les rythmes chaloupés du calypso que pour des ballades sentimentales. A ces cotés, on reconnaît le souriant Peter Chan Ho « le Cary Grant asiatique ». Outre d’innombrables mambos fort bien dansés souvent dans un style danse de salon (et notamment un passage exécuté par une danseuse acrobatique très douée qui n‘a rien à envier à Ninon Sevilla et Tongolele), on reconnaît aussi le « petit cordonnier » de Francis Lemarque popularisé en Extrême orient par Yvette Giraud.
Absolument charmant.

Music Man
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Re: Le cinéma naphta chinois

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LA ROSE SAUVAGE (the wild wild rose)- de Tia Ling WANG - HONG KONG -1961
Avec Grace CHANG, Yang ZHANG

Un jeune pianiste sérieux et honnête tombe dans les griffes d’une chanteuse frivole et infidèle, au grand désespoir de sa fiancée. Sa passion destructrice le mènera à commettre l’irréparable.

Cette adaptation chinoise de Carmen est certainement une des réussites du cinéma musical de Hong Kong du début des années 60 et le meilleur rôle de Grâce Chang, la magnétique « mambo girl ». Loin de ses rôles habituels de gentilles jeunes filles , elle brille dans ce personnage complexe de fille facile et dévergondée qui cache en fait un coeur d’or. Evidemment, on pourra reprocher aux acteurs d’en faire parfois un peu trop (la scène où le vieux musicien se dispute avec sa femme alitée, qui refuse de prendre ses médicaments pendant que les enfants pleurent est plus risible que dramatique), mais pour le reste le film sonne souvent juste, notamment lors du passage où la sensuelle chanteuse fait tomber le pianiste dans ses filets : tout est dans les gros plans et les regards. Même sans les passages musicaux, le film se laisserait suivre avec intérêt.
Grace Chang interprète plusieurs airs ultra connus de l’opéra occidental : la habanera de Carmen, la veuve joyeuse, Mme Butterfly revus et corrigés en version rumba, mambo et jazzy, voire parodique. C’est vraiment étonnant et souvent très réussi. L’étendue vocale de la chanteuse lui permet aussi de chanter un blues avec beaucoup de talent.
Une très bonne découverte.

Music Man
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Re: Le cinéma naphta chinois

Message par Music Man »

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BLUE SKIES – de Sit KWAN – HONG KONG - 1967
Avec Peter CHEN HO et Cheng PEI PEI

Une jeune et jolie danseuse remplace au pied levé la capricieuse vedette du spectacle. Elle part en tournée et s’éloigne du compositeur qui l’aime. Un grave accident de la route la défigure..
Comédie musicale de Hong Kong, naïve et colorée ; si certains danseurs paraissent doués (notamment la vedette féminine Cheng Pei Pei), les chorégraphess ne font pas montre de beaucoup de talent. Les ballets, dans des décors très colorés et carton pâte, s’articulent autour de scénettes amusantes avec danseurs déguisés en chats par exemple, ou en enfants avec d’immenses masques en papier mâché. Les diverses séquences musicales évoquent tour à tour les ballets oniriques des films hollywoodiens en technicolor de années 40 (style Banana split) ou des beach movies, avec des figurants dansant le jerk en bikini dans un décor kitsch de fonds marins en plastique : très amusant ! Vers la fin du film, l’intrigue bascule dans le drame puis tout s’arrange avant le numéro final. Une sucrerie amusante.
Music Man
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Re: Le cinéma naphta chinois

Message par Music Man »

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THE VENUS TEAR DIAMOND de Inoue UMETSUGU - HONG KONG -1971
Avec Lily HO, Ling YUNG

Quatre voleurs tentent de dérober l’inestimable diamant « la larme de Vénus » pendant un concours de chant au Japon.

On retrouve tout à fait la patte du réalisateur japonais Inoue Umetsugu (Hong Kong nocturne), le grand spécialiste de la comédie musicale de Hong Kong des années 60.
Tout s’enchaîne très rapidement dans cette comédie policière divertissante. Sans jamais se prendre au sérieux, le réalisateur propose un travail honnête et tout à fait agréable. Évidemment certains seconds rôles en font des tonnes (un peu comme à Bollywood mais en plus supportable) et musicalement, le film est assez pauvre : beaucoup de chansons, certes, mais platement filmées lors du concours de chant. C’est finalement l’intrigue assez cocasse qui retient l’attention (avec des voleurs qui se font mutuellement avoir) dans ce film familial. Le passage se déroulant pendant l’exposition universelle de Suita (qui se déroula entre mars et octobre 1970) est assez intéressant aussi.
Dernière modification par Music Man le 24 mai 12, 21:53, modifié 1 fois.
Abdul Alhazred
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Re: Le cinéma naphta chinois

Message par Abdul Alhazred »

Je vais rapatrier également.
Music Man a écrit :Image
LA ROSE SAUVAGE (the wild wild rose)- de Tia Ling WANG - HONG KONG -1961
Avec Grace CHANG, Yang ZHANG

Un jeune pianiste sérieux et honnête tombe dans les griffes d’une chanteuse frivole et infidèle, au grand désespoir de sa fiancée. Sa passion destructrice le mènera à commettre l’irréparable.

Cette adaptation chinoise de Carmen est certainement une des réussites du cinéma musical de Hong Kong du début des années 60 et le meilleur rôle de Grâce Chang, la magnétique « mambo girl ». Loin de ses rôles habituels de gentilles jeunes filles , elle brille dans ce personnage complexe de fille facile et dévergondée qui cache en fait un coeur d’or. Evidemment, on pourra reprocher aux acteurs d’en faire parfois un peu trop (la scène où le vieux musicien se dispute avec sa femme alitée, qui refuse de prendre ses médicaments pendant que les enfants pleurent est plus risible que dramatique), mais pour le reste le film sonne souvent juste, notamment lors du passage où la sensuelle chanteuse fait tomber le pianiste dans ses filets : tout est dans les gros plans et les regards. Même sans les passages musicaux, le film se laisserait suivre avec intérêt.
Grace Chang interprète plusieurs airs ultra connus de l’opéra occidental : la habanera de Carmen, la veuve joyeuse, Mme Butterfly revus et corrigés en version rumba, mambo et jazzy, voire parodique. C’est vraiment étonnant et souvent très réussi. L’étendue vocale de la chanteuse lui permet aussi de chanter un blues avec beaucoup de talent.
Une très bonne découverte.
Je repars de la critique de Music Man, qui m'a récemment prêté le DVD. J'attendais beaucoup de ce film, dont j'avais entendu parler dans plusieurs ouvrages et articles sur le cinéma hongkongais.
Outre Carmen, le scénario rappelle fortement L'Ange bleu de von Sternberg, soit la déchéance d'un ancien professeur amoureux d'un chanteuse de cabaret.

Musicalement, le film est très intéressant, avec, comme le signale Music Man, des reprises réussies d'airs connus. Les acteurs sont plutôt convaincants, bien qu'il m'ait fallu quelques minutes pour m'habituer au jeu un peu outrancier de Grace Chang.
J'ai apprécié le film mais j'avoue tout de même une légère déception au final. Je m'attendais à un scénario un peu plus policier ou film noir, et pas à un remake de L'Ange bleu (dont je ne suis pas fan). Et certains aspects mélo sont lourdingues, notamment la scène signalée par Music Man et les 20 dernières minutes, où tout le monde crie et pleure à longueur de temps (j'ai vu bien pire mais ça reste pénible).
Un film à voir mais un peu surestimé d'après moi.


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THE MILLIONAIRE CHASE (釣金龜) d'Inoue Umetsugu - HONG KONG - 1969
A l'inverse, autre film prêté par Music Man, j'ai trouvé The Millionaire Chase fort sympathique. Le film narre les péripéties de trois chanteuses de music hall hongkongaises qui acceptent une tournée en Asie dans l'espoir de rencontrer des millionnaires à marier. Vont s'ensuivre deux tonnes de petites aventures et de quiproquos, impliquant notamment des trafiquants de bijoux.

Malgré des numéros musicaux très classiques et des chansons pas exceptionnelles, le film reste une agréable comédie bien rythmée, sorte de mélange entre les Gold Diggers des années 30 et Comment épouser un millionaire. Le scénario est franchement prévisible, les gags déjà vus 10000 fois, mais ça n'empêche pas le tout de fonctionner très efficacement pour qui cherche un divertissement enjoué.
Abdul Alhazred
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Re: Le cinéma naphta chinois

Message par Abdul Alhazred »

Suite et fin de la première série de films hongkongais prêtés par Music Man.

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TILL THE END OF TIME (何日君再來) de CHUN Kim – HONG KONG - 1966
Rien à voir a priori avec le film homonyme de Dmytryk, que je n’ai pas vu.
Un riche pianiste tombe amoureux d’une pauvre chanteuse, contre l’avis de leur famille respective. Prêts à tout pour se marier, l’homme, renié par son père, abandonne sa situation. La femme quitte son travail pour ne pas faire honte à la réputation de la famille de son futur mari.
Une fois mariés, pour subvenir aux besoins du couple et de leur enfant nouveau né, l’ancien pianiste accepte un poste de professeur et travaille d’arrache-pied, ne lésinant pas sur les heures supplémentaires. Harassé par le travail, il devient aveugle.


Ho, le beau mélo que voilà. Ca pleure, ça meurt, et le sort s’acharne sur le pauvre couple. Tout ça ponctué de chansons car nous sommes dans un musical hongkongais des années 60.
C’est franchement invraisemblable, pas original pour deux sous, la réalisation appuie lourdement les effets, l’acteur masculin n’est pas des mieux choisis (Peter Chen Ho, pas un mauvais acteur mais sans doute pas le meilleur choix, à plus de 35 ans, pour jouer un jeune diplômé au côté de la petite Jenny Hu, moins de 20 ans) mais il faut avouer que c’est,au final, assez distrayant.

L’actrice principale, Jenny Hu dont c’était le premier film, a un jeu rafraîchissant, à l’inverse des parents du pianiste et de la grand-mère de la chanteuse, au jeu plutôt outrancier.
A noter également l’apparition de Lily Ho Li-Li, dont c’est un des premiers rôles et que je connaissais surtout dans des wu xia pian comme La légende du lac ou Les 14 amazones.

Seul petit bémol, les chansons, pourtant composées par un habitué du genre, Joseph Koo Ka-Fai, ne sont pas terribles, à l’exception de la dernière.
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Re: Le cinéma naphta chinois

Message par Music Man »

la chanson est la + connue de ce film est une adaptation variété d'une polonaise de Chopin, déjà chantée avec succès par le crooner Perry Como en 1946 sous le titre "till the end of time" (reprise en français la même année par Rina Ketty : tant que je vivrai) qui lui a donné son nom. Sinon, le film n'est pas fameux, je te l'accorde!! :wink:
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Re: Le cinéma naphta chinois

Message par Music Man »

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ASHIMA de Liu QIONG – CHINE -1964
Avec Yang LIKUN et Bao SI-ER

Légende chinoise : Ashima, dont le prénom signifie « aussi précieuse que l’or »,est une jeune fille de la tribu des Sani, connue pour son intelligence et sa beauté. Convoitant cette dernière, le fils du chef de la tribu veut la prendre pour femme. Après avoir essuyé un refus, le clan au pouvoir décide d’enlever la jeune fille. En apprenant la nouvelle, le berger Ahei qui est amoureux d’elle, part à cheval avec un arc et des flèches pour la sauver. Il défait le clan avec son intelligence et son grand courage, mais sur le chemin du retour, le génie de la montagne fige Ashima dans la roche. Depuis des siècles, elle demeure ainsi statufiée pour l’éternité au milieu de la forêt de pierres de Shilin, considérée comme la première Merveille du Monde.

Premier film en couleur de la république populaire chinoise, Ashima est un petit bijou de grâce et de musicalité, 100% chanté qui ne pourra qu’enchanter les amateurs d’opéra, de lyrisme, de poésie et de comédie musicale. Le film a d’ailleurs obtenu Ashima a obtenu le prix du meilleur film de danse au 3ème Festival du cinéma de danse et de musique en Espagne en 1982. Une récompense largement méritée.
Dans des tons à dominante rose ou mauve*, le film nous propose une série de tableaux tout à fait exquis, dans une atmosphère onirique, bucolique et d’une touchante naïveté au milieu des décors naturels absolument magnifiques de la province du Yunnan. Dans ce véritable paradis terrestre, les amours sont plus purs et profonds que jamais et défient l’éternité, avec cette magie et cette délicatesse qu’on trouvait par exemple dans le film d’animation les aventures du prince Achmed. Pour avertir son fiancé du grave danger qu’elle court, Ashima lui envoie un message dans un camélia rouge qu’elle fait glisser sur l’eau de la rivière : par enchantement, la fleur parvient à remonter courants et cascades, avant d’être récupérée par le cheval de Ahei qui le porte aussitôt à son maître. Si ce dernier est encerclé par les montagnes, il n’aura pas de mal à provoquer une avalanche et à se frayer ainsi un chemin grâce à son archer magique.
La nature et les animaux se font complices pour aider les deux héros: c’est mignon comme tout.
Musicalement, les mélodies sont superbes et harmonieuses et divinement chantées par le ténor à la voix d’or qui double Bao Si-er. Je sais que certains sont hostiles à l’opéra chinois mais là vraiment, la musique semblait plus proches des œuvres lyriques européennes et tout à fait assimilable à nos oreilles : franchement un véritable enchantement.
Ajoutons à cela une chorégraphie réussie et innovante (ballet des gardes du château avec leurs armes blanches) et de belles idées de mise en scène (utilisation de kaléidoscopes). Evidemment les trucages de la dernière partie sont perfectibles,
En résumé, j’ai été complètement sous le charme et je remercie vivement Abdul Alrazhed de cette belle découverte que j’ai très envie de faire partager à mon entourage.
A réserver néanmoins aux spectateurs n’ayant pas d’aversion pour les films chantés et dansés car le film est entièrement musical, avec une conception dans la trame et dans la forme très proche de l’opéra.
Image[
La jeune et jolie Yank Likun (1941-2000) qui incarne ici Ashima avait déjà obtenu beaucoup de succès dans le film les 5 feuilles d’or. Son statut de superstar de la comédie musicale chinoise lui vaudra d’être surnommée la Judy Garland chinoise. Elle a été persécutée et torturée pendant la révolution culturelle, car on la soupçonnait de ne pas partager les idées révolutionnaires. Traumatisée, la star a été internée à l’asile psychiatrique et ne s’en est hélas jamais remise. La maison où la star de cinéma a passé son enfance est devenue depuis peu un mémorial où sont exhibés des souvenirs de Yank Likun.

*Je me suis demandé si le cinéaste avait utilisé des filtres et choisi volontairement cette dominance rose ou si c’est le procédé technique choisi pour la couleur qui n’arrivait pas à faire ressortir le bleu (un peu comme le gévacolor espagnol des années 50)
Abdul Alhazred
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Re: Le cinéma naphta chinois

Message par Abdul Alhazred »

Music Man a écrit :En résumé, j’ai été complètement sous le charme et je remercie vivement Abdul Alrazhed de cette belle découverte que j’ai très envie de faire partager à mon entourage.
Pas de quoi, mais c'est Alhazred :mrgreen:

Sinon, seul regret pour ma part, le DVD que je t'ai prêté n'est pas d'une grande qualité (mais c'est à ma connaissance la seule version qui existe en DVD sous-titré anglais). Les sous-titres anglais sont corrects (à l'inverse d'autres films chinois que j'ai pu voir) mais l'image a quand même pas mal vécu et je pense que le côté très délavé des couleurs vient aussi de la qualité assez faible de la bande.
bruce randylan
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Re: Le cinéma naphta chinois

Message par bruce randylan »

Le focus HK de Paris Cinéma proposait aussi une dizaine de classique des années 40-50-60

Sorrow of the forbidden city (Zhu Shilin - 1948)

A la mort de l'empereur Qing, le fils manque de caractère pour reprendre le trône. Sa belle-mère autoritaire l'écarte du pouvoir pour le diriger à sa place. Quand le pays se fait envahir, sa politique conduit l'empire vers sa perte.


C'est ce qu'on appelle un drame de palais. Ce sont donc des films où les gens parlent, complotent, se disputent et pleurent dans de grands et beaux palais.
Ca a atrocement mal vieilli avec une histoire très mal racontée, où les enjeux mettent une éternité à se mettre en place. Le jeu d'acteurs est véritablement rigide, théâtrale et figé voire horripilant (la belle-mère stridente qui passe son temps à aboyer a de quoi vous écœurer du mandarin).
En revanche, visuellement, ce n'est pas moche du tout avec de très beaux décors et costumes qui font sentir qu'il y avait un budget conséquent. La photographie n'est pas mal non plus mais le master tirée d'une copie 16mm bien usée tirait vraiment la langue.

La première moitié est donc un beau calvaire mais la deuxième rehausse un peu le niveau avec son intrigue plus limpide et qui laisse entrevoir un film passionnant dans les rapports entre le jeune empereur manquant d'assurance mais avec une vision de ses responsabilités qui essaye de faire face à sa parente dont l'orgueil la rend aveugle aux problèmes de son pays.
Sauf que ces questions sont vraiment maladroitement traitées sans qu'on ressente vraiment une tension ou des dilemmes. Mais ça pimente un peu les palabres de palais. :|
"celui qui n'est pas occupé à naître est occupé à mourir"
bruce randylan
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Re: Le cinéma naphta chinois

Message par bruce randylan »

It was a cold winter night / Cold nights (Lee Sun-fung - 1955)

Durant la guerre contre le Japon, un fonctionnaire tousse et pleure.

Voilà. C'est tout. 130 minutes qui se résument à ça. Rien de plus. Il pleure et il tousse. Pour pas qu'il se sente seul, dès fois quelqu'un pleure pendant qu'il tousse. :|

C'est un mélodrame ahurissant qui pousse le genre dans ses derniers retranchements en faisant de chaque scènes un numéro lacrymonial pour ses acteurs. Et je ne caricature même pas. Le héros dois se faire plaquer 3 fois pas sa femme, comme il pleure (et tousse) beaucoup, elle revient. Mais les 3 fois, elle se prend la tête avec sa belle-mère. Donc elle aussi pleure. Elle part de nouveau. Le mari pleure. Elle reste. La belle-mère ronchonne. La femme pleure et part... Pour pas qu'on trouve ça répétitif, le réalisateur intercale donc à chaque fois "LA" grand scène de toux de l'acteur principal. :D
Soit3 scènes où il tousse et tousse et retousse lors de la pause de midi avec ses collègues. Évidement il préfère tousser devant les plats de ses copains plutôt que de s'éloigner. Donc les autres fonctionnaires l'écartent du groupe. Il pleure (en toussant). Les fonctionnaires culpabilisent (et pleurent un peu aussi). Mais le lendemain, il retousse dans leurs plats. Ils l'écartent. Il pleure (et tousse). Ils culpabilisent. Etc...

Comme à un moment il faut se rapprocher de la fin, un fonctionnaire lui dit qu'il peut rester tousser chez lui alors tout le monde pleure. Et puis ça femme pleure parce qu'elle doit partir à cause de la belle-mère ("qui est vieille et sénile alors il faut lui pardonner" dixit le mari en pleurant :lol: ). Alors on a droit à une scène d'adieu le soir où le mari puis la femme pleurent (et lui tousse aussi). Puis on a droit à une scène d'adieu durant la nuit où le mari pleure (et tousse) puis la femme pleure. Enfin, on a droit à la scène d'adieu le lendemain matin où le mari pleure (et tousse) puis la femme pleure avant que leur enfant et la grand-mère pleurent à leurs tours.
Comme tout le monde s'en doute, à la fin il meurt de trop tousser (alors que sa femme revient en pleurant).

Rarement vu une dramaturgie aussi ramenée à quelque chose d'aussi simple et artificiel. On ne voit vraiment que le mec qui tousse et pleure. C'est tellement répétitif que ça tiens de la performance expérimentale ou de l'happening.
Le pire, c'est que la mise en scène est en plus franchement molle avec sa succession de plans larges (quand il tousse devant ses collègues ou quand sa femme part) et gros plans (quand ça pleure). L'accessoiriste a pour travail de coller jusqu'à trois fausses larmes sur les joues des acteurs pour montrer qu'ils pleurent vraiment.

Voilà, vous connaissiez les films où les gens s'amusent à compter le nombre de morts, il faudrait faire la même chose avec les crises de toux et quand ils pleurent. :mrgreen:
Dernière modification par bruce randylan le 19 nov. 13, 19:19, modifié 1 fois.
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