Cy Endfield (1914-1995)

Rubrique consacrée au cinéma et aux films tournés avant 1980.

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bruce randylan
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Message par bruce randylan »

The Argyle Secrets ( Cy Enfield - 1948 )
Bon, j'aurais finalement réussi à voir un film de la rétro Cy Enfield à la cinémathèque ( le réalisateur de Zulu ).
Sans être un chef d'œuvre, c'est un film très sympathique et amusant.
Ecrit par Enfield lui même d'après une pièce radiophonique dont il fut déjà l'auteur, The Argyle Secrets est un film noir dans la tradition du Grand sommeil ou du faucon Maltais, c'est un policier au scénario des plus retorse pour ne pas dire incompréhensible mais s'inspirant de la méthode Hawks, Enfield fait passer la pilule en jouant la carte divertissement à fond. Son film ne se prend jamais au sérieux et multiplie les rebondissements, les fausses pistes, les seconds rôles avec une bonne humeur à la limite de l'auto-parodie qui rend sa très modeste production assez attachante. Il faut voir à ce titre la scène irrésistible où le héros, traqué pour meurtre, s'échappe de chez lui par l'escalier de service pour se retrouver chez sa voisine du bas en rentrant tout naturellement pas la fenêtre, se faire inviter presque tout aussi naturellement par la maitresse de maison avant de tomber sur son fils policier qui ramène le journal où l'on trouve sa tête en première page comme un dangereux criminel.

Les dialogues font mouches, la narration est sans temps mort ( avec 64 minutes au compteur, ça aide ) et la réalisation est correct à la photo tout à fait satisfaisante.
De quoi regretter de ne pas voir pu plus profiter du cycle. :(
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bruce randylan
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Cy Endfield (1914-1995)

Message par bruce randylan »

The underworld Story (1950)

La rétrospective Cy Endfield qui avait eut lieu à la cinémathèque il y a 2-3 ans avait eut la bonne idée de se dérouler entre Noël et nouvel an. Je n'avais du coup malheureusement pu en voir qu'un seul, le très sympathique The argyle secrets.

Séance de rattrapage donc avec ce film-ci qui est l'un de ses films américain les plus réputé.
C'est en effet un très bon titre avec un excellent scénario qui repose sur la figure centrale d'un journaliste opportuniste et cynique au possible. Prêt à tout pour obtenir un scoop ou vendre une info la plus chère possible, il n'hésite pas à dévoiler l'identité d'un témoin clé qui finira assassiner par sa faute (et dans une scène hallucinante il n'hésitera pas à aller demander une "prime" chez le mafieux qui s'épargne ainsi un procès), il n'hésite pas aussi à jouer avec la vie d'une servante noire, suspect n°1 dans une affaire criminelle.
Ce personnage, joué avec brio avec Dan Duryea, est vraiment stupéfiant et on peu aisément le préférer à celui du gouffre aux chimères de Billy Wilder dont le cynisme (du personnage et de l'histoire) est tellement radicalisé que le film perdait toute crédibilité à mes yeux.
ici, le contexte fonctionne mieux car le scénario demeure tout à fait lucide sur les arcanes de la presse et de la justice américaine. Les journalistes comme les avocats évoquent sans sourciller que puisque la servante est un noire, elle sera jugée forcément coupable par exemple. De plus l'assurance de Duryea, comme son énergie et son dirigisme, ne laisse pas le temps à la modeste équipe du journal local de réagir comme il le voudrait.

Les deux premiers tiers sont ainsi passionnants, intelligents et très prenant mais le reste s'avère un peu plus décevant avec des concessions commerciales qui amènent une conclusion banale : triomphe de la vérité, méchants punis, rédemption du héros et histoire d'amour plus qu'envisageable. Dommage d'autant qu'il y a quelque raccourcis ou invraisemblances un peu stupides comme la journaliste qui ne pense jamais à prévenir directement la police mais préfère passer par d'autres reporters pour sauver Duryea d'un mauvais pas.

Sinon, vu le budget plus que ridicule du film (production indépendante), Endfield fait du bon boulot avec une photo tout à fait correct, une bonne utilisation des perspectives dans ses décors intérieurs et une excellente direction d'acteurs.

Par contre, il y a eut un problème technique à la cinémathèque : la copie a été diffusée finalement sans sous-titres. Autant ce n'était pas gênant pour Feu rouge de Roy Del Ruth, autant là, il y a eut quelques moments où j'ai décroché vu la rapidité des dialogues. Je n'ai pas tout compris sur la façon dont les notables de la ville discréditent la campagne pour soutenir la servante noire et j'ai eut du mal à saisir par quel moyen le mari de la victime se retrouvait piégé par l'homme de main qui doit lui débloquer la situation.

Bref de quoi se dire que Zoulou est un peu l'arbre qui cache la forêt. D'ailleurs il me tarde de regarder The sound of fury
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Profondo Rosso
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Re: Cy Endfield (1914-1995)

Message par Profondo Rosso »

Allez je remet ça ici

L'Île mystérieuse (1961)

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Durant la guerre civile américaine, des soldats de l'union s'enfuient à bord d'un ballon d'un fort où ils étaient prisonniers ; par un concours de circonstance, un soldat sudiste se retrouve avec eux dans la nacelle. Ne sachant comment piloter l'engin, ils partent à la dérive, portés par les vents violents d'une gigantesque tempête. Ils finissent par s'échouer sur une île qui semble déserte. Bientôt, deux autres naufragés les rejoignent et, alors que la vie commence à s'organiser, ils font connaissance avec les créatures qui peuplent l'île : un crabe, des guêpes, des oiseaux..., mais tous d'une taille démesurée !

Après les Mille et Une Nuits (Le Septième Voyages de Sinbad), Jonathan Swift (Les Voyages de Gulliver) et avant HG Wells et la mythologie grecque (le formidable Les Premiers hommes sur la lune, Jason et les Argonautes) le cinéma de Ray Harryhausen s'appropriait donc cet autre grand pourvoyeur d'imaginaire qu'était Jules Verne. Le film est très fidèle au livre et contrairement à notamment Les Voyages de Gulliver les changements destinés à correspondre à la formule des productions Harryhausen/Charles Schneer se font dans le bon sens et ne dénature pas le roman. Le point de départ est similaire avec la fuite en ballon d'un groupe d'hommes lors du siège de Richmond sauf que contrairement au livre ils sont cette fois tous militaire et seront rejoint plus tard sur l'île par deux naufragée (le prétexte à intégrer une présence féminine aguicheuse est assez voyant surtout dès que Beth Morgan troque sa tenue distinguée pour un pagne ultra court que n'aurait pas reniée Raquel Welch). Autre légère modifications pour les connaisseurs du livre le bandit repenti Ayrton (réutilisé par Jules Verne après Les Enfants du Capitaine Grant) est déjà mort et seulement évoqué comme un ancien habitant de l'île.

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Les grands thèmes de Jules Verne sur la camaraderie et l'ingéniosité des hommes les aidant à survivre démunis sur cette île sont bien là, à travers le récit qui conserve cette tonalité à la Robinson Crusoé (Dafoe fut le modèle de Verne lorsqu'il se lança dans le roman) et la narration par Cyrus (qui d'ingénieur devient donc militaire tout en conservant son ingéniosité technique). Les militaires de camps différent qui s'unissent puis se lient d'amitié dans l'adversité l'es idées de Verne et permettra d'introduire de manière cohérente le Capitaine Nemo, présence bienveillante et mystérieuse planant sur l'île. Alors que le livre est un peu récit de survivance face à l'hostilité de la nature, Harryhausen ajoute pour plus de piquant une foultitude de créatures au proportions titanesque pour des morceaux de bravoures impressionnants. La première apparition d'un crabe géante est palpitante et inattendue, un volatile un peu ridicule offre tout de même une sacrée scène techniquement virtuose et on est pas loin de basculer dans l'épouvante avec des abeilles géantes peu ragoutantes. Le scénario lie habilement ses apparitions aux expériences de Nemo pour rendre le monde meilleur (notamment la faune gigantesque de l'île).

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Parfois mal servi par des réalisateurs peu doués et des castings transparents (les seuls effets sauvant les films) Harryhausen offre une ses production les plus réussies grâce à la présence derrière la caméra du solide Cy Enfield le réalisateur du fameux Zoulou et les acteurs sont solides dans l'ensemble notamment Michael Craig en Cyrus. Par contre sans être mauvais Herbert Holm affiche nettement moins de prestance en Nemo que James Mason dans le Vingt Mille Lieues sous les mers de Richard Fleischer ou même Omar Sharif dans l'excellent feuilleton tv des 70's (si on veut une adaptation fidèle c'est celle là qu'il faut voir). C'est d'autant plus vrai dans la scène où il périt assez quelconque alors que Mason est majestueux à ce moment là et que Sharif dans une scène similaire dégageait une sacrée émotion dans ses derniers moments (gros souvenir d'enfance son dernier regard avant la fin !).

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Techniquement le film est une grande réussite multipliant les prouesses. La traversée en ballon d'ouverture, l'île où le décor (la même plage espagnole que Le Septième Voyages de Sinbadpour les extérieurs le reste dans les studios de Shepperton) se dote d'un exotisme irréel par l'ajout de prodigieux matte painting compte parmi les images les impressionnantes sans parler des séquences sous marine où on entraperçoit des ruines de l'Atlantide (directement inspiré des dessins de Ferat dans l'édition originale du livre) et une éruption volcanique finale dantesque. Le design du Nautilus est un poil décevant par rapport au film de Fleischer ceci dit, mais ce ne sont que de petites broutilles pour ce formidable film d'aventures porté en plus par un fantastique score de Bernard Herrmann. 5/6
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Rick Blaine
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Re: Cy Endfield (1914-1995)

Message par Rick Blaine »

Merci pour vos avis. Je ne connais Endfield que par Zoulou, mais c'est peu de dire que j'aime beaucoup ce film.
L'Ile Mystérieuse étant mon Verne préféré, je dois dire que son adaptation par Endfield me fait envie, surtout à la lecture de cette chronique.
Dernière modification par Rick Blaine le 24 août 11, 17:13, modifié 1 fois.
Julien Léonard
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Re: Cy Endfield (1914-1995)

Message par Julien Léonard »

Idem, je ne connais ce metteur en scène que par Zoulou qui est un film qui m'a fortement marqué. Un sens de l'espace et une gestion des enjeux dramatiques vraiment impressionnants. Et puis le montage fait des merveilles, particulièrement dans la dernière scène de fusillade. Et quelle musique de John Barry !
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Re: Cy Endfield (1914-1995)

Message par Commissaire Juve »

Mince, je vais encore me faire des z'amis :mrgreen: ... mais perso, je trouve -- hélas -- que Zoulou a très mal vieilli. Ok pour les paysages, le ciel bleu et les uniformes rouges, mais le reste, heu.

Les glorieux soldats de sa majesté qui dégomment les hordes assaillantes en chantant en choeur, le gars qui s'inquiète pour la santé de son petit veau, le soldat qui meurt en s'écriant "Why ? Why ?", enfin les Zoulous qui se font tirer comme à la foire du Trône en faisant "hou-hou, hou-hou !"... rooh lala ! arrête ton char, Ben Hur !

Incidemment, on a un peu le même genre de truc dans les Maraudeurs attaquent (Samuel Fuller), avec le gars qui s'inquiète pour sa petite mule.

Non : je ne suis pas méchant, non je ne suis pas un troll, c'est juste un point de vue différent. :wink:

bruce randylan a écrit :...
Ce personnage, joué avec brio avec Dan Duryea, est vraiment stupéfiant et on peu aisément le préférer à celui du gouffre aux chimères de Billy Wilder dont le cynisme (du personnage et de l'histoire) est tellement radicalisé que le film perdait toute crédibilité à mes yeux...
Quand on parle du loup ! Après des années d'hésitation, je me suis justement décidé à commander le DVD Criterion. Je l'attends en piaffant.
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Re: Cy Endfield (1914-1995)

Message par Lord Henry »

Souvenir de Susannah York dont les vêtements étaient mis à rude épreuve dans Sands of the Kalahari.

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bruce randylan
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Re: Cy Endfield (1914-1995)

Message par bruce randylan »

Rick Blaine a écrit :Merci pour vos avis. Je ne connais Endfield que par Zoulou, mais c'est peu de dire que j'aime beaucoup ce film.
L'Ile Mystérieuse étant mon Verne préféré, je dois dire que son adaptation par Endfield me fait envie, surtout à la lecture de cette chronique.
Endfield est aussi connu pour ses films sociaux très engagés qui le firent blacklisté avec exil en Angleterre à la clé (où il réalisa ou co-réalisa parfois sous pseudonyme). En fouillant bien on doit pouvoir encore trouvé train d'enfer. Comme d'hab, je n'ai pas encore regardé mon DVD mais le film a l'air d'être un brûlot passionnant avec un casting en or (Stanley Baker, Herbert Lom, Patrick McGoohan, Sean Connery tout jeune...)
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Re: Cy Endfield (1914-1995)

Message par Commissaire Juve »

Oui, celui-là est vraiment bien. 8)
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Re: Cy Endfield (1914-1995)

Message par Rick Blaine »

bruce randylan a écrit : Endfield est aussi connu pour ses films sociaux très engagés qui le firent blacklisté avec exil en Angleterre à la clé (où il réalisa ou co-réalisa parfois sous pseudonyme). En fouillant bien on doit pouvoir encore trouvé train d'enfer. Comme d'hab, je n'ai pas encore regardé mon DVD mais le film a l'air d'être un brûlot passionnant avec un casting en or (Stanley Baker, Herbert Lom, Patrick McGoohan, Sean Connery tout jeune...)
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Le casting impressionne! Le DVD français est cher mais j'en vois un autre plus accessible sur amazon UK. Un film très tentant.
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Re: Cy Endfield (1914-1995)

Message par Jeremy Fox »

Ce film avait donné lieu à l'une des premières critiques du site signée Roy Neary
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