Le Western américain : Parcours chronologique II 1950-1954

Rubrique consacrée au cinéma et aux films tournés avant 1980.

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Jeremy Fox
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Re: Le Western américain : Parcours chronologique Part 2 (50

Message par Jeremy Fox »

monk a écrit :Il faut vraiment que j'arrête de suivre ce sujet (pour un temps): j'ai une wishlist longue comme l ebars à cause (grace !) à vous, et j'ai du mal à suivre :mrgreen:
Surtout que nous entrons dans la période la plus faste du genre avec aussi pour bientôt l'arrivée du cinémascope (et du commissaire Juve du coup) :mrgreen:
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monk
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Re: Le Western américain : Parcours chronologique Part 2 (50

Message par monk »

La majorité des films vus sont issuées des années 50.
Plus je creuse (toutes périodes confondues) et plus j'en ai à voir. Je ne m'en lasse pas !
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Jeremy Fox
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Re: Le Western américain : Parcours chronologique Part 2 (50

Message par Jeremy Fox »

monk a écrit :La majorité des films vus sont issuées des années 50.
Plus je creuse (toutes périodes confondues) et plus j'en ai à voir. Je ne m'en lasse pas !

Avec les deux Delmer Daves qui t'attendent, tu devrais encore te régaler :wink:
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Re: Le Western américain : Parcours chronologique Part 2 (50

Message par monk »

J'y compte bien ! Mais je les ai commandés alors que j'en ai encore au moins 10 (pré 60's) qui attendent :fiou:
Il faut vraiment que je fasse descendre la pile !
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Jeremy Fox
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Re: Le Western américain : Parcours chronologique Part 2 (50

Message par Jeremy Fox »

daniel gregg a écrit :Curieux de découvrir ton avis concernant le Fregonese que j'avais apprécié, moins Jack Carter et Père Jules si je me souviens bien.
Dis, tu ne m'en voudras pas si je forme un trio avec Jack et Jules et te laisse seul défendre ce Duel au soleil du pauvre ? :oops:
Exploit non renouvelé par Fregonese qui n'a néanmoins pas perdu la main concernant les cadrages et les éclairages.
A suivre
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hellrick
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Re: Carson City

Message par hellrick »

Jeremy Fox a écrit : Les Conquérants de Carson City (Carson City , 1952) de André De Toth WARNER


Au final, un western aux ficelles un peu grosses, sans presque aucune originalité, fadasse et routinier avec clichés à la pelle, femme potiche, méchants typés, héros sans peur et sans reproche, mais néanmoins tout à fait regardable et même assez plaisant grâce au solide savoir-faire de son réalisateur (notamment son sens du mouvement, sa gestion du cadre et de l’espace) et à la prestance de son acteur principal.
Vu à l'instant, je l'avais récupéré voici des mois et ta critique, aussi mitigée soit elle, m'a quand même donné envie de le voir.
Je n'ajouterais rien à ton avis, c'est en effet routinier, banal et ultra classique et pourtant malgré tout (ou "grâce à ça") plutôt plaisant pour une bonne petite soirée de détente sans prétention. et pis y a Randolph Scott donc c'est bien :fiou:
allez, 4/6
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Re: Carson City

Message par Jeremy Fox »

hellrick a écrit : et pis y a Randolph Scott donc c'est bien :fiou:
Quelle classe quand même ; personne ne porte mieux le Stetson que lui ! Et puis (sans ironie) ça me plait bien de le voir chevaucher avec sa chemise noire toujours impeccablement repassée, son petit foulard toujours parfaitement noué autour du cou (ça procède un peu de la même vision du cinéma que la tienne dans le topic QT :wink: ). Et puis dans ce film, il n'est pas avare de ses poings sans que l'on voit trop sa doublure. :mrgreen:
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Re: Le Western américain : Parcours chronologique Part 2 (50

Message par daniel gregg »

Jeremy Fox a écrit :
daniel gregg a écrit :Curieux de découvrir ton avis concernant le Fregonese que j'avais apprécié, moins Jack Carter et Père Jules si je me souviens bien.
Dis, tu ne m'en voudras pas si je forme un trio avec Jack et Jules et te laisse seul défendre ce Duel au soleil du pauvre ? :oops:
Exploit non renouvelé par Fregonese qui n'a néanmoins pas perdu la main concernant les cadrages et les éclairages.
A suivre
"...i'm a poor lonesome cow boy..." :fiou:
Ceci dit, j'étais peut être un poil lyrique lors de mon post après sa découverte.
Mais il m'avait néanmoins paru valoir plus que cet attribut de second ordre.
A revoir. :wink:
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Untamed Frontier

Message par Jeremy Fox »

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Passage interdit (Untamed Frontier , 1952) de Hugo Fregonese
UNIVERSAL


Avec Joseph Cotten, Shelley Winters, Scott Brady, Fess Parker, Suzan Ball, Lee Van Cleef, David Janssen, Minor Watson
Scénario : Gerald Drayson Adams, John & Gwen Bagni
Musique : Hans J. Salter
Photographie : Charles P. Boyle
Une production Leonard Goldstein pour la Universal


Sortie USA : 23 juillet 1952

Pour ceux qui avaient vu et apprécié Quand les tambours s'arrêteront (Apache Drums) l'année précédente, le rendez-vous avec le nouveau western Universal réalisé par Hugo Fregonese devait être attendu avec une grande impatience. J'imagine la déception à l'arrivée car non seulement l'exploit n'a pas été renouvelé mais le cinéaste a probablement signé le western le moins captivant du studio depuis au moins le début de la décennie. Cependant, grâce surtout au talent de plasticien du cinéaste, Untamed Frontier peut encore se laisser regarder avec plaisir. Car si son scénario se révèle bien médiocre, Fregonese n'a pas perdu la main concernant son sens de la composition, des cadrages et des éclairages, aidé en cela par l'excellent chef-opérateur Charles P. Boyle (Tomahawk de George Sherman et évidemment déjà Apache Drums entre autres). Mais avant d'y revenir un peu plus en détail, voyons de quoi nous parle ce western qui, au vu de son intrigue, devrait vous en rappeler un autre beaucoup plus célèbre, et ce, à juste titre !

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L'histoire se déroule au Texas vers la fin du 19ème siècle. "Vous n'avez pas le droit d'entraver le progrès !" Un journaliste informe Matt Denbow (Minor Watson) que s'il n'ouvre pas un passage au travers de ses terres pour que les immigrants puissent les franchir afin d'atteindre les libres pâturages cédés par le gouvernement, il le dénoncera dans les pages de son journal local. Mais, entêté comme ce n'est pas permis, le patriarche ne veut rien entendre et fait garder 24/24 heures les limites de son domaine par les vaqueros commandés par son fils, Glenn (Joseph Cotten) et son neveu, Kirk (Scott Brady). Mais lors d'une soirée dansante, alors qu'il était sorti flirter avec Jane (Shelley Winters), une serveuse, Kirk tue le prétendant de cette dernière, l'arme du 'fiancé' lui ayant été subtilisé auparavant afin qu'il n'ait aucune chance de pouvoir se défendre. Kirk étant accusé de meurtre, la honte risque de retomber sur la famille si un procès devait avoir lieu et qu'il ne puisse pas se disculper. Jane étant le seul témoin du drame, l'avocat véreux de la famille conseille que l'on célèbre le plus rapidement possible un mariage entre Kirk et Jane, la loi américaine précisant qu'une épouse ne peut en aucun cas témoigner contre son mari. C'est ce qui se passe, la naïve Jane croyant dur comme fer que Kirk l'a prise pour femme par amour. Lorsqu'elle découvre le pot aux roses, il est déjà trop tard. N'empêche qu'elle se met à haïr son époux et à tomber sous le charme de son cousin Glenn, homme d'une grande noblesse. Les relations familiales au sein du ranch Denbow commencent sacrément à s'effriter d'autant que Jane s'affronte avec son beau-père dont elle ne supporte pas la dureté et l'égoïsme...

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Vous l'aurez peut-être deviné ?! L'intrigue ressemble par de nombreux points à celle de Duel au soleil de King Vidor. En gros, Scott Brady reprend le rôle de Gregory Peck, Joseph Cotten se contente de rejouer le sien et, en lieu et place de Lionel Barrymore nous trouvons l'insipide Minor Watson. Seulement, alors que le scénario de Duel in the Sun dégageait une formidable puissance dramatique, il n'en est rien concernant celui du western de Fregonese ; et c'est là que le bât blesse avant tout. Les trois scénaristes semblent ne pas s'être souciés de la progression dramatique justement, commençant leur travail de la plus intéressante des manières pour paraître laisser tomber toute velléité de raccrocher l'attention du spectateur une fois la séquence du mariage bouclée. Bref, ça débutait de façon très convaincante avec des personnages semblant plutôt bien croqués mais tout s'écroulait par la suite, le 'monolithisme' de chacun ressortant d'une manière assez caricaturale. Et puis, quelle manque d'imagination lorsqu'il s'agit de faire mourir les 'Bad Guy', Scott Brady et Minor Watson, tous deux étant expédiés Ad Patres comme pour s'en débarrasser au plus vite et dans une indifférence à peu près totale. Des leçons d'écriture qui se perdent parfois !

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Comment de toute manière aurions nous pu être ému par ces séquences étant donné que les personnages sont dénués d'humanité et que du coup nous nous sentons incapables d'éprouver pour eux ne serait-ce qu'une seconde d'empathie ! Alors que Lionel Barrymore dans le film de Vidor trouvait parfois grâce à nos yeux, devenait touchant le temps de quelques minutes grâce à de petits détails, à un jeu plus nuancé qu'il n'y paraissait, celui qu'interprète sans conviction Minor Watson ne s'avère être (n'ayons pas peur des mots en l'occurrence) qu'un vulgaire 'facho' sans une once de bonté et qui ne semble obnubilé que par une seule chose, à ce qu'aucun émigrant ne vienne fouler ses terres ! Que son épouse regrette ne pas avoir d'amis à cause de la sale réputation de la famille ne le touche pas le moins du monde. Il en va de même pour le personnage de Glenn ; si Scott Brady (excellent second rôle jusqu'à présent) s'avère assez réjouissant au début dans la peau de cet homme fanfaron et roublard, n'ayant pas l'habitude de se retrouver si important au sein d'une intrigue, a tendance par la suite à cabotiner un peu plus que de mesure. Son Glenn n'en demeure pas moins le personnage le plus intéressant du film (le plus rutilant et 'picaresque' aussi avec ses chemises à paillettes brillantes et son sourire carnassier), celui qu'interprète Joseph Cotten étant bien trop lisse et ne sachant pas sur quel pied danser vis à vis de celui que tient Shelley Winters ; un personnage à priori trop riche pour ses encore frêles épaules, tout d'abord naïve arriviste (ce mélange est-il d'ailleurs bien crédible ?) puis se transformant en altruiste révoltée guère plus vraisemblable. Le personnage mystérieux qu'incarne Suzan Ball pour son premier rôle au cinéma, plus fouillé, aurait pu faire son effet ; en l'état, il ne passionne guère plus que les autres même si le visage de la comédienne retient sacrément l'attention.

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Bref, le semi-ratage de ce film provient pour une grande partie de son scénario (qui démarrait plutôt bien mais qui devient de plus en plus languissant et de moins en moins captivant au fur et à mesure de son avancée), de la mauvaise caractérisation de ses protagonistes et d'un casting bien trop 'vert' pour pouvoir assumer une telle tragédie familiale. Il reste néanmoins une bonne idée de départ (avec notamment ce 'piège' ourdi pour faire tomber Jane dans les rets de Kirk), quelques images assez vigoureuses comme l'utilisation du fouet par Minor Watson pour se faire respecter, la description intéressante de ce Cattle Baron entravant le progrès par pur égoïsme, et une mise en scène plutôt soignée de Hugo Fregonsese. A ce propos, on trouve un bon nombre de superbes plans (sur les visages notamment), de belles contre plongées, de magnifiques contre jour sur les cow-boys gardant les clôtures de barbelés. C'est vraiment assez plaisant pour la rétine. Malheureusement, alors qu'Universal s'était fait jusqu'à présent un point d'honneur à ne pas utiliser de transparences, nous en trouvons quelques unes bien gratinées au sein de ce Passage Interdit ; cela tendrait-il à prouver le manque d'implication de l'équipe de tournage ?

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Dans le même style, outre Duel au soleil de King Vidor et The Furies de Anthony Mann évidemment nettement supérieurs, il y avait eu un autre 'précédent' mettant en scène les rivalités entre deux membres d'une même famille, en l'occurrence deux frères ; il s'agissait du sympathique La Vallée de la vengeance (Vengeance Valley) de Richard Thorpe bien plus fouillé psychologiquement parlant. Un questionnement néanmoins intéressant sur la fin d'une époque, celle des ranchers tout puissants, une histoire pas plus bête qu'une autre, un drame familial qui aurait pu être prenant si les scénaristes avaient eu un tant soi peu le sens du tragique et de la progression dramatique. La tension étant presque constamment au plus bas, on ne peut que regarder tout ceci d'un œil amusé mais sans vraiment s'y passionner. Pas spécialement mauvais, juste raté et surtout anecdotique !
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Re: Le Western américain : Parcours chronologique Part 2 (50

Message par villag »

monk a écrit :La majorité des films vus sont issuées des années 50.
Plus je creuse (toutes périodes confondues) et plus j'en ai à voir. Je ne m'en lasse pas !

C'est, en fait l'age d'or du Western.....
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Jeremy Fox
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High Noon

Message par Jeremy Fox »

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Le Train sifflera trois fois (High Noon , 1952) de Fred Zinnemann
STANLEY KRAMER PRODUCTIONS


Avec Gary Cooper, Grace Kelly, Thomas Mitchell, Lloyd Bridges, Lee Van Cleef, Otto Kruger, Katy Jurado, Lon Chaney Jr, Henry Morgan
Scénario : Carl Foreman
Musique : Dimitri Tiomkin
Photographie : Floyd Crosby
Une production de Stanley Kramer


Sortie USA : 24 juillet 1952

S’il est une chose que l’on ne peut pas enlever au Train sifflera trois fois, c’est d’avoir en quelque sorte adoubé le genre auquel il fait partie auprès des critiques et spectateurs du monde entier qui, pour la plupart, se sont extasiés à son propos. Un génial concours de circonstances (le film est arrivé à un moment propice et le public lui a fait une immense ovation malgré le climat de suspicion qui régnait à l’époque) pour au final un western à l’inhabituelle notoriété excepté en France où beaucoup firent au départ la fine bouche avant de suivre le mouvement. La Chevauchée fantastique (Stagecoach) avait amorcé la pompe de la reconnaissance en 1939 mais c’est bien le film de Fred Zinnemann qui aura entériné la chose, donnant une définitive légitimité au western, considéré depuis comme un genre pouvant prétendre être aussi adulte et sérieux que n'importe quel autre (les années suivantes allant enfoncer le clou). En ce sens, il mérite effectivement sa place d’une importance capitale dans l’histoire du western et du cinéma. Que les amoureux du film se rassurent, la seule incursion de Zinnemann au sein du western (il y aura néanmoins également la comédie musicale Oklahoma qui prendra sa place au sein de ce parcours) n’aura pas à pâtir de mon ressenti très négatif à son encontre puisque dans l’ensemble il a fait et fera encore le consensus autour de lui, restera toujours l'un des westerns les plus renommés qui soit. D’ailleurs, il est dit qu’il s’agirait aussi du western américain classique préféré de ceux qui n’apprécient pas forcément le genre ; tranquillisez-vous à nouveau, ce n'est pas pour aller bêtement à l’encontre de cette assertion ou tout simplement l’inverser que je le critiquerais en mal ; car au vu de ce que j’ai pu lire ici et là, même parmi les aficionados du genre, une immense majorité le porte également au pinacle. Ceci étant dit, remémorons nous l’histoire de ce grand classique, voyons par quel biais Carl Foreman a pu pondre un pamphlet antimaccarthyste alors qu’il n’en avait pas du tout été question dans le scénario initial.

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Un matin de juin 1875 dans l'état de New Mexico. A 10.30, dans la petite bourgade d'Hadleyville, le Marshall Will Kane (Gary Cooper) vient de passer l’alliance au doigt d’une jeune et jolie Quaker, Amy (Grace Kelly). Alors qu'au grand soulagement de son épouse non-violente, il doit raccrocher ses armes et rendre son insigne étoilée le soir même, Will apprend l’imminent retour en ville de Frank Miller (Ian McDonald), un bandit qu’il avait jadis arrêté et envoyé en prison pour cinq ans. Miller est en route pour Hadleyville avec la ferme intention de régler son compte à celui qui l'a conduit sous les verrous ; il doit d’ailleurs arriver par le train de midi tapante (High Noon) ; trois de ses complices viennent l'attendre à la gare pour le soutenir dans sa vengeance. Alors qu'ils s'étaient néanmoins décidés à partir pour ouvrir une boutique dans une bourgade voisine, le couple fait demi-tour, Will ne pensant pas pouvoir commencer une nouvelle vie sans s'être débarrassé de celui dont il pense qu'il le retrouvera où qu'il aille. Malgré les supplications de sa jeune épouse, Kane est déterminé à attendre de pied ferme Miller et ses complices ; il tente de recruter des hommes auprès des habitants de la ville. Mais, l'un après l'autre, chacun a une bonne excuse pour se dérober et refuser de lui venir en aide. C’est donc seul qu’il devra livrer le combat face aux quatre hommes. La tension et le danger s'accroissent de minute en minute…

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En 1969, lors d’un entretien avec Bertrand Tavernier pour le N°102 de Positif, Carl Foreman décrivait ainsi la genèse de son scénario pour High Noon : "Au début, quand j'ai écrit le scénario, je voulais en faire une parabole sur l'ONU. Mais tout à coup, la menace de la Commission des Activités Anti-américaines s'est précisée. Ils se dirigeaient vers Hollywood [ ...] Et la peur a commencé à grandir, une peur insidieuse qui envahit peu à peu toute la ville. J'ai décidé alors de changer d'optique et d'écrire une parabole sur Hollywood et la maccarthysme. Pendant la fabrication du film, je reçus un petit papier rose me convoquant devant la commission et je me suis trouvé rapidement dans la situation de Gary Cooper. Mes amis m'évitaient. Quand je voulais voir quelqu'un, il n'était pas là... je n'ai plus eu qu'à transposer certains dialogues dans un cadre de western pour obtenir High Noon". C’est tout à son honneur d’avoir voulu écrire un salutaire et virulent pamphlet contre la chasse aux sorcières qui sévissait alors, contre la lâcheté d'une partie de ses concitoyens et amis. Foreman était d’ailleurs tellement motivé par son sujet qu’il voulait même au départ le réaliser mais le studio refusa. Il offrit alors le bébé à son ami Richard Fleischer qui dut décliner pour cause de préparation d’un film qu’il allait tourner pour les studios Disney et qui ne serait autre que 20.000 lieues sous les mers avec Kirk Douglas. Gregory Peck refusa de son côté d’endosser la défroque de Kane prétextant avoir déjà tenu un rôle semblable dans La Cible humaine (The Gunfighter) de Henry King ; il eut peut-être plutôt peur d’un deuxième bide de la même ampleur, High Noon devant être lui aussi un western psychologique à petit budget. On le proposa donc à Gary Cooper qui tomba amoureux du rôle au point d’accepter de n’être payé que le quart de son salaire habituel. Anecdote amusante ; l'acteur n’aurait jamais vu dans ce film l'allégorie politique qu’il était censé être ; alors, info ou intox ? Il faut dire à sa décharge qu’il n’y a pas besoin de s’en rendre compte pour apprécier ou non le film, l'histoire pouvant parfaitement bien fonctionner au premier degré.

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Quoi qu'il en soit c’est donc à Fred Zinnemann qu’échut le film. Le cas de ce réalisateur m’est un peu curieux. Paradoxalement, ce sont ses deux films les plus célèbres que je trouve les moins intéressants et les moins réussis (outre High Noon, l'insipide Tant qu’il y aura des hommes) alors que parmi ses films moins connus se cachent de petites pépites telles La Septième croix (The 7th Cross) ou encore Acte de violence (Act of violence), ce dernier déjà écrit par Carl Foreman, scénariste qui ensuite ne fera plus grand-chose de bon, ces derniers travaux étant même assez désastreux ; qu’on se souvienne de ceux réalisés par Jack Lee Thompson : Les Canons de Navarone ou, pire encore, L’or de MacKenna. Pour en revenir au film qui nous intéresse, que ce soient Fred Zinnemann ou Carl Foreman, j'estime que les deux auteurs sont aussi fautifs l'un que l'autre quant à la très mauvaise impression qu'il m'a faite. Dans tous les points positifs pointés ici et là, je n’y vois au contraire que des défauts. A moi de justifier maintenant ce qui me fait le trouver aussi raté et surtout foncièrement ennuyeux. Mais avant tout, même si je comprend sans problème qu'on puisse trouver ce film génial, il ne faudrait pas le surévaluer à coups de faux arguments comme l'a fait Leonard Maltin par exemple. Quels étaient-ils quant il affirmait que High Noon se démarquait complètement des westerns de l'époque ?

1- Que d’une part le héros admet avoir peur.
2- Que le film ne comporte que très peu de scènes d’action.
3- Qu’il soit tourné en noir et blanc ce qui était rarissime en 1952.
4- Qu'il ait une bande son dépouillée (sic !)

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1- Des héros de westerns admettant avoir peur : soit, il n'y en eut peut-être pas encore énormément avant Will Kane mais au moins un célébrissime quand même, le soldat joué par Audie Murphy dans The Red Badge of Courage de John Huston (d'ailleurs à propos de la modernité de la réalisation sans cesse mise en avant lorsqu'est évoqué High Noon, comparativement à celle du Huston, celle du film de Zinnemann ne lui arrive pas à la cheville). Mais il y eut aussi quelques mois avant High Noon, Rod Cameron dans Fort Osage sauf que cette série B n'a du être vu que par quelques aficionados et que son acteur principal n'était pas forcément une grande star. 2- Des westerns avec aussi peu de scènes d'action, il y en a déjà eu avant lui à la pelle aussi ; sortir cet argument relève à mon sens d'une certaine méconnaissance du genre. Et d'ailleurs, il n'en fallait pas plus dans High Noon car les deux que nous y trouvons sont loin d'être enthousiasmantes techniquement parlant et notamment le combat à poings nus mis en scène sans vigueur ni génie. A sa vision, je m'étonne encore que beaucoup parlent de réalisation parfaite (André de Toth pouvant le confirmer ayant filmé des scènes de ce style avec autrement de punch et de vitalité). 3- Qu'il soit tourné en noir et blanc relève plus d'une question de restriction budgétaire qu'autre chose ; et d'ailleurs nous pourrions trouver également maints autres exemples de westerns en noir et blanc datant de ces années ; ce qui ne veut absolument rien dire quant à la qualité ou non d'un film. 4- Le pompon va néanmoins à la bande son dépouillée alors que la musique assez pénible de Dimitri Tiomkin (et je ne parle pas que de la répétition jusqu'à plus soif du thème de la chanson de Ned Washington, ' Do not forsake me oh my darling') est omniprésente et même totalement envahissante. Bref, cette mini démonstration pour illustrer que rien que par rapport à Maltin, on peut très facilement contrer ses quatre arguments. Mais élargissons un peu le sujet !

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On le sait depuis longtemps, les bonnes intentions ne font pas forcément les bons films. Trop préoccupés par leur volonté de démonstration (un peu systématique et répétitive), les auteurs en ont oublié de donner chair et sang à leurs personnages et, pire encore, de donner tout simplement de la vie à leur film qui s’en trouve du coup totalement dépourvu. La direction d'acteur est la première blâmable ; malgré un casting 4 étoiles, hormis Gary Cooper qui porte le film sur ses épaules (même s'il a été bien plus inspiré par ailleurs), on a l'impression de voir un défilé de marionnettes venant faire leur tour et s'en allant, tous les seconds rôles déclamant leurs dialogues avec théâtralité et force grimaces quant ils ne se révèlent pas au contraire tout bonnement transparents (pauvre Grace Kelly dont le personnage s'avère on ne peut plus sacrifié). Une star qui fait ce qu'il peut pour nous faire vibrer au milieu de pantins inertes ou au contraire se démenant comme de beaux diables pour un résultat peu convaincant. La mise en scène proprement dite a aussi sa part de responsabilité. Stylistiquement, le film apparaît très bancal : on a l'impression que le film a été réalisé par deux cinéastes, comme si Joseph Kane et Samuel Fuller avaient filmés simultanément une scène sur deux ; ce qui lui donne un aspect très mal équilibré, peu harmonieux, passant continuellement de séquences d'une platitude absolue à des plans ou des idées de mise en scène effectivement très modernes mais qui semblent venir comme un cheveu sur la soupe et paraissant du coup totalement artificiels. Soit il aurait fallu être austère et rigoureux de bout en bout comme avait su si bien le faire William Wellman avec The Ox-Bow Incident (western au moins aussi courageux d'ailleurs), soit foncer tête baissée dans le baroquisme grandiloquent comme Samuel Fuller le fera dans Forty Guns (40 tueurs) un peu plus tard. Cette trop grande disparité stylistique, de la fadeur à l'artifice, nuit à mon avis grandement au film : rigorisme et modernité ne font pas forcément bon ménage au sein d'un même film.

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Quant à l'idée de départ, elle était plus qu'honorable mais malheureusement l'écriture est malhabile, le scénario trop didactique (on a droit dès le début à une parabole -au travers une histoire que raconte un habitant- sur ce qui va arriver par la suite comme si nous serions trop bête pour comprendre sans cette explication) et pesant notamment au travers de son découpage qui me semble aujourd'hui avoir horriblement mal vieilli tout comme le montage (pourtant louangé et même récompensé aux Oscars) franchement démonstratif et calamiteux ; on passe d'un lieu à l'autre, d'un personnage à l'autre sans liant, brusquement et sans apparemment avoir réfléchi à des idées de raccords (serait-ce la faute à Stanley Kramer qui y a grandement participé ? Les horloges ont-elles plus de temps de présence que n'importe quel second rôle ?) Que l'on analyse le phénomène de foule alors qu'elle devient hystérique ou au contraire qu'elle se taise et se terre par peur, le résultat est le même : un mort en résultera presque à coup sûr ! Ici on aura un lynchage (Fury de Fritz Lang, The Ox-Bow Incident de William Wellman ou L'Intrus de Clarence Brown), là 'l'assassinat' de celui que l'on abandonne à son triste sort sans lui porter secours comme dans Le train sifflera trois fois. Bref, tout ça pour dire qu'il n'y a pas plus de courage à montrer une foule silencieuse et lâche qu'une foule prise dans l'engrenage de la violence et qu'il faut peut-être un peu minimiser la réputation du film de Zinnemann quant à sa hardiesse polémiste comme si elle n'avait jamais eu de précédent. On s'est aussi extasié sur le déroulement de l'histoire en temps réel avec unité théâtrale de lieu : qu'on se souvienne qu'il y eut quand même, autrement plus puissants dramatiquement parlant, Nous avons gagné ce soir (The Set-up), l'un des plus beaux films de Robert Wise et, dans le domaine du western, le superbe La Cible humaine signé Henry King bien plus passionnant et surtout émouvant là où High Noon n'arrive pas à nous faire vibrer pour son héros dont on se demande d'ailleurs longtemps pourquoi il n'a pas obéi aux conseils de s'en aller loin d'ici aux côtés de sa chère et tendre épouse.

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La thématique est néanmoins intéressante, on ne peut pas le nier. Le vieux professionnel intègre se trouvant lâché par ses concitoyens pusillanimes, veules et mesquins, lui préconisant de partir de la ville pour faire fuir dans le même temps les hommes qui sont à ses trousses, faisant par la même occasion se déplacer la violence dans un autre endroit. Un homme honnête et intransigeant se retrouvant seul face aux habitants d'une ville en proie à l'angoisse, ces derniers prêts à tout pour retrouver la tranquillité y compris sacrifier le représentant de la loi qu'ils avaient eux-mêmes élu pour avoir quelques années plus tôt réussi à instaurer la paix dans ce même patelin. Si j'ai été aussi sévère, c'est peut-être aussi en raison de sa réputation et également parce qu'il avait tout pour me plaire : j'aurais tant voulu l'aimer ! Car malgré l'ennui qui ne m'a presque pas quitté une seule minute, j'ai pu y puiser quelques motifs de réjouissances même s'ils furent bien frugaux : quelques secondes assez touchantes lors du mariage (notamment la complicité qui lient les deux époux et leurs sourires de connivence) et surtout le splendide mouvement de grue ascendant qui isole Gary Cooper au milieu des rues de la ville désertée. Sans ça, un western que j'ai trouvé hiératique, sentencieux, mécanique et parfois anémié, incapable de gérer un rythme.

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Mais nous aurons l'occasion d'aborder de nouveau ce film plus tard, quant il sera nécessairement mis en comparaison avec d'autres dont des paraboles sur le maccarthysme moins solennelles et surtout beaucoup plus fortes dramatiquement parlant : Silver Lode (Quatre étranges cavaliers) de Allan Dwan par exemple ou Johnny Guitar de Nicholas Ray. Des histoires assez approchantes donnèrent également lieu à de petites pépites : Riding Shotgun de André De Toth, A Lawless street de Joseph H. Lewis et à des chefs d'œuvre : 3.10 pour Yuma de Delmer Daves ou Decision at Sundown de Budd Boetticher. Il est permis aussi de lui préférer son remake version science-fiction : Outland de Peter Hyams avec Sean Connery. Mais nous nous égarons dans le futur. Revenons en à l'année 1952 où il fut néanmoins très bon de trouver sur les écrans américains, en pleine chasse aux sorcières, un western libéral et progressiste.

Bon, les fans du film, vous ne m'abandonnerez pas pour si peu ? Un petit passage aux goudrons et aux plumes et on oublie tout hein ? :oops: :mrgreen:
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Re: Le Western américain : Parcours chronologique Part 2 (50

Message par ballantrae »

Tu as raison sur toute la ligne: film "légendaire" et déception effective au bout.Pourtant Gary Cooper est bien magnifique, certains plans inspirés mais tout sent l'intention au point de susciter une distanciation...il est question de proposer "plus qu'un western avec une insistance gênante comme si proposer un western avant tout posait problème.
J'avais tenté la revoyure il y a qqs années mais ne retenterai pas le coup tellement ce fut ennuyeux. Pas un "mauvais " film mais un objet un peu empesé et ennuyeux.
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Jeremy Fox
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Re: Le Western américain : Parcours chronologique Part 2 (50

Message par Jeremy Fox »

ballantrae a écrit :Tu as raison sur toute la ligne: film "légendaire" et déception effective au bout.Pourtant Gary Cooper est bien magnifique, certains plans inspirés mais tout sent l'intention au point de susciter une distanciation...il est question de proposer "plus qu'un western avec une insistance gênante comme si proposer un western avant tout posait problème.
J'avais tenté la revoyure il y a qqs années mais ne retenterai pas le coup tellement ce fut ennuyeux. Pas un "mauvais " film mais un objet un peu empesé et ennuyeux.
Je suis en phase avec toi sur ce film sauf que je n'affirme pas avoir raison. Trop de fans du western l'adulent (probablement avec autant de sincérité que nous) pour prouver le contraire. :wink:
ballantrae
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Re: Le Western américain : Parcours chronologique Part 2 (50

Message par ballantrae »

Je suis surpris que tu parles d'adulation pour ce film car j'ai rencontré peu de fervents admirateurs mais plutôt des nostalgiques qui le considéraient à l'aune d'une découverte lointaine...ma déception est à mesurer à l'aune de ce que j'en avais mémorisé depuis mes 9- 10 ans sachant que je ne l'avais jamais revu.
L'antithèse par exemple de The searchers ou Rio Bravo vus et revus année après année avec un éblouissement sans ombre!
Mais il est vrai qu'il n'est pas question d'avoir "raison " mais d'exprimer une opinion...
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Jeremy Fox
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Re: Le Western américain : Parcours chronologique Part 2 (50

Message par Jeremy Fox »

ballantrae a écrit :Je suis surpris que tu parles d'adulation pour ce film .
Il suffit de te rendre sur le forum westernmovie pour constater à la lecture du topic dédié au film que 90% de ses membres le placent au sommet du genre ; et pourtant ce sont des personnes appréciant tout autant la série B, voire plus. Ce qui m'a d'ailleurs tout autant étonné que toi.
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