Le Western américain : Parcours chronologique II 1950-1954

Rubrique consacrée au cinéma et aux films tournés avant 1980.

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Jeremy Fox
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Silver River

Message par Jeremy Fox »

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Ville d'argent (Silver City, 1951) de Byron Haskin
PARAMOUNT


Avec Edmond O'Brien, Yvonne de Carlo, Barry Fitzgerald, Richard Arlen, Gladys George, Laura Elliot, Edgar Buchanan...
Scénario : Frank Gruber
Musique : Paul Sawtell
Photographie : Ray Rennahan (Technicolor)
Un film produit par Nat Holt pour la Paramount


Sortie USA : 01 décembre 1951

Moins de six mois après Le Sentier de l’enfer (Warpath), atterrissait sur les écrans américains un deuxième western signé Byron Haskin, toujours produit par Nat Holt et de nouveau interprété en tête d’affiche par Edmond O’Brien. Il comporte malheureusement exactement les mêmes défauts que son prédécesseur (scénario médiocre, mise en scène indigente, interprétation fadasse) sauf que deux éléments viennent le rendre un peu plus regardable : le milieu des mineurs ayant été moins souvent abordé au sein du western que celui de la cavalerie américaine, nous sommes un peu plus "dépaysés" ; la superbe Yvonne de Carlo remplaçant avantageusement Polly Bergen, elle arrive à sauver le film par sa plastique et sa faculté à se glisser avec une formidable aisance dans les rôles de femmes de l’Ouest, maniant le fusil avec un naturel confondant. Ceci dit, on le savait déjà, inoubliable en 1949 dans le rôle de Calamity Jane dans l’excellent western de George Sherman, La Fille des prairies (Calamity Jane and Sam Bass)

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L’ingénieur Larkin Moffatt (Edmond O’Brien) et le président de la compagnie minière Charlie Storrs (Richard Arlen) sont attaqués par deux hommes qui leur volent la caisse ainsi que le dernier rapport effectué par Larkin sur un nouveau filon quant à sa teneur en argent. Une phrase échappée aux agresseurs fait penser au patron de la compagnie que Larkin était dans le coup. Non seulement il le licencie mais fait courir le bruit de sa malhonnêteté dans les environs afin que Larkin ne puisse plus retrouver du travail ailleurs. Il épouse même Josephine (Gladys George), la fiancée de son ex collègue. Larkin finit pourtant par se faire embaucher à Silver City par les locataires d’une mine dont le bail expire dans 12 jours, Currency (Edgar Buchanan) et sa charmante fille, Candace (Yvonne de Carlo). Il leur apprend que leur gisement est fabuleux et qu’il faut absolument exploiter le filon au plus vite. Le propriétaire, le vieux Jarboe (Barry Fitzgerald), ayant été informé de la richesse qui git dans les entrailles de sa mine, va au contraire tout faire pour leur mettre des bâtons dans les roues afin qu’aucun travaux d'extraction n’ait lieu avant qu’il ne récupère son bien…

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Sans en appeler aux très grands noms de la série B (Budd Boetticher, André De Toth, Don Siegel ou Gordon Douglas), les histoires qu’a adapté Frank Gruber pour les trois westerns réalisés par Byron Haskin auraient probablement donné lieu à des films tout du moins efficaces sous la direction d’un Jack Arnold, Nathan Juran ou autres Joseph Newman. Alors que malheureusement la mise en scène de Byron Haskin se révèle désespérément plate malgré l’action non stop que lui fournie l’intrigue. Le réalisateur s’est contenté de boucler correctement les deux séquences les plus spectaculaires de son film, celles qui l’ouvre et le clôture ; pour le reste, le minimum syndical, la grosse paresse. Les deux scènes concernées se déroulent, pour la première sur un train en marche transportant d’immenses troncs d’arbres sur lesquels Edmond O’Brien tente d’arrêter ses deux voleurs, pour la seconde au milieu d’une immense scierie, Edmond O’Brien étant à la poursuite de son ennemi. Deux séquences bien mouvementées, assez inédites dans le domaine et qui ne nous font pas regretter d’avoir jeté un œil sur ce western à part ça bien médiocre, faute également à un scénario pataud et infantile (toutes les histoires de jalousies ne dépareraient pas un Soap Opera).

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Une mine d’argent qui se trouve être au centre de conflits, rivalités et jalousies entre une dizaine de protagonistes. Avec ce postulat, Frank Gruber nous livre donc une nouvelle fois un scénario bien primaire empêchant par là même au spectateur de s’intéresser à ce qui peut bien arriver aux différents personnages. Le scénariste semble s’être fixé comme objectif de faire de son histoire, la plus gonflée en bagarres et destructions en tous genres vue jusqu'à présent, comme s’il s’était senti frustré dans sa jeunesse de ne pas avoir commis d’acte de vandalisme ; toutes les dix minutes, nous avons ainsi droit à ce que l'un des protagonistes frappe, casse ou fasse exploser quelque chose sans malheureusement que la réalisation amorphe rende ces séquences (qui se voudraient homériques) au moins réjouissantes. Edmond O’Brien est toujours aussi peu convaincant dans le genre et le reste du casting, pourtant assez prestigieux (Edgar Buchanan, Barry Fitzgerald), ne provoque guère plus d’étincelles. Seul Yvonne De Carlo sort du lot ; déjà que sa beauté rayonne mais elle s’avère également, au contraire du film, dynamique et enjouée. La comédienne est l’autre bonne raison de pouvoir ne pas trop s’ennuyer au cours de ce western qui s’avère pourtant le moins pénible des trois films que Byron Haskin a tourné sous la férule de Nat Holt pour la Paramount, le troisième allant être Denver & Rio Grande (Les Rivaux du rail) l’année suivante.

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Un western qui pourra éventuellement divertir pour quelques scènes d’action originales et une Yvonne de Carlo épanouie comme jamais (c’aurait été Rhonda Fleming, le premier choix sur lequel le producteur s'était penché, que ça n’en aurait pas été plus mal non plus). On pourra aussi s’intéresser à quelques notations sur le métier ‘d’essayeur’, celui qui consiste à évaluer un filon ou gisement minier. Pour le reste, c’est assez laborieux mais certains y trouveront probablement leur comptant d'adrénaline.
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Boubakar
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Re: Le Western américain : Parcours chronologique Part 2 (50

Message par Boubakar »

someone1600 a écrit :Un film qu'il faudra bien que je vois un jour
ça doit être le 300eme message de la sorte que je lis quand tu postes :fiou:
Strum
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Re: Across the Wide Missouri

Message par Strum »

Jeremy Fox a écrit :Le cursus westernien de William Wellman, quoique peu copieux (quantitativement parlant, il ne va guère ensuite s’enrichir que de deux autres films), s’avère être à ce moment de notre parcours au travers de l’histoire chronologique du western américain, avec celui de John Ford, l’un des plus riches et gouteux, l’éclectisme étant également de mise. En effet, la palette du cinéaste franc-tireur est très large et s’étend du noir et blanc pour ses œuvres les plus sombres à la couleur quant il décide d’aborder l’histoire de son pays que ce soit à travers un épisode de la Conquête de l’Ouest (dont les frontières à l’époque ne s’étendaient encore à peine plus loin qu’au Missouri, d’où le titre du film qui nous concerne) ou bien par la biographie d’un de ses plus célèbres représentants à l’autre bout du siècle. Dans la première catégorie, les films en noir et blanc, il y eut L’Etrange incident (The Ox-Bow Incident), pamphlet d’une sobriété exemplaire et sans concession contre le lynchage ainsi que le superbe La Ville Abandonnée (Yellow Sky), suspense psychologique puissant et tendu. Pour les sujets à priori plus épiques, Wellman utilisera une palette plus chatoyante par l’emploi du fameux et inimitable Technicolor. Plus que le moyennement convaincant Buffalo Bill, Across the Wide Missouri, s'attardant sur la vie quotidienne des trappeurs (les ‘Mountain Men’) du début du 19ème siècle, s’avère être une réussite exemplaire ! Encore une produite par la MGM, décidément peu avare de chef-d'œuvre du genre en ce début de décennie.
Au-delà du Missouri est mon western préféré de Wellman avec Convoi de femmes. Moins sec et plus ample que La Ville Abandonnée, moins didactique ou programmatique que L'Etrange Incident, c'est un film ample et lyrique comme je les aime, c'est-à-dire que le lyrisme n'y semble pas forcé ; il apparait peu à peu, au fur et à mesure du déroulement du récit et de l'épopée dont le film rend compte. D'abord porté par les paysages somptueux du film, puis immédiatement battu en brêche dès le début du récit par le ton quotidien et fraternel qu'utilisent entre eux les personnages pour se parler, il réapparait décuplé plus tard dans le film, lorsque celui-ci, en nous donnant à voir une guerre indienne, avec ce que tout conflit tribal comporte de lâchetés et d'amour contrarié, se rapproche d'une tragédie. La fin est très belle ; tu as raison de souligner que l'impact de sa violence est d'autant plus fort qu'elle intervient dans un moment de plénitude où une nature apaisante et majestueuse berce ces hommes fourbus. Gable, buriné et amical, joyeux et triste en même temps, est formidable. Il montre une fois de plus ce que les grands westerns et leurs histoires et personnages "bigger-than-life" doivent aux grands acteurs (un grand acteur dans le premier rôle, c'est par exemple ce qui manque à un Canyon Passage, pour moi, puisque vous évoquiez tous ce film ; c'est que Dana Andrews n'a pas le charisme naturel d'un Gable)
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Re: Across the Wide Missouri

Message par Lord Henry »

Jeremy Fox a écrit :
le top 20
Cette chronique aussi, elle rentre dans mon top 20 western.
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Jeremy Fox
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Re: Across the Wide Missouri

Message par Jeremy Fox »

Strum a écrit :
Au-delà du Missouri est mon western préféré de Wellman avec Convoi de femmes.
:)

Pareil y compris pour ce qui suit. Sauf concernant Dana Andrews, pas forcément "Bigger than life" effectivement puisque son personnage ne l'est pas ; je le trouve magistral dans ce rôle.

Cette chronique aussi, elle rentre dans mon top 20 western.
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Père Jules
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Re: Across the Wide Missouri

Message par Père Jules »

Lord Henry a écrit :
Jeremy Fox a écrit :
le top 20
Cette chronique aussi, elle rentre dans mon top 20 western.
C'est bien, il va peut-être commencer à comprendre qu'il faut éditer tout ça ;)
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Rick Blaine
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Re: Le Western américain : Parcours chronologique Part 2 (50

Message par Rick Blaine »

De mon côté, je glisserais quand même Yellow Sky au côté de ces deux titres, peut-être un petit cran au dessus de Convoi de Femmes, rien que pour la beauté du désert!
Jeremy Fox a écrit : Sauf concernant Dana Andrews, pas forcément "Bigger than life" effectivement puisque son personnage ne l'est pas ; je le trouve magistral dans ce rôle.
Moi de même. Andrews n'a effectivement pas le charisme naturel d'un Gable, mais il porte au contraire en lui une sorte de cassure, une faiblesse même, qui font la richesse de ses compositions. Pour moi deux acteurs de natures différentes, mais tous deux au talents exceptionnel.
Strum
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Re: Across the Wide Missouri

Message par Strum »

Jeremy Fox a écrit :Pareil y compris pour ce qui suit. Sauf concernant Dana Andrews, pas forcément "Bigger than life" effectivement puisque son personnage ne l'est pas ; je le trouve magistral dans ce rôle. 8)
Pour ma part, je n'ai pas vraiment cru à son personnage. Je ne sais pas si cela est dû au fait que je ne suis pas grand amateur de cet acteur (qui porte son visage comme un masque de film en film), malgré sa filmographie exemplaire, ou si cela tient à son rôle, que je ne trouve pas toujours bien écrit.
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Re: Le Western américain : Parcours chronologique Part 2 (50

Message par someone1600 »

Boubakar a écrit :
someone1600 a écrit :Un film qu'il faudra bien que je vois un jour
ça doit être le 300eme message de la sorte que je lis quand tu postes :fiou:
C'est a ca que sert le forum, faire découvrir de nouveaux films... lol. Pour ce film, il faudrait juste que je le trouve en dvd. Car je n'en ai pas d'enregistrement TCM.
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Jeremy Fox
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Silver River

Message par Jeremy Fox »

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hellrick
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Re: Across the Wide Missouri

Message par hellrick »

Me reste à voir de ton top 20

Jeremy Fox a écrit :
* 3- La Porte du Diable (Anthony Mann)

* 13- La Charge Victorieuse (John Huston)
* 14- Tomahawk (George Sherman)
* 15- La Cible Humaine (Henry King)
* 16- La Rivière Rouge (Howard Hawks)
* 17- La Charge Fantastique (Raoul Walsh)
* 18 - Quand les Tambours s'arrêteront (Hugo Fregonese)
* 19- La Piste des Géants (Raoul Walsh)
* 20- La Caravane Héroïque (Michael Curtiz)
Mais la bonne nouvelle c'est que j'ai déjà le 16, 17, 19 et 20 en dvd ouf!!!! :D
Critiques ciné bis http://bis.cinemaland.net et asiatiques http://asia.cinemaland.net

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Jeremy Fox
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Re: Across the Wide Missouri

Message par Jeremy Fox »

hellrick a écrit :
Jeremy Fox a écrit : A suivre : Le Sentier de l'enfer (Warpath, 1951) de Byron Haskin
Là changement complet et retour au petit western de série B pas vraiment mémorable mais avec suffisamment d'action pour divertir les nostalgiques :wink:
Et bien non, La VF étant inécoutable (on dirait que les doubleurs se sont enfermés dans une grotte minuscule avec écho insupportable) et la copie (enregistrée sur la médiocre chaine action) pas fameuse, j'ai tenu 10 minutes et j'ai jeté la galette :(

Bref, le prochain sera l'excellente première collaboration entre Randolph Scott et André de Toth : Le Cavalier de la mort (Man in the Saddle)
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Père Jules
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Re: Le Western américain : Parcours chronologique Part 2 (50

Message par Père Jules »

Un De Toth que je n'ai pas encore vu malgré mon achat datant de plusieurs mois. Ta chronique sera sans doute l'occasion d'y jeter un œil ;)
Lord Henry
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Re: Across the Wide Missouri

Message par Lord Henry »

Jeremy Fox a écrit : Bref, le prochain sera l'excellente première collaboration entre Randolph Scott et André de Toth : Le Cavalier de la mort (Man in the Saddle)
Fichtre! Si j'avais lu cela plus tôt, la prudence aurait commandé que je réfléchisse à deux fois avant de poster mon commentaire sur le même film.
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Jeremy Fox
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Re: Across the Wide Missouri

Message par Jeremy Fox »

Lord Henry a écrit :
Jeremy Fox a écrit : Bref, le prochain sera l'excellente première collaboration entre Randolph Scott et André de Toth : Le Cavalier de la mort (Man in the Saddle)
Fichtre! Si j'avais lu cela plus tôt, la prudence aurait commandé que je réfléchisse à deux fois avant de poster mon commentaire sur le même film.
Très intéressant ton avis en tout cas. Sans parler du fond (les 20 premières minutes sont superbes et d'une grande noirceur, ensuite, c'est plus conventionnel), ce qui m'a le plus frappé à la vision que je viens de terminer est la beauté stylistique du film (splendides utilisations des sources de lumières, des ombres, des tâches de couleur...), assez étonnante pour un film de série B à cette époque. Il y eut bien Fregonese mais c'était quand même assez rare. A suivre :wink:
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