Le cinéma français des années 60 (1960-69)

Rubrique consacrée au cinéma et aux films tournés avant 1980.

Modérateurs : cinephage, Karras, Rockatansky

Avatar de l’utilisateur
Commissaire Juve
Charles Foster Kane
Messages : 24561
Inscription : 13 avr. 03, 13:27
Localisation : Aux trousses de Fantômas !
Contact :

Re: Le cinéma français des années 60 (1960-69)

Message par Commissaire Juve »

Federico a écrit :
pak a écrit :Bon allez, détendons l'atmosphère
Elle n'était pas si tendue que ça... :wink:
pak a écrit : 2. Du mou dans la gâchette (ou Deux tueurs) de Louis Grospierre (1966)
A ranger dans les navets sympatoches, sans plus. Même si je fais aussi partie des amateurs de nanars et de ceux qui prennent toujours un plaisir gourmand à n'importe quelle apparition de Blier père, personnage assez hors-norme et certainement beaucoup moins drôle (ou plus inquiétant) à la ville qu'à l'écran. Quand je le vois dans des petits films de ce type, je ne peux jamais m'empêcher d'imaginer la réaction du "Patron" (Jouvet) si il avait pu voir où se compromit parfois un de ses plus brillants élèves.
pak a écrit : L'unique point remarquable de cette comédie entièrement tournée en extérieurs est son décor urbain qui semble fasciner le réalisateur, notamment une banlieue en pleine mutation avec ses grands ensembles en construction, futures cités qui pour certaines s'enflammeront une trentaine d'années plus tard.
Exact et le bétonnage des banlieues sous les Trente (pas) Glorieuses est très présent dans le cinéma populaire dès la fin des années 50 avec, par exemple, Archimède le clochard de Gilles Grangier (1958). En faisant abstraction de la qualité intrinsèque de la plupart de ces films, ils sont pour cela des témoignages sociologiques passionnants. Un des plus parlants est Le Grand Bazar de Claude Zidi avec les Charlots (1973). En plus d'un souvenir de très jeune spectateur de cinéma de quartier, je le revois toujours avec le même plaisir.

:o Quelle drôle de coïncidence : c'est le dernier test que j'ai mis en ligne... j'avais même ajouté trois quatre lignes de commentaire "artistique" (chose rare). Je pensais même être un des seuls à savoir que cela avait été tourné au Mont-Mesly.

http://ahbon.free.fr/DVD_1888.html

Et je vois qu'on est d'accord sur l'essentiel.

J'ai moi-même fait partie des premiers habitants d'une de ces cités construites dans le nord de Paris en 62-63. On y a passé une douzaine d'années super sympas, puis on est partis. J'ai su plus tard que la population s'était mise à changer à partir des années 80. Aujourd'hui, c'est franchement la zone de la zone. :?
Dernière modification par Commissaire Juve le 18 oct. 10, 16:52, modifié 1 fois.
La vie de l'Homme oscille comme un pendule entre la douleur et l'ennui...
pak
Electro
Messages : 990
Inscription : 23 mars 08, 00:25
Localisation : Dans une salle, ou sur mon canapé, à mater un film.
Contact :

Re: Le cinéma français des années 60 (1960-69)

Message par pak »

Commissaire Juve a écrit : Je pensais même être un des seuls à savoir que cela avait été tourné au Mont-Mesly.
Quand on y a habité 20 ans, ça saute aux yeux (embués)...
Le cinéma : "Il est probable que cette marotte disparaîtra dans les prochaines années."

Extrait d'un article paru dans The Independent (1910)

http://www.notrecinema.com/
pak
Electro
Messages : 990
Inscription : 23 mars 08, 00:25
Localisation : Dans une salle, ou sur mon canapé, à mater un film.
Contact :

Les demoiselles de Rochefort (1966)

Message par pak »

3. Les demoiselles de Rochefort de Jacques Demy (1966) :

Avec : Catherine Deneuve, Françoise Dorléac, Jacques Perrin, Danièle Darrieux, Michel Piccoli, Gene Kelly, George Chakiris... Scénario et paroles des chansons : Jacques Demy - Musique : Michel Legrand - Genre : comédie musicale - Production française (avec des fonds américains) - Date de sortie : 08/03/1967
Image Image
Mon avis :

La recherche de l'âme sœur de deux jumelles, mais aussi des autres protagonistes de l'histoire, dans la ville de Rochefort animée par l'installation d'une foire commerciale.

Auréolé du succès critique des Parapluies de Cherbourg (Prix Louis-Delluc 1963, Palme d'or au festival de Cannes 1964 et Prix Méliès 1965), Jacques Demy a enfin les moyens d'assouvir son rêve de réaliser une comédie musicale à l'américaine et digne des meilleurs spectacles de Broadway, chose qu'il n'avait pu faire en 1960 avec Lola au budget trop restreint.

On a beau dire, la musique de Michel Legrand a parfois mal vieilli, notamment dans les films de Claude Lelouch. Pourtant, dès les premières notes de piano du début, jouant le thème des Demoiselles de Rochefort, on entend en nous une autre petite musique, de celle qui vous murmure dans l'oreille que l'on va assister à un beau spectacle. Et beau, il l'est...

Grâce à la musique, bien-sûr, qui décoche ses thèmes imparables, mixage assez miraculeux de jazz et de blues, avec des nuances de musique classique.

Grâce aussi aux ballets millimétrés qui s'enchainent avec un bel équilibre entre douceur et énergie.

Et évidemment grâce à la réalisation de Demy, qui a une pêche incroyable, une modernité quasi inédite à l'époque, où la caméra, sans cesse en mouvement, caresse ses personnages ou s'envole dans des embardées poétiques et aériennes. Chaque plans sont soigneusement travaillés, relèvent même de la géométrie, une leçon de cadrage de tous les instants avec ses personnages phares constamment centrés sur l'écran (qu'un certain Luc Besson par exemple retiendra plus tard), ses espaces latéraux et arrières-plans savamment occupés, loin du remplissage gratuit.

Ainsi cette scène tournée de l'intérieur de la buvette, avec ce petit garçon au t-shirt rouge marchant derrière Jacques Perrin assis et filmé en plan serré, semblant traverser la tête de l'acteur, n'est pas là par hasard, mais pour rappeler l'âme d'enfant du jeune homme aux idéaux presque enfantins... Puis des femmes aux robes colorées remplacent le gamin tandis que le comédien chante son idéal amoureux.

Le film a été restauré pour le format numérique. Le travail sur l'image est remarquable, et la restauration est miraculeuse. Les couleurs irisent l'écran comme si le film avait été tourné hier, elles sont d'une pureté éclatante. Peut-être trop d'ailleurs, donnant un côté pictural forcé. Mais pourtant cela reste en phase avec les intentions de l'auteur car c'est bien de pureté qu'il parle ici. Pureté des sentiments, de l'amour, de la vie, mais aussi de la mélancolie, de la tristesse, des souvenirs... Il n'y a pas une once de méchanceté dans cette histoire résolument optimiste. Naïve aussi, oui, mais jamais niaise. Si le rythme faiblit un peu dans le dernier tiers, les ultimes minutes proposent des moments d'une grâce folle.

Françoise Dorléac et Catherine Deneuve, les sœurs du titre, espiègles, touchantes, gaies, et lumineuses, se complètent à merveille, ayant le même but, rencontrer l'amour, l'une grâce au coup de foudre, l'autre s'en remettant à la chance, ce qui finalement est la même chose, l'amour idéal étant un jeu de hasard.

La comédie musicale était un genre que les américains maitrisaient et Jacques Demy fut un des rares à se hisser à leur niveau. Lion de les copier, il y imposa son univers tout en rendant hommage à ce genre lié à l'âge d'or d'Hollywood, à travers la présence de Gene Kelly (un monument du genre) et George Shakiris (révélé par le non moins monumental West Side story en 1961) même si pour être tout à fait honnête, la présence de ces deux acteur est liée à la participation financière à la production du film d'une filiale de la Warner.

Voir un film de Jacques Demy, et en particulier celui-ci, c'est entrer dans un autre monde, idéalisé, irréel, mais en même temps proche de nous (certaines chansons sont de véritables dialogues qui alimentent l'intrigue, jouant sur la dualité du quotidien et du féérique). Un mariage réussi entre le divertissement et l'art...

Étoiles : * * * * . Note : 17/20. (ben ouais, j'ai adoré ! )
Image
Autour du film :

1. Difficile de parler du film sans évoquer Françoise Dorléac, sœur ainée de Catherine Deneuve. Elle était à la moitié des années 1960 plus populaire que sa cadette, mais cette dernière sortait du succès Les parapluies de Cherbourg. C'est la seconde fois que les deux sœurs tournent ensemble, après l'oublié Les portes claquent de Jacques Poitrenaud et Michel Fermaud (1960). On le sait, moins de 4 mois après la sortie du film, le 26/06/1967, Françoise Dorléac se tue au volant de sa voiture. Elle avait 25 ans.
Image
2. Hormis Danièle Darrieux, tous ceux qui chantent à l'écran sont en fait doublés, Gene Kelly inclus, n'ayant pas le temps d'apprendre les chansons, même phonétiquement. Les voix ont été choisies en fonction de leur ressemblance avec celles doublées.
Image
3. Le tournage a eu lieu en extérieurs dans la ville de Rochefort du 31 mai au 27 août 1966, mais dès le mois d'avril, des peintres blanchissent des milliers de mètres carrés de façades autour de la place Colbert de la ville ainsi que dans les diverses rues servant aux prises de vue. En 1994, la place devant la gare de la ville a été baptisée Place Françoise Dorléac.

4. Le film, tourné à la fois en français et en anglais (pour le public américain) sortira sur les écrans simultanément à Paris, New-York et... Rochefort, bien-sûr. Il recevra le prix Max Ophüls 1967 et sera nommé à l'OSCAR 1969 de la meilleure musique.

5. Jacques Demy aimait lier ses films aux précédents. Ainsi avait-il prévu que le second forain aux côté d'Étienne joué par George Shakiris soit Guy, le héros malheureux des Parapluie de Cherbourg : il aurait été veuf de Madeleine qu'il avait épousé à la fin du film, et sauvé du désespoir par Étienne qu'il aurait alors suivi. Mais Nino Castelnuovo, l'interprète de Guy, n'est pas libre et l'auteur abandonne son idée. Il reste des allusions à Cherbourg et aussi à Nantes (Lola).

6. Le film fut un succès avec 1 319 432 entrées France, ce qui incita la Columbia à inviter l'auteur à réaliser un film aux USA. Il reprend alors le personnage de Lola (et donc Anouk Aimée) et réalise Model shop en 1968. Le film est un échec. De plus, la comédie musicale ne rapporte plus outre-Atlantique, et même un chef-d'œuvre comme Hello Dolly ! (réalisé par Gene Kelly), trop cher en regard des échecs précédents du genre ne suffit plus à intéresser les producteurs au genre. Demy ne signera donc pas sa comédie musicale américaine et préfère retourner en France, où, avec de nouveau Catherine Deneuve et Jacques Perrin en vedettes, et Michel Legrand à la musique, il signera Peau d'Âne...
Image Image
Image Image
Dernière modification par pak le 5 avr. 11, 13:39, modifié 1 fois.
Le cinéma : "Il est probable que cette marotte disparaîtra dans les prochaines années."

Extrait d'un article paru dans The Independent (1910)

http://www.notrecinema.com/
pak
Electro
Messages : 990
Inscription : 23 mars 08, 00:25
Localisation : Dans une salle, ou sur mon canapé, à mater un film.
Contact :

Les aventuriers (1966)

Message par pak »

4. Les aventuriers de Robert Enrico (1966) :

Avec Lino Ventura, Alain Delon, Joanna Shimkus, Serge Regniani, Paul Crauchet... Scénario de Robert Enrico, José Govianni et Pierre Pelegri d'après le roman du même nom de José Govianni – Dialogues de Robert Enrico et Pierre Pelegri – Musique de François de Roubaix – Genre : aventure – Production franco-italienne – Sortie le 12/04/1967
Image
Mon avis :

Trois amis un peu bohèmes et un peu amoureux dont les rêves se sont brisés se lancent dans une chasse au trésor.
Il y a des films qui vous tiennent par la nostalgie et vous touchent particulièrement. C'est vrai pour moi avec celui-ci. Déjà parce que les premières images que l'on voit montrent la ville de Créteil vue d'un terrain vague dans lequel j'ai joué gamin quelques années après le tournage. Ce terrain boueux est devenu par la suite le lac artificiel de la ville avec sa base de loisirs, ses espaces verts, ses immeubles à hauts loyers... Les temps changent...

Ensuite parce que d'emblée, la musique de François de Roubaix donne le ton d'un film au fort capital de sympathie.

Le film est monté comme un triptyque dans trois lieux différents que l'on peut décomposer ainsi : les espoirs déçus de doux dingues en région parisienne, la chasse au trésor sur une côte africaine, la tentative de concrétiser un dernier souhait en Charente-Maritime...

Le début est un hymne à l'amitié, la liberté d'esprit, un hommage à ceux qui ont des rêves et qui cherchent à les vivre, à l'ouverture d'esprit devant ce qui peut paraître loufoque, à la créativité, à la porte ouverte aux amis. Certains trouveront le message naïf, même daté vue notre époque plus axée vers l'individualisme, mais on peut aussi s'autoriser à y croire un bref instant, au moins le temps du film. Les « exploits » de Manu et Roland sont des clins d'œils aux pionniers d'autrefois, du début du siècle dernier, ces gentils dingues, cascadeurs ou inventeurs, qui voltigeaient avec leurs coucous ou tentaient les records les plus impossibles, avant que des tas de règlements interdisent toutes ces folies parfois dangereuses et qu'il ne reste de ces exploits que de vieilles images en noir et blanc muettes montrant d'illustres inconnus casser du bois ou froisser de la tôle la plupart du temps.

Lino Ventura et Alain Delon forment un duo parfait en inadaptés sociaux, prêt à tout pour l'amitié mais incompétent face aux conventions. Entre eux deux s'immisce Laeticia, interprétée par la douce Joanna Chimkus qui fut l'égérie d'Enrico le temps de trois films (Tante Zita la même année, puis Ho ! En 1968) : elle est le ciment idéal entre le bourru costaud Ventura et le svelte beau gosse Delon. Avec eux trois se joue une (platonique) histoire à la Jules et Jim exotique. Leurs personnages pourraient paraître être des losers, pourtant, l'apparition de celui de Serge Reggiani remet les pendules à l'heure : ce dernier en est un vrai, aux abois, solitaire, pas fiable, lâche et désespéré.

Enrico a de la tendresse pour ses personnages et ses acteur, celle-ci irradie l'écran et atteint agréablement le spectateur, jusqu'à ce que l'auteur durcisse le ton et ce qui était jusqu'alors une jolie ballade devient une suite de moments forts, certes parfois naïfs, encore, mais aussi d'une tristesse et d'une poésie qui peuvent laisser des traces longtemps après le mot fin.

Étoiles : * * * . Note : 15/20.
Image
Autour du film :

1. L'actrice canadienne Joanna Shimkus a fait une carrière éclair au cinéma. Après avoir été mannequin, elle débuta à 21 ans dans De l'amour de Jean Aurel en 1964, puis on l'aperçut dans Qui êtes-vous, Polly Magoo ? de William Klein en 1966, mais ses rôles les plus marquants furent ceux qu'elle interpréta dans les trois films de Robert Enrico. Elle joue ensuite dans Boom de Joseph Losey en 1968 puis elle tient le premier rôle féminin de L'homme perdu (The lost man) de Robert Allan Arthur en 1969 aux côtés de Sydney Poitier, qu'elle épousera en 1976. Elle arrêta définitivement sa carrière en 1971 après seulement 11 films. Une des deux filles du couple Joanna/Sydney est actrice aussi : Sydney Tamiia Poitier, qu'on a pu voir par exemple en 2007 dans Boulevard de la mort de Tarantino.
Image
2. La dernière partie du film se déroule en partie dans un lieu redevenu célèbre grâce à la télévision : le Fort Boyard. Durant le tournage, il était dans son « jus », à savoir complètement abandonné. Il a bien-sûr depuis été partiellement rénové à la fin des années 80 pour des jeux télévisés. Détail cocasse, le fort a été acheté lors d'une vente aux enchères par un dentiste belge en 1962. L'ancienne forteresse appartient désormais au conseil général de la Charente-Maritime.
Image
3. Le film fut l'un des plus gros succès de 1967, avec 3 120 412 entrées, ce qui le place 7ème au box-office français de cette année.

4. Alain Delon poussa la chansonnette pour ce film :

Image
Image Image
Image Image
Dernière modification par pak le 5 avr. 11, 13:39, modifié 3 fois.
Le cinéma : "Il est probable que cette marotte disparaîtra dans les prochaines années."

Extrait d'un article paru dans The Independent (1910)

http://www.notrecinema.com/
Jean Michel
Doublure lumière
Messages : 576
Inscription : 26 août 06, 16:39
Liste DVD
Localisation : chilly-mazarin
Contact :

Re: Le cinéma français des années 60 (1960-69)

Message par Jean Michel »

Excellent!! de belles critiques!! Les demoiselles c'est un film que j'adore, léger, sautillant, chantant, pleins de bonnes humeurs. Les chansons sont mythiques, les chorégraphies sont d'une belle qualités, un vrai scud dans le monde du cinéma français!
Avatar de l’utilisateur
Commissaire Juve
Charles Foster Kane
Messages : 24561
Inscription : 13 avr. 03, 13:27
Localisation : Aux trousses de Fantômas !
Contact :

Re: Le cinéma français des années 60 (1960-69)

Message par Commissaire Juve »

Les aventuriers... grand souvenir d'enfance.

Vu dans un cinéma en plein air, en Vendée, en 1973... La scène des fun*** sous-marines m'avait fait forte impression. Et le final à Fort Boyard, oh lala.

A propos de Joanna Shimkus -- si belle -- je signale sa présence dans un film à sketches sorti en 1965... un de ses deux amants annonce le personnage qu'elle interprétera dans "les Aventuriers".

Voir le petit avis critique de mon test à : http://ahbon.free.fr/DVD_1488.html (sur la petite capture, c'est elle).
Dernière modification par Commissaire Juve le 1 nov. 10, 19:50, modifié 1 fois.
La vie de l'Homme oscille comme un pendule entre la douleur et l'ennui...
riqueuniee
Producteur
Messages : 9706
Inscription : 15 oct. 10, 21:58

Re: Le cinéma français des années 60 (1960-69)

Message par riqueuniee »

Les aventuriers Un très beau film,dans un genre où les grandes réussites (en ce qui concerne le cinéma français) sont rares : le film d'aventures...
Federico
Producteur
Messages : 9462
Inscription : 9 mai 09, 12:14
Localisation : Comme Mary Henry : au fond du lac

Re: Le cinéma français des années 60 (1960-69)

Message par Federico »

Pardon d'avance si je m'emballe mais Les aventuriers est un de mes films de chevet donc ça va être très dur de rester objectif. :wink:

Je le considère comme l'un des plus merveilleux films d'aventures jamais réalisés, d'une santé et d'une fraîcheur absolues, drôle et fin, bouleversant par ses touches de mélancolie et porté par un trio d'acteurs magnifiques au superlatif.

Et comme cet autre chef-d'oeuvre du genre de la même époque (L'homme de Rio, de Philippe de Broca), le film d'Enrico est une bande-dessinée en "live", mille fois plus réussie que toutes les adaptations littérales commises ici et là et souvent pour le pire. Car Les aventuriers sont truffés de clin d'oeil aux aventures de Tintin. Un Tintin plus adulte qui serait interprété par Delon, Ventura jouant Haddock et (contrairement à l'univers hergéen où le seul personnage féminin de premier plan fut la peu attirante Bianca Castafiore) l'immixtion d'une fée lumineuse entre les deux très virils héros. La ravissante Laetitia joue en quelque sorte le rôle de... Tournesol (si ! si !) puisque c'est grâce à elle que Manu et Roland vont pouvoir aller chercher leur Trésor de Rackham Le Rouge. Parmi les autres hommages à Hergé : la séquence de danse tribale en scaphandre, les acrobaties aériennes de Manu, le dragster de Roland et les méchants d'opérette (Crauchet et sa petite bande de désoeuvrés, Reggiani et sa barbe de clodo des Tropiques).

Bon et puis il y a Joanna Shimkus et là, je ne trouve plus mes mots... :oops:

Image

Si la bonne humeur qui se dégage de la première partie est contagieuse, il en fut un peu différemment sur le tournage où une fois de plus Môssieur Delon voulut imposer ses directives et fut très mécontent de voir que la pauvre Joanna Shimkus ait été préférée à sa compagne Nathalie.

Alors bien sûr, l'ensemble est délicieusement naïf mais Alexandre Dumas l'était aussi, Jean Renoir, Capra, Hawks et Spielberg itou et j'ai d'autant moins de mal à avouer que je marche ici à 2000/100 que j'admire tout autant ce que font des cinéastes aussi durs et désenchantés (ou enchantés par les cauchemars) que Lynch et Cronenberg. Enrico réussit tout simplement le film grand public parfait.

Quant aux superbes ruines du Fort Boyard (encore un décor à la Tintin), ça m'a fait mal au coeur de les voir relookées en terrain de jeu télévisuel.

Le DVD édité pour les 40 ans de ce petit bijou contient un remarquable et très émouvant documentaire sur François de Roubaix, qui est à mes oreilles (là encore, zéro objectivité) un des 4-5 meilleurs compositeurs pour le cinéma de tous les temps et sûrement l'un des plus inventifs. Un destin vachard le fit prématurément disparaître dans des conditions rappelant la plus émouvante scène du film d'Enrico pour laquelle il conçut un thème beau à pleurer. :cry:

Image

http://www.francoisderoubaix.com/
http://emma.esse.free.fr/francoisderoubaix/

Pour continuer la belle présentation du film par pak et revenir (je n'ai pas à me forcer :wink: ) sur l'adorable Joanna Shimkus, si sa carrière fut bien trop brève, elle tint aussi le rôle principal de The virgin & the gypsy (1970). Une adpatation de D.H. Lawrence assez mollement réalisée par Christopher Miles mais où elle est rayonnante (on peut trouver le DVD dans une édition anglaise mais non-sous-titrée et avec une qualité de transfert très moyenne).

Image

La belle qui doit son nom et sa frimousse à ses origines lituaniennes joua aussi dans le sketch Montparnasse-Levallois réalisé par Godard pour le film Paris vu par... (1965). Mini-film dont l'intrigue-imbroglio est je crois racontée par Belmondo dans Une femme est une femme.

Image

Les shimkusophiles (dont je m'auto-proclame président à vie :D ) peuvent aussi l'entr'apercevoir dans la séquence du vernissage pop de La prisonnière de Clouzot. Et il faut absolument la voir dans son premier film, De l'amour pour se faire une idée de sa photogénie et de sa grâce sur-naturelles (à voir aussi si vous avez été traumatisés en revoyant récemment la scène du dentiste de Marathon Man :wink: ).
Dernière modification par Federico le 1 nov. 10, 19:48, modifié 1 fois.
The difference between life and the movies is that a script has to make sense, and life doesn't.
Joseph L. Mankiewicz
Avatar de l’utilisateur
Commissaire Juve
Charles Foster Kane
Messages : 24561
Inscription : 13 avr. 03, 13:27
Localisation : Aux trousses de Fantômas !
Contact :

Re: Le cinéma français des années 60 (1960-69)

Message par Commissaire Juve »

Federico a écrit :...
La belle qui doit son nom et sa frimousse à ses origines lituaniennes joua aussi dans le sketch Montparnasse-Levallois réalisé par Godard pour le film Paris vu par... (1965). Mini-film dont l'intrigue-imbroglio est je crois racontée par Belmondo dans Une femme est une femme).
exactement...

Comme je le disais plus haut... voir mon tout petit commentaire sur la fiche test en lien.
Commissaire Juve a écrit :A propos de Joanna Shimkus -- si belle -- je signale sa présence dans un film à sketches sorti en 1965... un de ses deux amants annonce le personnage qu'elle interprétera dans "les Aventuriers".

Voir le petit avis critique de mon test à : http://ahbon.free.fr/DVD_1488.html (sur la petite capture, c'est elle).
La vie de l'Homme oscille comme un pendule entre la douleur et l'ennui...
Federico
Producteur
Messages : 9462
Inscription : 9 mai 09, 12:14
Localisation : Comme Mary Henry : au fond du lac

Re: Le cinéma français des années 60 (1960-69)

Message par Federico »

Commissaire Juve a écrit :
Federico a écrit :...
La belle qui doit son nom et sa frimousse à ses origines lituaniennes joua aussi dans le sketch Montparnasse-Levallois réalisé par Godard pour le film Paris vu par... (1965). Mini-film dont l'intrigue-imbroglio est je crois racontée par Belmondo dans Une femme est une femme).

Comme je le disais plus haut... voir mon tout petit commentaire sur la fiche test en lien.
Commissaire Juve a écrit :A propos de Joanna Shimkus -- si belle -- je signale sa présence dans un film à sketches sorti en 1965... un de ses deux amants annonce le personnage qu'elle interprétera dans "les Aventuriers".

Voir le petit avis critique de mon test à : http://ahbon.free.fr/DVD_1488.html (sur la petite capture, c'est elle).
Ah, désolé, je ne l'avais pas vu, promis-juré (j'ai laissé traîner un moment le brouillon de mon commentaire cet AM). :wink:
En tout cas, ça me rassure car j'avais eu peur de m'être emmêlé les pinceaux à propos de la citation de l'intrigue par Bébel (un moment, j'ai cru que c'était Léaud dans un des Doinel).
The difference between life and the movies is that a script has to make sense, and life doesn't.
Joseph L. Mankiewicz
Federico
Producteur
Messages : 9462
Inscription : 9 mai 09, 12:14
Localisation : Comme Mary Henry : au fond du lac

Re: Le cinéma français des années 60 (1960-69)

Message par Federico »

Et puis tiens, sur ma lancée, je renvoie à une ancienne critique du film d'Aurel rédigée avec les pieds par une andouille de ma connaissance... :wink:

http://cinecritiques.free.fr/cc/index.p ... iew&id=412
The difference between life and the movies is that a script has to make sense, and life doesn't.
Joseph L. Mankiewicz
riqueuniee
Producteur
Messages : 9706
Inscription : 15 oct. 10, 21:58

Re: Le cinéma français des années 60 (1960-69)

Message par riqueuniee »

La superbe chronique de federico,venant après celle de pak,ne peut que donner envie à ceux qui ne le connaîtraient pas de découvrir ce très beau film.Je n'avais pas vraiment pensé,en le voyant,aux clins d'oeil "hergéens",moins évidents que dans l'Homme de Rio.Ca me semble très pertinent (il faudrait que je revoie le film).
Avatar de l’utilisateur
Major Dundee
Producteur Exécutif
Messages : 7100
Inscription : 15 mai 06, 13:32
Localisation : Bord de la piscine de "Private Property"

Re: Le cinéma français des années 60 (1960-69)

Message par Major Dundee »

Federico a écrit :Pardon d'avance si je m'emballe mais Les aventuriers est un de mes films de chevet donc ça va être très dur de rester objectif. :wink:

Je le considère comme l'un des plus merveilleux films d'aventures jamais réalisés, d'une santé et d'une fraîcheur absolues, drôle et fin, bouleversant par ses touches de mélancolie et porté par un trio d'acteurs magnifiques au superlatif.
Complètement d'accord avec ce que tu dis (du moins si l'on reste dans le cinéma français) quoique...

Le seul bémol c'est que je le place à cent coudées au-dessus de "L'homme de Rio" qui m'a toujours un peu gonflé.
De toute façon je n'ai jamais bien compris l'engouement dont jouissait De Broca :oops: :oops: :oops: :arrow: :arrow: :arrow:
Charles Boyer (faisant la cour) à Michèle Morgan dans Maxime.

- Ah, si j'avais trente ans de moins !
- J'aurais cinq ans... Ce serait du joli !


Henri Jeanson
pak
Electro
Messages : 990
Inscription : 23 mars 08, 00:25
Localisation : Dans une salle, ou sur mon canapé, à mater un film.
Contact :

Re: Le cinéma français des années 60 (1960-69)

Message par pak »

Apparemment, l'évocation du film Les aventuriers et de Joanna Shimkus a réveillé quelques souvenirs... :D
Le cinéma : "Il est probable que cette marotte disparaîtra dans les prochaines années."

Extrait d'un article paru dans The Independent (1910)

http://www.notrecinema.com/
Federico
Producteur
Messages : 9462
Inscription : 9 mai 09, 12:14
Localisation : Comme Mary Henry : au fond du lac

Re: Le cinéma français des années 60 (1960-69)

Message par Federico »

pak a écrit :Apparemment, l'évocation du film Les aventuriers et de Joanna Shimkus a réveillé quelques souvenirs... :D
En ce qui me concerne, que ce soit pour l'un comme pour l'autre, ils ne se sont jamais endormis. :wink:
The difference between life and the movies is that a script has to make sense, and life doesn't.
Joseph L. Mankiewicz
Répondre