Le cinéma français des années 60 (1960-69)

Rubrique consacrée au cinéma et aux films tournés avant 1980.

Modérateurs : cinephage, Karras, Rockatansky

Répondre
pak
Electro
Messages : 990
Inscription : 23 mars 08, 00:25
Localisation : Dans une salle, ou sur mon canapé, à mater un film.
Contact :

Le cinéma français des années 60 (1960-69)

Message par pak »

Les années 1960 sont marquées par l'émergence de la Nouvelle Vague, terme intégrant une génération de cinéastes qui expriment le besoin et la volonté d'un nouveau cinéma, indépendant des studios, plus personnel : François Truffaut, Claude Chabrol, Jean-Luc Godard, Jacques Rivette, Louis Malle, Éric Rohmer, Agnes Varda , Alain Resnais sont parmi ses représentants les plus connus. La notion de cinéma d'auteur, chère au cinéma français d'aujourd'hui trouve là ses racines les plus solides. Si l'apport technique de cette nouvelle vague est significatif (on filme avec des caméras plus légères, en son direct, en dehors des studios... ), l'apport esthétique est plus discutable.

Face à ces nouveaux venus, le cinéma plus populaire, la fameuse « qualité à la française » coexiste pourtant car le cinéma en France a connu une décennie 1950 faste où le nombre d'entrées bat régulièrement des records (les 15 premiers films du box-office dépassent alors généralement des 3,5 millions d'entrées, alors qu'aujourd'hui, pour atteindre ce top 15, 2,5 millions suffisent).

Deux acteurs personnalisent la dualité de notre cinéma : Jean-Paul Belmondo et Alain Delon. Le premier, gouailleur, joue chez Godard et Truffaut tout en commençant à développer son personnage de Bébel bondissant, le second, plus sombre, impose sa beauté mi-ange, mi-démon chez René Clément, Jacques Deray et Jean-Pierre Melville : à eux deux, ils vont truster le box-office français durant une vingtaine d'années avant leur déclin populaire (en salles) au milieu des années 1980. Et il serait difficile de passer sous silence le mythe BB : après quelques rôles légers et secondaires, Brigitte Bardot impose sa sensualité (à défaut souvent de son talent d'actrice) aussi bien chez les anciens (En cas de malheur d'Autant-Lara, La vérité de Clouzot) que chez les jeunes loups (Le mépris de Godard ou Vie privée de Malle).

Mais la progression de la télévision dans les foyers apporte une concurrente directe au cinéma en salles. Face à ce média menaçant (en 1950, on ne compte qu'environ 3500 postes pour une couverture de seulement 10 % du territoire ; en 1965, 40 % des foyers possèdent un téléviseur ! ), les professionnels du cinéma cherchent des parades pour continuer d'attirer les gens dans les salles comme le cinémascope en N&B puis couleur qui donne une image plus spectaculaire que le format carré télévisuel, et de nouveaux partenaires financiers, notamment l'Italie avec laquelle une pléthore de coproductions sont tournées, souvent pour des films populaires (cape et épée, policiers, comédie, espionnage, films à sketchs, etc... ) à grand spectacle.

Avec la Nouvelle Vague, mais aussi les sujets abordés par certains cinéastes où pointent critique et satire sociales, le cinéma se fait aussi le relais d'un malaise certain dans la société française. En mai 1968, celle-ci implose sous les pavés et les grèves : la secousse sismique de la rébellion atteint même les dorures du festival de Cannes qui a lieu en même temps : celui-ci est alors interrompu le 19 mai. En 1968, c'est aussi l'année de la projection de Z de Costa-Gavras : les spectateurs refusent de quitter la salle et débattent du film qui devient alors un véritable phénomène de société, car bien que se passant en Grèce, l'intrigue trouve de forts échos avec l'état français d'alors. A partir de ces évènements, le cinéma français sera alors de plus en plus en phase avec son temps, et se fera aussi plus militant voire contestataire...

A mesure des films visionnés de cette décennie, je listerai et commenterai ceux-ci ici, avec une subjectivité que j'espère vous me pardonnerez (me répète moi ? )...


J'aime énormément : * * * * (17 à 20/20)
J'aime beaucoup : * * * (14 à 16/20)
J'aime bien : * * (10 à 13/20)
J'aime moyen : * (6 à 9/20)
J'aime pas, mais alors pas du tout : 0 (0 à 5/20)


Films abordés :

1961 :
Belle américaine (La) de Robert Dhéry et Pierre Tchernia

1964 :
Chasse à l'homme (La) d'Édouard Molinaro

1965 :
Alphaville de Jean-Luc Godard
Chevalier de Maupin(Le) de Mauro Bolignini
Furia à Baya pour OSS 117 d'André Hunebelle

1966 :
Aventuriers (Les) de Robert Enrico
Demoiselles de Rochefort (Les) de Jacques Demy
Du mou dans la gâchette de Louis Grospierre

1967 :
Tante Zita de Robert Enrico

1968 :
Érotissimo de Gérard Pirès
Dernière modification par pak le 21 août 11, 12:23, modifié 11 fois.
Le cinéma : "Il est probable que cette marotte disparaîtra dans les prochaines années."

Extrait d'un article paru dans The Independent (1910)

http://www.notrecinema.com/
pak
Electro
Messages : 990
Inscription : 23 mars 08, 00:25
Localisation : Dans une salle, ou sur mon canapé, à mater un film.
Contact :

Alphaville (1965)

Message par pak »

1. Alphaville de Jean-Luc Godard (1965) :

Avec Eddie Constantine, Anna Karina, Akim Tamiroff, Howard Vernon, Valérie Boisgel, Laszlo Szabo... Scénario de Jean-Luc Godard – Musique de Paul Misraki – Genre : anticipation – Production franco-italienne – Sortie : 06/05/1965
Image Image Image

Mon avis :

L'agent secret Lemmy Caution est envoyé en mission dans la cité futuriste d'Alphaville régit par l'ordinateur Alpha 60 pour retrouver un professeur.

Godard a ses aficionados, notamment chez les critiques cinéma. Il est de bon ton d'élever le cinéaste au panthéon du cinéma français des années 1960 et même après. Personnellement, j'ai toujours eu du mal à entrer dans son univers et, bien qu'on ne puisse ignorer qu'il fut une personnalité forte et atypique à une époque où le classicisme encombrait le cinéma français, je ne peux m'empêcher de penser que certains de ses films sont assez surestimés d'un point de vue cinématographique. C'est peut-être d'ailleurs là l'erreur, de situer et de juger son travail d'un point de vue cinématographique. N'est-il finalement pas plutôt un des pionniers de l'art vidéo né au début des années 1960, et qui a explosé à partir des années 1980 ? Peut-être Godard est-il mieux à sa place aux côtés d'un Chris Marker ou d'un Fred Forest pour citer des contemporains au film que d'un François Truffaut ou d'un Claude Chabrol pour rester dans la Nouvelle Vague... ? C'est en regardant ce film, assez expérimental, que m'est venue cette réflexion.

Scénario limite compréhensible, prise de son directe au point de rendre certains dialogues quasi inaudibles, voix off assénant des citations improbables de l'auteur, citations d'autres auteurs (Borges, Eluard, Céline), jeu minimaliste des acteurs (voire même non-jeu), froideur du ton et des images (sauf quand le cinéaste filme Anna Karina)... Il y a des signes ne trompent pas : on est bien chez Godard...

Le film est une sorte de polar futuriste. Qui n'est ni vraiment polar : l'auteur semble se moquer plus du genre que lui rendre hommage tellement il ironise sur ses figures types ; ni vraiment futuriste car Godard ne fait aucun effort pour apporter un visuel intemporel, se contentant d'utiliser quelques intérieurs neufs de l'époque comme l'alors récente Maison de la radio, et pas un instant on se sent en dehors des années 1960 (en fait, il n'a aucune imagination concernant le futur, exploitant l'architecture parisienne moderne de l'époque comme la tour Esso de la Défense ou un bâtiment EDF dans le 12ème rempli d'ordinateurs par exemple).

La vision de l'auteur du futur est pessimiste, on parle parfois de dystopie, terme un peu barbare qu'on peut opposer à l'utopie, et on pense forcément à George Orwell même si ce dernier délivre un message plus politique alors que celui du cinéaste est plus philosophique et poétique. Cela ne l'empêche pas de frôler le ridicule comme la scène d'exécution de prisonniers politiques au bord d'une piscine, où l'on voit des suppliciés fusillés dans le dos, tombant alors dans l'eau dans laquelle des nageuses synchronisées plongent pour achever au couteau les éventuels survivants... Ou encore les questions idiotes posées par l'ordinateur lors de l'interrogatoire de Lemmy Caution.

Car oui, le personnage principal du film est le fameux agent secret alors en vogue et faisant partie de la flopée de personnages récurrents de ce genre à la mode dans les années 1950/60 dans les romans d'espionnage ou au cinéma (le succès d'un certain James Bond en 1963 va d'ailleurs faire durer le phénomène) : OSS 117, Coplan, le Gorille, le Monocle, S.A.S. et quelques autres... Eddie Constantine sera l'interprète exclusif de Lemmy Caution au cinéma (à partir de 1953 avec La môme vert-de-gris) et le reprend pour Godard : mi figue mi raisin, l'acteur semble se demander ce qu'il fait là, parfois sérieux comme un pape, parfois rigolard... Récit obscur, figé dans ses citations littéraires, qui devient agaçant avec ses images en négatif de la fin, je me demande encore ce qu'a pu y voir le jury du festival de Berlin de 1965 pour lui accorder l'Ours d'Or...

Étoiles : * . Note : 7/20.


Autour du film :

1. La voix d'Alpha 60, l'ordinateur qui règne sur la cité, est une voix amplifiée d'une personne opérée d'un cancer de la gorge, qui participe au malaise ressenti quand la machine s'exprime.

2. Hormis John Van Dreelen dans le segment Je suis un tendre du film à sketchs Brelan d'as d'Henri Verneuil (1952), Eddie Constantine est l'unique interprète à l'écran de Lemmy Caution. Il le jouera une quinzaine de fois. Il le reprendra une ultime fois pour Godard de nouveau en 1991 dans Allemagne 90 neuf zéro.
Image

3. Contrairement à ses contemporains français cinématographiques (OSS 117, Coplan, S.A.S. , ect...), Lemmy Caution est un personnage de littérature relativement ancien puisqu'il a été créé par Peter Cheyney en 1936. Il apparaît dans 10 romans et quelques nouvelles jusqu'en 1946.

4. Figure indissociable de la Nouvelle Vague (et de Truffaut), Jean-Pierre Léaud fait une courte apparition dans le film en employé d'hôtel.

5. Anna Karina et Jean-Luc Godard ont été mariés 7 ans, de 1961 à 1968. Révélée par le réalisateur, l'actrice tournera avec lui 8 films : Le petit soldat et Une femme est une femme (1960), Vivre sa vie (1962), Bande à part (1964), Pierrot le fou et Alphaville (1965), Made in USA et Le plus vieux métier du monde (segment Anticipation, ou l'amour en l'an 2000, 1966).
Image
Image Image Image Image


6. Prolongement insolite du film : celui-ci aura marqué trois jeunes allemands qui en 1984 vont créer leur groupe de New Wave en prenant comme nom son titre, Alphaville. Ils aligneront quelques tubes comme Forever young, Big in Japan ou Sounds like a melody...

Allez, pour le fun (en tous cas, ça l'est plus que le film de Godard) :
Dernière modification par pak le 5 avr. 11, 13:37, modifié 1 fois.
Le cinéma : "Il est probable que cette marotte disparaîtra dans les prochaines années."

Extrait d'un article paru dans The Independent (1910)

http://www.notrecinema.com/
Federico
Producteur
Messages : 9462
Inscription : 9 mai 09, 12:14
Localisation : Comme Mary Henry : au fond du lac

Re: Le cinéma français des années 60 (1960-69)

Message par Federico »

pak a écrit :1. Alphaville de Jean-Luc Godard (1965) :

Godard a ses aficionados, notamment chez les critiques cinéma. Il est de bon ton d'élever le cinéaste au panthéon du cinéma français des années 1960 et même après. Personnellement, j'ai toujours eu du mal à entrer dans son univers et, bien qu'on ne puisse ignorer qu'il fut une personnalité forte et atypique à une époque où le classicisme encombrait le cinéma français, je ne peux m'empêcher de penser que certains de ses films sont assez surestimés d'un point de vue cinématographique. C'est peut-être d'ailleurs là l'erreur, de situer et de juger son travail d'un point de vue cinématographique. N'est-il finalement pas plutôt un des pionniers de l'art vidéo né au début des années 1960, et qui a explosé à partir des années 1980 ? Peut-être Godard est-il mieux à sa place aux côtés d'un Chris Marker ou d'un Fred Forest pour citer des contemporains au film que d'un François Truffaut ou d'un Claude Chabrol pour rester dans la Nouvelle Vague... ? C'est en regardant ce film, assez expérimental, que m'est venue cette réflexion.
Je ne suis pas d'accord sur le reste mais là je dis oui.
pak a écrit : Le film est une sorte de polar futuriste. Qui n'est ni vraiment polar : l'auteur semble se moquer plus du genre que lui rendre hommage tellement il ironise sur ses figures types ; ni vraiment futuriste car Godard ne fait aucun effort pour apporter un visuel intemporel, se contentant d'utiliser quelques intérieurs neufs de l'époque comme l'alors récente Maison de la radio, et pas un instant on se sent en dehors des années 1960 (en fait, il n'a aucune imagination concernant le futur, exploitant l'architecture parisienne moderne de l'époque comme la tour Esso de la Défense ou un bâtiment EDF dans le 12ème rempli d'ordinateurs par exemple).
Si, justement. Je vois un lien direct entre la froideur clinique et désincarnée des années 60 d'Alphaville et celle des années 80 de Buffet froid.
pak a écrit : La vision de l'auteur du futur est pessimiste, on parle parfois de dystopie, terme un peu barbare qu'on peut opposer à l'utopie, et on pense forcément à George Orwell même si ce dernier délivre un message plus politique alors que celui du cinéaste est plus philosophique et poétique. Cela ne l'empêche pas de frôler le ridicule comme la scène d'exécution de prisonniers politiques au bord d'une piscine, où l'on voit des suppliciés fusillés dans le dos, tombant alors dans l'eau dans laquelle des nageuses synchronisées plongent pour achever au couteau les éventuels survivants... Ou encore les questions idiotes posées par l'ordinateur lors de l'interrogatoire de Lemmy Caution.
Il peut s'agir d'une allusion à la piscine, terme utilisé pour désigner les services secrets français (renseignements et contre-espionnage). A l'époque le SDECE (aujourd'hui la DGSE).
pak a écrit : Le plus vieux métier du monde (segment Anticipation, ou l'amour en l'an 2000, 1966).
Qui peut se voir comme une suite d'Alphaville en monochromie orange.
pak a écrit : 6. Prolongement insolite du film : celui-ci aura marqué trois jeunes allemands qui en 1984 vont créer leur groupe de New Wave en prenant comme nom son titre, Alphaville. Ils aligneront quelques tubes comme Forever young, Big in Japan ou Sounds like a melody...
Un détail, plutôt une séquelle et un dommage collatéral qu'il vaut mieux oublier... :lol:
Je préfère me souvenir de l'introduction des séquences de Cinéma, Cinémas.
The difference between life and the movies is that a script has to make sense, and life doesn't.
Joseph L. Mankiewicz
julien
Oustachi partout
Messages : 9039
Inscription : 8 mai 06, 23:41

Re: Le cinéma français des années 60 (1960-69)

Message par julien »

Article passionant à lire et bien illustré, mis à part la référence d'un goût douteux au groupe pop Alphaville. Au passage sur google ils sont référencés avant le film de Godard.
Image
"Toutes les raisons évoquées qui t'ont paru peu convaincantes sont, pour ma part, les parties d'une remarquable richesse." Watki.
pak
Electro
Messages : 990
Inscription : 23 mars 08, 00:25
Localisation : Dans une salle, ou sur mon canapé, à mater un film.
Contact :

Re: Le cinéma français des années 60 (1960-69)

Message par pak »

Je ne vois pas bien ce que le goût vient faire là (au passage, merci pour la réflexion, m'enfin... ? :roll: ). C'est une référence factuelle sur l'influence qu'a pu avoir le film, suffisamment originale pour la citer et ne pas trop se prendre au sérieux. Qu'on aime ou pas, après, ça c'est autre chose.

Mais je vais retenir le "passionnant à lire", ça c'est déjà plus sympathique et ça flatte l'ego 8) ( :uhuh: ).
Le cinéma : "Il est probable que cette marotte disparaîtra dans les prochaines années."

Extrait d'un article paru dans The Independent (1910)

http://www.notrecinema.com/
riqueuniee
Producteur
Messages : 9706
Inscription : 15 oct. 10, 21:58

Re: Le cinéma français des années 60 (1960-69)

Message par riqueuniee »

La référence au groupe était obligée,celui-ci ayant pris ce nom en hommage au film de Godard.Pour ma part,un film que je ne suis pas arrivée à suivre jusqu'au buot.Pas pour cause d'ennui à proprement parler,c'est surtout que je n'ai pas accroché du tout.
pak
Electro
Messages : 990
Inscription : 23 mars 08, 00:25
Localisation : Dans une salle, ou sur mon canapé, à mater un film.
Contact :

Re: Le cinéma français des années 60 (1960-69)

Message par pak »

Federico a écrit :
pak a écrit : Le film est une sorte de polar futuriste. Qui n'est ni vraiment polar : l'auteur semble se moquer plus du genre que lui rendre hommage tellement il ironise sur ses figures types ; ni vraiment futuriste car Godard ne fait aucun effort pour apporter un visuel intemporel, se contentant d'utiliser quelques intérieurs neufs de l'époque comme l'alors récente Maison de la radio, et pas un instant on se sent en dehors des années 1960 (en fait, il n'a aucune imagination concernant le futur, exploitant l'architecture parisienne moderne de l'époque comme la tour Esso de la Défense ou un bâtiment EDF dans le 12ème rempli d'ordinateurs par exemple).
Si, justement. Je vois un lien direct entre la froideur clinique et désincarnée des années 60 d'Alphaville et celle des années 80 de Buffet froid.
Je m'attendais à me faire laminer en égratignant le mythe Godard, mais ça se passe finalement assez bien pour l'instant... :mrgreen:

Je ne vois pas ce lien, entre Godard et Blier, le premier voulant donner dans le futuriste sans vraiment s'y impliquer, le second étant froidement lucide sur son présent, les démarches étant donc pour moi différentes...
Federico a écrit :
pak a écrit : La vision de l'auteur du futur est pessimiste, on parle parfois de dystopie, terme un peu barbare qu'on peut opposer à l'utopie, et on pense forcément à George Orwell même si ce dernier délivre un message plus politique alors que celui du cinéaste est plus philosophique et poétique. Cela ne l'empêche pas de frôler le ridicule comme la scène d'exécution de prisonniers politiques au bord d'une piscine, où l'on voit des suppliciés fusillés dans le dos, tombant alors dans l'eau dans laquelle des nageuses synchronisées plongent pour achever au couteau les éventuels survivants... Ou encore les questions idiotes posées par l'ordinateur lors de l'interrogatoire de Lemmy Caution.
Il peut s'agir d'une allusion à la piscine, terme utilisé pour désigner les services secrets français (renseignements et contre-espionnage). A l'époque le SDECE (aujourd'hui la DGSE).
C'est possible, mais ça n'enlève rien au ridicule de la scène (têtu moi ? ).


Je vais bientôt démolir Truffaut, va falloir que je m'achète un casque... Je déconne ! (encore que... )
Le cinéma : "Il est probable que cette marotte disparaîtra dans les prochaines années."

Extrait d'un article paru dans The Independent (1910)

http://www.notrecinema.com/
Federico
Producteur
Messages : 9462
Inscription : 9 mai 09, 12:14
Localisation : Comme Mary Henry : au fond du lac

Re: Le cinéma français des années 60 (1960-69)

Message par Federico »

pak a écrit : Je m'attendais à me faire laminer en égratignant le mythe Godard, mais ça se passe finalement assez bien pour l'instant... :mrgreen:
Je ne me connais aucun mythe et encore moins de culte (sauf sur la commode :lol: ) donc no problemo. Et il y a un paquet de films de Godard qui m'ennuient aussi mais pas celui-ci même si je comprends tout à fait qu'il barbe ou indiffère.
pak a écrit : Je ne vois pas ce lien, entre Godard et Blier, le premier voulant donner dans le futuriste sans vraiment s'y impliquer, le second étant froidement lucide sur son présent, les démarches étant donc pour moi différentes...
Le futur clinique que montre Alphaville ressemble à s'y méprendre au présent des années 80 et, j'irai même plus loin, à celui des années 2000. Alors qu'au moment de son tournage, les différentes représentations artistiques montraient souvent un univers coloré et optimiste.
pak a écrit :
Federico a écrit : Il peut s'agir d'une allusion à la piscine, terme utilisé pour désigner les services secrets français (renseignements et contre-espionnage). A l'époque le SDECE (aujourd'hui la DGSE).
C'est possible, mais ça n'enlève rien au ridicule de la scène (têtu moi ? ).
J'y vois plutôt en forme de burlesque noir.
The difference between life and the movies is that a script has to make sense, and life doesn't.
Joseph L. Mankiewicz
pak
Electro
Messages : 990
Inscription : 23 mars 08, 00:25
Localisation : Dans une salle, ou sur mon canapé, à mater un film.
Contact :

Re: Le cinéma français des années 60 (1960-69)

Message par pak »

Federico a écrit : Je ne me connais aucun mythe et encore moins de culte (sauf sur la commode :lol: ) donc no problemo. Et il y a un paquet de films de Godard qui m'ennuient aussi mais pas celui-ci même si je comprends tout à fait qu'il barbe ou indiffère.
On ne peut pas lui retirer ça, à Godard, c'est qu'il provoque la réflexion et est suffisamment flou pour ouvrir le débat. On voit dans ses films autant de raisons de le vénérer (ce qui n'est pas mon cas, même pour ses films les plus connus) ou le démolir (ce qui n'est pas mon cas non plus, car je ne comprend souvent rien à ses films, gna... ). Au mieux, il me laisse perplexe. En même temps, je n'ai vu de lui qu'une dizaine de films, car j'avoue me faire violence pour voir ses films. Chat échaudé...
Le cinéma : "Il est probable que cette marotte disparaîtra dans les prochaines années."

Extrait d'un article paru dans The Independent (1910)

http://www.notrecinema.com/
Avatar de l’utilisateur
Jeremy Fox
Shérif adjoint
Messages : 99488
Inscription : 12 avr. 03, 22:22
Localisation : Contrebandier à Moonfleet

Re: Le cinéma français des années 60 (1960-69)

Message par Jeremy Fox »

pak a écrit :
Federico a écrit : Je ne me connais aucun mythe et encore moins de culte (sauf sur la commode :lol: ) donc no problemo. Et il y a un paquet de films de Godard qui m'ennuient aussi mais pas celui-ci même si je comprends tout à fait qu'il barbe ou indiffère.
On ne peut pas lui retirer ça, à Godard, c'est qu'il provoque la réflexion et est suffisamment flou pour ouvrir le débat. On voit dans ses films autant de raisons de le vénérer (ce qui n'est pas mon cas, même pour ses films les plus connus) ou le démolir (ce qui n'est pas mon cas non plus, car je ne comprend souvent rien à ses films, gna... ). Au mieux, il me laisse perplexe. En même temps, je n'ai vu de lui qu'une dizaine de films, car j'avoue me faire violence pour voir ses films. Chat échaudé...

J'étais dans le même cas que toi pas plus tard que l'année dernière en beaucoup plus sévère encore ; j'en étais presque à le mépriser. Une nouvelle tentative avec plusieurs de ses films à la suite il y a à peine quelques mois l'a fait entrer dans le panthéon de mes cinéastes français préférés et Alphaville fit partie de ces très bonnes surprises même si je comprends parfaitement qu'on puisse le rejeter en bloc. Par contre, malgré un nouvel essai, il n'y a pas eu de revirement pour Truffaut ; si j'aime toujours beaucoup de lui 3 ou 4 films, le reste m'indiffère et m'ennuie encore :(

Sinon, pas besoin de te protéger puisque tu n'es pas bêtement provocateur dans tes propos argumentés qui expriment au contraire parfaitement bien tes ressentis et tes avis ; aucun culte ni aucune secte d'aucune sorte, aucun film ni cinéaste innattaquable quoique certains aient pu le penser : on peut ne pas apprécier n'importe quel film et ce n'est pas pour cette raison qu'on te tombera dessus à bras raccourcis ; il suffit de pas méchamment t'acharner en étant certain de détenir la vérité et tout peut passer
Spoiler (cliquez pour afficher)
(sauf à dire du mal de Minnelli, Boetticher ou Delmer Daves :mrgreen: )
:wink:
NotBillyTheKid
Tout le monde en parle
Messages : 5704
Inscription : 15 avr. 06, 08:56
Localisation : fait le larron
Contact :

Re: Le cinéma français des années 60 (1960-69)

Message par NotBillyTheKid »

Bon. Alphaville étant, après Pierrot le fou, mon Godard préféré, et, accessoirement, un de mes 10 films préférés tout court, je m'arrache les cheveux en lisant ça. Le topic étant présenté - c'est tout à son honneur - comme totalement subjectif, je sais désormais qu'il est incompatible avec ma propre subjectivité et que je ne vais pas y retourner :mrgreen:
(mais quand même !! passer à côté du film comme ça, chapeau bas !)
notamment ce paragraphe qui montre que tu n'as pas du tout voulu comprendre le projet :
Le film est une sorte de polar futuriste. Qui n'est ni vraiment polar : l'auteur semble se moquer plus du genre que lui rendre hommage tellement il ironise sur ses figures types ; ni vraiment futuriste car Godard ne fait aucun effort pour apporter un visuel intemporel, se contentant d'utiliser quelques intérieurs neufs de l'époque comme l'alors récente Maison de la radio, et pas un instant on se sent en dehors des années 1960 (en fait, il n'a aucune imagination concernant le futur, exploitant l'architecture parisienne moderne de l'époque comme la tour Esso de la Défense ou un bâtiment EDF dans le 12ème rempli d'ordinateurs par exemple).
Car là est justement tout l'interet de son traitement de la sci-fi. Tout l'interet de faire du présent le futur et vice versa... mais bon.. on va commencer à polémiquer si je m'y mets...
"Je ne veux pas rester dans l'histoire comme le gars qui a détruit l'Univers"
Dude, where's my car
Tears in my beers
Nomorereasons
Dédé du Pacifique
Messages : 5150
Inscription : 29 mai 07, 20:19

Re: Le cinéma français des années 60 (1960-69)

Message par Nomorereasons »

NotBillyTheKid a écrit :Bon. Alphaville étant, après Pierrot le fou, mon Godard préféré, et, accessoirement, un de mes 10 films préférés tout court, je m'arrache les cheveux en lisant ça. Le topic étant présenté - c'est tout à son honneur - comme totalement subjectif, je sais désormais qu'il est incompatible avec ma propre subjectivité et que je ne vais pas y retourner :mrgreen:
...
Allons! Comme si aimer Godard allait de soi. Je souscris au post de Jeremy Fox et vais peu ou prou raconter la même chose en essayant de le faire de façon au minimum subjective. :oops: :mrgreen:

J'avais acheté six ou sept de ses films des années 60 à bas prix en dvd il y a de ça 5 ou 6 ans, je ne te dis pas la crise d'urticaire quand je les ai enchaînés. Il n'y en avait pas un pour racheter l'autre, même "A bout de souffle" je trouvais ça intolérable. Le pire c'était l'attitude des happy few, qui gavaient leur commentaire de sociologie marxiste ou de glose cinéphilique à grands renforts de mots-valises, voire pire, ceux qui prétendaient simplifier les choses en déclarant tranquilles comme Baptiste que "a bout de souffle" au fond c'est du polar, "Une femme est une femme" au fond c'est de la comédie musicale, "alphaville" au fond c'est de la science-fiction, etc. Comme si je disais que le petit salé au lentilles, au fond c'est de la chimie moléculaire.

J'allais gentiment revendre ou plutôt donner ces galettes insondables lorsque je tombai sur une critique d'un journaliste qui me semble (presque) honnête, Jean-Louis Bory. Je le rejoignais sur beaucoup de choses et je comprenais pourquoi certains de ses avis pouvaient différer de mes opinions; or Bory s'est attaché à décrire quelques films de Godard pour en faire l'éloge: cela seul me décida à revoir attentivement ces films.

Tout ça pour dire que pour Godard, il m'a fallu un passeur, une personne en qui j'eusse confiance plus qu'une bataille d'arguments.
Ce qui est sûr c'est que l'initiation peut en valoir la peine, je suis devenu fan de Pierrot le Fou.
Maintenant on n'est pas obligé de tout aimer et je me méfie des gens qui aiment tout. Et donc merci Pak pour ta subjectivité et ce beau topic!
pak
Electro
Messages : 990
Inscription : 23 mars 08, 00:25
Localisation : Dans une salle, ou sur mon canapé, à mater un film.
Contact :

Re: Le cinéma français des années 60 (1960-69)

Message par pak »

NotBillyTheKid a écrit :Bon. Alphaville étant, après Pierrot le fou, mon Godard préféré, et, accessoirement, un de mes 10 films préférés tout court, je m'arrache les cheveux en lisant ça. Le topic étant présenté - c'est tout à son honneur - comme totalement subjectif, je sais désormais qu'il est incompatible avec ma propre subjectivité et que je ne vais pas y retourner :mrgreen:
(mais quand même !! passer à côté du film comme ça, chapeau bas !)
notamment ce paragraphe qui montre que tu n'as pas du tout voulu comprendre le projet :
(...)
Car là est justement tout l'interet de son traitement de la sci-fi. Tout l'interet de faire du présent le futur et vice versa... mais bon.. on va commencer à polémiquer si je m'y mets...
Je me disais bien aussi que les réactions étaient assez sages... :)
Il n'y a pas de volonté de ne pas vouloir comprendre le projet de ma part. Je suis tout simplement resté froid au propos de Godard. Que je sois passé à côté de quelque chose, ça n'est pas impossible, mais quand on se retrouve à finir de regarder un film avec un intérêt poli, c'est que manifestement, la perception du film n'est pas très positive. Je tenais à ouvrir ce topic avec un film concernant la Nouvelle Vague, car c'est l'évènement cinématographique marquant de cette décennie, même si je ne suis pas très client... De toutes manières, il n'y a pas matière à polémiquer. On n'ose généralement pas avouer son peu d'attachement au cinéma de Godard, ou que l'on s'ennuie devant Bergman car généralement, ça provoque au mieux ensuite des regards désolés (le pôvre, il comprend rien). Je comprends ton point de vue, car je fais moi aussi des bons quand je vénère un film mais que je lise ou que j'entende à son sujet des avis pas très flatteurs. Ceci dit, c'est un topic années 60, pas sur Godard, alors j'espère que certains films évoqués ici serviront de passerelles pour échanger sereinement nos points de vue.

Jeremy Fox a écrit :
Sinon, pas besoin de te protéger puisque tu n'es pas bêtement provocateur dans tes propos argumentés qui expriment au contraire parfaitement bien tes ressentis et tes avis ; aucun culte ni aucune secte d'aucune sorte, aucun film ni cinéaste innattaquable quoique certains aient pu le penser : on peut ne pas apprécier n'importe quel film et ce n'est pas pour cette raison qu'on te tombera dessus à bras raccourcis ; il suffit de pas méchamment t'acharner en étant certain de détenir la vérité et tout peut passer
Spoiler (cliquez pour afficher)
(sauf à dire du mal de Minnelli, Boetticher ou Delmer Daves :mrgreen: )
:wink:
Merci. On a chacun nos chouchous il est vrai. Je sais bien qu'avec certains réalisateurs et auteurs, on marche sur des œufs. Je suis peu partisan dans mes propos généralement, essayant d'éviter de passionner les débats car ça peut vite partir en cacahuète (mais le premier qui bave sur Leone, Aldrich ou Siegel, je lui arrache la t... heu... :fiou: )

yaplusdsaisons a écrit :
Maintenant on n'est pas obligé de tout aimer et je me méfie des gens qui aiment tout. Et donc merci Pak pour ta subjectivité et ce beau topic!
Merci. Je reviendrai sûrement vers Godard dans quelques temps, car j'ai quelques films en réserve à voir. Encore que j'ai vu récemment La chinoise, et heu... bon, je ne vais pas enfoncer le clou, ça pourrait passer pour de l'acharnement (j'ai déjà rédigé une bafouille, je la garde en réserve).


En tous cas merci à tous pour vos interventions et avis éclairés. Je me doutais que Godard n'allait pas laisser indifférent (c'est rarement le cas avec lui), mais il n'y a pas volonté de provocation de ma part et vous l'avez tous bien compris : je crois que j'ai bien fait de poser mes valises dans ce forum. :D
Le cinéma : "Il est probable que cette marotte disparaîtra dans les prochaines années."

Extrait d'un article paru dans The Independent (1910)

http://www.notrecinema.com/
pak
Electro
Messages : 990
Inscription : 23 mars 08, 00:25
Localisation : Dans une salle, ou sur mon canapé, à mater un film.
Contact :

Du mou dans la gâchette (1966)

Message par pak »

Bon allez, détendons l'atmosphère avec un bon vieux nanar comme il en sortait une pleine brouette dans nos salles (mais bon, ça, quelque soit la décennie abordée, on y aura droit à cette brouette, c'est pour ça aussi qu'on l'aime notre cinéma, non ? Comment ça... ? ). Donc dans un registre à l'exact opposé du précédent, après la politique de l'auteur, voici la politique du franchouillard.

2. Du mou dans la gâchette (ou Deux tueurs) de Louis Grospierre (1966) :

Avec : Bernard Blier, Jean Lefebvre, Francis Blanche, Corinne Marchand, Michel Serrault... Scénario : Louis Grospierre et René Havard - Dialogues de René Havard - Musique : Claude Bolling - Genre : comédie - Production franco-italienne - Date de sortie : 30/08/1967
Image Image
Mon avis :

Deux tueurs à gages provinciaux et calamiteux de maladresse montent à Paris pour se mettre au service d'un gros caïd du crime.

Dans les années 1960, la comédie/parodie policière/d'espionnage cartonnait dans les salles. Le maitre du genre était sans contestation Georges Lautner, avec sa série (inégale) Le Monocle (Le Monocle noir - 1961, L'œil du Monocle - 1962, Le Monocle rit jaune - 1964), mais surtout Les tontons flingueurs (1963), Les barbouzes (1964), Ne nous fâchons pas (1965)... Louis Grospierre, réalisateur ayant surtout œuvré pour la télévision (et vu ce film, on ne va pas se plaindre), inscrit son film dans cette tendance, récupérant d'ailleurs une partie du casting du culte Les tontons flingueurs : Bernard Blier, Jean Lefebvre et Francis Blanche. Ces 3 acteurs n'étant plus très regardants sur la qualité de leurs films à l'époque (et ça ne va pas s'arranger par la suite, notamment pour Jean Lefebvre qui va aligner de plus en plus de navets terribles à mesure que sa fin de carrière cinématographique approchera), malgré leur immense talent comique, leur présence dans un long-métrage n'est en aucun cas un gage de qualité.

Pourtant il y avait du potentiel sur le papier. Bien entendu, Blier et Lefebvre en tueurs à gages, ça ne peut que tourner à la farce, d'autant que ceux-ci sont assez atypiques car très maladroits et accomplissant leurs tâches sans le faire exprès, ne touchant pas leurs cibles avec leurs armes même à bout-portant, et ne se déplaçant qu'avec une Cadillac décapotable tirant une caravane dans laquelle les deux compères vivent. Seulement, si on sourit de temps en temps, c'est surtout grâce à l'abattage des comédiens. Louis Grospierre n'a pas le talent de Georges Lautner derrière la caméra, et le dialoguiste René Havard n'arrive pas à la cheville d'un Michel Audiard rompu au genre. Le thème du gaffeur maladroit qui réussi malgré lui ses missions est bien mieux exploité par Blake Edwards et Peter Sellers pour le personnage de l'inspecteur Clouseau dans la série de films La panthère rose ou par Pierre Richard dans le diptyque Le grand blond d'Yves Robert.

L'unique point remarquable de cette comédie entièrement tournée en extérieurs est son décor urbain qui semble fasciner le réalisateur, notamment une banlieue en pleine mutation avec ses grands ensembles en construction, futures cités qui pour certaines s'enflammeront une trentaine d'années plus tard. Malheureusement, le réalisateur, malgré quelques plans travaillés (à moins que, à l'instar de son duo de tueurs, ce soit un pur hasard), profite mal de ces décors presque futuristes pour l'époque, et se contente d'illustrer platement sa parodie de film noir. Bertrand Blier, avec les mêmes éléments, fera bien mieux en 1979 avec Buffet froid, exploitant au mieux la froideur et l'inquiétude que génèrent ces blocs et ces tours sans âme.

Du mou dans la gâchette, mais pas que, car il y en a aussi dans la réalisation, le montage, l'imagination et le budget manifestement très serré. Reste la sympathie que dégagent parfois certains nanars sans prétention, et c'est (un peu) le cas ici...

Étoiles : * . Note : 7/20.
Autour du film :

1. Une partie importante du film fut tournée à Créteil (94, préfecture du Val-de-Marne), et plus précisément dans le quartier du Mont-Mesly, alors en pleine construction. Petite ville champêtre, Créteil a connu une forte urbanisation au lendemain de la seconde mondiale, car sa population augmenta fortement à cause de l'exode rurale (en 1946, on compte environ 11 000 habitants, 20 ans plus tard, plus de 40 000). Le site du Mont-Mesly fut choisi pour implanter 6 400 logements répartis en 148 immeubles sur 88,9 hectares sous la direction de l'architecte Charles-Gustave Stoskopf. Les travaux s'achèveront en 1968, le tournage du film ayant donc eu lieu après le gros-œuvre. Pour l'anecdote personnelle, mes parents s'y sont installé en 1974, j'y ai vécu 20 ans dont toute mon enfance, aussi ces vieux films tournés dans cet environnement que je connais comme ma poche (je pourrai aussi citer entre autres Les aventuriers de Robert Enrico, 1966 ou Série noire d'Alain Corneau, 1979) ont une résonance particulière pour moi...

2. Une météorite, Corinne Marchand : de son vrai nom Denise (Marie Renée) Marchand, elle est née à Paris le 4 décembre 1937. Très tôt elle se destine à la danse, et débute comme chanteuse et meneuse de revue. Mais parallèlement, elle suit des cours d'art dramatique et y prend goût. Elle débute dans de petits rôles dans Cadet Rousselle (André Hunebelle) et Napoléon (Sacha Guitry) en 1954. Jacques Demy la repère et exploite son expérience du cabaret dans Lola, mais c'est Agnès Varda qui lui apporte la popularité en lui proposant le rôle-titre de Cléo de 5 à 7 en 1962. Hélas, l'actrice enchaine ensuite des films plus ou moins anodins (on la croise même dans un western spaghetti, Arizona Colt de Michele Lupo, 1966). Elle sort aussi plusieurs disques durant les années 1960. Elle obtient un regain de notoriété cinématographique grâce à René Clément et Le passager de la pluie (1969) et à Jacques Deray et Borsalino (1970). Mais ses apparitions au cinéma vont s'espacer de plus en plus. Elle apparaitra dans Coup de tête (Jean-Jacques Annaud, 1979), Attention bandits ! (Claude Lelouch, 1985) et Le parfum d'Yvonne (Patrice Leconte, 1994). Son dernier film devait être Les palmes de M. Schutz en 1997 (Claude Pinoteau), mais Lucile Hadzihalilovic réussit à la convaincre d'accepter le rôle de la directrice d'établissement dans son étrange film Innocence en 2004. Une trentaine de films en 50 ans, rarement pour un premier rôle, dont la carrière restera marquée par sa prestation de Cléo dans le film d'Agnès Varda.
Image
3. Le film a eu une carrière modeste, totalisant 551 013 entrées.

Image Image
Image Image
Dernière modification par pak le 28 mai 11, 16:58, modifié 3 fois.
Le cinéma : "Il est probable que cette marotte disparaîtra dans les prochaines années."

Extrait d'un article paru dans The Independent (1910)

http://www.notrecinema.com/
Federico
Producteur
Messages : 9462
Inscription : 9 mai 09, 12:14
Localisation : Comme Mary Henry : au fond du lac

Re: Le cinéma français des années 60 (1960-69)

Message par Federico »

pak a écrit :Bon allez, détendons l'atmosphère
Elle n'était pas si tendue que ça... :wink:
pak a écrit : 2. Du mou dans la gâchette (ou Deux tueurs) de Louis Grospierre (1966)
A ranger dans les navets sympatoches, sans plus. Même si je fais aussi partie des amateurs de nanars et de ceux qui prennent toujours un plaisir gourmand à n'importe quelle apparition de Blier père, personnage assez hors-norme et certainement beaucoup moins drôle (ou plus inquiétant) à la ville qu'à l'écran. Quand je le vois dans des petits films de ce type, je ne peux jamais m'empêcher d'imaginer la réaction du "Patron" (Jouvet) si il avait pu voir où se compromit parfois un de ses plus brillants élèves.
pak a écrit : L'unique point remarquable de cette comédie entièrement tournée en extérieurs est son décor urbain qui semble fasciner le réalisateur, notamment une banlieue en pleine mutation avec ses grands ensembles en construction, futures cités qui pour certaines s'enflammeront une trentaine d'années plus tard.
Exact et le bétonnage des banlieues sous les Trente (pas) Glorieuses est très présent dans le cinéma populaire dès la fin des années 50 avec, par exemple, Archimède le clochard de Gilles Grangier (1958). En faisant abstraction de la qualité intrinsèque de la plupart de ces films, ils sont pour cela des témoignages sociologiques passionnants. Un des plus parlants est Le Grand Bazar de Claude Zidi avec les Charlots (1973). En plus d'un souvenir de très jeune spectateur de cinéma de quartier, je le revois toujours avec le même plaisir.
The difference between life and the movies is that a script has to make sense, and life doesn't.
Joseph L. Mankiewicz
Répondre