Le festival de Pordenone rendait cette année hommage à William S. Hart dans une petite sélection, reprise elle-même partiellement par la Fondation Pathé en 3 séances (pour 5 films).
The Gunfighter (William S.Hart - 1917)
Un bandit qui se vante de n'avoir assassiner que des hors-la-loi rencontre une jeune femme pure qui lui reproche son manque d'humanisme.
De ce film de 50 minutes, il ne reste qu'une moitié ; ce qui est fort dommage étant donné sa qualité.
Même si la formule du "mauvais garçon se repentant au contact d'un ange rédempteur" n'est pas très originale, l'interprétation de William S Hart et sa mise en scène suffisent à en faire une œuvre estimable.
La première partie, légère et décontractée, laisse place à une approche plus tourmentée et sombre jusqu'à une conclusion pessimiste. Peut-être est-ce à cause de ses parties manquantes - résumées par des cartons - mais la transition entre les deux tonalités est un assez brusque et le basculement du héros vers la culpabilité est un peu précipitée.
Malgré cet aspect, la réalisation est fluide, rythmée, toujours vivante par la véracité de son univers : la petite ville poussiéreuse, les bandits grandes gueules, les baraquements sommaires etc... De plus William S Hart est une nouvelle fois impeccable dans un rôle qui multiplie les palettes d'émotions. La photographie comme son sens du cadre viennent souligner les troubles de sa psychologie avec de très belles idées : incrustations des spectres de ses victimes, nuit orageuse, profondeur de champ, paysages à contre-jour etc...
The aryan (William S. Hart et peut-être Reginald Barker et Clifford Smith - 1916)
Un chercheur d'or est manipulé par une femme vénale qui se fait passer pour chaste et attentionnée. Elle fait en sorte de le saouler et lui vole son argent. A son réveil, il découvre en plus qu'on ne lui a pas transmis une lettre de médecin de sa mère annonçant qu'elle vivait ses dernières heures. Arrivée trop tard pour être à ses côté une dernière fois, il devient misanthrope.
Encore une réussite majeure à rajouter à la carrière du comédie-cinéaste qui synthétise toutes les qualités de ses films : un scénario bien construit qui repose sur ses personnages ; un mélange de dureté et d'humanisme, de violence et de tendresse ; une interprétation sobre et subtile ; une reconstitution juste ; une mise en scène sophistiquée bien que discrète.
Construit en 2 actes principaux (l'arnaque signant son déchéance et son rachat), ses 45 minutes sont pleinement exploitées pour rendre crédible les différentes évolutions de William S. Hart et faire vivre plusieurs seconds rôles.
Encore plus que dans le précédent, le contexte historique est exploitée judicieusement via des émigrants englués dans le désert qui cherche le salut auprès de Hart devenu le chef d'un gang. Le choix des décors est remarquable avec ces bâtisses construits au sommet de dunes, surplombant le désert et renforçant le rang des deux personnages principaux. La partenaire Bessie Love apporte un contre-point parfait par une présence lumineuse sans être aussi virginale et idéalisée que chez les Griffith de cette période.
Ce qui est brillant, c'est que malgré ses 100 ans, le film semble éviter nombre de clichés du
western à l'image d'une conclusion qui refuse le spectaculaire et l'ultime morceau de bravoure pour choisir un apaisement presque aussi dépouillé que lyrique ; le tout avec une tranquillité et une assurance à hauteur d'hommes.
C'est qu'en rentrant que j'ai tilté que le titre français est
Pour sauver sa race que Louis Delluc cite en boucles dans ses articles.
Le film revient de loin et sa survit est encore bien précaire : à part quelques fragments, il était considéré comme perdu avant d'être retrouvé très récemment dans une copie issue d'Argentine qui avait écarté les éléments les moins tendres avec les Mexicains. Elle est en plus en 16mm, bien rayée et zoomée, coupant le haut et le bas de l'image. Faudra s'en contenter et on s'en contente largement.