Anatole Litvak (1902-1974)

Rubrique consacrée au cinéma et aux films tournés avant 1980.

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Alfred Kralik
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Anatole Litvak (1902-1974)

Message par Alfred Kralik »

ANASTASIA d'Anatole Litvak (1956)
J'ai un faible pour le CinemaScope couleurs de ces années-là : il m'est arrivé de ressentir un plaisir coupable à la re-vision de chefs d'oeuvre dégoulinants du genre "La colline de l'adieu" ou, même, de "L'auberge du sixième bonheur" !
Ici, l'histoire de Miss Anderson, une américaine qui réussit à se faire passer pour Anastasia, fille du Tsar Nicolas II, prétendûment réchappée du massacre de la famille impériale à Ekaterinenburg.
Histoire qui défraya la chronique et partagea les lecteurs de la presse people de l'époque en deux camps : ceux qui croyaient et les incrédules.
Cette affaire a donné récemment lieu à un film d'animation de bonne facture qui a le mérite de pousser un peu plus loin "l'enquête" sur le sujet.
Chez Litvak, bon "faiseur" (surtout en début de carrière, notamment avec ses films tournés en France dans les années 30) l'affaire est prétexte à démontrer un savoir-exploiter l'écran large et le Technicolor, et surtout à une mise en valeur de la star Ingrid Bergman.
Laquelle se livre à un numéro insensé : surjouant, on s'attend de sa part à ce qu'elle nous hurle "je veux un Oscar ! je veux un Oscar !".
Le plus drôle étant que l'Oscar, elle l'obtiendra pour cette interprétation de la soi-disant archiduchesse (dont les chaussettes sont sèches, d'ailleurs).
Notre Ingrid, votre Bergman, est à cent lieues évidemment de ses compositions chez Hitchcock ou chez Rosselini qui surent admirablement la diriger.
Quant à son partenaire, Yul Brynner, pour lequel je n'ai jamais eu de véritable intérêt, il est aussi crédible en général russe qu'il le fut en Tarass Bulba .
Litvak filme tout ceci sans une once de véritable conviction, le pire étant que le film finit en eau de boudin, le scénariste, épuisé sans doute, mettant un point final à son histoire, voyant sans doute que, bon, il se fait tard "va falloir que j'y aille, hein, salut !".
Bref, un nanar de chez nanar.
Mais, bien sûr, indispensable. :wink:
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Anatole Litvak (1902-1974)

Message par Alligator »

Un acte d'amour (Anatole Litvak, 1953) :
8/10
_______________

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Mon premier Litvak et une belle surprise. Une réalisation pas loin d'être impeccable. Et la version un peu trop médiocre que j'ai vue n'altérera en rien ma joie. Je ne sais si le terme est adéquat pour un mélodrame aussi poignant. La direction d'acteurs n'est pas aussi exceptionnelle que la mise en image mais comporte quelques belles séquences. Kirk Douglas en impose comme à son habitude. Il offre là encore une excellente interprétation. Le jeune Reggiani dans un tout petit rôle n'est pas mal non plus le saligaud. La prestation de Dany Robin, je ne l'évoque qu'à peine, la pauvre soutient un personnage effacé, peu vaillant et hostile au monde qui l'entoure... c'est justement tout le sens du film et n'a par conséquent qu'une présence en demi-teinte, difficile finalement pour moi de la jauger, je ne la connais pas suffisamment. J'ai bien aimé celle de Fernand Ledoux qui porte bien son nom en papy tranquille, gentil, du sur-mesure, une trogne bienveillante.

Au delà de ce que les acteurs amènent à travers leurs personnages, c'est la thématique explorée par Litvak qui m'a particulièrement intéréssé. Le poids et la souffrance d'être femme dans ce Paris tout juste libéré, bref, toujours aux prises à une guerre qui n'en finit pas de durer, l'oppression des jugements moraux qui lient ou délient les amours aussi facilement que cruellement dans ce contexte cahotique, ces écorchures que la guerre ne montre pas directement mais qui font aussi mal que celles du front. "Si nous nous étions connus avant la guerre" ne cessent de se dire ces amoureux. Plus qu'un acte d'amour le film nous raconte une tentative de deuil. Le deuil d'un amour entre deux êtres, le deuil d'une guerre qui a tué une époque, des moeurs, des illusions, des rêves de petits garçons ou de jeunes filles. C'est un moment émouvant certes mais il s'en faut de peu pour que l'histoire des mentalités s'engouffre dans ce mélodrame. Litvak reste en marge de l'évènement pour mieux nous faire sentir les affres souterrains, les malédictions inexorables. C'est une belle oeuvre, romanesque sans être pompeuse, mélodramatique sans être larmoyante, bien filmée sans être trop voyante.
Nestor Almendros
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Message par Nestor Almendros »

Ce que j'en disais hier (en moins bien :oops: ) dans le topic "top Kirk Douglas":

UN ACTE D'AMOUR d'Anatole Litvak (Cinéma de Minuit)

Ma foi, c'est une très bonne surprise. Je l'ai surtout vu pour Kirk Douglas, sans trop savoir de quoi parlait le film, et j'ai passé un très très bon moment. C'est un joli mélodrame qui se déroule à Paris à la Libération. L'aspect romantique du film m'a bien évidemment conquis (relation habituelle mais bien tournée), et le sort qui s'acharne sur le couple est particulièrement prenant.
De plus, le film est agrémenté d'une peinture sociale de cette époque troublée, certains aspects sont traités ici avec pertinence. Notamment le statut du militaire avec la population libérée, à la fois conquérant et sauveur, et donc avec tout l'aspect de "soumission", de dévouement, et de pouvoir que cela entraine (cadeaux, nourriture gratuite, sexe en contrepartie, etc.). Je pense, entre autres, à la condition des femmes seules à l'époque, et le regard de la population vis à vis de celles qui fricotent avec les soldats US. Un parallèle pertinent, donc, avec ces femmes dont on rasait les cheveux à la libération parce qu'elles avaient entretenu des laisons avec les soldats allemands. Une scène en particulier rappelle cela, avec Serge Reggiani dans un accès de fureur.
Petit bémol, histoire de...: dommage que la fin soit si vite expédiée. J'aurais certainement voulu que cela se termine mieux. :oops:

Je ne connaissais pas la charmante Dany Robin (ou en tout cas je ne l'avais jamais remarqué auparavant). A noter la présence en quasi figuration (elle n'a que 2-3 répliques) de Brigitte Bardot. Il y a aussi Marthe Mercadier, pour ceux qui connaissent. Son heure de gloire artistique?
bruce randylan
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Message par bruce randylan »

Bah, entre un début sublime et une fin trés joli, j'avoue m'être un peu ennuyé. Heureusement la qualité d'interprêtation généralle est trés élevé.
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Ann Harding
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Message par Ann Harding »

Personnellement, j'ai trouvé le film complètement râté. Surtout à cause du scénario qui n'est pas plausible une seule minute. Durant les derniers mois de la guerre, une amourette entre un soldat américain et une française orpheline, franchement, il n'y a pas de quoi affoler la foule....
Les gens étaient trop occupés à trouver de quoi se nourrir et à pratiquer l'épuration sur les femmes accusées d'avoir eu des relations avec les allemands pour regarder de travers une jeune fille en ménage avec un américain.....
Selon Jacques Siclier, le roman original se passait en Italie où effectivement cette histoire était nettement plus plausible. (voir des films nettement plus dérangeant comme La Pelle de Cavani)
Le personnage de Serge Reggiani, en gardien des bonnes moeurs sadique était au bord du ridicule.
Un film qui a mal vieilli. :|
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Phnom&Penh
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Anatole Litvak (1902-1974)

Message par Phnom&Penh »

Voici des liens vers les topics par films du forum:

All this, and Heaven Too, L'Etrangère (1940)


La nuit des généraux (1966)

Anatole Litvak (1902 – 1974)
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Né à Kiev en 1902, Anatole Litvak termine en 1922 des études de philosophie à Leningrad et début ensuite au théâtre comme acteur, décorateur puis metteur en scène. Il est engagé par un studio de cinéma en 1923 et réalise deux courts-métrages avant de quitter l’URSS en 1925 pour s’installer en Allemagne.
Il réalise son premier long-métrage, Dolly macht karriere pour la UFA en 1929. C’est en France qu’il connaîtra son premier grand succès, Cœur de Lilas, en 1932, avec Jean Gabin. Il quitte l’Allemagne pour la France et connaîtra plusieurs autres succès : Cette vieille canaille (1933) avec Harry Baur, L’Equipage (1935) d’après le très grand succès en librairie de Joseph Kessel et Mayerling (1936) avec Charles Boyer et Danielle Darrieux.

Il quitte ensuite la France pour les Etats-Unis et réalise The Amazing Dr Clitterhouse (1938) avec Edward G. Robinson. Il tourne L’Etrangère (1941) avec Bette Davis et Charles Boyer et City for Conquest (1940) avec James Cagney et s’engage ensuite fortement dans l’effort de guerre. Avec Franck Capra, il réalise plusieurs films de la série Why we fight et, du fait de sa connaissance de plusieurs langues européennes, il dirige la division chargée de la documentation photographique pour la préparation du débarquement de Normandie.

Après la guerre, il réalise The long Night (1947) avec Henry Fonda, Sorry, wrong number (1948) avec Barbara Stanwyck et Burt Lancaster, puis The Snake Pit (1948) avec Olivia de Havilland, qui sera nominé aux Oscars et Decision before Dawn (1951) avec Oskar Werner qui sera nominé aux Academy Awards.

Il retourne ensuite tourner en France et réalise Anastasia (1956) avec Ingrid Bergman et Yul Brynner, qui sera un important succès commercial. Aimez-vous Brahms ? (1961), d’après Françoise Sagan, avec Ingrid Bergman, Yves Montand et Anthony Perkins sera nominé à Cannes, sera un succès en France, mais pas aux USA où le film, d’après Ingrid Bergman, n’a pas été compris :

« Vous partagez la vie d’un homme avec qui vous n’êtes pas mariée, et vous prenez un amant assez jeune pour être votre fils. Quelle honte ! Et ensuite, vous retournez avec ce type avec qui vous vivez, qui vous a trompée pendant toutes ces années, et qui est tout prêt à recommencer. Mais qu’est-ce que c’est que ce genre de film ? »
Voilà comment réagissaient les journalistes de San Francisco réputés pour leur cynisme et leur dureté ! En fait, ils reflétaient l’opinion américaine, et aux États-Unis, le film n’a pas connu le moindre succès.


Il réalise ensuite Le couteau dans la plaie (1962) avec Anthony Perkins et Sophia Loren, que je trouve très intéressant, La nuit des généraux (1967) que j’ai oublié et La dame dans l’auto avec des lunettes et un fusil (1970) que je rêve de voir parce que le livre est génial et que Stéphane Audran joue le rôle-titre.
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Sinon, que dire du cinéma d’Anatole Litvak ? Il est souvent dénigré, voire méprisé, comme si son travail était tout juste digne d’un bon artisan.
En réalité, je trouve que si la mise en scène n’est certes pas d’un grand génie, elle est bien assez sérieuse pour mettre en valeur, si on excepte quelques films vraiment ratés, un cinéma qui reflète bien la personnalité de son réalisateur : international, élégant voire raffiné et d’une grande curiosité. Litvak est aussi un amateur de littérature qui sait travailler sur de bons scénarios. Les films conservent bien souvent, même pour les meilleurs, un côté un peu bancal. Mais Anatole Litvak avait la grande qualité de savoir bien s’entourer dans son travail et son cinéma permet tour à tour d’apprécier tranquillement, comme si les défauts de ses films permettaient d’en apprécier encore mieux les qualités, de très bons acteurs, une belle histoire bien scénarisée, une belle musique de film ou un travail photographique de très haut niveau.
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Re: Anatole Litvak (1902-1974)

Message par Lord Henry »

Phnom&Penh a écrit : La dame dans l’auto avec des lunettes et un fusil (1970) que je rêve de voir parce que le livre est génial et que Stéphane Audran joue le rôle-titre.
Mon souvenir du film est fort lointain, néanmoins il me semble bien que Samantha Eggar tenait le rôle principal; Stéphane Audran y figurant plutôt comme un second rôle.

Quoi qu'il en soit, le résultat m'était apparu d'une grande confusion et la mise en scène d'un académisme préjudiciable à l'instillation de toute angoisse ou de tout suspense.
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Phnom&Penh
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Re: Anatole Litvak (1902-1974)

Message par Phnom&Penh »

Oui, tu as raison, j'aurais du vérifier, elle joue seulement le rôle de la femme du couple. Je ne connais du film que la musique de Michel Legrand et il n'est pas très visible. Mais, d'après ce que tu en dis, il vaut mieux en rester au livre :)
Lord Henry a écrit :la mise en scène d'un académisme préjudiciable à l'instillation de toute angoisse ou de tout suspense.
Je viens de découvrir Le couteau dans la plaie, qui est intéressant par de nombreux aspects, mais effectivement, les scènes de suspens ne sont pas très glorieuses. En revanche, l'atmosphère est bien faite et la photographie d'Henri Alekan n'y est pas pour rien. Sophia Loren est excellente et la musique (Jacques Loussier et Mikis Theodorakis) est très bonne.

J'ai ouvert le topic pour présenter quelques films que j'aime bien, mais c'est sûr que ça reste très inégal :wink:
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Re: Anatole Litvak (1902-1974)

Message par Lord Henry »

En revanche, The Amazing Dr Clitterhouse est un divertissement réjouissant à l'immoralité savoureuse.
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Nestor Almendros
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Re: Anatole Litvak (1902-1974)

Message par Nestor Almendros »

un micro-avis que j'avais posté en juillet 2008

CONFESSION D'UN ESPION NAZI d'Anatole Litvak (Cinéma de Minuit)

Si la seconde moitié s'attarde davantage à raconter une histoire, et donc à m'intéresser, la mise en place de ce film m'a vraiment gêné. C'est un film comme on en faisait alors, très didactique, très pédagogique pour le grand public. Mais ce qui ne m'a vraiment pas plu c'est l'aspect propagande de l'ensemble. Même pour une cause justifiée (anti nazisme) la méthode employée ici ressemble trop à de la manipulation. Ainsi on a les méchants nazis qui menacent les Etats-Unis, ce grand et beau pays avec ses habitants merveilleux...



et plusieurs avis glânés sur le forum...
bruce randylan (août 2009) a écrit :Raccrochez c’est une erreur ( Sorry, Wrong number - 1948 )
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Litvak se lance sur les traces d’Hitchcock avec un réussite un peu mitigée.
Mitigée car toute la partie centrale qui est une succession de flash-back sensés expliquer la situation alourdit en fait considérablement la narration. Non seulement l’enchaînement des séquences est mécanique et poussif mais surtout les informations ne sont pas toujours nécessaires. Certains flash-backs complètement inutiles ou redondants deviennent même par instant assez lassant et ennuyeux.
On sent que la pièce radiophonique d’origine a été étirée en longueur ( c ‘est le mot ! ) pour atteindre une durée cinématographique sans modifier le postulat : un femme alitée passe sa soirée au téléphone après avoir entendu par erreur qu’un meurtre se prépare.

C’est dommage car l’ouverture comme la conclusion sont des sommets de mise en scène et d’efficacité.
La réalisation de Litvak est d’une virtuosité impressionnante qui surpasse même Hitchcock sur son terrain de prédilection. Plan-séquences virtuoses, incroyable sens de l’espace, présentation du lieu et du personnage avec une concision implacable. Le gros Alfred reprendra même dans fenêtre du court l’idée d’un travelling « retraçant » la vie de l’héroïne en filmant son appartement tandis qu’on entend celle-ci en off.
La pression est ainsi installé en un temps record…
Quand a la fin, c’est encore plus impressionnant. On trouve d’ailleurs un mouvement de caméra de malade dont je n’arrive même à comprendre comment il a été effectué.
Sans rien dévoiler du dénouement, sachez juste que celui-ci est vraiment très osée et laisse K.O. un moment porté par une Barbara Stanwick formidable de bout en bout qui parvient à coller la chaire de poule.

Ces 15 dernières minutes font aisément oublier la longue série de flash-back mais ne les excuse pas. Un peu plus de rythme et une narration plus précise aurait pu donner sans problème THE référence du genre.
daniel gregg (septembre 2004) a écrit :mon coup de coeur de ce debut de mois d'Aout s'adresse a "LE TRAITRE" d'Anatole Litvak.

Peut etre l'un des plus beaux films d'espionnages que j'ai vu, ce film datant de 1951, reussit le tour de force de nous amener a nous identifier assez facilement a des acteurs assez peu connus.
Le traitement de l'intrigue est original : le recrutement par l'armee americaine de prisonniers allemands a la fin de la seconde guerre mondiale pour en faire des espions dont la mission est d'infiltrer les lignes allemandes et ainsi permettre aux troupes de la liberation d'avancer plus vite...
Une reflexion tout en nuance sur l'horreur de la guerre et plus precisement sur le sentiment de trouble et de traumatisme a l'interieur meme de l'identite allemande.
Un tres beau film sur la compassion qui m'a beaucoup fait repenser a cet autre chef d'oeuvre qu'est "NONE SHALL ESCAPE" d'Andre de Toth.
Ce film ("LE TRAITRE") est actuellement diffuse sur Cineclassic :wink:
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Cathy
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Re: Anatole Litvak (1902-1974)

Message par Cathy »

Rapatriement de mes critiques concernant deux films d'Anatole Litvak

The Snake Pit, la Fosse aux serpents (1948)

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Une jeune femme se retrouve dans un asile psychiatrique. Grâce à un médecin particulièrement attentionné, elle sort progressivement de sa "folie".

Nous sommes ici dans la période où Hollywood s'intéresse particulièrement à la psychanalyse, mais aussi dans un genre que les réalisateurs affectionnent, mais nous sommes dans un univers féminin. Le rôle principal est le rôle à Oscar type, avec cette femme qui ne sait plus qui elle est, qui suite aux traitements electrochocs, et discussion avec son thérapeute, finit par s'en sortir. Olivia de Havilland est absolument superbe une fois de plus, passant de l'hébétude totale à la "folie" ou à son état normal. Naturellement il y a un petit côté "exhibitionniste" avec l'évocation de tous ces cas différents, la mutiste totale qui naturellement finira par parler, la folle furieuse, etc. Malgré ce côté dur, l'univers n'est jamais "malsain" ou "insupportable", le film sonne pourtant vrai sans doute de par le talent d'Anatole Litvak qui arrive à nous émouvoir sans tomber dans le pathos absolu, ou dans l'irregardable. On ne sort pas du film avec un sentiment désagréable, sans doute car toutes les crises de folie sont séparées par des flashbacks et permettent de sortir régulièrement d'une atmosphère oppressante. Naturellement le film est une ode aux thérapeutes, à leurs méthodes comme les électrochocs, et surtout la psychanalyse pure plus efficace que les électrochocs. Curieusement on sait que la malade a une relation privilègiée avec son médecin, mais les scènes montrées avec celui-ci ne sont que celles liées aux crises. Mark Stevens et Leo Genn sont parfaits le premier en mari qui ne comprend pas ce qui arrive à sa femme et le second en médecin attentif à ses patientes. Peut-être pas un chef d'oeuvre, mais un très beau film et surtout une superbe interprétation d'Olivia de Havilland.

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All this and heaven too - l'étrangère (1940) - Anatole Litvak

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Le Duc de Praslin (Charles Boyer) et la préceptrice de ses enfants Henriette Deluzy-Desportes (Bette Davis) sont amoureux sans jamais se l'avouer. Toutefois la jalousie de la Duchesse transforme cette liaison platonique en drame.

Nous sommes ici dans la lignée des Autant en emporte le vent, avec ces grandes sagas romantiques, mélodramatiques sur fond 'historique". Anatole Litvak reconstitue le Paris de 1848 avec l'exubérance hollywoodienne, allant même jusqu'à évoquer une soirée d'Halloween ! Mais ces petits détails n'ont guère d'importance, car ce qui compte est l'histoire d'amour sans espoir que vivent les deux personnages principaux, le père qui tombe amoureux de la préceptrice, mais ne peut laisser ses sentiments s'exprimer. Charles Boyer est parfait dans le rôle de ce noble quelque peu lâche, tout comme Bette Davis qui est impressionnante dans son rôle de jeune préceptrice toute en retenue. On pourra certes reprocher quelques longueurs, même si les scènes permettent de s'attacher aux personnages des enfants ou du Duc et de la préceptrice. Par contre la fin en France est quelque peu expédiée . Barbara O'Neill sait rendre détestable à souhait la Duchesse de Praslin. Malgré cette réserve, il y a dans les films de cette époque un charme évident qui n'existe plus. A noter que le titre anglais est quand même bien plus romantique et évocateur que le titre français fort réducteur.
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Cathy
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Re: Anatole Litvak (1902-1974)

Message par Cathy »

The Sisters - Nuit de Bal (1938)

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Durant quatre ans, la vie de trois soeurs qui voient leurs destins changer après un soir de bal d'Election présidentielle aux USA.

Un film de contre-emploi, voilà ce à quoi ressemble The Sisters, dont le titre français est un peu réducteur, et léger, alors que le film est un mélodrame. Trois soeurs se marient deux par amour, la troisième par intérêt, mais leurs maris présentent tous les défauts, le riche alcoolique, l'écrivain maudit lui aussi alccolique et le mari trompeur. Bette Davis est dans son registre de femme forte devant les évènements mais qui ne dirige pas entièrement sa vie. Errol Flynn lui est dans un rôle assez inhabituel de jeune premier totalement looser, alcoolique, loin du flamboyant héros qu'il incarna si souvent. Anatole Litvak arrive à montrer la force du fameux tremblement de terre de San Francisco (qui prend une dimension cruelle en ce moment) dans une seule scène où Bette Davis seule dans son appartement voit sa vie s'écrouler au propre et au figuré. Anita Louise et Beulah Bondi sont ces deux autres sisters qui servent plus de faire valoir et d'anecdotes qu'autre chose. Anatole Litvak réalise donc un bon mélodrame porté par ses deux interprètes principaux, mais il ne faut pas oublier aussi de citer ces grands seconds rôles que sont Donald Crisp ou encore Ian Hunter, incontournables dans un certain nombre de films de cette époque. Un film agréable sans être un chef d'oeuvre.

Copie TCM
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Anatole Litvak (1902-1974)

Message par Julien Léonard »

Réalisateur né en Russie, Anatole Litvak fut un très habille serviteur des studios hollywoodiens une fois émigré en Amérique (notamment sous l'égide Warner). Si sa carrière n'a pas l'aura de celle d'un Curtiz, elle apparait néanmoins valoir plus que celles de William Keighley, Vincent Sherman... Contrairement à ces derniers, solides faiseurs sans génie mais à la filmographie très équilibrée, Litvak a parfois introduit dans sa filmographie quelques sommets, tels que Ville conquise, L'étrangère ou La nuit des généraux.


Les liens vers ses films ayant eu droit à un topic sur le forum :

http://www.dvdclassik.com/forum/viewtop ... k#p1608393

http://www.dvdclassik.com/forum/viewtop ... k#p1423335


Et un avis personnel sur un film découvert il y a peu de temps :


City for conquest (Ville conquise) - Réalisé par Anatole Litvak / 1940 :

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Elle n'a qu'une ambition : devenir une star, voir son nom en haut de l'affiche. Elle danse à la perfection, cela la mènera à la gloire, aux côtés d'une ordure totale. Lui n'a qu'une ambition : vivre sa vie en toute simplicité, car son bonheur est simple. Mais par amour pour elle, il deviendra un grand boxeur, puis deviendra presque aveugle à la suite d'un dernier match terriblement crépusculaire. Là encore, une autre vision du rêve américain. La Warner affiche d'emblée une histoire populaire, qui parle au peuple. Chose absolument magnifique, il y est dit avec simplicité et dignité (et cela sans populisme aucun) qu'il n'y aucune honte à être en bas de l'échelle sociale et que l'on peut être fier de soi en toute circonstance. Une thématique troublante et touchante, qui parle immédiatement à tous les américains qui ont vécu les années 30 et les suites de la crise économique. Le scénario est somptueux, surtout concernant l'apport de la musique à son univers. Arthur Kennedy est d'ailleurs parfaitement crédible en musicien acharné, et la grande scène orchestrale finale est tout simplement inoubliable : des réalisateurs prétentieux et pompiers comme Claude Lelouch devraient s'en inspirer au lieu de sorti Les uns et les autres avec une fin totalement similaire mais grossière, boboïsante et agaçante. Ici, point de maniérisme dans la mise en scène ni dans le sentimentalisme, car Anatole Litvak n'en a pas besoin : sa mise en scène est écrasante de modernité et de souplesse, le style Warner y ajoute sa palette (montage percutant, photographie contrastée, décors foisonnants, dialogues magnifiques) et une distribution magistrale en renforce l'effet. Ann Sheridan prouve encore une fois son talent, mélange de beauté et de modernité, de larmes et de rires. Et James Cagney, bien sûr... Ah celui-là ! Il trouve l'un de ses plus grands rôles, tout comme dans Les anges aux figures sales, L'enfer est à lui... Son regard boursouflé, presque aveugle et d'une justesse remarquable, restera longtemps dans la mémoire du spectateur. Une leçon d'humilité, émouvante et surplombée d'un happy-end légitime et amplement mérité. Un très beau film.
Dernière modification par Julien Léonard le 6 juin 10, 14:04, modifié 4 fois.
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Jeremy Fox
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Re: Anatole Litvak (1902-1974)

Message par Jeremy Fox »

Ma découverte de ce film date sacrément, lors d'une diffusion chez Brion, et je me rappelle avoir beaucoup aimé d'autant que je partais sur un à priori négatif, tous les autres films du réalisateur m'ayant laissé de marbre.
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AtCloseRange
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Re: Anatole Litvak (1902-1974)

Message par AtCloseRange »

J'avais beaucoup aimé son Etrangère (j'en avais fait mon film du mois).
L'Etrangère - Anatole Litvak (1940)
Beau mélo porté par ses trois interprètes principaux (Bette Davis, Charles Boyer et Barbara O'Neil dans le rôle de l'épouse castratrice). Litvak fait durer les scènes ce qui met en valeur ses interprètes et permet de souder les relations entre les personnages. Le personnage de Bette Davis est un peu trop angélique mais ce sont aussi les conventions du genre.
Ce film tiré d'une histoire vraie n'est pas tendre avec la religion (l'épouse pieuse et son prêtre qui est loin d'être une présence rassurante) et je soupçonne la production d'avoir ajouté le personnage du pasteur américain positif (mais un peu en dehors de l'histoire principale) pour contrebalancer.
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