"Comédies" classiques américaines inclassables ?

Rubrique consacrée au cinéma et aux films tournés avant 1980.

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Jihl
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Re: "Comédies" classiques américaines inclassables ?

Message par Jihl »

Jeremy Fox a écrit :
Jihl a écrit : La Dame du vendredi de Hawks
C'est pourtant une pure comédie sans aucun élément dramatique
Pour une fois, pas d'accord avec toi. Je te remets mon avis sur le film plus celui de deux autres forumeurs qui ont une lecture du film différente de la tienne.
Jihl a écrit :J'avoue que je ne m'attendais pas à ça. J'envisageai une comédie ultra rapide style l'impossible Monsieur Bébé (que j'aime beaucoup d'ailleurs) mais là ça va beaucoup plus loin dans le sens où le film est très violent sociologiquement (modernité du personnage féminin) mais aussi politiquement (portrait au vitriol de la presse et des politiques).
Enfin quand j'écris au vitriol, je devrais plutôt écrire moderne, lucide et réaliste : des politiques prêt à tout pour garder leur place, une police aux ordres des politiques, une opinion publique avide de faits divers, une presse sans morale qui ne cherche qu'à vendre du papier (quitte à renvoyer "Hitler au milieu de la page des histoires drôles") et puis au milieu de tout ça une histoire d'amour entre un chômeur malade et paumé et une femme un peu paumée elle aussi. Ce sont eux qui sont au coeur du film, qui sont broyés par la société qui les entoure (dont Cary Grant et Rosalind Russel). Et là du coup on rit beaucoup moins...
John T. Chance a écrit ::) c'est justement le fait d'avoir mélangé la satire, le film noir et de l'avoir traité sous l'angle de la comédie qui fait le prix du film. Il y a des traits du film qui sont très noirs : le personnage du meurtrier, l'histoire avec la fille; Gary Grant a un de ses rôles les plus ambigüs.
Hawks, c'est le mélange des genres, il donne une comédie grincante, frontale, ne retranchant aucun élément du film: l'ambigüité est ci à l'image de la vie. le côté roublard de Hawks est aussi à prendre en compte :wink:
bruce randylan a écrit : Entre tout ça, la vision de Hawks sur le(s) milieu(x) me semble trés pertinente et ses virages vers le drame et la critique sont autant brutales qu'imprévisbles. Les moments avec l'amie du criminel m'ont d'ailleurs bien mis mal à l'aise.
francesco
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Re: "Comédies" classiques américaines inclassables ?

Message par francesco »

Je crois que ce qui fait l'objet de la discussion c'est une question de ton, de structure, pas de sujet.
Si La Dame du vendredi (titre crétin pour traduire en fait "Sa version féminine de Vendredi") a un sujet très grave, mais je n'ai pas l'impression qu'on cherche à nous émouvoir ou que les larmes y soient présentes. On réfléchit, on ne pleure pas. Un peu comme dans n'importe quelle satire en fait.
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k-chan
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Re: "Comédies" classiques américaines inclassables ?

Message par k-chan »

The Shop Around the Corner de Lubitsch.

Et tous les longs métrages de Chaplin.
Jihl
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Re: "Comédies" classiques américaines inclassables ?

Message par Jihl »

francesco a écrit :Je crois que ce qui fait l'objet de la discussion c'est une question de ton, de structure, pas de sujet.
Si La Dame du vendredi (titre crétin pour traduire en fait "Sa version féminine de Vendredi") a un sujet très grave, mais je n'ai pas l'impression qu'on cherche à nous émouvoir ou que les larmes y soient présentes. On réfléchit, on ne pleure pas. Un peu comme dans n'importe quelle satire en fait.
Je ne parlais pas de sujet, mais bien de ton et d'émotion. Moi j'ai été très ému par l'histoire entre la femme et le chômeur qui me semble n'avoir rien de satirique.
Ballin Mundson
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Re: "Comédies" classiques américaines inclassables ?

Message par Ballin Mundson »

Born to be bad avec Loretta Young et Cary Grant est assez sombre et cynique.
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kiemavel
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Champagne For Caesar

Message par kiemavel »

UP ! Je ne sais pas où le classer celui là mais ce n'est en tout cas pas une Screwball , le sujet le plus fréquemment choisi pour caser ce genre de films. Bref :
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Beauregard Bottomley, un intellectuel qui a passé sa vie à se cultiver sans parvenir à tirer profit professionnellement de ses immenses connaissances, est au chômage et célibataire. Il partage son bungalow à Los Angeles avec sa sœur Gwenn (Barbara Britton), professeur de piano, et leur perroquet parlant. Un soir, avec Gwenn, à la devanture d'un magasin, il tombe sur un quizz télévisé appelé Masquerade for Money qu'il trouve bête et dégradant pour ses candidats contraints de se déguiser. Le lendemain, il est précisément envoyé pour postuler à un emploi à la Milady Soap Company, le sponsor de l'émission, y est reçu par l'excentrique et mégalomane PDG de l'entreprise, Burnbridge Waters, mais celui ci trouve inopportune une blague de Beauregard et ne l'engage pas. Décidé à se venger, il se présente comme candidat au quizz et remporte victoire sur victoire à la grande satisfaction du fabriquant de savons dont les ventes progressent de manière exponentielle en raison de la popularité grandissante de Beauregard. Mais ce dernier, refusant d'encaisser ses gains et préférant prendre le risque de tout perdre, se représente semaine après semaine, gagne et double ses gains à chaque émission, au point de menacer de mettre Waters sur la paille. Aussi, ce dernier va tout tenter pour se débarrasser de ce trop brillant candidat …
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Champagne for Caesar est une comédie douce amère qui se voulait déjà satirique sur le media qui n'en était qu'au début de son expansion : la télévision. Il se moquait en particulier des jeux idiots tendant à humilier les candidats, de l'emprise de la publicité et, chez ses fabricants, montrait l'hypocrisie des animateurs (et il peut être vu, pour cet aspect là, secondaire, comme une sorte d’ancêtre de Masques, en bien moins méchant, le film étant à la fois de son temps, et se moquant gentiment des institutions de son temps) et le mercantilisme sans vergogne des grands magnats des médias.
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L'histoire est centrée sur Beauregard Bottomley dont la personnalité assez singulière dans l'univers de la comédie, est très bien restituée par l'interprétation calme, sobre et très fine de Colman. Il interprète une sorte de génie dilettante, lunaire et doux mais pas absolument sympathique puisqu'il se montre égocentrique, légèrement hautain, assez dictatorial avec sa sœur, et sa lucidité peut apparaître comme "gentiment" effrayante mais quoiqu’il puisse dire ou faire, sa distinction, sa prestance et son charme font tout passer.
En ce qui concerne l'interprétation de Vincent Price, c'est tout l'inverse. Il en fait des caisses et semble sorti d'un dessin animé. Dans son building au décor futuriste, il n'est disponible que lorsqu'il émerge d'un état végétatif où il doit puiser en lui son génie créatif et dont il ne sort brutalement que pour donner ses directives et sortir quelques bons mots auxquels ses collaborateurs doivent s’esclaffer … avant de retomber en léthargie aussi brutalement qu'il en était sorti… Pour commencer ... A chaque fois qu'il paraît, le film tourne au burlesque et il se montre absolument déchaîné dans un de ces rares rôles de pure comédie. Le contraste avec Colman est étonnant et d’aucuns pourront le trouver parfois déroutant (c'est mon cas)
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Pour empêcher ce dangereux candidat de le mettre sur la paille – ce qui finit d'ailleurs par être l'intention de l'intéressé - il se sert successivement de son animateur vedette, Happy Hogan (Art Linkletter, dans la « vraie » vie, pendant longtemps, animateur d'un jeu télévisé populaire) qui tente d'atteindre Beauregard par sa sœur, une vieille fille que son frère rabaisse fréquemment et dont il doute qu'elle puisse avoir sincèrement séduit l'animateur (1). Puis il lui envoie une froide séductrice (Celeste Holm) …

Sans aller plus loin dans l'intrigue, quelques trouvailles isolées : l'ouverture assez sexy et drôle durant laquelle le metteur en scène cadre sous toutes les coutures une beauté en maillot de bain couchée sur la pelouse du carré de verdure situé au milieu de la résidence où habitent les Bottomley et où tout le voisinage masculin est montré trouvant n'importe quel prétexte pour être au plus près pour la reluquer … Sauf Beauregard, plongé dans un bouquin. Belle façon d'introduire le personnage.
Plus tard, c'est Albert Einstein en personne qui intervient en direct pour corriger l'erreur commise par l'animateur au sujet de sa théorie de la relativité . Ou encore, on finit par apprendre qui avait appris à Caesar (le perroquet) à jurer … Et accessoirement, il le fait avec la voix de Mel Blanc, puisque c'est lui qui doublait l'animal amateur de champagne. C'est tout ce qu'il y avait derrière ce titre : Champagne For Caesar qui vaut bien le coup d'oeil. Vu ' à peu près ' en vost
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(1) Aspect d'autant plus étonnant que le rôle est tenu par la superbe Barbara Britton

Le mauvais génie du magnat lui suggère une manière radicale d'écarter Beauregard
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Cathy
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Re: "Comédies" classiques américaines inclassables ?

Message par Cathy »

Comment as-tu vu ce film ? J'adore ce style de film
kiemavel
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Mon secrétaire travaille la nuit - Take a Letter, Darling

Message par kiemavel »

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Tom Verney, un artiste peintre fauché, se présente dans une grande agence de publicité avec une lettre de recommandation à présenter à un certain MacGregor, qui s'avère - contre toute attente – être une femme, laquelle l'engage sur le champ malgré son absence de références comme secrétaire personnel, sa principale mission étant d’accompagner sa patronne dans les soirées d'affaires où Verney sera chargé de séduire les épouses des clients difficiles … ou de rassurer les épouses jalouses en passant pour le fiancé de MacGregor car le célibat de celle ci et son charme lui posent des problèmes en affaires. Une condition : ne jamais tomber amoureux d'elle, sous peine d'être viré comme l'ont été ses 4 prédécesseurs. En principe …
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Comédie « de bureau » assez typique mais inversant totalement les rôles habituellement dévolus aux deux sexes. Ici, le boss est une femme et l'escort, employé uniquement pour son physique avantageux, un homme.
Le retournement des conventions se concrétise dans des séquences vues ailleurs, telle la visite chez le couturier pour rhabiller l'employé pas suffisamment élégant pour sa future fonction. C'est la femme de pouvoir et au caractère bien trempée qui envoie donc Verney se faire habiller chez un tailleur et il a toutes les peines du monde à faire entendre ses goûts parce que Madame a ses propres exigences (mais il finit par avoir gain de cause au bout d'une séquence assez drôle).
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Une fois habillé comme un prince et après qu'il ait bredouillé – un peu gêné - quelques vagues explications sur ses nouvelles fonctions, son voisin et ami lui répondra : « Ah oui, tu vas faire le gigolo ! » Mais non... pas avec sa patronne en tout cas, malgré quelques quiproquos initiaux. MacGregor ne pense vraiment qu'à son boulot (c’est elle qui dirige de fait l’agence de publicité qu'elle a sauvé de la faillite. D'ailleurs, son associé, le créateur de la boite, n'est jamais vu autrement que s’entraînant à différents jeux dans son bureau). Rosalind Russell était l’actrice parfaite pour donner vie à cette femme émancipée, indépendante, qui par sa dureté apparente, ses propos dissuasifs et sa forte personnalité refroidit les mâles qui l'entourent malgré qu'elle soit jolie, chaleureuse et souriante, l'actrice pouvant jouer sur tous les tableaux à la fois au cours d'une même scène...
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Dans un premier temps, sa fonction aussi refroidit le mâle en position d'infériorité, Verney, qui ne pouvait pas s'amouracher (selon le scénariste :wink: ) d'une femme autoritaire et, professionnellement, son supérieur hiérarchique. Mais des deux cotés, on fait du chemin : MacGregor commence à adoucir sa carapace en acier trempé et MacMurray s'affirme et reprend le pouvoir en parvenant à rendre jalouse sa patronne … Cela survient dans une seconde partie pas vraiment satisfaisante où deux nouveaux personnages fortunés entre en piste, un frère, Jonathan (joué par MacDonald Carey), qui après avoir divorcé 4 fois détestent les femmes, et sa sœur Ethel (Constance Moore) … laquelle tombe amoureuse de Verney. Malheureusement, les développements du scénario nous laissent un peu sur notre faim, tout comme ces personnages secondaires qui apparaissent à mi chemin : les quiproquos, un projet de mariage avortée, le retour -bienvenu pour le coup – de la peinture, la passion de Verney … sont des développements assez faibles qui rappellent que Leisen, aussi doué était-il, avait besoin des scénarios des géniaux Preston Sturges ou Billy Wilder pour réaliser ses chefs d’œuvre antérieurs … Letter est très sympathique mais n'en est pas un.
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Dommage car, entre autres choses, l' ouverture du film est tonitruante. MacMurray fait son entrée dans une salle remplie de secrétaires. Après qu'elle ait pris connaissance de la raison de sa visite, la jeune femme de l'accueil et du standard décrète après l'avoir envisagé de haut en bas : «  Vous allez avoir le travail ! » devant un jeune nigaud mi amusé mi intimidé. Puis ce sont plusieurs secrétaires qui minaudent autour de lui tandis qu'il attend d'être reçu par le patron (il ne sait pas encore qu'il s'agit d 'une patronne) ; avant qu'un homme -visiblement son prédécesseur- ne sorte du bureau du dit patron en se tenant la joue, venant visiblement d'être giflé. Puis, passant devant son futur remplaçant, l'homme saisit sa lettre de motivation et pouffe de rire devant le pauvre type de plus en plus inquiet et intimidé.

Vu ' à peu près' en vost
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