L'Invasion des Profanateurs (Philip Kaufman - 1978)

Rubrique consacrée au cinéma et aux films tournés avant 1980.

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Flol
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L'Invasion des Profanateurs (Philip Kaufman - 1978)

Message par Flol »

L'Invasion des Profanateurs de Philip Kaufman

Bien meilleur que l'original : plus malaisant, plus étouffant...plus flippant, quoi !
Le fait que l'action se déroule à San Francisco (donc pas une petite bourgade) fait davantage ressentir l'impression de paranoïa et de solitude des personnages principaux.
Et cette fin !!! Ca c'est de la fin "coup de poing" !! :shock:
De par son traitement sec et brutal, ça m'a fait penser à La Grande Menace de Jack Gold réalisé, comme par hasard, la même année.
Y a pas à dire : la fin des 70's, c'était quand même mortel pour le ciné fantastique !
Martin Quatermass
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Message par Martin Quatermass »

ratatouille a écrit :L'Invasion des Profanateurs de Philip Kaufman

Bien meilleur que l'original : plus malaisant, plus étouffant...plus flippant, quoi !
Le fait que l'action se déroule à San Francisco (donc pas une petite bourgade) fait davantage ressentir l'impression de paranoïa et de solitude des personnages principaux.
Et cette fin !!! Ca c'est de la fin "coup de poing" !! :shock:
Dans le traitement sec et brutal, ça m'a fait penser à La Grande Menace de Jack Gold réalisé, comme de par hasard, la même année.
Y a pas à dire : la fin des 70's, c'était quand même mortel pour le ciné fantastique !
Content que tu ais aimé ! excellent film. Et je dirais même que la décennie 1970 a été formidable pour le cinéma tout court ! :wink:
phylute
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Message par phylute »

ratatouille a écrit :L'Invasion des Profanateurs de Philip Kaufman

Bien meilleur que l'original : plus malaisant, plus étouffant...plus flippant, quoi !
Le fait que l'action se déroule à San Francisco (donc pas une petite bourgade) fait davantage ressentir l'impression de paranoïa et de solitude des personnages principaux.
Et cette fin !!! Ca c'est de la fin "coup de poing" !! :shock:
Dans le traitement sec et brutal, ça m'a fait penser à La Grande Menace de Jack Gold réalisé, comme de par hasard, la même année.
Y a pas à dire : la fin des 70's, c'était quand même mortel pour le ciné fantastique !
Depuis qu'elle a vue le film, je passe mon temps à faire peur à ma copine avec le rictus des "possédés"... ça marche très bien.
Il te reste à voir (à moins que ce ne soit déjà fait) la vesion de Ferrara.... qui ne pourra que te conforter dans l'idée que le film de Kaufman est le meilleur de la série.
Les films sont à notre civilisation ce que les rêves sont à nos vies individuelles : ils en expriment le mystère et aident à définir la nature de ce que nous sommes et de ce que nous devenons. (Frank Pierson)
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Jeremy Fox
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Message par Jeremy Fox »

phylute a écrit :
ratatouille a écrit :L'Invasion des Profanateurs de Philip Kaufman

Bien meilleur que l'original : plus malaisant, plus étouffant...plus flippant, quoi !
Le fait que l'action se déroule à San Francisco (donc pas une petite bourgade) fait davantage ressentir l'impression de paranoïa et de solitude des personnages principaux.
Et cette fin !!! Ca c'est de la fin "coup de poing" !! :shock:
Dans le traitement sec et brutal, ça m'a fait penser à La Grande Menace de Jack Gold réalisé, comme de par hasard, la même année.
Y a pas à dire : la fin des 70's, c'était quand même mortel pour le ciné fantastique !
Depuis qu'elle a vue le film, je passe mon temps à faire peur à ma copine avec le rictus des "possédés"... ça marche très bien.
Il te reste à voir (à moins que ce ne soit déjà fait) la vesion de Ferrara.... qui ne pourra que te conforter dans l'idée que le film de Kaufman est le meilleur de la série.
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Flol
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Message par Flol »

Jeremy Fox a écrit :
phylute a écrit : Depuis qu'elle a vue le film, je passe mon temps à faire peur à ma copine avec le rictus des "possédés"... ça marche très bien.
Il te reste à voir (à moins que ce ne soit déjà fait) la vesion de Ferrara.... qui ne pourra que te conforter dans l'idée que le film de Kaufman est le meilleur de la série.
+1
+1 ! ;)

J'ai vu la version de Ferrara il y a de cela quelques années et bien que l'ayant plutôt apprécié à l'époque, j'avoue n'en avoir plus beaucoup de souvenirs aujourd'hui. :?
Ce qui est donc plutôt un mauvais signe.
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Re: Notez les films naphtalinés de Novembre 2008

Message par Profondo Rosso »

L'invasion des profanateurs de Philip Kaufman (1978)

Tombées de l'espace intersidéral sur San Francisco, d'étranges graines donnent naissance à des plantes mystérieuses qui peu à peu gagnent le corps de ceux qui les ont approchés, les transformant en êtres froids, deshumanisés, privés d'émotions, soumis à une volonté venue d'ailleurs. Elisabeth, fonctionnaire au ministère de la santé, et son ami et supérieur Matthew vont devoir affronter ces terribles plantes menaçantes.

Premier et meilleur des remakes de l'intouchable film de Don Siegel même si on en approche très fort qualitativement. Kaufman fait tout les bons choix et réussi à assurer la continuité avec l'original tout en y apposant sa propre patte. Conscient que le thème est désormais bien connu, le film abandonne toute l'aura de mystère qui entourait les premiers instants du film de Siegel avec présentation dès l'ouverture du long voyage stellaire des cellules extraterrestres vers la terre et leurs mutations au sein de la faune et flore humaine. Le ton de thriller paranoïaque typique des 70's adopté se marie à merveille au sujet lorsque la menace s'insinue lentement au début à l'insu de tous et l'ambiance devient carrément irrespirable dans la deuxième partie avec un ton particulièrement noir et desespéré, c'est d'ailleurs le seul remake à oser une conclusion totalement pessimiste (même le Siegel entretenait un maigre lueur d'espoir). Déplacer l'histoire dans une grande ville va également dans ce sens avec un sentiment de folie urbaine insidieuse où l'uniformité glaciale des étrangers gagne peu à peu toute la population pour aboutir à la stressante traque finale. Kaufman use des acquis du film de Siegel en jouant sur le côté monolithique des doubles, créant le doute à travers leurs échanges de regards entendus mais crée aussi de terrifiantes séquences de son cru comme ce moment où en filmant simplement les pas saccadés du couple de héros mêlés à ceux robotique des extraterrestre (et appuyant sur leurs télépathie surnaturelle évoquant des insectes tout comme le cri autre ajout du remake) amenant une course poursuite surprenante. Les effets gores bien sentis suscitent de beaux moment de terreur aussi comme cette fameuse scène où Sutherland cédant au sommeille manque de peu d'être dupliqué ou Elizabeth qui fond littéralement dans les bras de Matthew, sans parler de pures images de cauchemar comme une fusion homme chien suite à une duplication manquée. Tout comme dans les remake qui suivront, l'invasion s'amorce au niveau mondial (dont une ipressionnante scène de culture de cosse à grande échelle) et sans la toile de fond anticommuniste du Siegel, la menace s'avère d'autant plus inconnue et effrayante. Hormis un Leonard Nimoy qui semble bien trop louche dès sa première apparition, un cast assez parfait dominé par l'excellent Donald Sutherland et où on trouve le tout jeune Jeff Goldblum dans un de se premiers rôles marquant. Sinon dommage que des années de fréquentation du net m'aient spoilé depuis bel lurette la dernière scène :mrgreen: 5,5/6
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nobody smith
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Re: Notez les films Naphtas- Février 2009

Message par nobody smith »

L’INVASION DES PROFANATEURS de Philip Kaufman
Un peu partagé quant à cet énième variation du roman de Jack Finney. Le générique d’ouverture pose assez bien mon désarroi. Malgré des effets spéciaux honorables, j’ai du mal à accrocher à cette dérive spatiale fort vieillote esthétiquement. Mon enthousiasme ne s’enclenche que lors de sa deuxième partie marquant le début de l’invasion. Exit la musique qui ne sait pas sur quel pied dansé (les thème se succèdent sans cohésion si ce n’est de marteller mon pauvre crâne) et les gros effets spéciaux pas forcément du meilleur du meilleur gout, ces dernières images usent de pas grand chose pour un résultat impeccable et terriblement effrayant. Le film ne cesse alors de faire des va et vient, accroissant mon intérêt lorsqu’il adopte un style documentaire au sein d’un environnement urbain poisseux et le faisant redescendre lorsqu’il déballe une grosse artillerie qui a mal supporté les années (la scène où les foetus sortent des cocon perd énormément de son effroi à cause des effets). Une impression très variable à l’image des clones dont le caractère déshumanisé est relatif d’une scène à l’autre. L’ambiance paranoïaque et désespérée est toutefois assez aboutit pour motiver mon visionnage.
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Re: Notez les films Naphtas- Février 2009

Message par julien »

nobody smith a écrit :L’INVASION DES PROFANATEURS de Philip Kaufman
Un peu partagé quant à cet énième variation du roman de Jack Finney. Le générique d’ouverture pose assez bien mon désarroi. Malgré des effets spéciaux honorables, j’ai du mal à accrocher à cette dérive spatiale fort vieillote esthétiquement. Mon enthousiasme ne s’enclenche que lors de sa deuxième partie marquant le début de l’invasion. Exit la musique qui ne sait pas sur quel pied dansé (les thème se succèdent sans cohésion si ce n’est de marteller mon pauvre crâne) et les gros effets spéciaux pas forcément du meilleur du meilleur gout, ces dernières images usent de pas grand chose pour un résultat impeccable et terriblement effrayant. Le film ne cesse alors de faire des va et vient, accroissant mon intérêt lorsqu’il adopte un style documentaire au sein d’un environnement urbain poisseux et le faisant redescendre lorsqu’il déballe une grosse artillerie qui a mal supporté les années (la scène où les foetus sortent des cocon perd énormément de son effroi à cause des effets). Une impression très variable à l’image des clones dont le caractère déshumanisé est relatif d’une scène à l’autre.
C'est marrant. Je pense exactement tout le contraire de ta critique. Et puis énième variation. Il me semble que c'est seulement la deuxième, après celle réalisée par Don Siegel. Où alors tu parles du film avec Kidman ? Et j'adore la scène où Veronica Cartwright se lance dans une tirade complètement barrée. "Avant l'aube de l'humanité, des extraterrestres ont envahit la planète et se sont accouplés avec des singes." Un truc comme ça. Y'a qu'elle pour sortir des trucs comme ça. :D
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Re: Notez les films Naphtas- Février 2009

Message par Lord Henry »

Personnellement, chaque fois que l'occasion se présente, je le classe parmi les grands films du cinéma américain des années soixante-dix.
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Re: Notez les films Naphtas- Février 2009

Message par Kevin95 »

Bien que très "space", la version d'Abel Ferrara est assez réussie.
Les deux fléaux qui menacent l'humanité sont le désordre et l'ordre. La corruption me dégoûte, la vertu me donne le frisson. (Michel Audiard)
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Re: Notez les films Naphtas- Février 2009

Message par nobody smith »

julien a écrit :C'est marrant. Je pense exactement tout le contraire de ta critique. Et puis énième variation. Il me semble que c'est seulement la deuxième, après celle réalisée par Don Siegel. Où alors tu parles du film avec Kidman ? Et j'adore la scène où Veronica Cartwright se lance dans une tirade complètement barrée. "Avant l'aube de l'humanité, des extraterrestres ont envahit la planète et se sont accouplés avec des singes." Un truc comme ça. Y'a qu'elle pour sortir des trucs comme ça. :D
C'est marrant, ce genre de remarque revient souvent avec moi.
Le film de Kaufman est peut être uniquement la seconde des quatre adaptations officielles mais faut non plus oublier que le sujet a donné lieu une kyrielle d'enfants illégitimes. Quant à la tirade ahurissante de Cartwright, c'est le genre de passage "what the fuck ?" qui m'ont fait sortir du film. Cela dit, j'ai beau être un peu méchant avec le film de Kaufman, je trouve sa version cent coudées au dessus de celle de Ferrara et Hirschbiegel (enfin je voulais dire des Wachowski).
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Re: Notez les films Naphtas- Février 2009

Message par julien »

Elle est même bien plus aboutie que la version de Siegel. Du moins, on voit que Kaufman bénéficiait lui et son scénariste d'une plus grande indépendance.
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Re: Notez les films Naphtas- Février 2009

Message par Lord Henry »

Il y a aussi le remake mexicain, avec des haricots sauteurs.
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Major Tom
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L'Invasion des Profanateurs (P. Kaufman, 1978)

Message par Major Tom »

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de Philip Kaufman (1978)

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Leonard Nimoy, Donald Sutherland et Jeff Goldblum sur le tournage
[cliquez sur l'image pour un grand format]
Matthew Bennell (Donald Sutherland) est inspecteur de l’hygiène alimentaire, vivant dans un appartement de la grande cité cosmopolite de San Francisco. Célibataire, il est secrètement épris d’une laborantine, Elisabeth Driscoll (Brooke Adams), qui partage déjà sa vie avec Geoffrey. Un matin, elle commence à remarquer un changement dans le comportement de son compagnon. Par la suite, d’autres personnes feront la même observation concernant leurs proches. Lors d’une signature dans une librairie, Bennell présente à Driscoll un de ses amis, le thérapeute Kibner (Leonard Nimoy), sorte de gourou à la mode qui leur suggère qu’il s’agit peut-être d’une hallucination collective, ou de la traduction du désir des hommes et des femmes de se désengager les uns des autres...
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Le titre français de Invasion of the Body Snatchers, alias L'Invasion des Profanateurs de Sépultures, est cocasse puisqu'il n'y a en effet ni profanations ni sépultures (cette étrange traduction m'a fait imaginer presque tout et n'importe quoi avant de voir les films). Officiellement, le roman original (de 1954) par Jack Finney a été porté au cinéma au moins quatre fois : en 1956 avec L'Invasion des Profanateurs de Sépultures de Don Siegel ; puis en 1978 avec le film de Philip Kaufman dont le titre est raccourci, L'Invasion des Profanateurs, auquel je m'intéresse davantage ici ; en 1992 avec Body Snatchers d'Abel Ferrara qui par contre ne m'intéresse pas ; pas plus que le dernier, Invasion (2007) d'Oliver Hirschbiegel. Les deux premiers films ont, dans les grandes lignes, plusieurs points communs (en gros: substitution d'un sosie à l'original humain pendant le sommeil, origine extra-terrestre, technique de reproduction identique, couple qui affronte le fléau, etc.). En revanche, le cadre n'est plus le même (Santa Mira, petite ville dans le premier ; San Francisco dans le second) et les dénouements sont opposés.
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Cette histoire de transmission du Mal, où des gens sont remplacés par des clones extra-terrestres moutonniers (sujet qu'on trouve aussi dans la nouvelle The Father-King de Philip K. Dick) est toute indiquée pour les remakes. Le retour de ce genre d'histoires à l'écran, avec bien sûr les films de zombies, s'explique sûrement par son aspect visuel et scénaristique très plaisant cinématographiquement (et on pourrait aussi parler de la mise en abyme du personnage de cinéma, n'est-il pas body-snatché par l'acteur qui l'incarne, et son corps un dédoublement entre l'interprète et son rôle?).

La version de Don Siegel se déroulait dans l'Amérique des années 50. Elle se rapprochait d'autres films de science-fiction de cette période (dont le célèbre La Chose d'un Autre Monde, 1951) par son propos politique décelable - Guerre Froide et climat de paranoïa obligent. Avec son histoire où des américains deviennent une troupe embrigadée et soumise, et avec en plus un plaidoyer du personnage du psychiatre (curieusement appelé Kaufman dans le film) pour une société grégaire de fourmis, il est assez courant d'y voir une parabole sur l'aliénation soigneusement polysémique: analogie du péril communiste ou, à l'inverse, du maccarthysme encore dans les esprits?
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De la même manière, la version de Philip Kaufman concorde avec son époque: la fin des années 70, époque où résonne encore l'affaire du Watergate et où fleurissent des polars paranoïaques comme Les Trois Jours du Condor (1975) de Sydney Pollack, Les Hommes du Président (1976) d'Alan J. Pakula... L'Invasion des Profanateurs comporte forcément un sous-texte différent, et d'autres dissemblances notables par rapport à son prédécesseur, comme par exemple les personnages féminins (femmes au foyer ou à marier, épouses ou mères dans le premier film ; professionnelles, dynamiques, efficaces et même maternelles avec leur compagnon dans le second). Elles n'ont par ailleurs pas d'enfants - c'est un point important sur lequel il faut revenir.
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Kaufman démarre donc son film en présentant ses personnages un à un, et on s'aperçoit qu'aucun ne vit dans un mode familial classique ; Matthew est un célibataire vivant seul ; son ami Jack Belicek (Jeff Goldblum) est un écrivain raté vivant aux crochets de sa femme Nancy (Veronica Cartwright) qui est la salariée du couple ; et enfin nous apprendrons qu'Elisabeth est en union libre avec Geoffrey. Aucun d'eux ne veut des enfants. Les Body Snatchers, ces créatures qui nous ressemblent, seraient donc une allégorie des enfants. D'ailleurs, dans la scène hallucinante où on assiste à la "duplication", les créatures apparaissent sortant des "cosses", l'utérus végétal, sous une forme monstrueuse d'adultes, émergeant comme... des nouveau-nés.
Au tout début, une classe se promène dans un jardin public, conduite par une maîtresse au comportement manifestement étrange qui les laisse cueillir des fleurs pour "ramener à leurs parents", des fleurs qui évidemment sont liées à la propagation de la mutation. Pendant les deux heures qui suivent et jusqu'à quelques minutes avant la fin, il n'y a plus d'enfant n'apparaît dans le film, tant à l'image que dans les propos et d'ailleurs, personne n'évoque sa propre famille (parents, frères et sœurs, cousins, etc.) ou ne s'inquiète pour eux. L'ambigu docteur Kibner, le psychiatre à la fois médiatique et paternaliste avec les gens qui le côtoient, deviendrait alors une figure de père pour ces personnages perdus...
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Une des grandes réussites du film de Kaufman, c'est d'avoir situé l'action à San Francisco. Une grande ville est en principe considérée comme un lieu préservé et par définition urbain, et donc plus difficile à faire accepter au public qu'elle puisse devenir le théâtre d'une métamorphose crescendo des personnes qui y vivent sans que personne ne s'en aperçoive, c'est risqué, et pourtant le réalisateur y parvient avec beaucoup d'intelligence. Cela donne même lieu à des scènes de rues angoissantes. Je pense notamment à cette scène où la caméra est resserrée sur les pieds des personnages, et montre petit à petit les protagonistes accélérer le pas après s'être aperçus qu'ils ont été repérés par les créatures, ça m'a fait penser à une danse. C'est souvent impressionnant et encore plus déconcertant par sa simplicité.
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Dans le même ordre d'idées, j'aime beaucoup le début qui installe concisément et avec précision les Body Snatchers, de leur voyage dans l'espace à leur arrivée sur Terre, avec la pluie diluvienne et leur métamorphose sur des feuilles. L'imagerie récurrente de la voirie publique permet au réalisateur d'aborder un thème de science-fiction commun à de nombreux films du genre: la pollution terrestre. Il insiste notamment sur la présence du camion à ordures (montré dès les premiers plans de la ville), qui n'est évidemment pas un élément du hasard, et qui aura toute son importance dans la chute de l'humanité. On le sait très bien dès qu'il circule près des personnages, ou apparaît à travers une fenêtre...
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Dans le film de Siegel, tout le monde vous observe, c'était ce qui faisait l'élément inquiétant du film. Chez Kaufman, cette méthode est renversée. Ce qui est inquiétant ici, c'est que personne ne regarde, ce qui fait qu'on voit absolument rien venir. Dès le tout début, après la maîtresse qui se retourne avec un regard insistant, la caméra resserre sur un personnage de curé en soutane -Robert Duvall en caméo- qu'on voit jouer à la balançoire, et personne ne remarque son étrange comportement. Plus tard, un vieil homme à barbe blanche court à perdre haleine dans une rue bondée (évidemment poursuivi par les Body Snatchers) et ici aussi, personne n'y fait attention. Parmi les autres caméos du film, notons Don Siegel en chauffeur de taxi, et, pour le clin d'œil humoristique, c'est Kevin McCarthy, l'acteur du premier film, qui se jette sur le pare-brise de Sutherland comme il le faisait sur l'autoroute du film de Siegel...
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C'est un film remarquable, bien ficelé, intelligent et ne souffrant d'aucun temps mort grâce à une tension palpable et permanente. À l'aide de plans valorisant les détails insolites et inquiétants, le réalisateur distille au fur et à mesure une ambiance terriblement angoissante. Loin de desservir le film, les effets spéciaux ajoutent une peur supplémentaire, notamment dans les effrayantes scènes de duplication. Difficile de ne pas penser tôt ou tard aux films de science-fiction de la même période, comme Alien (1979) de Ridley Scott (où pareillement, nul n'est capable de s'avérer compétent face à un danger imminent, et où les fameux œufs dans lesquels naissent les face hugger rappellent les "cosses" géantes), ou bien sûr The Thing (1982) de John Carpenter. Pour parler de l'interprétation, le casting (Sutherland, Adams, Goldblum, Cartwright, Nimoy) est absolument parfait. Le duo entre Donald Sutherland et la belle Brooke Adams fonctionne merveilleusement bien, comme le démontre cette scène de dîner sur la terrasse, où il plaisante avec elle en divulguant davantage le fait qu'il est épris d'elle. Voilà donc un très beau film d'horreur/science-fiction qui mériterait une édition DVD digne de ce nom.
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Dernière modification par Major Tom le 9 nov. 09, 00:41, modifié 6 fois.
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Demi-Lune
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Re: L'Invasion des Profanateurs (P. Kaufman, 1978)

Message par Demi-Lune »

Major Tom a écrit : un très beau film d'horreur qui mériterait une édition DVD digne de ce nom.
Il existe une édition spéciale du film, avec bonus et tutti quanti, chez MGM, en zone 1. :wink:
Je l'ai commandée il y a deux semaines mais elle tarde sacrément à arriver. :evil:
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