Maurice Tourneur (1876-1961)

Rubrique consacrée au cinéma et aux films tournés avant 1980.

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Supfiction
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Re: Maurice Tourneur (1876-1961)

Message par Supfiction »

Impasse des deux anges dans 3/4h au Cinéma de minuit.
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Commissaire Juve
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Re: Maurice Tourneur (1876-1961)

Message par Commissaire Juve »

Supfiction a écrit :Impasse des deux anges dans 3/4h au Cinéma de minuit.
Vu... Que dire ? Je n'ai pas grimpé aux rideaux -- distribution assez glaçante... Herrand, Signoret, Meurisse... oh lala -- mais je suis content de l'avoir découvert.

Etrange, le coup du psychopathe dans la mansarde. Osé, aussi, le coup des deux anciens flics collabo (pour un film de 1948). C'est peut-être la première fois que je vois ce fada de Paul Demange jouer les durs ! :lol:

EDIT : j'oubliais... quelques beaux passages en ombre et lumière. Et un caméo de Danielle Delorme (22 ans) en petit chat de gouttière mal luné.
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Frances
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Re: Maurice Tourneur (1876-1961)

Message par Frances »

AU NOM DE LA LOI (1931) de Maurice Tourneur avec Charles Vanel, Gabriel Gabrio, Marcelle Chantal.

L’histoire en deux mots : Un inspecteur infiltre une bande de trafiquants de drogue. Le lendemain son corps est retrouvé flottant dans la Seine. Deux de ses collègue vont reprendre l’enquête et tenter de démasquer son assassin.
Image
Au risque de me répéter mais je finirai peur être par être entendue, notre cinéma recèle de bien jolies pépites… Au nom de la loi est de celles-là. Un polar à la française mâtiné de film noir et véhiculant les us et coutumes policières des années 30 avec force détails.
Avant tout il faut rendre hommage au savoir faire et à la maîtrise de Maurice Tourneur. Aussi à l’aise en intérieur qu’en extérieur il exploite formidablement l’espace. Les plongées radicales répondent à de brillants cadrages qui enferment les personnages pour mieux libérer l’expression des mouvements. Tourneur n’hésite pas à multiplier les angles de prises de vue, à déplacer sa caméra pour offrir la meilleure latitude d’interprétation. Il permet ainsi au spectateur de littéralement se mouvoir dans la scène afin d’adopter les différents points de vue des protagonistes.

Pendant 1h23 Tourneur nous emmène dans les bouges mal famés de la capitale, QG des marlous et des frangines, dans les fumeries d’opium, sur les ponts de Paris, du quai des Orfèvres à Montmartre. Il nous embarque dans un train de nuit pour Marseille, nous ouvre les cales d’un cargo, nous fait pénétrer dans les coulisses de la drogue et de la police. Au-delà de l’enquête, de la traque, de la femme fatale, des truands et des hommes de main chinois Maurice Tourneur cisèle avec précision un quasi documentaire sur l’époque. On découvre les méthodes policières, par exemple l’étonnante scène où les inspecteurs font appel à la concierge de l’immeuble pour effectuer la fouille corporelle de Sandra parce qu’il n’y avait pas de femme dans la police.

La progression dramatique est très réussie rythmée par des scènes fortes parfaitement orchestrées comme celle de l’arrestation et de l’interrogatoire d’Amédée ou celle du siège de la mansarde où s’est retranché un fugitif.
Tous les interprètes portent le récit avec beaucoup de justesse, qu’il s’agisse de Charles Vanel en inspecteur obstiné et humain, de Gabriel Gabrio ou de Marcelle Chantal qui insuffle son charme et son mystère au film.
Dernière modification par Frances le 9 avr. 14, 21:36, modifié 1 fois.
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Tommy Udo
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Re: Maurice Tourneur (1876-1961)

Message par Tommy Udo »

Merci pour cette notule, Frances. Je la partage intégralement :)
Quels sont les films du coffret qu'il te reste encore à visionner ?
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Frances
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Re: Maurice Tourneur (1876-1961)

Message par Frances »

Tommy Udo a écrit :Merci pour cette notule, Frances. Je la partage intégralement :)
Quels sont les films du coffret qu'il te reste encore à visionner ?
Merci Tommy :wink: Il m'en reste trois : Accusé levez-vous, Obsession et Justin de Marseille.
Un vrai bonheur ce coffret. Merci de me l'avoir recommandé d'autant que les suppléments sont aussi de qualité. Après ça j'aurai hâte de découvrir aussi la période cinéma muet de Tourneur mais ce n'est sans doute pas évident de se procurer les titres.
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Tommy Udo
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Re: Maurice Tourneur (1876-1961)

Message par Tommy Udo »

Justin de Marseille est un petit bijou. Les deux autres sont également très bons :wink:
Pour la période muette, ce n'est effectivement pas évident. Il y a un coffret qui vient de sortir chez Bach Films, mais à ta place je ne m'y risquerais pas :mrgreen:
Sinon, peut-être prospecter du côté des Etats-Unis ??
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Frances
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Re: Maurice Tourneur (1876-1961)

Message par Frances »

Tommy Udo a écrit :Justin de Marseille est un petit bijou. Les deux autres sont également très bons :wink:
Pour la période muette, ce n'est effectivement pas évident. Il y a un coffret qui vient de sortir chez Bach Films, mais à ta place je ne m'y risquerais pas :mrgreen:
Sinon, peut-être prospecter du côté des Etats-Unis ??
Ah oui le coffret Bach je l'ai eu en mains et quand j'ai vu l'éditeur je l'ai reposé :uhuh:
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Re: Maurice Tourneur (1876-1961)

Message par Ann Harding »

Tu peux déjà lire l'interview de Kevin Brownlow que j'ai réalisée en 2008 où il parle de Tourneur.
http://www.dvdclassik.com/article/entre ... eme-partie
J'avais mis des captures de certains films muets et noter les ref. des DVD:

The Wishing Ring (inclu dans le DVD : Before Hollywood There Was Fort Lee, N.J. - Early Moviemaking in New Jersey chez Image Entertainment, Z1 US)
Lorna Doone (chez Kino International, Z1 US)
Alias Jimmy Valentine (inclu dans la boîte The Origins of Film, Image Entertainment, Z1 US, épuisé)
The Blue Bird (chez Kino International, Z1 US)
The Last of the Mohicans (attention! achetez la copie issue de George Eastman House, et pas une autre)
On trouve aussi maintenant:
Poor Little Rich Girl dans un coffret Pickford (chez Milestone Films, Z1)
Et chez Grapevine Video (qualité 16mm assez médiocre sur DVD-R):
The Whip, Pride of the Clan, The County Fair (un film produit par Tourneur, mais réalisé par un de ses assistants)
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Frances
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Re: Maurice Tourneur (1876-1961)

Message par Frances »

Merci Ann pour ton intervention et ces renseignements. Je pensais justement à te solliciter pour en savoir plus. Si les qualités de Tourneur étaient déjà présentes dans sa période cinéma muet j'ai hâte de découvrir tout ça.
Je vais lire ton interview de Kevin Brownlow dès que j'ai un moment. :wink:
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Re: Maurice Tourneur (1876-1961)

Message par Frances »

OBSESSION (1933) de Maurice Tourneur avec Charles Vanel, Paul Amiot, Louise Lagrange, Jean Yonnel.
L’histoire en deux mots : Louise a fait interner Maurice, son mari après qu’il a tenté de l’étrangler mais le frère de celui-ci veut à tout prix le faire sortir de l’asile. De retour chez lui Maurice est à nouveau en proie au délire de persécution.
Image
Aussi connu sous le titre de L’homme mystérieux, Obsession est un moyen métrage (40 mn) adapté de la pièce éponyme de Charles Binet et André de Lorde. Maurice Tourneur refuse d’aérer la pièce pour gonfler artificiellement la durée du film. Le récit se déroule donc exclusivement en intérieur, orchestré en tableaux successifs ordonnant l’action et sa progression. Les lieux sont les suivants :
- La résidence de Louise et Maurice
- Le bureau du directeur de l’asile
- Les couloirs de l’asile (pour quelques plans rapides).
Ce choix de réduire l’espace, de le confiner au lieu de jouer en défaveur de l’œuvre apporte un sentiment de claustrophobie et touche à deux buts :
- Il renforce notre perception de la folie qui hante littéralement le film
- Souligne la pression que subit Louise (Louise Lagrange) de la part de Pierre, son beau-frère (Charles Vanel) et sa belle-mère. Elle est dans l’impossibilité de fuir physiquement (on notera comment les deux silhouettes l’encadrent pour la pousser à signer une lettre pour libérer son époux) et moralement (tout argument pour se soustraire à la contrainte étant systématiquement repoussé).
Pierre emprisonne Louise à force de persuasion et d’arguments culpabilisants dans une camisole de force invisible la privant de fait de toute autonomie. Elle deviendra la proie des actes de violence à venir de son époux s’il recouvre la liberté (à l’image de l’insecte captif de la toile d’araignée).
Tourneur ne s’empare pas du sujet pour démontrer avec force les failles d’un système mais il dénonce néanmoins – lors de l’affrontement entre le médecin de l’asile et le préfet – l’incohérence et la bêtise de l’institution laissant au haut fonctionnaire de l’état la décision de renvoyer ou non le malade mental dans son foyer. Si le métrage ne permet pas d’en dire plus long on se souviendra de la vive confrontation qui oppose le médecin au préfet, laissant le premier abattu devant l’inconscience du second.
Voilà pour le contenu des deux premiers actes, le troisième et dernier s’intéressant au retour de Maurice parmi les siens.
Passons aux personnages :
Tourneur fait appel à Charles Vanel qui interprète avec beaucoup de conviction Pierre le salaud, le frère cupide et sans état d’âme, résolu à tous les stratagèmes, audaces et coups de force pour arracher Maurice à l’institution psychiatrique pour mieux profiter de sa fortune.
A ses côtés Jean Yonnel connu pour son jeu souvent emphatique et plombant…mais ici Tourneur lui donne un rôle qui lui va comme un gant, sa démesure nourrit la personnalité dérangée du mari et accentue les affres de la paranoïa qui le ronge. On retiendra la scène très réussie du flash back – quand sa femme se remémore et évoque la soirée où il faillit l’étrangler – et la scène finale avec son fils où il incarne la figure d’un grand pantin désarticulé, presque inerte devant les élans de tendresse du gamin, ses mains de géant finissant par l’enlacer comme si elles allaient l’engloutir tout entier. On pense alors furtivement au Nosferatu de Murnau.
On notera également la présence de Louise Lagrange dans le rôle de Louise (épouse de Maurice Tourneur) qu’on a surtout vu à l’époque du muet dans les films de Feuillade et de Méliès.
In fine quel message nous délivre M. Tourneur ? Faut-il comprendre que la société est incapable de nous protéger du « mal »…et que contre toute attente c’est l’amour paternel qu’il reliant le cœur à la raison dans un éclair de lucidité commande au fou de retourner à l’asile pour protéger ceux qu’il aime ?
Si Maurice Tourneur ne fait pas montre ici d’une certaine virtuosité dans la réalisation et se cantonne à une forme classique on prend cependant un réel plaisir à suivre ce moyen métrage plutôt bien mené.
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Re: Maurice Tourneur (1876-1961)

Message par Commissaire Juve »

Tiens, j'en ai découvert une bien bonne... Dans la version Tourneur de L'île au Trésor (1920), le personnage de Jim Hawkins est tenu par une fille ! Une certaine Shirley Mason dont je n'avais jamais entendu parler.

D'après la IMDb, le film serait considéré comme perdu.

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Re: Maurice Tourneur (1876-1961)

Message par Hitchcock »

Je crois que c'était assez fréquent à l'époque. Les premières versions de Peter Pan étaient aussi interprétées par des jeunes filles (si je ne dis pas de bêtises).
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Re: Maurice Tourneur (1876-1961)

Message par lilmoz »

Son meilleur film pour moi "La Main du Diable"!
Rashomon
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Re: Maurice Tourneur (1876-1961)

Message par Rashomon »

Hitchcock a écrit :Je crois que c'était assez fréquent à l'époque. Les premières versions de Peter Pan étaient aussi interprétées par des jeunes filles (si je ne dis pas de bêtises).
Le rôle a été crée par une actrice, et n'a pratiquement été interprété que par des femmes depuis lors.
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Ann Harding
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Re: Maurice Tourneur (1876-1961)

Message par Ann Harding »

Ma biographie de Maurice Tourneur sortira à la fin du mois de janvier. Les détails sont .
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