Pre-Code Hollywood

Rubrique consacrée au cinéma et aux films tournés avant 1980.

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Ann Harding
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Re: Pre-Code Hollywood

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Upper World (L'Homme de quarante ans, 1934) de Roy Del Ruth avec Warren William, Mary Astor, Ginger Rogers et Dickie Moore

Alexander Stream (W. William), un magnat du chemin de fer, s'ennuie dans sa luxueuse propriété. Son épouse Hettie (M. Astor) est obsédée par sa vie sociale et le délaisse. Un jour, il rencontre une show girl, Lily Linda (G. Rogers) qu'il sauve de la noyade...

Ce délicieux Pre-Code bénéficie d'un bon scénario signé Ben Hecht. Le film commence comme une comédie. Nous découvrons la vie des super-riches qui mènent une existence oisive et superficielle. Entourés de domestiques qui ne peuvent vaquer à leurs occupations car le maître fait la grasse matinée jusqu'à midi, les Stream sont un couple en complète dislocation. Elle (Mary Astor) ne songe qu'à sa vie mondaine faite de dîners et cocktails et lui essaie d'échapper à ses rendez-vous pour flirter avec une show girl. Leur fils Tommy (joué par Dickie Moore) est laissé aux domestiques avant d'être expédié dans un 'summer camp' chic. Laissé seul par son épouse, Alexander Stream (Warren William) s'amourache de Lily Linda (Ginger Rogers) qui lui apporte une affection qui lui manque auprès de sa femme. Mais, la situation va virer au cauchemar quand le petit ami de Linda (J. Carroll Naish) essaie de le faire chanter. Linda est tuée et il tire sur son meurtrier. Il tente de maquiller maladroitement le crime. Le film fourmille de détails réjouissants tels que les discussions en maître et chauffeur. Warren William, toujours parfait en homme de la haute atteint du démon de midi, discute avec Andy Devine (toujours aussi truculent) de jolies filles et comment en rencontrer. Devine dit préférer les bibliothèques municipales où il cible les filles qui aiment lire les romans d'amour. De même, le policier interprété par Sidney Toler se révéle être le déclencheur de la chute d'Alexander Stream. Il lui a fait perdre son travail et celui-ci se vengera en enquêtant sur le meurtre de Linda. Tout cela est rondement mené par un Roy Del Ruth en grande forme. Mary Astor joue avec son talent habituel la dame de la haute dévorée par la 'jet set'. Ginger Rogers, alors débutante, est une show girl fort aguichante avec un costume de scène ultra-léger, typique de la période. Le seul bémol vient du final du film qui parait expédié et peu crédible comme si tout était bien dans le meilleur des mondes après la démonstration inverse que nous avons eu durant tout le film. Un très bon petit film Warner.
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Ann Harding
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Side Streets (1934, Alfred A. Green) avec Aline MacMahon, Paul Kelly, Ann Dvorak et Dorothy Tree

A San Francisco, Bertha (A. MacMahon) tient une boutique de fourrure qu'elle dirige avec succès. Un jour, elle rencontre un marin sans le sou, Tim O'Hara (P. Kelly). Elle l'invite chez elle et de fil en aiguille, elle tombe amoureuse de lui, puis l'épouse. Mais Tim la trompe avec la jeune Marguerite (A. Dvorak)...

Cette série B de la Warner, sans prétention, se révèle être un très bon film grâce à un excellent scénario. Aucune star dans les premiers rôles, mais la géniale Aline MacMahon domine un casting très professionnel. Cette artiste souvent confinée dans les seconds rôles, à cause de son physique sans âge, fait montre d'un immense talent en femme d'affaire qui épouse un homme plus jeune qu'elle. Le film est définitivement un 'pre-code' dans son approche sans langue de bois de l'infidélité et la présence -fort rare- d'un lit conjugal à deux personnes. Pour une fois, les personnages ne sont pas blancs ou noirs, mais ils ont tous une tonalité complexe de gris. Aline MacMahon est une femme de tête qui a toujours été célibataire, mais elle tombe amoureuse de cet homme qu'elle connaît à peine. Le mariage paraît bien précaire au premier abord: il n'est pas bon à grand chose et la trompe allègrement. De son côté, elle mène sa boutique avec talent tout en sachant que son époux ne lui est pas fidèle. Elle semble accepter cet état de fait, car elle se sait plus âgée que lui. Tout change avec l'arrivée de leur enfant. Tim renonce à sa maîtresse et devient un papa-poule qui fait l'admiration de tous. Mais, la mort subite de l'enfant va les plonger dans une crise encore plus aiguë. La nièce de Bertha, la rouée Ilka (D. Tree) cherche à amadouer Tim et voudrait qu'ils partent tous les deux. Le film est aussi une réussite grâce à sa description des clients qui fréquentent la boutique de Bertha. On y voit des hommes qui viennent acheter des manteaux luxueux pour leurs maîtresses alors qu'avec leurs femmes, ils ne sont prêt à acheter qu'une petite étole en renard. Bertha comprend tous ces manèges et réussit même à 'venger' la femme légitime en lui revendant le manteau qui a appartenu à la maîtresse. Seul le final paraît un peu expédié, bien qu'inattendu. Un bon petit Warner qui montre le grand talent d'Aline MacMahon.
Ce film est disponible en Warner Archives.
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Un excellent Pre-code fort peu connu.

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Night World (1932, Hobart Henley) avec Boris Karloff, Lew Ayres, Mae Clarke, Hedda Hopper et Bert Roach

'Happy' MacDonald (B. Karloff) dirige un night-club où se retrouvent les riches new-yorkais qui viennent boire et s'encanailler. Ruth Taylor (M. Clarke), une simple chorus girl va y rencontrer Michael Rand (L. Ayres) qui vient se saouler tous les soirs pour oublier le meurtre de son père...

Cette petite production Universal est un petit bijou de moins de 60 min qui réussit à combiner la comédie musicale, le film noir et le mélodrame. C'est un film choral qui rappelle sur un mode parodique et nettement plus noir, Grand Hotel (1932, E. Goulding) qui fut un des gros succès MGM cette même année. Mais, l'atmosphère est nettement moins glamour que dans le film MGM. Le night-club de Happy est un lieu où les vieux messieurs sortent avec des filles très jeunes, d'autres ne viennent là que pour se saouler. Prohibition oblige, les alcools forts sont dissimulés sous la table pendant que trônent les bouteilles de 'root beer'. Dans ce petit monde interlope, on croise des gangsters (un jeune George Raft) ou des fils à papa (L. Ayres). Au milieu, il y a la figure lumineuse de Mae Clarke, héroïne du fameux Waterloo Bridge (1931) de James Whale. Le ton du film oscille entre la comédie et le drame avec bonheur. Il est évident que personne ne se prend totalement au sérieux. Karloff joue le gangster patron de night-club avec brio. Hedda Hopper fait une apparition en mère meurtrière et cupide. Et tous les seconds rôles sont formidablement tenus par des 'character actors' de grand talent tel Bert Roach en provincial de Schenectady, en gogette, complètement éméché. Tous les petits rôles sont délicieusement dessinés, avec au premier rang Clarence Muse en portier qui attend avec impatience des nouvelles de sa femme qui est à l'hôpital. Il faut aussi mentionner que Busby Berkeley a chorégraphié les quelques numéros musicaux qui parsèment le film avec ses figures kaléidoscopiques. Le fil s'ouvre sur un montage virvoltant qui suggère la vie nocturne new-yorkaise la plus débridée et qui rappelle l'ouverture de So This is Paris (1926, E. Lubitsch). Le final lui se rapproche du film de gangster qui en train d'éclore à l'époque. Un délicieux Pre-Code plein de sous-entendus.
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Encore un film qui est difficile à classer. Je le mets donc ici.

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Once in a Lifetime (1932, Russell Mack) avec Jack Oakie, Sidney Fox, Aline MacMahon, Russell Hopton et Gregory Ratoff

1927, trois artistes de music-hall, George, May et Jerry (J. Oakie, A. MacMahon et R. Hopton) décident de partir tenter leur chance à Hollywood suite à l'arrivée du parlant qui a vidé leur théâtre. Ils créent un cours d'élocution au sein du studio Glogauer dirigé par Herman Glogauer (G. Ratoff)...

Adaptée d'une comédie de George S. Kaufman et Moss Hart, cette délicieuse production Universal nous emmène dans les coulisses d'Hollywood à l'orée du parlant. Les deux auteurs se moquent du système hollywoodien où le bluff passe pour du talent. Les trois artistes de 'vaudeville' n'ont aucun mal à se faire une place dans ce milieu factice où le plus nul d'entre eux, George (très bien joué par Jack Oakie) arrive à faire passer sa bêtise pour du génie auprès du patron, Glogauer. Ce dernier avec son épais accent russe, n'y connaît pas grand chose non plus et il bombarde George producteur exécutif. Il se retrouve en charge de la nouvelle production maison dont la star est la fragile et parfaitement sotte, Susan Walker (Sidney Fox). Bien qu'il se soit trompé de scénario - et que le film paraisse inepte - il est salué par les critiques comme une superbe réussite. Morale de l'histoire : à Hollywood au début du parlant, si on est totalement nul, on a toutes ses chances. Le film fourmille de seconds rôles réjouissants avec la géniale Aline MacMahon qui devient professeur d'élocution en rien de temps en se fabriquant un CV bidon. Zasu Pitts est la secrétaire de Glogauer toujours dans la lune et incapable de se souvenir du nom des visiteurs. Louise Fazenda joue une journaliste 'reine du potin' dans le moule de Louella Parsons. C'est une production atypique pour le studio Universal qui mériterait d'être mieux connue et qui montre qu'Hollywood a su très tôt se moquer de lui-même. Carl Laemmle a eu du nez en achetant cette pièce de Kaufman et Hart.
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Miss Nobody
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Re: Pre-Code Hollywood

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J'alimente un peu le topic avec ces quatre récentes et belles découvertes de la collection Forbidden Hollywood.
Par ordre de préférence: :)

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Five star final (Leroy) 8/10
L'intrigue posée sur papier pourrait paraître un brin boursouflée et/ou moraliste, mais le résultat à l'écran est simplement foudroyant. Leroy maîtrise parfaitement ses effets: de pamphlet virulent contre la presse, il passe au mélodrame le plus pur et maintient une tension sans faille dès lors que la trame est nouée. Ce "Five star final" est un vrai coup de coeur: un petit film qui a excellemment vieilli (à quelques interprétations théâtrales près) et qui recèle une scène de SPOILER suicide(s) qui est sans doute la plus puissante -et formidablement pudique- que j'ai pu voir au cinéma.

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Other men's women (Wellman) 7/10
Petit film d'une petite heure, finement écrit et réalisé avec grâce. Court mais jamais expéditif, langoureux sans être mièvre, ce "Other men's women" possède un charme certain, à l'instar de son trio d'interprètes (Mary Astor est vraiment craquante). Si les 20 premières minutes (introduction extrêmement condensée et pourtant d'une subtilité percutante) sont quasi-parfaites, la suite de l'intrigue est plus attendue. On se réjouira néanmoins de l'absence de moralisme (avec un titre pareil, on pouvait s'attendre au pire), de la beauté de certains plans et scènes, et de la présence en second plan des tout jeunes James Cagney et Joan Blondell.

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Baby Face (Green) 7/10
"Baby Face", c'est un peu le pendant féminin aux films de gangsters des années 30. La misère qui acère les crocs, l'ascension plus vertigineuse encore que l'ambition, puis le gouffre de l'immoralité qui vient s'ouvrir sous les pieds de notre personnage. Ici, la divine Barbara Stanwyck, arriviste blasée par la vie, cassée par les hommes, sera sauvée de justesse par un amour rédempteur... et bien sûr, c'est un peu dommage.

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Prologue / Footlight Parade (Bacon) 7/10
Troisième volet de la trilogie Berkeley de 1933, ce "Prologue" est un backstage musical à la fois anodin et remarquable, où se côtoient des personnages très attachants (et des interprètes qui ne le sont pas moins), des intrigues assez banales, des chorégraphies hallucinantes et un petit goût de pré-code assez savoureux. Cela reste un peu dommage que, comme traditionnellement, tous les numéros se retrouvent condensés dans les dernières minutes, créant un petit déséquilibre au niveau du rythme et une résolution d'intrigue un peu abrupte. Les trois tableaux finaux sont heureusement de magnifiques créations : "By the waterfall" imprime la pupille durablement et "Shanghai Lil" étonne par son ambiance sous opium.
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Re: Pre-Code Hollywood

Message par feb »

Voilà un post qui fait sacrément plaisir :D
Miss Nobody a écrit :...à l'instar de son trio d'interprètes (Mary Astor est vraiment craquante).
Absolument 8) L'actrice y est vraiment superbe.
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Ann Harding
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Re: Pre-Code Hollywood

Message par Ann Harding »

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Blood Money (1933, Rowland Brown) avec George Bancroft, Frances Dee et Judith Anderson

Bill Bailey (G. Bancroft) est un 'bailbondsman', c'est-à-dire qu'il prête de l'argent aux gangsters pour payer leurs cautions. Il tombe amoureux d'Elaine Talbart (F. Dee) qui est kleptomane et la fille d'un richissime homme d'affaire...

Le scénariste Rowland Brown n'a réalisé que trois films. Il fut ensuite mis sur la liste noire des réalisateurs à éviter suite à une rixe avec un producteur. Blood Money est son troisième opus qui, dans cette période heureuse du pre-code, lui permet d'explorer le monde interlope des gangsters et des politiciens corrompus. Le personnage central de Bailey (joué par George Bancroft qui avait joué les gangsters dans plusieurs films de von Sternberg) est ici une sorte d'entremetteur entre le monde des voyous et celui de la bonne société qui est loin d'être sans reproches. Il empoche des profits juteux en recevant de l'argent de coquins divers tout en entretenant des relations louches avec les juges et les procureurs. Il suit plus le code de l'honneur des gangsters que celui des soi-disant gens honnêtes. Quant à Frances Dee, c'est une fille à papa qui recherche la compagnie des gangsters avec délice. On devine chez elle un mélange de masochisme et de nymphomanie qui lui fait dire qu'elle rêve "d'être tenue en laisse" par un mauvais garçon ! La compagnie de Bill Bailey ne va pas être suffisante pour cette fille qui cherche à se mettre en danger en volant dans les magasins ou en suivant un gangster en fuite. Ce court film de 65 min se termine par une course poursuite haletante alors que Bailey s'apprête à taper dans une boule de billard chargée d'explosifs. Il faut aussi noter la présence de Judith Anderson dans ce qui fut son premier film en tenancière de boîte de nuit connectée avec la pègre. Rowland Brown brosse un portrait sans concession d'une société gangrénée par la corruption. La fin de la prohibition allait bientôt limiter les actions des voyous et des corrompus. Et l'arrivée du code de production allait lui aussi stopper la dénonciation de la corruption. Un film qu'il faut redécouvrir.
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Re: Pre-Code Hollywood

Message par feb »

Entre ce film et celui de Wyler, tous les 2 avec Frances Dee, tu nous gates Ann :shock:
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Re: Pre-Code Hollywood

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Under 18 - Archie Mayo (1931)

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1931, une production Warner, Marian Marsh, Anita Page, Warren William, Archie Mayo à la réalisation et un titre, Under 18, très Pre-Code. Tout semblait réuni pour faire de ce film un petit Pre-Code social comme la Warner a su en faire durant cette période mais malheureusement il n'est pas aussi bon que son titre le laissait espérer.

Une jeune couturière (Marian Marsh) va tout faire pour trouver l'argent nécessaire afin d'aider sa soeur (Anita Page) à divorcer au point de demander à un riche producteur de Broadway (Warren William) moyennant certaines conditions. Avec un tel casting, une histoire aussi simple mais terriblement Pre-Code et un titre aussi intrigant, on pouvait s'attendre à un film piquant, dynamique, jouant avec le Code par le biais de thèmes comme les rapports riches/pauvres, le besoin d'argent, le remboursement "en nature" mais rien de tout ça malheureusement. Le film de Mayo s'avère être un film social avec des touches de film romantique et d'éléments Pre-Code mais ce n'est en rien un pur film Pre-Code comme Baby Face par exemple.
La mise en scène ou le jeu des acteurs ne posent aucun problème, ce qui pêche réellement c'est d'abord un scénario qui ne donne pas assez de corps à son personnage principal, le fait que la partie la plus interessante se retrouve sur les 20 dernières minutes du film et enfin que le twist final soit vraiment décevant voire ridicule. Une fois de plus le film se finit sur une scène plus classique, gommant les aspects Pre-Code au détriment d'un aspect romantique où le personnage principal finit avec celui qu'elle aime, oubliant ce qui vient de se passer. Ce besoin de finir le film sur une touche positive ne fait que grandir le sentiment de frustration que l'on ressent devant un tel gâchis (même si le mot est un peu fort). Marian Marsh est une actrice pétillante et réellement charmante mais c'est vraiment dommage que le scénario lui offre si peu pour s'exprimer, Anita Page est une actrice que je découvre petit à petit et qui brille par un jeu naturel et fort au point qu'elle eclipse le reste du casting lors de ses scènes (on en vient à regretter que son personnage soit si peu utilisé), et, enfin, Warren William est fidèle à lui même dans ce rôle de prédateur mais il est ici peu présent et il souffre d'une fin assez ridicule.
Le film se laisse néanmoins regarder par curiosité, pour sa description de la vie difficile des personnages de Margie et Sophie en totale opposition au Penthouse très Art-Deco de Raymond Harding et pour ses quelques notes Pre-Code (mais je soupçonne quand même la production d'avoir fait tomber pas mal de pellicule par terre à cause de scènes où l'avortement semble être la solution pour la grossesse du personnage de Sophie (Anita Page)) mais le casting et le titre auraient pu (et du) donner beaucoup mieux.

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Re: Pre-Code Hollywood

Message par Ann Harding »

Je viens de regarder toute une série de pre-codes gouleyants. En voici déjà deux:

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Employees' Entrance (1933) de Roy Del Ruth avec Warren William, Loretta Young, Wallace Ford, Alice White and Albert Gran

Kurt Anderson (W. William) dirige d'une main de fer un grand magasin new-yorkais. La jeune Madeline (L. Young) qui recherche désespérement un emploi, en fait les frais. Ayant obtenu un job de mannequin dans le magasin, elle doit cacher à tout le monde qu'elle est fiancé à Martin (W. Ford), qui devient le bras droit d'Anderson...

Cet excellent film de Roy Del Ruth contient l'une des meilleures interprétations de Warren William, un des piliers de la Warner durant la période pre-code. En patron tyrannique, qui ne recule devant rien pour augmenter les marges bénéficiaires du magasin, il montre des qualités d'éloquence et de dynamisme qui rappellent John Barrymore dans Counsellor-at-law (1933, W. Wyler). Ayant dû grimper les échelons à la seule force de son caractère, il élimine toute personne qui ne correspond pas à son idée du succès. Un vieil employé se suicide suite à son renvoi : qu'importe ! Pour ce qui est des femmes, il leur offre une chance d'emploi si elles veulent bien passer par sa chambre à coucher. Il n'a pas ni morale, ni remords. Toute sa vie est concentrée sur son travail. Loretta Young est ici une proie facile face à ce prétadeur, mais elle réussira finalement à échapper à ses griffes après bien des tourments. Les seconds rôles sont tenus par une multitude de têtes connues de l'époque avec tout le talent voulu. Le film est dynamique et superbement construit. Un vrai moment de bonheur qui n'oublie pas de nous faire réfléchir sur une société où le profit prime sur tout.

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Massacre (1934) d'Alan Crosland avec Richard Barthelmess, Ann Dvorak, Claire Dodd, Dudley Digges, Clarence Muse et Tully Marshall

Le chef Thunderhorse (R. Barthelmess) travaille dans un cirque où il réalise un numéro d'acrobatie équestre qui lui vaut de nombreux succès féminins. Un jour, il apprend que son père est mourant et il part pour la réserve des Sioux qu'il a quittée depuis des décennies...

Massacre est une oeuvre à part dans la production pre-code des années 30. Alors que les Indiens avaient eu droit à un traitement sympathique durant les années 10 et 20, l'arrivée du parlant et la descente en gamme des westerns (rélégués aux séries B, voire pire) en fait de simples sauvages hurlants destinés à tomber sous les coups de revolvers. Heureusement, ce film d'Alan Crosland prend totalement à revers cette vision stéréotypée. Retouvant les accents pro-Indien de The Vanishing American (1925, G.B. Seitz), il fait le portrait d'un Indien qui s'est intégré dans la société blanche de son époque en devenant une star de cirque. Certes, il en est réduit à jouer de son image et à en rajouter avec un maquillage foncé, mais Thunderstorm a acquis patiemment une place dans la société. C'est en retournant dans la réserve qui accueille les siens qu'il va réaliser à quel point les Indiens ne sont pas des citoyens américains à part entière. Ils n'ont strictement aucun droit face à des officiels corrompus, les fameux agents des réserves, qui peuvent s'emparer de leurs biens ou violer leur fille sans qu'ils puissent protester. Lorsque Thunderstorm arrive, il réalise qu'il va falloir défendre rapidement sa tribu en utilisant toutes ses connaissances acquises grâce à sa renommée. Le film offre un tableau sans concession de la vie misérable des peaux-rouges et se permet même de comparer leur sort avec celui des noirs. Clarence Muse, qui joue le valet de Barthelmess, constate lui-même que son sort de domestique est nettement plus enviable que celui des Indiens de la réserve. Barthelmess est égal à lui-même, dans une période où sa carrière va bientôt se clore, en redresseur de torts dans la lignée de Paul Muni dans I Was a Fugitive from a Chain Gang (1932, M. LeRoy). La fin heureuse paraît peu plausible, mais qu'importe. C'est un film noir qui se déguste avec plaisir pour son ton inhabituel.
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Re: Pre-Code Hollywood

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Achat des Forbidden Hollywood Vol. 6 & 7 obligatoire :mrgreen:
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Re: Pre-Code Hollywood

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feb a écrit :Under 18 - Archie Mayo (1931)

une production Warner, Marian Marsh, Anita Page, Warren William, Archie Mayo à la réalisation et un titre, Under 18, très Pre-Code. Tout semblait réuni pour faire de ce film un petit Pre-Code social comme la Warner a su en faire durant cette période mais malheureusement il n'est pas aussi bon que son titre le laissait espérer.
J'ai moi aussi regardé Under 18 que j'ai nettement plus apprécié que Feb. Je n'avais aucun préjugé sur le film, même par rapport à son titre. Et j'ai été très agréablement surprise.

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Under 18 (1931, A. Mayo) avec Marian Marsh, Anita Page, Warren William et Regis Toomey

Margie Evans (M. Marsh) est couturière dans une maison de couture chic de New-York. Elle vit dans un tout petit appartement de L'East End avec sa mère et espère pouvoir un jour monter en grade. Sa soeur (A. Page) et son beau-frère débarquent un jour chez eux ; ils n'ont plus de toit...

Under 18 appartient à cette série de films Warner qui offrent des commentaires sociaux sur la vie des petites gens. Comme dans Employees' Entrance, on découvre la vie des filles mannequin qui se vendent au plus offrant pour arrondir leur fin de mois. Mais, comme le dit une de leurs collègues, elles sont tenus par leurs riches amants qui ne leur donnent pas un cent en argent de poche. Le rôle principal du film est une jeune fille innocente et naïve qui regarde tout ce monde sans nécessairement comprendre l'envers du décor. Ainsi lorsqu'elle découvre que sa soeur Sophie (Anita Page) est malheureuse avec son époux, elle lui suggère de divorcer, appliquant les recettes qu'elle a entendues au salon de couture. Elle croît faire au mieux pour sa soeur en se décarcassant pour trouver les 200 dollars nécessaires pour l'avocat. Elle va aller naïvement voir son petit ami Jimmy (R. Toomey), un riche client (W. William) et son patron. Margie pense que le mariage n'est peut-être pas cet état de bonheur absolu qu'elle envisageait lorsqu'elle voit sa soeur en train de se quereller avec son époux sans emploi. Après tout, elle pourrait elle aussi devenir modèle et se faire entretenir par un riche vieux beau comme Raymond Harding (Warren William). Lorsqu'elle aura visiter le luxueux appartement du millionaire avec ses soirées endiablées autour d'une piscine, elle sera capable de réfléchir sereinement à tout cela. Le scénario offre une série de surprises et d'événements inattendus qui tiennent en haleine. Et au final, Margie aura les 200 dollars convoités. Mais, ils se révèleront inutiles : entre temps, sa soeur s'est réconciliée avec son époux. Marian Marsh est excellente en jeune fille naïve et fraîche. Il y a de très bons seconds rôles et c'est une belle réussite à mettre au crédit de Mayo.
feb
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Re: Pre-Code Hollywood

Message par feb »

Je l'ai revu il y a peu dans le cadre de mon AnitaPagethon :mrgreen: et je reste quand même sur ma faim, la faute à une Page sous-exploitée et à une fin que je continue de qualifier de ridicule pour le personnage de Warren William. Ce sont vraiment les 2 points sur lesquels je râle un peu parce que pour tout le reste c'est un Pre-Code bien emmené :wink:
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Re: Pre-Code Hollywood

Message par Ann Harding »

feb a écrit :Je l'ai revu il y a peu dans le cadre de mon AnitaPagethon :mrgreen: et je reste quand même sur ma faim, la faute à une Page sous-exploitée et à une fin que je continue de qualifier de ridicule pour le personnage de Warren William. Ce sont vraiment les 2 points sur lesquels je râle un peu parce que pour tout le reste c'est un Pre-Code bien emmené :wink:
Anita Page est quand même une actrice assez limitée. Le film où je la préfère, c'est Night Court (1931, WS Van Dyke). Le fait q'elle n'ait qu'un petit rôle dans Under 18 n'est pas un problème pour moi. Elle joue un rôle quasiment identique dans The Easiest Way (1931, J. Conway) où elle est la petite soeur de Constance Bennett.
feb
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Re: Pre-Code Hollywood

Message par feb »

Ann Harding a écrit :Anita Page est quand même une actrice assez limitée...Le fait q'elle n'est qu'un petit rôle dans Under 18 n'est pas un problème pour moi.
Ca ne va pas faciliter notre discussion Ann :mrgreen: Je ne suis pas du même avis concernant cette actrice que je trouve sous-estimée et qui n'a pas eu droit au même traitement que les Stars de la MGM. Je reste persuadé qu'elle aurait pu prétendre à mieux...
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