Les Visiteurs (Elia Kazan - 1972)

Rubrique consacrée au cinéma et aux films tournés avant 1980.

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Flol
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Les Visiteurs (Elia Kazan - 1972)

Message par Flol »

The Visitors (Kazan) : huis-clos oppressant, sorte de précurseur au Straw Dogs de Peckinpah, mais en moins violent et ayant pour toile de fond les conséquences du Vietnam.
Un film étrange, tout en retenue pendant 1h, baignant dans une atmosphère troublante (l'action se déroulant durant une seule et même journée, mettant en scène uniquement 5 personnages), avant que les 20 dernières minutes ne viennent conclure le film sur une note violente et pessimiste (très "beau" dernier plan).
Un film atypique dans la carrière de Kazan, me semble-t-il.
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Boubakar
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Les visiteurs (Elia Kazan, 1972)

Message par Boubakar »

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[quote]Bill Schmidt vit en paix avec sa femme et son fils quand Tony et Mike, deux anciens compagnons du Viêt Nam, viennent s'installer chez lui.[/quote]
Avant-dernier film d'Elia Kazan, il est particulier à plus d'un titre.
Réalisé dans la maison du réalisateur, avec une équipe technique et artistique extrêmement réduite (il n'y a que cinq acteurs), c'est un film assez fort sur les comportements humains.
Disons que c'est un mélange entre le Outrages de De Palma et Les chiens de paille pour la dureté de son propos.

Le film n'échappe pas à certains griefs dûs à son tout petit budget, (il n'y aucune musique, sauf à la fin, provenant d'une radio) mais au fond, ça n'a aucune importance, tellement c'est passionnant d'assister à cette sorte de montée en puissance du sujet, jusqu'à un final assez rude, où l'on peut voir une certaine ambiguïté.
Excepté un le père de la femme, tous les acteurs sont débutants, et sont tout de même impeccables, malgré les situations qu'ils vivent.
C'est parfois un peu long, mais ça installe l'ambiance et de découvrir que le père n'aime pas son gendre au profit des deux militaires, notamment quand il tue un chien avec son fusil. Le personnage de Bill nous est présenté comme un homme assez lâche, et fuyant plus ou moins ses responsabilité, et ça, on le comprendra dans le film.

Quant au dvd, il propose un superbe documentaire du début des années 80, où Kazan, en compagnie de Michel Ciment, se raconte, sans occulter les moments "sombres"' de sa vie, avec un talent de conteur assez irrésistible.
Le film a l'air d'être très rare en dvd, on peut être contents de découvrir une telle œuvre, où le pessimisme et la force du propos sont de rigueur.
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Watkinssien
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Re: Les visiteurs (Elia Kazan, 1972)

Message par Watkinssien »

Kazan signe une oeuvre dure, sans concessions, parfaitement servie par ses jeunes acteurs (dont James Woods.

C'est un film intéressant par son contexte (la guerre du Vietnam) et par son parti-pris de filmer au plus près les visages (ce que Kazan commençait à faire dans les années 60).

Ce n'est pas mon préféré du cinéaste, car je trouve la charge un peu lourde avec le recul, mais cela vaut le coup d'oeil !
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Nestor Almendros
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Re: Les visiteurs (Elia Kazan, 1972)

Message par Nestor Almendros »

On pense à OUTRAGES et c'est normal puisque les deux films sont basés sur le même fait divers, il me semble. l'histoire des VISITEURS est en quelque sorte la suite du film de De Palma.
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Commissaire Juve
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Re: Les visiteurs (Elia Kazan - 1972)

Message par Commissaire Juve »

Tu as bien fait de préciser "Elia Kazan" ! :mrgreen: A un moment, j'avais pensé à un tout autre film...
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Re: Les visiteurs (Elia Kazan - 1972)

Message par Miss Nobody »

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Les visiteurs - The visitors

« Les visiteurs » est un film singulier. Tourné dans une indépendance quasi-totale, avec peu de moyen et dans la propre maison du cinéaste, il aborde sans concession le sujet, encore tabou à l'époque, de la guerre du Vietnam, et, dans de grands espaces enneigés immaculés, il s'enfonce dans les zones obscures de l'âme humaine.
Au niveau de la forme, très épurée, « Les visiteurs » a des allures de film amateur: l'image est granuleuse, pas toujours très nette, les couleurs sont nauséabondes et les plans quelquefois étrangement cadrés. De plus, l'accompagnement musical est quasiment absent et les acteurs sont des débutants (ce qui ne les dispensent pas d'être très bons par ailleurs).
Mais cette apparente faiblesse technique n'est évidemment qu'un leurre car le renommé et sextagénaire Elia Kazan est un réalisateur qui, en 1972, n'a plus à prouver son talent. Il continue néanmoins inlassablement à lutter contre ses vieux démons, et le scénario que lui offre son fils Chris avec « Les visiteurs » est à la fois un moyen de les exorciser (à la manière de « Sur les quais ») et l'expression du malaise profond de la jeunesse de l'époque.
La nudité stylistique du film sert de manière brute et terriblement efficace la profondeur et la violence du propos, qui, malgré la simplicité trompeuse du synopsis, est extrêmement riche et bouleversant. Et si le film retourne franchement l'estomac dans sa séquence finale, il donne surtout à réfléchir... sur la condition humaine, sur les guerres passées qui sont un peu celles d'aujourd'hui, mais aussi sur la dénonciation et ses conséquences: le sentiment de culpabilité pour les uns et la rancoeur pour les autres.
« Les visiteurs » est un huis-clos sobre et froid qui, en jouant sur un point de rupture impalpable, oppresse le spectateur du début à la fin, et qui, en dépeignant les aspects les plus noirs des comportements humains, marque fortement et durablement.
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Roy Neary
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Re: Les visiteurs (Elia Kazan - 1972)

Message par Roy Neary »

Aujourd'hui, DVDClassik met en ligne sa chronique du DVD Wild Side Les Introuvables consacré aux Visiteurs d''Elia Kazan.

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monk
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Re: Les Visiteurs (Elia Kazan - 1972)

Message par monk »

Je ne connaissait rien du film, ça a été une drôle de surprise. Je ne m'attendais pas à un film aussi radicale et sec de la part de Kazan. C'est un film indé 70's cheap dans la forme, mais particulièrement inconfortable et oppressant. La violence est lattante, jusqu'à ce qu'elle s'exprime pleinement. Bill, principalement, voit son monde s'écrouler de toute part...
Spoiler (cliquez pour afficher)
Y compris sa femme qui lui tourne le dos, en plus de son beau père...horrible.
Un film assez terrifiant en fait, qui m'a d'autant plus choqué que je ne m'y attendais vraiment pas.
Blue
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Re: Les Visiteurs (Elia Kazan - 1972)

Message par Blue »

"Les Visiteurs" est un film qui semble détonner de prime abord dans la filmo de Kazan, mais surtout c'est une oeuvre très intéressante historiquement pour ceux qui étudient le nouvel Hollywood, et plus particulièrement cette période qui marque la fin de l'utopie des 60's (initiée par l'assassinat de Kennedy en 1963, puis précipitée avec celle de Sharon Tate en 1969, suivi du drame du concert d'Altamont la même année) à travers des films emblématiques comme "Easy Rider" (1969) ou "Husbands" (1970). Quand on commence à creuser un peu, on se rend compte que Kazan, avec "Les Visiteurs" sorti en 1972, est complètement en phase avec les enjeux de son époque (contrairement à Lean, par exemple, qui avec "La Fille De Ryan" en 1970, réalise un film qui semble alors d'un autre temps - mais qui est un chef d'oeuvre absolu qu'il faut absolument redécouvrir !)
Même le grand Kubrick, qui avait exprimé en 1968 son espoir en l'humanité à travers le plan final de "2001 : L'Odyssée De L'Espace", s'est ensuite "repris" avec "Orange Mécanique" (1971).

Mais à y regarder de plus près encore, dans l'entourage de Kazan plus exactement, ce n'est pas si étonnant que ça. Si on jette un oeil au "Wanda" (1970) de Barbara Loden - alors sa femme -, on se rend compte que l'esthétique "cinéma indépendant" de "Les Visiteurs" est déjà là. Caméra portée, image granuleuse en 16mm, photographie minimaliste ; on se croirait bel et bien chez un élève de Cassavetes.

Et puis il y a le sujet du film. Kazan traite avant tout le monde et avec une grande lucidité, du traumatisme de la guerre du Vietnam (alors pas encore terminée), sur un script de son fils Chris Kazan, basé sur le même fait divers que dans le mésestimé "Outrages" de Brian De Palma. Et ça retourne ! Kazan signe un "home invasion" sans concession, qui n'est pas sans rappeler par certains aspects, le culte "Chiens De Paille" de Sam Peckinpah (1971).

"Les Visiteurs" est un film marquant non seulement pour ce qu'il est, mais aussi pour sa place dans l'histoire du cinéma américain. Le découvrir donne l'impression d'ajouter une pièce essentielle à ce puzzle passionnant qu'est le nouvel Hollywood.

8/10
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