John Huston (1906-1987)
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Re: John Huston (1906-1987)
THE NIGHT OF THE IGUANA - John Huston (1964) révision
Revu dans une salle insupportable de la Cinémathèque à l'occasion de la rétrospective John Huston. Une salle pleine à craquer, dissipée, énervée, prête à bavarder pendant le film, à gesticuler plus que de raison, à frapper les sièges de devant, à rire bêtement à chaque geste de Richard Burton, à s'engueuler copieusement une fois le film terminé, bref à me gâcher la séance si je n'avais foi en The Night of the Iguana. Car Huston signe là un de ses (multiples) chef d’œuvres, adaptation d'une pièce de Tennessee Williams qui en a bien plus dans le ventre qu'une simple lecture de la pièce. Le réalisateur étoffe considérablement l’œuvre d'origine, lui donne une moiteur palpable, un trouble plus intense et décale le "simple" règlement de compte dans un coin paumé du Mexique vers un chemin de croix déchirant. Rire devant, revient à ne pas se laisser porter par le drame qui est en jeu. L'humour a beau est présent dans la première partie du film, notamment dans tout ce qui concerne le groupe de touristes, il prend une autre saveur à mesure que le personnage de Burton sombre pour finalement devenir jaune dans la dernière partie du film. On ne rit plus, on crispe car l'homme filmé n'est plus maitre de rien. Ses longues discussion avec la rigide Deborah Kerr ne sont ni du bavardage, ni des échanges théoriques mais des non-dits. Il ne faut pas prendre leur discussion final pour argent comptant mais essayer de lire entre les lignes. Quels sont les traumas de Kerr ? Ceux de Burton ? Huston prend parti en entrecoupant ces échanges confus par des plans de toute beauté sur Ava Gardner, personnage physique, spontané et sans afféterie. Éloigné de ses démoniaques clients/paroissiens, de sa Lolita infernale, le prêtre Burton ne peut trouver son repos qu'auprès d'elle, comme le conseille l'évanescente Deborah Kerr. The Night of the Iguana se pose comme la jonction entre le ton mélancolique mais solaire de The Misfits (Burton rejoue le geste de Gable en se rapprochant de Ava/ Marilyn) et le ton tranchant, désespéré de Reflections in a Golden Eye. C'est à la fois un film guilleret, ironique mais en même temps meurtri, qui cache son mal-être derrière les bons mots et les situations cocasses. La boule dans la gorge, j'ai pris les mots "The End" comme un murmure qui m'était destiné, très loin du brouhaha d'une salle de cinéma qui ne voulait pas se donner au film.
Les deux fléaux qui menacent l'humanité sont le désordre et l'ordre. La corruption me dégoûte, la vertu me donne le frisson. (Michel Audiard)
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Re: John Huston (1906-1987)
Quelqu'un peut-il confirmer si le documentaire John Huston: The Man, the Movies, the Maverick est bien présent en bonus de cette édition Z1 du Trésor de la Sierra Madre
(clic on)
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Re: John Huston (1906-1987)
[quote="moonfleet"]Quelqu'un peut-il confirmer si le documentaire John Huston: The Man, the Movies, the Maverick est bien présent en bonus de cette édition Z1 du Trésor de la Sierra Madre
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Oui c'est le 1er bonus du second disque de cette belle édition, attention il n'y a pas de ss-titres, mêmes anglais, sur ce documentaire de plus de deux heures.
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Oui c'est le 1er bonus du second disque de cette belle édition, attention il n'y a pas de ss-titres, mêmes anglais, sur ce documentaire de plus de deux heures.
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Re: John Huston (1906-1987)
Super !!
Merci de ta réponse
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Re: John Huston (1906-1987)
REFLECTIONS IN A GOLDEN EYE - John Huston (1967) révision
Peut-être, voir sans aucun doute, le film de John Huston que j'ai le plus revu. Faudrait que j'en parle à un psy car Reflections in a Golden Eye n'a rien d'un feel good movie, bien au contraire. Qu'il soit dans sa version "ciné", "dorée" ou - ce fut le cas lors d'une projection à la Cinémathèque - partiellement dorée, le film reste d'une pesanteur (au sens noble du terme), d'une gravité et d'une bizarrerie incroyables. Pas d'air, des personnages sur le fil tandis qu'un parfum dégueulasse se dégage du film sans jamais le faire sombrer dans le trash ou la provocation à deux euros. Huston filme son fait divers avec sobriété, mais ne regarde jamais ses personnages de haut. Le drame dans ce monde, c'est que tout le monde a ses raisons et dans Reflections in a Golden Eye, personne n'est à blâmer car tout ce beau monde est condamné, enfermé dans une hypocrisie sur le point de craquer, prisonniers d'un décors étouffant et ridicule. Marlon Brando se torture, Elizabeth Taylor fait comme si rien n'était, Brian Keith ne peut plus saquer sa femme et la pauvre Julie Harris se console avec son valet efféminé. La conclusion est inéluctable, le panoramique final laisse transparaitre une hystérie jusqu'ici (heureusement) absente du film. Une œuvre stressée et stressante qui ne cesse de me bouleverser, donc de me fasciner. Quand d'autres l'évitent, j'aime à mon plonger dans Reflections in a Golden Eye comme on se plonge dans des névroses, les siennes mais surtout celles des autres. John Huston, cinéaste magnifiquement déprimant.
Peut-être, voir sans aucun doute, le film de John Huston que j'ai le plus revu. Faudrait que j'en parle à un psy car Reflections in a Golden Eye n'a rien d'un feel good movie, bien au contraire. Qu'il soit dans sa version "ciné", "dorée" ou - ce fut le cas lors d'une projection à la Cinémathèque - partiellement dorée, le film reste d'une pesanteur (au sens noble du terme), d'une gravité et d'une bizarrerie incroyables. Pas d'air, des personnages sur le fil tandis qu'un parfum dégueulasse se dégage du film sans jamais le faire sombrer dans le trash ou la provocation à deux euros. Huston filme son fait divers avec sobriété, mais ne regarde jamais ses personnages de haut. Le drame dans ce monde, c'est que tout le monde a ses raisons et dans Reflections in a Golden Eye, personne n'est à blâmer car tout ce beau monde est condamné, enfermé dans une hypocrisie sur le point de craquer, prisonniers d'un décors étouffant et ridicule. Marlon Brando se torture, Elizabeth Taylor fait comme si rien n'était, Brian Keith ne peut plus saquer sa femme et la pauvre Julie Harris se console avec son valet efféminé. La conclusion est inéluctable, le panoramique final laisse transparaitre une hystérie jusqu'ici (heureusement) absente du film. Une œuvre stressée et stressante qui ne cesse de me bouleverser, donc de me fasciner. Quand d'autres l'évitent, j'aime à mon plonger dans Reflections in a Golden Eye comme on se plonge dans des névroses, les siennes mais surtout celles des autres. John Huston, cinéaste magnifiquement déprimant.
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Re: John Huston (1906-1987)
Kevin95 a écrit :REFLECTIONS IN A GOLDEN EYE - John Huston (1967) révision
Peut-être, voir sans aucun doute, le film de John Huston que j'ai le plus revu. Faudrait que j'en parle à un psy car Reflections in a Golden Eye n'a rien d'un feel good movie, bien au contraire. Qu'il soit dans sa version "ciné", "dorée" ou - ce fut le cas lors d'une projection à la Cinémathèque - partiellement dorée, le film reste d'une pesanteur (au sens noble du terme), d'une gravité et d'une bizarrerie incroyables. Pas d'air, des personnages sur le fil tandis qu'un parfum dégueulasse se dégage du film sans jamais le faire sombrer dans le trash ou la provocation à deux euros. Huston filme son fait divers avec sobriété, mais ne regarde jamais ses personnages de haut. Le drame dans ce monde, c'est que tout le monde a ses raisons et dans Reflections in a Golden Eye, personne n'est à blâmer car tout ce beau monde est condamné, enfermé dans une hypocrisie sur le point de craquer, prisonniers d'un décors étouffant et ridicule. Marlon Brando se torture, Elizabeth Taylor fait comme si rien n'était, Brian Keith ne peut plus saquer sa femme et la pauvre Julie Harris se console avec son valet efféminé. La conclusion est inéluctable, le panoramique final laisse transparaitre une hystérie jusqu'ici (heureusement) absente du film. Une œuvre stressée et stressante qui ne cesse de me bouleverser, donc de me fasciner. Quand d'autres l'évitent, j'aime à mon plonger dans Reflections in a Golden Eye comme on se plonge dans des névroses, les siennes mais surtout celles des autres. John Huston, cinéaste magnifiquement déprimant.
Pareil ; un film qui continue à me fasciner vision après vision.
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Re: John Huston (1906-1987)
Pareil que vous deux.
Je connaissais plusieurs nouvelles de Carson McCullers avant de découvrir le film, j'étais heureux, fasciné voire même angoissé de retrouver ce climat si particulier des textes de cette formidable mais troublante auteure. Huston a fait non seulement une superbe adaptation du roman et du style de McCullers, mais il a réalisé un film toujours fascinant quel que soit la manière de l'appréhender, thèmes, jeux des acteurs (Brando y est monumental), lumière, son & musique, montage (la fuite à cheval !), etc.
L'impression de mieux saisir le film au début de chaque nouvelle vision, pour au final la même sensation d'inconfort, de folie mais de satisfaction à la fin.
Je connaissais plusieurs nouvelles de Carson McCullers avant de découvrir le film, j'étais heureux, fasciné voire même angoissé de retrouver ce climat si particulier des textes de cette formidable mais troublante auteure. Huston a fait non seulement une superbe adaptation du roman et du style de McCullers, mais il a réalisé un film toujours fascinant quel que soit la manière de l'appréhender, thèmes, jeux des acteurs (Brando y est monumental), lumière, son & musique, montage (la fuite à cheval !), etc.
L'impression de mieux saisir le film au début de chaque nouvelle vision, pour au final la même sensation d'inconfort, de folie mais de satisfaction à la fin.
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Re: John Huston (1906-1987)
Si je ne devais garder qu'une seule prestation d'acteur ce serait celle de Brando dans ce film.
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Re: John Huston (1906-1987)
Dont la relation avec Huston a été d'une facilité peu commune sur le tournage. Huston dit n'avoir eu aucun problème pour le diriger sur le plateau.Jeremy Fox a écrit :Si je ne devais garder qu'une seule prestation d'acteur ce serait celle de Brando dans ce film.
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Re: John Huston (1906-1987)
Vous remarquerez que les grands cinéastes ne t'arrisent pas d’éloges au sujet de l'acteur, à croire que Marlon ne foutait son souk que sur le tournage de réalisateurs disons moins qualifiés.Watkinssien a écrit :Dont la relation avec Huston a été d'une facilité peu commune sur le tournage. Huston dit n'avoir eu aucun problème pour le diriger sur le plateau.Jeremy Fox a écrit :Si je ne devais garder qu'une seule prestation d'acteur ce serait celle de Brando dans ce film.
Les deux fléaux qui menacent l'humanité sont le désordre et l'ordre. La corruption me dégoûte, la vertu me donne le frisson. (Michel Audiard)
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Re: John Huston (1906-1987)
Stanley Kubrick, Charles Chaplin... Et encore, entre la légende et la réalité...Kevin95 a écrit :Vous remarquerez que les grands cinéastes ne t'arrisent pas d’éloges au sujet de l'acteur, à croire que Marlon ne foutait son souk que sur le tournage de réalisateurs disons moins qualifiés.Watkinssien a écrit :
Dont la relation avec Huston a été d'une facilité peu commune sur le tournage. Huston dit n'avoir eu aucun problème pour le diriger sur le plateau.
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Re: John Huston (1906-1987)
Il faudrait demander à Coppola ce qu'il en pense ; il doit avoir deux-trois anecdotes à raconter, du temps où il était enlisé aux fins fonds de la jungle cambodgienne.
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Re: John Huston (1906-1987)
Il en a toujours parlé avec beaucoup de douceur et d'admiration, il me semble.Thaddeus a écrit :Il faudrait demander à Coppola ce qu'il en pense ; il doit avoir deux-trois anecdotes à raconter, du temps où il était enlisé aux fins fonds de la jungle cambodgienne.
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Re: John Huston (1906-1987)
Ce n'est pas tout à fait ce que j'ai compris, mais soit.