Sergio Corbucci (1926-1990)

Rubrique consacrée au cinéma et aux films tournés avant 1980.

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mannhunter
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Re: Sergio Corbucci (1926-1990)

Message par mannhunter »

Chronique du dernier Corbucci le téléfilm policier "Donne armate" (dispo en dvd italien):

http://inisfree.hautetfort.com/archive/ ... 32180.html
lecoinducinéphage
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Re: Sergio Corbucci (1926-1990)

Message par lecoinducinéphage »

Image
A venir "Le premier livre en français consacré au réalisateur Sergio Corbucci
Auteur : Vincent Jourdan
Format : 17 x 24 cm, cartonné, 300 pages minimum, quadrichromie

https://fr.ulule.com/sergio-corbucci/
"Jamais je ne voudrais faire partie d'un club qui accepterait de m'avoir pour membre." (Groucho Marx)
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Kevin95
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Re: Sergio Corbucci (1926-1990)

Message par Kevin95 »

J'étais prêt à dégainer la CB mais... le prix fait mal aux dents. Du coup, j'hésite.
Les deux fléaux qui menacent l'humanité sont le désordre et l'ordre. La corruption me dégoûte, la vertu me donne le frisson. (Michel Audiard)
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cinephage
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Re: Sergio Corbucci (1926-1990)

Message par cinephage »

Je parcours la rétro Corbucci à la Cinémathèque, pour découvrir qu'il a réalisé Salut l'ami, adieu le trésor, un Terrence Hill/Bud Spencer qui a fait les beaux jours de mon enfance. :D
Enorme !!!


Bon, il ne passe pas dans la rétro, c'est un peu dommage, je trouve, même si ce n'est sans doute pas un de ses meilleurs titres, j'aurais emmené mes petits neveux le découvrir.
I love movies from the creation of cinema—from single-shot silent films, to serialized films in the teens, Fritz Lang, and a million others through the twenties—basically, I have a love for cinema through all the decades, from all over the world, from the highbrow to the lowbrow. - David Robert Mitchell
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Jeremy Fox
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Re: Sergio Corbucci (1926-1990)

Message par Jeremy Fox »

cinephage a écrit :Je parcours la rétro Corbucci à la Cinémathèque, pour découvrir qu'il a réalisé Salut l'ami, adieu le trésor, un Terrence Hill/Bud Spencer qui a fait les beaux jours de mon enfance. :D
Enorme !!!


Bon, il ne passe pas dans la rétro, c'est un peu dommage, je trouve, même si ce n'est sans doute pas un de ses meilleurs titres, j'aurais emmené mes petits neveux le découvrir.

Ce fut quelques mois devenu mon film préféré l'année de sa sortie :uhuh:

Puis un jour, je l'ai revu...
bruce randylan
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Re: Sergio Corbucci (1926-1990)

Message par bruce randylan »

C'est parti pour 15 jours très intenses à la CInémathèque

Le blanc, le jaune et le noir (Il bianco il giallo il nero - 1975)

Image

1.
Résumé de la cinémathèque
Un voleur suisse, un serviteur japonais à moitié idiot et un shérif vieillissant partent à la recherche d'un poney sacré émettant des pets parfumés, cadeau de l'empereur du Japon au président des États-Unis et kidnappé par des Indiens.
2.
Casting : Giuliano Gemma, Tomás Milián, Eli Wallach

3.
1 + 2 = curiosité un peu perverse.

Au moins il n'y a pas tromperie sur la marchandise : le résumé est bien fidèle à cette histoire, omettant au passage un coffre rempli d'argent servant de rançon pour le poney, enlevé par des indiens.
Corbucci semble vouloir parodier la petite vague de western où un asiatique partage l'affiche (Shanghai Joe, le bon, le colt et le Karaté et Soleil rouge) et l'introduction donne immédiatement le ton où une mégère engueule son mari dans un monologue où chaque phrase cite un "classique" du western italien (ou intègre des jeu de mot comme sur Leone). C'est totalement gratuit mais très amusant. Et le film multiplie d'autres clins d'oeil comme un trésor caché dans une tombe ou un cercueil qu'on traîne à pied, au milieu du désert.
La rencontre de Giuliano Gemma (le voleur suisse) et de Eli Wallach (le shérif habillé de noir) est encore correct avec un duo plaisant. Par contre, on est un peu inquiet à l'idée de croiser Tomas Milian en japonais. Et à raison. Il se lance dans un numéro honteux, gênant, usant, pénible et douloureux qui donne envie de revoir la définition de cabotinage (et du racisme). C'est bien simple, on souffre à chaque fois qu'il apparaît à l'image... et qu'il s'entend dans les enceintes avec des tics stridents, accompagnants chaque seconde de "aya... ayo... mhmmm,......hiya...". Michel Leeb à côté, c'est Robert Bresson.
Il massacre donc 50% d'un western en pilotage automatique qui se cache derrière son second degré pour masquer un scénario très répétitif et à l'humour peu inspiré à part quelques détails gratuits et presque absurdes (la croix sur le T-shirt rouge du suisse !). Corbucci fait donc le minimum avec quelques cadrages justifiant le scope et quelques extérieurs bien mis en valeurs. Il laisse surtout son trio faire les marioles devant la caméra. Et si Milian est perdu dans la stratosphère, ses deux camarades s'amusent (et nous amusent) un peu plus, dont Eli Wallach qui paye de sa personne. C'est celui qui a l'air le de plus s'amuser dans la séquence de travestissement à ce titre.

Avec 20 minutes en moins, et en supprimant le budget coke de Milian, ça aurait pu avoir un peu de gueule. Mais dans le cas présent, il n'est pas aisé d'être indulgent même si quelques rares passages font (sou)rires, parfois nerveusement. Et sans qu'on sache toujours si c'est volontaire ou non, notamment la diction des acteurs asiatiques : le maître de Milian semble parler un mélange entre vietnamien et le chinois tandis que l'émissaire de l'ambassade s'exprime en italien avec un accent français impayable.
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Alexandre Angel
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Re: Sergio Corbucci (1926-1990)

Message par Alexandre Angel »

bruce randylan a écrit :Par contre, on est un peu inquiet à l'idée de croiser Tomas Milian en japonais. Et à raison. Il se lance dans un numéro honteux, gênant, usant, pénible et douloureux qui donne envie de revoir la définition de cabotinage (et du racisme). C'est bien simple, on souffre à chaque fois qu'il apparaît à l'image... et qu'il s'entend dans les enceintes avec des tics stridents, accompagnants chaque seconde de "aya... ayo... mhmmm,......hiya...". Michel Leeb à côté, c'est Robert Bresson.
En tout cas, ton compte-rendu est assez fendard.
Comme "le Temps de l'innonce" et "A tombeau ouvert", "Killers of the Flower Moon" , très identifiable martinien, est un film divisiblement indélébile et insoluble, une roulade avant au niveau du sol, une romance dramatique éternuante et hilarante.

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Jeremy Fox
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Re: Sergio Corbucci (1926-1990)

Message par Jeremy Fox »

La première VHS que j'avais louée en vidéoclub... ce devait être l'été 1985. J'avais adoré... mais je me garderais bien de le revoir :mrgreen:
UneVoix
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Re: Sergio Corbucci (1926-1990)

Message par UneVoix »

Plus que la question du racisme et du personnage japonais dans le film mentionné par Bruce, je me rend compte au visionnage de Toto, peppino e la dolce vita que j'ai beaucoup de mal avec les tentatives humoristiques de Corbucci qui jouent sur le langage. Dans le cas présent hormis 2-3 séquences qui font sourire en tentant de refaire une sorte de Dolce Vita des prolos, ça tourne terriblement à vide et séance de 21h oblige j'en suis presque venu à regretter qu'on ait pas eu le droit à l'un de ses spectateurs qui anime chaque séance depuis le début de la rétrospective.

Sinon je suis un peu déçu jusqu'à présent des films de la rétro - hormis Mais qu'est-ce que je viens foutre au milieu de cette révolution? et l'affrontement final de L'homme du Minnesota - tant et si bien que j'hésite à aller voir l'ensemble des films de la rétro comme je l'avais prévu initialement :| . Je comptais sur le documentaire en avant-première pour me redonner l'envie mais il a été retiré de la programmation (officiellement parce qu'il n'est pas terminé, officieusement parce que le réalisateur dont le nom m'échappe aurait pris ombrage de ne pas être invité pour des raisons budgétaires alors qu'il a prêté une dizaine de copies).
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Re: Sergio Corbucci (1926-1990)

Message par bruce randylan »

Alexandre Angel a écrit :
bruce randylan a écrit :Par contre, on est un peu inquiet à l'idée de croiser Tomas Milian en japonais. Et à raison. Il se lance dans un numéro honteux, gênant, usant, pénible et douloureux qui donne envie de revoir la définition de cabotinage (et du racisme). C'est bien simple, on souffre à chaque fois qu'il apparaît à l'image... et qu'il s'entend dans les enceintes avec des tics stridents, accompagnants chaque seconde de "aya... ayo... mhmmm,......hiya...". Michel Leeb à côté, c'est Robert Bresson.
En tout cas, ton compte-rendu est assez fendard.
On trouve très facilement un rip de la VHS VF sur internet. VF qui a l'air plus supportable que la VI puisque le doubleur de Milian a réduit les onomatopées. :mrgreen:
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Re: Sergio Corbucci (1926-1990)

Message par bruce randylan »

UneVoix a écrit :Plus que la question du racisme et du personnage japonais dans le film mentionné par Bruce, je me rend compte au visionnage de Toto, peppino e la dolce vita que j'ai beaucoup de mal avec les tentatives humoristiques de Corbucci qui jouent sur le langage. Dans le cas présent hormis 2-3 séquences qui font sourire en tentant de refaire une sorte de Dolce Vita des prolos, ça tourne terriblement à vide et séance de 21h oblige j'en suis presque venu à regretter qu'on ait pas eu le droit à l'un de ses spectateurs qui anime chaque séance depuis le début de la rétrospective.
J'étais aussi à Toto, peppino e la dolce vita et je suis plutôt client puisque j'apprécie souvent Toto et les comédies italiennes en générale (exception faîte du duo Franco et Ciccio dont on trouvera deux films dans cette rétro Corbucci)

Pour Corbucci et l'humour, ce n'est clairement pas un réalisateur de comédie dans le sens où sa mise en scène ne possède pas de recherche visuelle, de volonté d'imposer un timing ou une mécanique huilée. Par contre, il a compris que les spectateurs venaient voir ses comédiens et il leur laisse les coudées franches avec des plans assez longs et un cadre suffisamment large pour donner un peu d'interaction. Ce qui le place dans la bonne moyenne déjà des artisans.
Essaie peut-être le Pot-de-vin, pastiche de film noir, décontracté et un peu décalé, sans virer dans la farce ou la parodie, avec un très bon Tognazzi. :wink:

Pour revenir à Toto, peppino e la dolce vita (1961), j'avais déjà beaucoup aimé son religieux de Monza et je partais donc confiant.
Malgré un gros relâchement dans le dernier tiers qui patine comme un danseur du Bolchoi dans une combinaison en latex, c'est un bonne comédie populaire avec un duo imparable Toto/Peppino de Filipo... à la condition d'apprécier les comédiens bien-sûr.
Dans les moments où les deux compères lâche la bride, j'avais quasiment l'impression d'avoir une promotion 3 Marx Brothers pour le prix de 2. Une sorte d'anarchie verbale, iconoclaste, bourrée de répliques intraduisibles qui donnerait presque le tournis par moment (la séquence du restaurant avec les deux touristes américaines ; l'affront et la demande en duel). Signe qui ne trompe pas Kevin95 avait un sourire béa dans ces moments la :mrgreen:
De quoi être frustré de ne pas comprendre l'italien car les sous-titres peinaient à retranscrire les jeux de mots, accents du sud de l'Italie, et autres allitérations. D'autant que le débit est parfois très rapides et qu'il est fréquent que Toto et son comparse parlent en même temps. Parfois juste le bordel ambiant suffit à profiter de l'humour du film.
Signe qui ne trompe pas sur la confiance et l'appréciation de Corbucci envers ses comédiens, il s'offre un petit rôle (reconnu par Kevin95) face à Peppino de Filipo devant un téléphone et a du mal à contenir son rire à la fin de la prise.

Et si le film connaît donc un passage à vide, j'ai beaucoup apprécié le moment de calme qui le précédait, à savoir une visite dans l’appartement de Toto, en sous-sol d'un immeuble délabré, et littéralement sous les eaux à cause de l'humidité puisqu'il faut un embarcadère pour traverser le salon. Cette séquence se permet donc une petit discours social qui se moque gentiment des bourgeois en quête de sensation forte en voulant patauger dans la fange.
C'est surtout là qu'on voit que Corbucci filme un peu platement son scénario sans chercher à profiter du potentiel burlesque et on imagine ce que Buster Keaton aurait pu en faire (y compris sur la solitude du personnage, et sa précarité, qui s'est bricolé une machine à café moka à base d'arrosoir).
Autre limite de la mise en scène, un recours systématique au studio qui fait que le film revient toujours au même décor principal. Une répétition cela bien moins fatigante que le thème musical de Trovajoli qui est diffusé en boucle.


Chi si ferma e perduto / Qui s'arrête est perdu (1960)

Deux médiocres fonctionnaire de bureaux se livrent à suite de coups fourrés pour se discréditer l'un autre face à un inspecteur qui va décider de leur promotion (ou mutation)

Nouveau duo Toto / Peppino de Philippo pour une comédie plus homogène que leur Dolce Vita, bénéficiant en plus d'une forme plus soigné avec tournage dans des décors « en durs » et des vrais extérieurs (train, bureau, appartements). Par contre si les plaines sont les moins plates et étendues, les cimes sont aussi moins hautes et affutées : les petites touches sociales ont disparus, l'humour est moins loufoque, plus conventionnel et il manque de petits moments plus touchant (comme la visite de l'appartement innndée du précédent film).
Et si le duo se lâche moins, la mécanique est souvent parfaitement rodée quand même, surtout le début, réglée comme une partition musicale (la chanson au téléphone dédiée à l'épouse française, le client sourd, le collègue appelant ses maîtresses). Corbucci filme toujours en plan-séquence ses comédiens qui sont toujours dans un bon timing, y compris les seconds et troisième rôle. Ca fonctionne très bien il faut reconnaître et c'est parfois plus amusant de regarder comment chaque acteur essayent d'attirer le regard du spectateur (ou de combler les espaces vides) plutôt le contenu purement humoristique qui n'est pas fondamentalement original ou inspiré. Beaucoup de séquences sont interchangeables, donnent l'impression que le scénario s'est improvisé au jour le jour. Et quant on a fait le tour des situations les plus évidentes, on fait intervenir de nouveaux personnages pour une dernière partie qui vire au vaudeville et de parodie de Roméo et Juliette. C'est là qu'on voit une nouvelle fois les limites de Corbucci dans la comédie puisqu'il ne parvient pas à transcender ces moments savoureux sur le papier. Le découpage est très médiocre pour la scène du Balcon (sans trouvaille visuelle de surcroît) et le sens de l'espace pour le final dans l'hôtel est au abonné absent qui manque aussi d'une pure progression dans l'accélération des quiproquos. Un problème qui vient aussi du scénario et des dialogues car on peut pas dire qu'on soit chez Feydeau. Le précédent avait l'avantage d'avoir le spécialiste Steno (et Lucio Fucli !) à l'écriture qui a souvent bossaé avec Toto.
Malgré tout, on sourit souvent, le rythme faiblit pas et les comédiens sont entraînant, Toto en tête avec un art du timing et de la gestuel réjouissant. De quoi encore regretter une nouvelle fois de ne pas comprendre l'italien, surtout lors des scènes « romantiques » avec la sœur du directeur général.
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Michel2
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Re: Sergio Corbucci (1926-1990)

Message par Michel2 »

bruce randylan a écrit :Par contre, on est un peu inquiet à l'idée de croiser Tomas Milian en japonais. Et à raison. Il se lance dans un numéro honteux, gênant, usant, pénible et douloureux qui donne envie de revoir la définition de cabotinage (et du racisme). C'est bien simple, on souffre à chaque fois qu'il apparaît à l'image... et qu'il s'entend dans les enceintes avec des tics stridents, accompagnants chaque seconde de "aya... ayo... mhmmm,......hiya...". Michel Leeb à côté, c'est Robert Bresson..
Il me semble avoir un souvenir aussi lointain que brumeux de la chose : Milian reconnaît le poney sacré à l'odeur de ses flatulences, et comme le canasson a régulièrement l'obligeance de lui envoyer son vent divin à la figure, le Nippon d'opérette le remercie obséquieusement à chaque fois de ses delicates attention pétomanes, c'est bien ça ?
bruce randylan
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Re: Sergio Corbucci (1926-1990)

Message par bruce randylan »

Michel2 a écrit :
bruce randylan a écrit :Par contre, on est un peu inquiet à l'idée de croiser Tomas Milian en japonais. Et à raison. Il se lance dans un numéro honteux, gênant, usant, pénible et douloureux qui donne envie de revoir la définition de cabotinage (et du racisme). C'est bien simple, on souffre à chaque fois qu'il apparaît à l'image... et qu'il s'entend dans les enceintes avec des tics stridents, accompagnants chaque seconde de "aya... ayo... mhmmm,......hiya...". Michel Leeb à côté, c'est Robert Bresson..
Il me semble avoir un souvenir aussi lointain que brumeux de la chose : Milian reconnaît le poney sacré à l'odeur de ses flatulences, et comme le canasson a régulièrement l'obligeance de lui envoyer son vent divin à la figure, le Nippon d'opérette le remercie obséquieusement à chaque fois de ses delicates attention pétomanes, c'est bien ça ?
C'est tout à fait ça. Par contre, ce n'est pas si fréquent. 2 scènes pour ainsi dire.


Les deux brigadiers (I Due marescialli - 1961)

Image

En 1943, un brigadier est sur le point d'arrêter un voleur déguisé en prêtre quand l'effondrement d'un toit dû à un bombardement l'assomme. Son prisonnier en profite pour s'échapper après avoir échanger leur costume.

Après Peppino de Philippo, Toto partage la caméra avec Vittorio de Sica. Comme ces derniers ont moins de temps de présence en commun à l'écran, Sergio Corbucci a l'air de se dire que c'est le moment ou jamais de montrer qu'il est un réalisateur, un vrai, un tatoué pur souche. Dès les premiers plan, la différence qualitative avec les précédents titres avec Toto est flagrante : le scope est pleinement exploité, les compositions de plan sont travaillés et le noir en blanc en impose avec des contrastes prononcés.
Sur la fin, on a l'impression que Corbucci veut même des récompenses et se prend pour le Rosselini du Général della Rovere et bascule même dans des plans très graphiques, quasi expressionnistes, avec gros plan de visages en premier plan qui laisse de la place pour un travail sur la profondeur de champ. Sans oublier quelques scènes de foules bien gérés.
Sur le principe, pourquoi pas, sauf qu'il faudrait un scénario pour ça. Ou plutôt des scénaristes. Et les nombreux personnes présentes au générique ont du mal à construire quelque chose de cohérent. La première moitié n'est au final qu'une longue exposition qui galère à faire vivre son duo principal tandis que les seconds rôles sont inexistants (les juifs ou l'américain cachés). Niveau humour, rien de très original dans les gags. Corbucci reproduit ses longs plans qui permet à ses comédiens de se livrer à leur numéro sans coupes. Mais comme l'écriture ne suit pas, ça reste plutôt inerte malgré la scène cocasse où un officier nazi se demande qui lui a fait "pfffff" avec la langue. Et on voit que l'alchimie entre Toto et De Sica ne produit pas les étincelles attendues et le partage entre leur deux intrigues est trop déséquilibré. L'idée du scénario est revient à Toto (sous son "vrai nom" Antonio De Curtis), ce qui n'est pas surprenant car on voit bien que le comédien fait de son mieux et a l'air investi lors des dernières séquences où son personnage devient plus sérieux.
La seconde moitié propose ainsi des enjeux plus prenants mais la bascule de la comédie au drame noble est trop brutale pour être satisfaisante. Et cette fois les seconds rôles disparaissent purement et simplement. Plutôt que le frangin de Sergio Corbucci (Bruno), il aurait sans doute fallu de vrais auteurs pour mieux accompagner le désir de Toto de trouver un rôle plus dramatique.


Le jour le plus court (Il giorno più corto - 1963)
Image

Cameo the movie !

Alors comme ça les américains ont produit le jour le plus long avec un ribambelle de comédiens tous plus prestigieux les uns que les autres ? Et bien, les italiens ne se laissent pas impressionner et décide d'en faire une parodie... ou plutôt une volonté de les battre sur le casting 3 étoiles (histoire aussi de sauver le studio Titanus de la faillite). Du coup, on se demande si le défilé de vedettes n'est pas la parodie principale en poussant le concept du caméo dans son retranchement le plus absurde.
Il n'y plus rien de cinématographique, seulement une démonstration de procédé de l' "insert". Et encore vraiment pour le pur concept car c'est loin d'être érigé en art. Dans l'ensemble, les différents caméo sont placés n'importe où et n'importe comment lors d'une séquence, voire dans le film tout court. On comprend au bout de 5 minutes que chaque vedette a été filmé dans son coin, entre deux plateaux de cinéma et n'ont pas du consacrer plus de 5 minutes de leur temps. C'est donc du gros plan sur un fond blanc ou littéralement entre deux portes. Au final, les apparitions dépassent rarement les 10 secondes.
Vittorio de Sica se retourne balance et balance une réplique limite hors sujet, Annie Girardot s'occupe d'un malade, Ugo Tognazzi roule des yeux et indique une direction, Amedeo Nazzari louche dans les tranchées... Les apparitions vont parfois tellement vite et de manière tellement impromptu qu'on se demande si on bien vu Stewart Granger, Terence Hill ou Walter Pidgeon (pour un gag navrant sur Hemingway). La palme revient tout de même à Jean-Paul Belmondo qui a droit à 2 plans de 3 secondes placés en dépit du bon sens et dont on ne comprend pas où il peut se situer dans le décor. Je pense sincèrement qu'il s'agit d'un test caméra récupéré par la production. Je vois pas comment c'est possible autrement.

Le plus simple pour avoir une idée du générique est quand même d'aller voir sur wikipedia mais il y a deux acteurs qu'il faut citer : Franco et Ciccio qui ont les rôles principaux. Il va sans dire qu'il sont affligeant et toujours autant insupportables (surtout Franco Franchi dont les grimaces représentent le degré zéro de l'humour). C'est surréaliste que ce 2 types furent à ce point populaire en Italie. Il y a un mystère qui mérite une enquête sociologique je pense. Cela dit, il y a avait quelques spectateurs pour s'esclaffer de ça. J'avoue avoir rit une fois, mais c'était vraiment un rire nerveux.
Le bon point cependant de ce All Stars Games, c'est que les 2 aberrations humoristiques sont finalement peu présentes à l'image. On se console comme on peut.

Sinon, difficile de savoir ce que Corbucci a vraiment bien pu faire sur le tournage tant la moitié du film semble avoir été filmé par des assistants. Il y a tout de même 1 ou deux plans pas dégueux (dont un très David Lean dans une gare).

Après est-ce qu'on peut vraiment appeler ça un film ? Davantage un blind test de 1h40.
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Michel2
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Re: Sergio Corbucci (1926-1990)

Message par Michel2 »

Pour revenir à Milian dans Le blanc, le jaune et le noir, un aperçu de la finesse du comique qu'il déploie dans ce film :



En v.f, la michelleebitude de la chose s'aggrave :



En cerise sur le gâteau (de riz), et toujours sous la houlette de Corbucci, Milian en Chinois acupuncteur avec un bonsaï sur la tête dans Delitto al ristorante chinese, l'un des Nico Giraldi du début des années 80 :

bruce randylan
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Re: Sergio Corbucci (1926-1990)

Message par bruce randylan »

Michel2 a écrit :Pour revenir à Milian dans Le blanc, le jaune et le noir, un aperçu de la finesse du comique qu'il déploie dans ce film
C'est pas sympa de faire remonter un traumatisme si récent. Aucun respect :mrgreen:

L'amnésique de Collegno (Lo smemorato di Collegno - 1962)

Image

Amnésique depuis 18 ans, un homme s'enferme pendant des heures dans des toilettes pour attirer l'attention. La presse s'empare en effet de son cas et après la publication d'une photo, plusieurs personnes annoncent le reconnaître.

Encore un film avec Toto même si cette fois-ci le sujet tire moins vers la simple comédie pour un début surprenant qui laisse espérer que Corbucci tente quelque chose de plus audacieux et moins consensuel. Le générique présente une silhouette seule, avancer dans des paysages urbains vides bien cadrés avant de proposer quelques plans presque étouffant de Toto enfermé dans des "Walter Closet" face à une foule compact de l'autre côté.
Mais assez rapidement, on revient dans une formule classique et efficace (grand numéro comique de Toto face au directeur de l'asile) avant de basculer dans un curieux film à procès rempli de flash-back qui semble annoncer Le jour le plus court :fiou: . Ce n'est qu'à moitié surprenant puisque dans les deux cas, on retrouve le frangin Bruno Corbucci au scénario. Et il ne faut pas trop compter sur lui pour enrichir ou étoffer cette histoire tiré d'un fait réel. Il aurait fallut aller à fond dans la critique sociale et/ou la fable existentialiste mais c'était trop lui demander. Et trop espérer de Sergio qui ne cherche pas à dynamiser ce script qui tire méchamment la jambe et multiplie les séquences qui s'éternisent, parvenant même à flinguer des moments décalés tel la projection d'un film amateur.
Du coup, le film n'est pas ni très subtil dans ses effets (le travelling avant "Attention, je vais faire mon numéro d'acteurs à oscar" ; le chien errant en métaphore de la situation de Toto), ni très efficaces en terme de récit. La fin aurait pu être plus mélancolique, plus amer, plus dénonciatrice sauf que les personnages ne suivent pas car ils n'ont pas réussi à imprimer la pellicule. Elle n'est que timorée et même incompréhensible dans son ultime plan sorti de nulle part.
Dommage car le film avait du potentiel et j'aurais préféré qu'on s'attarde moins sur la riche épouse et davantage sur la mère célibataire dont les quelques apparitions sont assez touchantes.

Gli onorevoli (1963)

Image

Quelques jours dans la vie de 5 candidats aux élections législatives à l'approche du scrutin.

Plutôt sympa ce faux film à sketch malgré des parties franchement inégales. La bonne idée est d'avoir alterné entre les différentes personnages plutôt que constitué des blocs indépendants même si au final, il n'y a je crois aucune vraie interaction entre eux.
On croise Toto en royaliste, Gino Cervi en libéral de droite, Aroldo Tieri en communiste, Franca Valeri en féministe et Peppino De Filippo en fasciste pour un temps de présence et une qualité d'écriture aléatoire.
Gino Cervi est au final inexistant par exemple et n'a rien de vraiment concret à proposer. Aroldo Tieri a droit à quelque bons moments (notamment un chouette duo avec un enfant) mais là aussi, ça reste très en surface. Franca Valeri avait de quoi aller dans le grinçant sarcastique avec sa féministe prenant à son piège un séducteur qui voulait la discréditait mais l'écriture ne va pas jusqu'au bout du potentiel (décidément). Reste le côté pathétique de Peppino De Filippo qui s'en prend plein la tronche, même trop dans le face à face étiré durant sa séance de maquillage orchestré par Walter Chiari.
Le must reste donc sans conteste Toto donc chaque séquence est un régal (même avec un petit côté Capra pour le dénouement)

En plus de ça, il y a des séquences de remplissage avec deux escrocs qui diffusent de la propagande pour chaque candidat à tour de rôle et des enfants qui jouent eux- mêmes à des élections pour se moquer des adultes.
C'est loin d'être faramineux quand on prend les éléments à part. Mais à la sortie de séance, le ressenti reste globalement positif tout en regrettant encore et toujours que le frérot Bruno Corbucci soit au générique comme scénariste et non pas des vrais pointures du cinéma italien.
Un détail ne trompe pas quant à l'engagement de Sergio Corbucci derrière la caméra, il semble presque en faire un exercice de style gratuit déconnecté du récit, s'essayant à des cadrages, objectifs et focales sorti de thrillers ou films noir tout en restant plutôt discret (sauf les grands angles ridicules lors du diner de Toto avec les dirigeants de son parti).
Dernière modification par bruce randylan le 21 juil. 18, 01:22, modifié 1 fois.
"celui qui n'est pas occupé à naître est occupé à mourir"
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