Cinéma muet français

Rubrique consacrée au cinéma et aux films tournés avant 1980.

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bogart
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Re: Cinéma muet français

Message par bogart »

Tommy Udo a écrit :Chez moi, on arrive à une chronique des VAMPIRES du même Feuillade :?:

+1.
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Jeremy Fox
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Re: Cinéma muet français

Message par Jeremy Fox »

:fiou:

5 jours sans internet, ça fait des dégats. C'est bien évidemment Les vampires : mes excuses à François. :oops:
allen john
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Re: Cinéma muet français

Message par allen john »

Jeremy Fox a écrit ::fiou:

5 jours sans internet, ça fait des dégats. C'est bien évidemment Les vampires : mes excuses à François. :oops:
François, qui est à ce moment affairé à chercher sur internet une tenue noire, avec masque et collant intégré, afin d'aller sans doute perpétrer de noirs desseins et autres exactions criminelles...
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Jeremy Fox
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Re: Cinéma muet français

Message par Jeremy Fox »

bruce randylan
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Re: Cinéma muet français

Message par bruce randylan »

La phalène bleue (Georges Champavert - 1917)

Un père et un fils sont deux collectionneurs. Le plus âgé enrichit son album de papillons en rêvant d'attraper un phalène bleue tandis que son rejeton multiplie les conquêtes amoureuses. Sa prochaine proie est une jeune et innocente paysanne.

Retrouver un film que mêmes les archivistes des cinémathèque ignorait l'existence, c'est toujours formidable... Mais c'est pas une raison pour le projeter à un public :mrgreen:

Celui-ci un mélodrame particulièrement atroce, conservateur et moralisateur extrême d'autant plus hallucinant qu'il ne vise que les victimes : les femmes. Les hommes qui les poussent au crime, eux, ne craignent absolument aucune punition. :?
Voilà, donc la paysanne qui suit son amant à la ville en abandonnant ses parents et sa petite sœur. Évidement cette vie de débauche la rend malade et même si la petite sœur vient la ramener dans le droit chemin et dans on village natal, on sait d'avance qu'elle va mourir pour expier ses fautes.
La deuxième partie est insupportable avec tous les pires clichés du genre. C'est tellement réactionnaire que ça peut en devenir tordant (la jeune fille radieuse de pouvoir s'habiller de nouveau comme une souillon :lol: ). Mais bon, dans l'ensemble, c'est juste assommant. D'ailleurs arrivé à la fin du 5ème acte, on pense être délivrer du supplice. Et bien non ! Y-en a un 6ème avec le père qui refuse de revoir sa fille dévergondée mais qui se met à courir vers elle lorsqu'il apprend qu'elle est à l'agonie dans le couvent où elle s'est retirée. (je vous laisse deviner l'issue de la séquence).

Pourtant tout ça commencer bien et on avait envie d'y croire avec une première demi-heure qui utilisait avec beaucoup d'originalité les teintes de l'image pour traduire l'état psychologique des personnages (passant d'un plan à l'autre du gris au bleu par exemple). Ca donne une scène audacieuse avec une nuit d'orage où les teintes s'alternent très rapidement alors que l'héroïne hésite à quitter le domicile familiale pour rejoindre son amoureux.
De plus, pour 1917, j'ai trouvé que le montage parallèle entre les 2 collectionneurs fonctionnaient vraiment bien (même si peu subtile sur la longueur).
Le film gardera en tout cas ce procédé de jeu avec les teintes mais ça s’essouffle aussi rapidement que l’intérêt du spectateur même s'il faut aussi admettre que les extérieurs sont joliment photographiés et que l’interprétation est sobre (hormis les 2 derniers actes).

Donc, montrer quelques extraits (dont celle, excellente, de l'orage) lors d'une conférence ou comme exemple pour illustrer l'utilisation de la couleur durant le cinéma muets, c'eut été une idée géniale... Diffuser le film entier, beaucoup moins pour le coup.
Donc, ouais, c'est formidable de pouvoir projeter un film pour la première fois depuis 96 ans, mais la curiosité historique a ses limites on va dire.
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hansolo
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Re: Cinéma muet français

Message par hansolo »

On peut désormais consulter la revue Cinémagazine (1921-1935) en ligne
http://www.cineressources.net/ressource ... UES&pk=346#
(signalé par Jérome sur la page Facebook de Forgotten Siliver)

Dans le N°1 de Janvier 1921; une annonce insolite en dernier page:
"ON DEMANDE Capitalistes qui s'interesse au Cinéma en relief; Ecrire: Administrateur du journal qui transmettra."
:!:
- What do you do if the envelope is too big for the slot?
- Well, if you fold 'em, they fire you. I usually throw 'em out.

Le grand saut - Joel & Ethan Coen (1994)
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Ann Harding
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Re: Cinéma muet français

Message par Ann Harding »

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Nène (1924, Jacques de Baroncelli) avec Sandra Milowanoff, Edmond Van Daële, Gaston Modot, François Viguier et France Dhélia

Madeleine, dite Nène (S. Milowanoff) est servante dans la ferme de Cordier (E. Van Daële). Elle s'occupe des deux petits enfants du fermier depuis la mort de leur mère. Elle est en butte aux avances de Boisseriot, un valet de la ferme (François Viguier) qu'elle repousse. Celui-ci entreprend de se venger en poussant la perfide Violette (F. Dhélia) dans les bras de Cordier...

Sandra Milowanoff a fait ses débuts dans les sérials de Louis Feuillade. C'est en 1923 qu'elle devient l'interprète favorite d'un autre cinéaste Jacques de Baroncelli. Dans Nène, elle reste fidèle aux personnages tragiques qu'on lui confiait volontiers. Nène est une servante de ferme laborieuse et bonne qui donne toute sa tendresse à deux enfants qui ne sont pas les siens. Elle ne se plaint jamais et sait se défendre face aux assauts d'un Boisseriot qui voudrait abuser d'elle. Baroncelli fait le choix d'un naturalisme total en tournant pratiquement tout le film en extérieur, probablement dans le bocage vendéen. Tiré d'un roman éponyme d'Ernest Pérochon, Baroncelli veut faire revivre à l'écran l'atmosphère de la vie paysanne à la fois rude et bucolique que décrit l'auteur. Nous ne sommes pas dans La Terre de Zola, mais les personnages sont très contrastés. Alors que Nène et Cordier sont deux êtres bons, Boisseriot et Violette sont à la fois pervers et cupides. Le frère de Nène, Jean (Gaston Modot) est lui un homme fragile, qui lorsqu'il abuse de la boisson peut perdre la tête. Baroncelli soigne particulièrement les éclairages et avec son opérateur Louis Chaix cherche une vision picturale de la campagne tout en nous faisant partager la vie quotidienne des paysans. Du point de vue cinématographie, Baroncelli utilise certaine des dernières innovations de l'époque comme cette courte séquence en caméra mobile lorsque Nène emporte en courant dans ses bras la petite Lalie qui a été brûlée. La soulerie de Gaston Modot est également suggérée par une scène en accéléré avec un montage rapide montrant des images inversées alors qu'il lutte pour retrouver son équilibre. Il est évident que Baroncelli n'est pas un cinéaste d'avant-garde. Il cherche essentiellement à servir son scénario (dont il est l'auteur) du mieux possible. Le film repose essentiellement sur les épaules de Sandra Milowanoff qui joue avec fougue, naturel et élan cette fille de ferme fière et sensée. Si le film est moins émouvant qu'une autre oeuvre de Baroncelli, Pêcheur d'Islande, c'est simplement que l'intrigue de Nène n'a pas les mêmes ressorts dramatiques. On s'attache moins aux personnages car ils n'ont guère le temps d'être développés. Il y a heureusement la beauté de la cinématographie, particulièrement mise en valeur par une copie teintée d'excellente qualité. Un Baroncelli dans la bonne moyenne, mais moins impressionnant et émouvant que La Légende de Soeur Béatrix ou Pêcheur d'Islande.
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Ann Harding
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Re: Cinéma muet français

Message par Ann Harding »

Une jolie découverte sur le site des Archives Françaises du film qui a mis en ligne le film suivant:

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La Dame de Monsoreau (1913) de Charles Krauss ? ou Victorin Jasset ? ou Emile Chautard ?
avec Marie-Louise Derval, Henri Bosc, Paul Guidé, Victor Perny, Léonce Cargue et Emile Garandet

La belle Diane de Méridor (M.L. Derval) est convoitée par le Duc d'Anjou (L. Cargue) et doit accepter la protection du Comte de Monsoreau (Jean Dulac) qu'elle abomine. Un jour, elle sauve le Comte de Bussy (H. Bosc) blessé dans un duel, en faisant venir un médecin...

Le célèbre roman d'Alexandre Dumas a été adapté plus d'une fois au cinéma et à la télévision. Cette première version produite par la société Eclair sortie en novembre 1913 présente un intérêt certain. Tout d'abord, les films produits par cette firme ont presque tous disparus et la restauration d'une de leurs grandes productions est vraiment un événement à saluer. Il reste un sérieux problème pour l'indentification du metteur en scène de ce film. Cette production de la branche ACAD (Association cinématographique des auteurs dramatiques) a dans le passé été attribué à Maurice Tourneur, par le peu fiable Jean Mitry. En fait, les quelques sources que l'on possède montre qu'il n'en est rien. Emile Garandet, qui joue Gorenflot, indique que le film aurait été réalisé par Victorin Jasset. Et Paul Guidé, qui joue Henri III, donne Charles Krauss comme réalisateur. Il n'est pas impossible que le film ait été commencé par Jasset et suite à son décès en juin 1913, qu'il ait été repris par Charles Krauss. Quant à l'attribution à Emile Chautard qui réalisait les grandes adaptations littéraires de l'ACAD, elle reste également possible sans qu'on puisse l'affirmer à 100%.
En tout état de cause, c'est un plaisir de découvrir cette version de mon roman préféré d'Alexandre Dumas. Eclair n'a pas lésiné sur les moyens, entre les costumes somptueux, le tournage en extérieurs au château de Chenonceau et le choix des acteurs issus des grands théâtres parisiens. En seulement 60 min, l'intrigue complexe du roman est résumée à grands traits sans éliminer pourtant les personnages et les intrigues secondaires. Le résultat donne un film qui avance sur les chapeaux de roue, mais qui est nettement plus satisfaisant que la version languissante réalisée par René Le Somptier en 1923. Les films Eclair offrent un découpage nettement plus dynamique que les films Pathé de la même époque. Ce film contient d'ailleurs nombres de plans américains, qui étaient fort rares chez leur concurrent. Il y a une excellente qualité de la photo avec une composition et une lumière directionnelle élaborées. Et on peut l'apprécier malgré les nombreuses traces de décomposition. Les acteurs sont parfois un peu théâtraux, mais évitent l'outrance. C'est surtout par sa pure beauté plastique que le film régale les yeux. D'ailleurs, lorsque le film fut distribué aux Etats-Unis en mai 1914, il reçut les louanges de la presse professionnelle qui "nota la beauté exceptionnelle des paysages et la magnificence des intérieurs." Le seul bémol dans mon appréciation du film vient de la fin heureuse qui a été élaborée pour épargner au public la mort du héros et qui, sans nulle doute, fut adorée par le public américain, mais qui ne correspond pas du tout aux intentions de Dumas qui avait conçu un drame romantique dans les règles de l'art. Même si je préfère toujours le merveilleux feuilleton de 1971 réalisé pour l'ORTF, ce film Eclair reste un régal pour les yeux. Vous pouvez découvrir le film sur le site des Archives Françaises du Film en cliquant ici.
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Ann Harding
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Re: Cinéma muet français

Message par Ann Harding »

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Un petit up pour vous signaler qu'il existe maintenant une salle à Paris dédiée au cinéma muet français: la salle Charles Pathé de la Fondation Jérôme Seydoux-Pathé. Ils programment une saison de films d'Albert Capellani du 15 octobre au 4 novembre. Il y a trois séances différentes de courts-métrages: Drames et policier, L'Assommoir et autres drames et Contes et légendes. Les longs métrages suivants seront aussi projetés: La Glu, Les Misérables, Germinal, Le Chevalier de Maison-Rouge et Quatre-vingt-treize. Toutes les séances sont accompagnées par un pianiste (contrairement à la cinémathèque).
Allez sur le site et cliquez sur le calendrier.
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Re: Cinéma muet français

Message par bruce randylan »

Oui, j'ai vu ça la semaine dernière... Malheureusement, les séances ne sont que dans l'après-midi, donc à part les séances du samedi, ça s'adresse qu'aux chômeurs ou aux retraités :? Je ne pourrais donc pas voir les Capellani, drames et policiers
Après je ronchonne, mais c'est super qu'un lieux comme ça existe ! Reste que même en travaillant à mi-temps, 2/3 temps, mon planning cinéma est déjà quasi complet jusqu'à fin novembre :mrgreen:
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Re: Cinéma muet français

Message par aelita »

Ce sont des horaires de musée plus que de salle de cinéma. Donc pas de séance le soir (et comme ce n'est pas vraiment un musée, fermeture le dimanche...).
Sinon, à ces horaires-là, il n'y a pas que des gens qui ne travaillent pas ou en vacances (comme dans les misées, d'ailleurs).
Pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué ? (pensée shadok)
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Re: Cinéma muet français

Message par bruce randylan »

Les musées font au moins des nocturnes de temps en temps...
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Ann Harding
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Re: Cinéma muet français

Message par Ann Harding »

C'est vrai que les horaires sont un problème. Il faut espérer qu'ils évolueront vers la soirée avec le temps. Il y aura aussi bientôt une seconde salle Pathé dédiée aux films de patrimoine qui est actuellement en travaux, en face de la fondation.
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Ann Harding
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Re: Cinéma muet français

Message par Ann Harding »

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Jocelyn (1922) de Léon Poirier avec Pierre Blanchar, Armand Tailler, Laurence Myrga, Suzanne Bianchetti et Roger Karl

Le poète Lamartine (P. Blanchar) découvre le manuscrit des mémoires de Jocelyn (A. Tailler) près de son lit de mort. Il y découvre sa vie. Jocelyn a rejoint le séminaire pour permettre à sa soeur (S. Bianchetti) de se marier. Durant la Révolution, le jeune séminariste doit fuir et se cacher dans les Alpes pour échapper aux persécutions. Un jour, il sauve un jeune homme (L. Myrga) lui aussi recherché. Il n'a pas réalisé que Laurence est en fait une femme...

Léon Poirier était certainement un amoureux de Lamartine. Après avoir réalisé Jocelyn, il s'est attelé à Geneviève (1923) avec à nouveau Pierre Blanchar dans le rôle du poète. Au sein de la Gaumont de l'après-guerre, Poirier produisait les films de prestige tout comme son collègue Marcel L'Herbier pendant que le "cinéma commercial" était réservé à Feuillade qui continuait à faire ses sérials. Si L'Herbier était un innovateur dans la structure narrative et visuelle de ses films, Poirier lui est un artisan quelque peu académique. Pourtant, le poème de Lamartine est riche en possibilités dramatiques, des potentialités que Poirier ne réalise pas totalement à l'écran. Il se contente d'illustrer assez platement le poème de Lamartine en utilisant les décors somptueux des Alpes françaises. En regardant le film, on réalise rapidement à quel point le cinéma suédois a influencé les français. La vie des deux proscrits, Jocelyn et Laurence, réfugiés dans les montagnes rappelle fortement celle des Proscrits (Berg Ejvind och hans hustru, 1918) de Victor Sjöström. Malheureusement, Léon Poirier est incapable de dépasser son sujet et de faire vivre intérieurement ses personnages comme le faisait Sjöström. Il ne tourne que de courtes scènes connectées entre elles par des intertitres citant verbatim le poème de Lamartine. Ses paysages manquent de lyrisme et on n'est pas touché émotionnellement par la destinée de ses héros comme on l'était dans le chef d'oeuvre suédois. Pourtant, l'histoire tragique des amants de Lamartine portait en elle de quoi produire un chef d'oeuvre. Jocelyn sacrifie sa vie pour le bonheur de sa soeur, puis il va sacrifier celle qu'il aime pour sauver l'âme de son ancien évêque (R. Karl) voué à la guillotine révolutionnaire. Cette succession de sacrifices ne lui apporte que la solitude et les regrets. Ses regrets sont encore avivés lorsqu'il découvre que sa bien-aimée Laurence (L. Myrga), qu'il a lâchement abandonnée, est devenue une "Merveilleuse" entretenue par des hommes riches. A aucun moment, Poirier ne réussit à transcender son sujet. Il reste dans l'illustration sans profondeur psychologique. Cependant, Jocelyn fait partie des meileurs films de ce réalisateur sans génie. Un film intéressant.
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Ann Harding
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Re: Cinéma muet français

Message par Ann Harding »

Quelques films sur la Grande Guerre. Le premier film est Belge, mais il peut s'insérer dans ce topic car il est produit par Pathé.

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Maudite soit la guerre (1914, Alfred Machin) avec Baert, Suzanne Berni, Fernand Crommelynck et Albert Hendricks

Dans un pays non défini, la guerre est déclarée séparant pour toujours Adolf Hardeff (Baert), venu d'un pays voisin et maintenant ennemi, de son son ami Modzel (A. Hendricks), ainsi que sa soeur Liza (S. Berni) dont il est épris...

Tourné en 1913 et sorti en mai 1914, ce film antimilitariste et pacifiste d'Alfred Machin était prémonitoire du conflit mondial qui allait bientôt éclater. Cette oeuvre est remarquable à plus d'un titre. Tout d'abord, il s'agit d'un des tous premiers films réalisés en Belgique, marquant les débuts de la production cinématographique dans le plat pays. Ensuite, c'est un film entièrement colorié au pochoir par le procédé Pathécolor ce qui lui donne un relief tout particulier. Le film est à la fois une réalisation cinématographique de première classe pour son époque, pour la qualité de sa composition, du jeu des acteurs et l'articulation de l'intrigue, et aussi pour sa dénonciation du nationalisme qui mène à la guerre. La simplicité de l'intrigue met en relief les différents personnages. Tout d'abord, il y a Hardeff, venu d'un pays voisin et ami, qui est venu apprendre le pilotage en compagnie de son ami Modzel. Ils sont tous deux dans l'armée, mais amis. La brutale entrée en guerre de leurs pays respectifs va faire d'eux des ennemis et les mettre l'un face à l'autre pour un combat à mort, de la même manière que dans le futur Wings (Les Ailes, 1927) de William Wellman. Aucun des deux ne réchappera de cette lutte à mort. De son côté, Liza, la soeur de Modzel, qui aimait Hardeff perd à la fois un fiancé et un frère. Alors qu'elle songeait à refaire sa vie avec un autre officier, elle découvre effrayée une breloque sur sa chaîne de montre. C'est elle qui avait offert cette breloque à Hardeff à son départ, et l'officier se désigne lui-même comme le meurtrier de son fiancé. Liza décide d'entrer au couvent et le film se clôt sur un gros plan du visage de la belle Liza, une grande et belle actrice belge qui ressemble à la star française Suzanne Grandais. Si vous voulez découvrir ce film d'Alfred Machin, il est disponible en ligne sur le site European Film Gateway .

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Une Page de gloire (1915, Léonce Perret) avec Fabienne Fabrèges, René Montis, Mme Vergny-Cholet et Armand Dutertre

Denise (F. Fabrèges) épouse, contre l'avis de ses grands-parents, Robert Laroche (R. Montis) dont elle est tombée amoureuse. La guerre éclate et Robert part laissant Denise enceinte. Quelques mois plus tard, Denise donne naissance à Jules. Ayant reçu une lettre désespérée de Robert, elle décide de partir vers le front pour lui amener leur enfant...

En 1915, Léonce Perret participe à l'effort de guerre en produisant des films patriotiques pour la firme Gaumont. Cependant, contrairement à de nombreuses bandes sans intérêt, Une Page de gloire est avant tout l'oeuvre d'un grand metteur en scène. Dès les premières minutes, il sait capturer l'intérêt du spectateur par son utilisation des décors naturels, sa science de la composition - secondé par son merveilleux opérateur Georges Specht - et son excellente direction d'acteurs. Lors de la séance à la Cinémathèque hier soir, les qualités de Perret ressortaient d'autant plus après une bande patriotique de Gaston Ravel, Le Grand souffle (1915), sans relief et un épisode des Vampires (1915) de Feuillade qui paraissait primitif en comparaison. Feuillade restait fidèle aux plans séquences et se préoccupait de l'action plus que de la psychologie des personnages, alors que Perret était attentif aux petits détails qui donnent de la profondeur aux personnages. De plus, il encadrait ses acteurs dans une vision poétique de la nature qui donne à ses images un souffle et une vie tout à fait extraordinaires. Le début du film est de ce point de vue magique. Denise retrouve son amoureux sous les arbres en fleurs dans une prairie aux longues herbes qui ondulent sous le vent. Le mouvement de l'image semble accompagner les sentiments de ses personnages; le paysage fait partie intégrante de l'intrigue. Dans cette nouvelle restauration numérique 2K, l'image est d'une nettetée et d'une pureté confondante et permet de mesurer l'extraordinaire beauté de la cinématographie. Léonce réussit à nous émouvoir avec cette histoire patriotique qui dans d'autres mains serait ridicule. Denise va risquer sa vie pour que son époux, au front, puisse voir leur enfant. Son voyage se révèle mouvementée et elle se retrouve sur la ligne de front sans le vouloir. Les Poilus ne sont pas enjolivés. On les voit dormir par terre ensemble durant leur temps de repos. Puis, lorsque Robert leur annonce la naissance de son fils, ils se lèvent tous en ensemble, joyeux, et trinquent avec le nouveau papa. Que ce soit dans les scènes intimistes du foyer ou dans celles de bataille, Perret montre son sens du détail et la composition picturale. Un grand film de Perret superbement restauré qui va être projeté également à la Fondation Jérôme Seydoux-Pathé la semaine prochaine. A ne pas manquer!
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